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Critiques de Claude Schopp (30)
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L'origine du monde

Qu'on ne me con-damne pas, ce n'est ni un billet con-traire à la morale, ni concupiscent mais...





"Lorsqu'on écartait le voile, on demeurait stupéfait d'apercevoir une femme... vue de face, émue et convulsée, reproduite " con amore"."





C'est le portrait de Constance Quénieux, jeune danseuse d'opéra puis "courtisane", et favorite du richissime Khalil-Bey...

Elle posa pour " L'origine du monde" de Gustave Courbet...





A cette époque, la danseuse est la figure féminine par excellence, sur scène, où elle expose ses courbes, ses longues jambes, ses seins, ses hanches et ses fesses...

Une danseuse comme Constance ne gagnait que 200 à 600 francs/an, guère plus que les ouvrières parisiennes.





Il faut accepter les attouchements, privautés et harcèlements du maître de ballet (du musicien, du librettiste, ou du directeur!)

Fermer les yeux, serrer les dents et sourire en même temps!

Souris, petit rat, pour ne pas risquer de passer, à la trappe...





Il faut apprendre à... lever la jambe, exécuter des entrechats et à attraper un gros matou, un protecteur, un mentor puissant et fortuné. Sous la férule de sa mère, ou d'une parente "apparent chaperon mais véritable maquerelle "...





De l'argent !

Constance était la Shéhérazade qui charmait Khalil Bey, non grâce aux contes des mille et une nuits, mais en tant que porte bonheur...

(Une fois qu'elle eut dansé pour lui... la danse des 7 voiles...pardon, hein!)





" Un porte-veine".

Si quelque caprice éloignait Constance de Khalil-Bey, ce dernier perdait aux cartes. "Ce fut la guigne noire, après la rupture définitive!"





C'est en 1866, que Constance accepta de poser pour le peintre, qui préparait depuis longtemps, son pinceau, le plus... Euh, pardon encore.





" Un con ( comme moi) ça ose tout, c'est à ça qu'on le reconnait!" Pardon, Mr Audiard.
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L'origine du monde

Appelons un chat un chat, la chatte qui soulève tant de questions, non pas pour deviner qui y est entré, car ce serait vraiment pénis perdu, mais pour deviner à qui elle appartient, surtout si elle s'intitule « L'origine du monde » serait Constance Queniault.

Pourquoi elle, et pas l'amante entretenue par Dumas fils et Kalil-Bey, Jeanne de Tourbey ? Elle a partagé avec parcimonie et ardeur les faveurs payées, entre autres, d'Emile de Girardin et du Prince Napoléon. C'est une biche, traduisons une… non, impossible de traduire sans être grossier.

Et pourquoi pas Joanna Hifferman, l'Irlandaise rousse, la maitresse de Whistler que Courbet avait peinte dans le Sommeil, (deux femmes entrelacées après l'amour) ?



Claude Shopp cite Alexandre Dumas fils qui critique violemment Courbet, lequel gâche son talent « avec l'interview de Melle Queniault de l'Opéra, pour le Turc qui s'y hébergeait de tems en tems. »

Or nous dit finement Claude Schopp, mieux vaut remplacer le mot interview par intérieur.

Et oui, Kalil Bey ne collectionnait pas seulement les tableaux, mais aussi les femmes, dont Constance Queniault. On sait que c'est lui qui a commandé l'Origine du monde à Courbet.

Il fréquente la « bicherie », le monde des femmes entretenues, il s'y héberge de temps en temps, dans leurs différents intérieurs, s'héberger, en voilà un mot poétique.



L'auteur, lui, nous héberge dans une logorrhée sans queue ni tête, et surtout sans queue, où il nous parle de ce statut des femmes entretenues- qui, après la Dame aux camélias, pensaient toutes avoir droit à l'amour d'un duc- aux transformations socio-économiques et sociales, à l'âge trop avancé de Constance pour être peinte nue et poser les jambes écartées, (34 ans, pensez donc, je préfère pas voir).

Et pourtant, tellement fier de sa compréhension à lui, le spécialiste des Deux Alexandre Dumas père et fils, il persévère et l'enfonce.

Lacan : « Le phallus est dans le tableau » 

L'auteur ne s'aventure pas dans la psychologie du Turc, (qui aurait voulu garder un petit souvenir de celle qui lui a procuré des émotions particulières, et qui lui a fait gagner beaucoup d'argent au jeu, détail non négligeable) ni dans celle du modèle, comme l'avait fait Christine Orban dans « J'étais à l'origine du monde ». Et encore moins dans la psychologie de Courbet.

Ce qui préoccupe Claude Schopp, c'est, oubliant souvent de fermer les guillemets, de pouvoir montrer l'étendue de son savoir, avec notes à l'appui, concernant l'époque, et de conclure que, finalement, le modèle de « l'origine du monde » qui a plumé les hommes, s'en sort bien.

Et il le dit style politiquement correct : contrairement à la Nana de Zola, Constance, si elle a dû, un temps, se prêter au désir des hommes, c'est pour, à la fin, triompher.

Combat de femme, corps triomphant, plumage réussi.

Comment peut-on se pencher sur ce tableau dont la force érotique crève toujours les yeux, en rasant non pas le pubis certes flamboyant de la belle, mais nous, lecteurs ?

Alors que finalement, ce qui reste, c'est le choc de la vision, peu importe qui est à l'origine du monde, le monde a bien commencé.
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L'origine du monde

J’ai encore en mémoire le plaisir de lecture en 2009 du livre de Thierry Savatier* qui documente la trajectoire de la plus sulfureuse des peintures de Courbet, passant de mains en mains entre différents propriétaires, assortie d’années de discrétion voire de disparition.



C’est donc très amusant de finaliser la connaissance de l’œuvre par la dernière énigme qui y restait attachée: mais à qui appartient donc cet «intérieur»?

Nul doute qu’en découvrant l’identité de cette fameuse «toison», Claude Schopp a fait autant un scoop culturel qu’une savoureuse découverte dont il peut se satisfaire.



Donc voici nommée Constance Quéniaux (1832-1908), tour à tour danseuse de l’opéra de Paris, demi mondaine vivant de ses charmes, courtisane rentière d’aisance accumulée, dame patronnesse et discrète vieille dame un peu collectionneuse.



L’auteur a fait un travail de rat de bibliothèque pour suivre sa trace dans toutes sortes de documents, reconstituant ainsi son parcours probable. Si le résultat de ses recherches est parfois fastidieux pour le lecteur, il dessine néanmoins une époque sociale, esthétique et culturelle un peu oubliée et qui s’avère très intéressante.



Pouvait-elle imaginer, cette petite dame respectable de soixante-quinze ans, que sa renommée posthume tiendrait à son intimité si largement offerte au public? Quel destin!



*L’origine du monde: histoire d’un tableau de Gustave Courbet

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Alexandre Dumas

Vous l’avez probablement noté si vous suivez un peu mes critiques, mais cette année 2014 a été placée sous le signe flamboyant d’Alexandre Dumas, un de mes grands amours littéraires de jeunesse que j’ai eu le plaisir de redécouvrir récemment. Il semblait donc juste de terminer l’année par la lecture d’une biographie de Dumas et pas écrite par n’importe qui, attention, par Claude Schopp, probablement l’admirateur français le plus fanatique et le plus monomaniaque du ventripotent auteur romantique.



Claude Schopp a consacré sa vie à Alexandre Dumas, a fait éditer des dizaines de ses œuvres les plus méconnues, s’est penché sur les moindres détails de sa vie, sur ses moindres lettres, sur ses moindres nouvelles. Un tel dévouement a immanquablement créé un lien particulier entre le biographe et son sujet : Claude Schopp ne parle pas de Dumas avec l’abstraction que l’on conserve généralement vis-à-vis des grands hommes, il en parle comme d’un ami, un très cher, très fantasque et très brillant ami. Il l’interpelle, se moque gentiment de ses folies et de ses inconséquences, s’amuse de ses fantaisies et applaudit joyeusement à ses triomphes.



Sa biographie ne perd pas pour autant en détails et en objectivité, mais elle gagne énormément en tendresse et en émotion. Quel plaisir que de suivre Dumas le long des chemins campagnards de son enfance, enfance dorée par la présence d’un père vénéré et d’une mère un peu dépassée mais adorée ! Quelle excitation que de l’accompagner à Paris, d’être ébloui à ses côtés par la performance de l’illustre Talma à la Comédie Française, de côtoyer le cercle passionné et tumultueux des jeunes romantiques, Victor Hugo, Théophile Gauthier, Gérard de Nerval, Honoré de Balzac ! Quelle exaltation que de partager ses premiers succès d’auteur théâtral, de courir sur ses talons pour faire le coup de feu pendant la Révolution de Juillet ! Quelle joie que de voir naître sous sa plume alerte les chefs d’œuvres qui nous enchanteront des décennies plus tard, « Les Trois Mousquetaires », « Le comte de Monte-Cristo », « La reine Margot », « Vingt ans après » !



Et quand les années noires viennent, quand les amis commencent à mourir, que les bourses se vident, que le cher Victor est parti en exil, que les enfants tournent le dos, que la critique boude, on s’émeut sur le sort de ce grand bougre dépensier, fort-en-gueule et orgueilleux, mais aussi si bon, si chaleureux, si affectueux, si joyeux, si humain en somme…



Jamais je n’avais été autant touchée à la lecture d’une biographie. J’en suis sortie avec le sentiment, non seulement d’avoir appris une foule de détails sur la vie de Dumas, mais aussi d’avoir été, le temps de quelques centaines de pages, un peu plus proche de lui – pas une amie, n’exagérons pas, pas même une connaissance, mais presque une contemporaine, quelqu’un qui l’aurait croisé au détour d’une rue, l’aurait entraperçu brièvement du coin de l’œil, juste le temps de s’extasier « Regardez, Regardez ! Je l’ai vu, c’est Alexandre Dumas ! ».



Adolescente, j’avais pleuré toutes les larmes de mon corps à la mort des mousquetaires dans « Le vicomte Bragelonne ». Aurais-je l’air ridicule si je confesse avoir un peu larmoyé sur la mort du dernier et du plus vieux des mousquetaires, treize ans plus tard ? Contrairement à ses héros, Dumas n’aura pas eu la chance d’une mort épique, mais il s’est éteint dans son lit, ruiné mais entouré des siens, et son dernier geste conscient fut un sourire. Il avait peur pourtant, il tremblait de voir son œuvre disparaitre derrière lui, d’avoir bâti son immense château sur du sable… Qu’il se rassure maintenant : à l’instar de d’Artagnan, d’Athos, d’Aramis et de Porthos, il est devenu immortel. Regardez les rayons des librairies, des bibliothèques, les affiches de cinéma, de série télévisée, les petits garçons coiffés de chapeaux à plumes dans les défilés de Carnaval !



Qu’on se le dise, qu’on le clame haut et fort : Dumas n’est pas mort !

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Le Paris de Dumas

Un très rapide tour des tres nombreux lieux que Dumas a occupés dans sa vie agitée, riche en rebondissements, en départs et retours...

La vie très chaotique et les nombreuses maîtresses allaient de pair avec d'incessants déménagements, dans des lieux luxueux un jour dénués de confort un autre jour.

Impossible de suivre sans une carte de Paris, compliqué de s'y retrouver sans photos, les témoignages et extraits de textes de l'auteur n'étant pas suffisants pour visualiser tous ces immeubles !
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Nouvelles contemporaines et autres nouvelle..

Claude Schopp, LE spécialiste d'Alexandre Dumas, s'est fait une spécialité de faire republier les écrits du grand écrivain du XIXème siècle.

Premier recueil publié par l'auteur, les Nouvelles Contemporaines date de 1826 et n'avait jamais été republié avant cette édition, qui date de 1993.

Nouvelles Contemporaines regroupe trois nouvelles : Laurette, Blanche de Beaulieu ou la Véndéenne et Marie.

D'autres nouvelles : La Rose rouge, Le Cocher de cabriolet, Un bal masqué, Une Amazone et Herminie ont été publiées dans des revues, entre 1831 et 1845, mais n'avaient jamais été réunies dans un livre.
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L'origine du monde

Le tableau intitulé L'Origine du monde de Gustave Courbet jouit d'une immense célébrité : autant il est stupéfiant qu'il ait été occulté de mille manières depuis sa réalisation en 1866 jusqu'à son exposition au musée d'Orsay en juin 1995, suite à la dation à l'État par les héritiers du psychanalyste Jacques Lacan, son dernier propriétaire, autant il a généré une vaste bibliographie – à celle qui est reproduite en fin de volume et qui semble exhaustive, il faut ajouter l'essai de l'auteur turc-parisien Enis Batur, intitulé La Pomme – laquelle s'est penchée sur les énigmes et mystères de cette œuvre encore aujourd'hui troublante... De ces mystères, Claude Schopp, biographe d'Alexandre Dumas père et fils, vient tout récemment d'en dévoiler un de taille : l'identité du modèle de la toile. Dans une lettre adressée par Dumas fils à George Sand, lettre pleine de fiel et d'insultes contre Courbet, il s'exclame : « […] sans compter que l'on ne peint pas de son pinceau le plus délicat et le plus sonore l'intérieur de Mlle Queniault de l'Opéra, pour le Turc qui s'y hébergeait de tems et tems, le tout de grandeur naturelle […]. Tout cela est ignoble ».

Mis à part que Claude Schopp commet ce qui ressemble fort à un acte manqué en lisant « l'interview » à la place de « l'intérieur », anachronisme qui rend la phrase incompréhensible, alors que la graphie de Dumas, dans cette lettre, est tout-à-fait lisible ; et hormis que le nom de la demoiselle était en réalité Constance Quéniaux (souvent mal orthographié même de son vivant), l'identification est parfaite : le Turc, c'était bien Khalil Bey, le richissime ambassadeur ottoman commanditaire de ce tableau et d'un autre, Le Sommeil, tout aussi scandaleux ; et il entretenait effectivement une relation avec ladite demoiselle, relation évoquée de façon quelque peu licencieuse voire totalement « reloue » par l'expression : « l'intérieur [… où il s'] hébergeait de tems en tems »...

De là, avec un procédé qui fait penser aux enquêtes de Didier Blonde sur des personnes disparues dans le passé, l'auteur procède à un travail d'archives très approfondi pour nous rendre tous les renseignements possibles sur Constance Quéniaux (1832-1908). Sa biographie est scandée en trois étapes : de l'enfance sans père mais adroitement guidée par une mère qui l'oriente vers la carrière de danseuse à l'Opéra – carrière qui impliquait à l'époque l'acceptation implicite des faveurs de « protecteurs » rarement désintéressés ; à partir de l'âge de vingt-quatre ans, l'abandon de la scène pour devenir uniquement « biche porte-veine », c'est-à-dire courtisane, demi-mondaine, jusqu'au faîte de cette activité représentée sans doute par la courte liaison avec Khalil Bey ; et enfin, à un âge plus mûr, et en profitant d'une grande aisance financière, un dévouement aux actes philanthropiques, sans jamais s'éloigner ni renier ses anciennes amitiés féminines issues du milieu des arts et du demi-monde. En apprenant tout sur cette femme remarquable, dont les talents, davantage même que la beauté dont on peut difficilement juger aujourd'hui avec nos critères, ont fait qu'elle sorte entièrement triomphante et non victime d'un système de domination sexuelle masculine qui a, à l'évidence, broyé la plupart de ses semblables, en disposant même d'inventaires de ses biens et de plusieurs portraits photographiques – outres les œuvres de Courbet concernées et autres pièces iconographiques également essentielles – l'on acquiert aussi un aperçu très intéressant de ce système justement, et plus généralement de l'univers des loisirs parisiens de la seconde moitié du XIXe siècle. Les qualités d'intelligence, de raffinement social et d'élégance exquise, de fidélité en amitié, de bon cœur et surtout de discrétion de la protagoniste, déjà reconnues par la presse mondaine de son temps constamment citée verbatim forcent notre admiration à son égard et nous la rendent vivante. Mais là se clôt le texte de l'auteur.

L'indispensable postface par Sylvie Aubens tente, brièvement, de répondre à la question cruciale : « [Avoir appris l'identité du modèle] Cela change-t-il notre perception du tableau ? En est-elle enrichie pour autant ? » Et sur ce point, je trouve que l'ouvrage est fortement lacunaire. Certes, on se référera à d'autres livres pour en savoir davantage sur les circonstances de la création de la toile, sur les personnalités de Khalil Bey et de Courbet. Évidemment, les documents compulsés ne pourraient nous renseigner davantage sur les rapports personnels entre les trois personnes. Pourtant on a le droit de se demander : seule la fiction romanesque est-elle à même de répondre aux questions suivantes ? -

Quelle sorte de masochisme a poussé le diplomate égyptien à commander un tableau représentant la vulve de sa propre maîtresse, obligée de poser nue devant le peintre ? Quels étaient les motifs qui ont poussé Courbet à réaliser une série de tableaux scandaleux, sans doute autres que la simple rémunération ? Quelle était la part politique de la haine que le Tout-Paris semble avoir vouée au peintre pour sa participation active à la Commune ? Courbet était-il juste un mégalomane imbu de sa personne, pour se comparer à Raphaël, au Titien et au Corrège ou bien ces œuvres-là avaient une ambition révolutionnaire ? Et quid de Constance Quéniaux, femme pourtant avisée, qui sut rompre assez vite avec le millionnaire, mais qui accepta de poser pour le peintre malgré sa discrétion ? De qui reçut-elle un précieux tableau de Courbet, très significativement représentant des fleurs, dont deux camélias, un blanc un rouge – alors que tout le monde avait lu La Dame aux camélias : de l'artiste lui-même ou du « Turc » ? Y avait-il peut-être une certaine forme de complicité entre les trois ? Enfin Alexandre Dumas, comme d'autres plumes acérées contre Courbet, révélait-il un secret de polichinelle en nommant Mlle Quéniaux ? Ou bien était-il suffisamment intime de ces personnes, comme le laisserait croire le fait d'avoir vu de ses yeux des tableaux si confidentiels ? Et alors pourquoi tant d'acrimonie, d'hostilité ? Avait-il des rancunes privées ? Les relations étaient-elles donc plus compliquées entre eux tous ?

Je pense qu'une si belle découverte résulte un peu tronquée par le manque de recherche d'autres documents reliant les personnages historiques entre eux. C'est dommage.

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Alexandre Dumas

Il était le génie de la vie, il n'a pas senti la mort. Belle épitaphe que celle offerte par George Sand à ce très grand bonhomme dont la vie fut à la démesure de l’œuvre.

Petit-fils d'un marquis aventureux et d'une belle esclave noire, fils d'un général révolutionnaire déchu, il naquit avec le siècle et joua un rôle dans tous les grands combats progressistes de son temps. Celui de l'art romantique, aux côtés de Hugo, sur les scènes des théâtres parisiens. Celui de la république, en 1830, fusil au poing sur les barricades, puis en 48, moins jeune déjà, candidat enthousiaste mais malheureux à des élections qui le laisseront sur la touche. Celui de l'indépendance italienne, encore, aux côtés de Garibaldi, alors que la vieillesse lui tendait déjà les bras.



Engagé en littérature par vocation, parce qu'il fallait bien gagner sa vie, parce que la politique ne voulait pas de lui, il devint l'auteur le plus prolifique de son temps (voire de tous !), aidé par de multiples collaborations sans doute, mais aussi et surtout, par une formidable fertilité intellectuelle, une puissance de travail énorme.

Le résultat se chiffre par dizaines : de pièces de théâtre, de nouvelles, d'articles, d'impressions de voyage, de causeries, de romans. Il connut des triomphes magnifiques et des fours formidables. Y gagna des centaines de milliers, qu'il perdit par millions. Généreux, dispendieux, inconséquent, entouré toujours d'innombrables maîtresses, de pique-assiettes éhontés, embarqué sans cesse dans de grandes affaires plus ruineuses que rentables, il finit à peu près aussi pauvre qu'il avait commencé. Et au milieu de tout cela, il trouva encore le temps de voyager, avec autant de passion qu'il en mettait pour le reste : en Suisse, en Italie, en Belgique, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Espagne, en Afrique du Nord, en Angleterre, en Russie...



Grand spécialiste de Dumas, Claude Schopp en livre ici une biographie d'une grande précision. Un poil trop précise, même, peut-être : alors que je ne connais pas trop mal l'époque et le contexte, j'avoue m'être parfois un peu perdue dans cette accumulation de faits, qui aurait gagné à un peu plus de synthèse et d'analyse, à quelques remises en perspective politique et littéraire. De même, j'aurais apprécié un peu moins de détails sur les très nombreuses maîtresses, les grands amours dont la répétition devient très vite lassante, et en contrepartie en apprendre un peu plus sur ces belles amitiés qui furent aussi l'un des grands fondements de la vie de Dumas.

Malgré ces quelques réserves, la lecture est très intéressante, enthousiasmante même parfois, lorsque la jeunesse s'emballe dans ses premiers combats, lorsque les théâtres croulent sous les applaudissements, lorsqu'il faut affronter les vieux prégugés et la censure, lorsque les balles sifflent sur les barricades. Bien plus tard, même, lorsque vieilli, ruiné, l'incorrigible Alexandre refuse encore de devenir respectable, fait le désespoir de son fils en posant, égrillard, enlacé d'une belle écuyère demi-nue.

Enthousiasmante parfois, et parfois franchement poignante, lorsque les amis commencent à mourir, que les désastres s'accumulent, que l'argent fait défaut et oblige à courir toujours plus vite après le moindre sou, à prostituer le talent pour tenter de sauver le navire. Lorsque la formidable vitalité se heurte désormais, régulièrement, à la mélancolie, et qu'un réalisme désabusé vient ternir les beaux idéaux d'autrefois. Claude Schopp est particulièrement doué pour décrire ces moments noirs, qui donnent à ce grand monstre impétueux une belle profondeur.

Nuancé et intelligent, le portrait de l'auteur, indéniablement, est superbe !
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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Dictionnaire Dumas

J'ai longtemps hésité avant d'acheter ce bel ouvrage écrit pas l'éminent Claude Schopp.

C'est -je pense- une acquisition indispensable pour tous les amoureux de l'œuvre d'Alexandre Dumas.

Outre les entrées nombreuses et suffisamment détaillées, incluant évidemment un bref résumé de chaque œuvre, les noms des personnages, les personnes célèbres ayant côtoyé Dumas, ses collaborateurs, etc.

On trouve aussi en fin d'ouvrage une chronologie biographique, une chronologie des œuvres et une bibliographie sélective.

J'aime bien ouvrir ce livre régulièrement, souvent après une lecture dumasienne, pour avoir quelques informations supplémentaires.

Un exemple intéressant : dans l'entrée Le Prince des voleurs, on apprend que ce roman est une traduction d'un certain Victor Perceval d'un roman anglais nommé 'Robin Hood and Little John, or, The Merry Men of Sherwood Forest' de Pierce Egan le jeune. Une petite étoile nous indique que l'entrée Victor Perceval existe et en allant y jeter un œil, on peut y lire notamment que c'est en fait le pseudonyme d'une certaine Marie Laure Chaufour, qui serait probablement venu proposer ses traductions à Dumas. On trouve également la liste des autres traductions qu'elle a proposées à Dumas.

On comprend pourquoi le style de ce roman est si différent du style habituel !
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 Dumas fils ou l'Anti-Oedipe

Ecrite à quatre mains et deux stylos par les époux Schopp (Claude, dumasien passionné, tombé tout petit dans la marmite "alexandrine" et Marianne, dumasienne non moins convaincue), cette bio très documentée a comme très grande qualité - outre celle de leur énorme travail - d'avoir comme sujet Alexandre Dumas Fils (l'auteur de la Dame aux Camélias ; Les Trois Mousquetaires, le Comte de Monte-Christo, La Reine Margot, etc., etc., c'est le Père, mais cela vous le savez !) ; en effet, de nombreuses bios ont été consacrées au père alors qu'aucune n'a été produite concernant le fils. Injustice réparée donc avec cet excellent ouvrage.

Prolifique et travailleur acharné comme son père (des plumes d'oie au bout de leurs mains comme des extensions naturelles), aussi charmeur de femmes et d'actrices que son géniteur mais plus conservateur, plus apte à la modération et à la frustration, peut-être moins aventureux par souci de moralité, Alexandre Dumas Fils aurait pu mal tourner finalement face à l'écrasante personnalité de son paternel. Faut-il que ce père fut si bon et bienveillant pour que ce fils ne s'en allât pas volontairement vers l'anonymat par détestation de la gloire ou par d'autres chemins moins littéraires par complexe oedipien ! Tuer le Père ne fut pas son but, bien au contraire, les auteurs l'expliquent bien en détail avec forces lettres du Fils qui montrent bien qu'il n'a eu de cesse d'entretenir la complicité créatrice avec son Père et sa mémoire après sa disparition. Et pourtant, il faut bien dire que tout avait mal commencé pour le rejeton, triangulé dans la petite enfance entre un père bourlingueur, une mère effacée et une belle-mère qui le rejetait.

Ce que je retiens de cette excellente bio (Prix Goncourt 2017 section Biographie), c'est l'extraordinaire talent de ces deux hommes (quelle famille peut se vanter d'avoir autant de talent ?), leur amitié sans jalousie ou compétition (ou si peu et, quand il y a eu des facheries, elles furent courtes et sans incidence) mais aussi l'amour filial que Dumas Fils a entretenu avec George Sand, qu'il appelait Maman bien qu'il aimat sa propre mère ; les lettres d'encouragement, de soutien, pleines de bon sens et d'un réel intérêt adressées par Sand à ce fils de coeur sont touchantes.

Beau travail offert là aux amoureux des Dumas !

J'en profite pour conseiller la superbe bio consacrée au Père, Alexandre Dumas le Grand, de Daniel Zimmermann ... et voilà on en revient toujours au même !







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Mes infortunes de garde national

Court texte de Dumas à l'occasion de quinze jours de quelques jours de prison, le récit est enlevé et plein d'humour, comme souvent. Pour les amateurs de l'auteur, on y retrouve sa plume et son opinion très tranchée sur bien des sujets, des critiques littéraires aux autres auteurs, et pour les amateurs d'histoire, c'est une plongée directe dans une période bien embrouillée dont il traite les embrouillaminis avec un style inégalable.
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L'origine du monde

L'Origine du monde, célèbre tableau de Courbet est aujourd'hui considéré comme un classique de la peinture, mais il n'en n'a pas toujours été ainsi. L'histoire de cette œuvre est des plus scandaleuse lorsqu'on la replace dans son contexte de création. Un tableau dont le seul sujet est une femme, qui plus est, nue, dont on ne voit qu'une seule partie du corps : son sexe exposé en gros plan. A l'époque où la norme était le portrait et les natures mortes, où les seuls nus étaient les sujets mythologiques, le corps de L'Origine du monde, offert au regard et à l'appréciation du spectateur est forcément matière à esclandre surtout en 1866 !

De plus, qui put bien être la muse du peintre ? Une femme de petite vertu, modèle pour pouvoir se nourrir ou le tableau cache-t-il un autre scandale en reproduisant la partie la plus intime d'un corps d'une femme du monde ? Il y a encore peu le mystère était entier, il fallut attendre que Claude Schopp, chercheur spécialisé d'Alexandre Dumas fils, tombe sur une phrase, ou plus précisément un mot, dans une correspondance de ce dernier avec Georges Sand pour avoir la puce à l'oreille.



L'identité révélée il partit à la recherche de la vie de ce modèle. Découvrez son enquête minutieuse dans les archives, les lettres et autres journaux d'époque afin de retracer au plus près la vie de cette femme énigmatique. La lecture s'avère parfois fastidieuse, l'auteur insère la moindre petite phrase où le nom du modèle, Constance Quéniaux, est cité. Mais c'est également une mine d'informations sur le mode de vie de nombre de femmes de l'époque. Constance était danseuse à l'Opéra de Paris, partie de rien, pour finir sa vie comme demie-mondaine respectée. Une vie atypique pour celle qui aurait pu rester sans le sous.



Un historique du tableau est présent à la fin de l'ouvrage, où l'on découvre son parcours aventureux. Saviez-vous qu'il a été vendu à l'état français seulement en 1993 ?



Un essai historique plus qu'artistique mais il est certain que vous ne regarderez plus ce tableaux du même œil...
Lien : https://topobiblioteca.wordp..
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Le Paris de Dumas

Merci à Babelio et aux éditions Alexandrines pour cet envoi.

Dans ce livre on apprend que Dumas a beaucoup arpenté Paris, a beaucoup déménagé, a eu de nombreuses maîtresses et a vécu les barricades de 1830. On découvre qu'il a réussi à faire une fête mémorable dans un de ses appartements, avec 700 personnes!! On a peine à le croire.

Mais il manque quand même LE truc qui nous aurait aidés pendant la lecture: un plan de Paris avec des repères précis. D'abord pour guider les lecteurs qui ne sont pas parisiens et pour découvrir les quartiers fréquentés. On pensait aussi trouver quelques dessins ou illustrations pour mieux s'imaginer la ville à cette époque. Le format du livre est très pratique car il tient dans une poche mais c'est dommage qu'il n'y ait pas plus de documents ou de témoignages.
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A propos de l'art dramatique

Recueil de causeries publiées par Dumas dans différents journaux, de lettres échangées entre lui et des critiques ou directeurs de journaux de l'époque, toutes sur le même thème: le théâtre!

A réserver aux amateurs forcenés de Dumas pour l'entendre parler lui-même de la bataille d'Hernani, de Mademoiselle Mars, ou aux passionnés du théâtre pour cette plongée dans l'histoire de l'art dramatique où classiques et romantiques s'affrontaient dans une vraie guerre!
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L'origine du monde

Excellent travail de recherche. Ouvrage très édifiant sur le monde du "ballet" et des milieux artistiques en général au milieu du XIX° siècle. Gustave Courbet peintre transgressif? Question d'actualité qui mérite d'être débattue dans le contexte actuel et à laquelle nous invite cet ouvrage.
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 Dumas fils ou l'Anti-Oedipe

A partir de correspondances inédites, Marianne et Claude Schopp ont établi cette biographie du fils officiel d'Alexandre Dumas. Tombé aujourd’hui dans l'oubli, il a été le plus célèbre dramaturge de son temps, parce qu'auteur du mélodramatique "La Dame aux camélias", roman paru en 1848 et porté à la scène en 1852, avant de faire l’objet de plusieurs adaptations cinématographiques. "La Dame aux camélias" inspira "La Traviata", l'opéra de Verdi créé en 1853. Dumas fils ? Une personnalité complexe, tour à tour défenseur des filles perdues et pourfendeur de la dissolution des mœurs. Un livre passionnant !
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Le meilleur d'Alexandre Dumas : Maximes, pe..

Claude Schopp, le plus spécialiste universitaire de Dumas, a rassemblé ici un ensemble de citations issues de différentes oeuvres de Dumas, dans ses romans, ses pièces de théâtre, ses articles, sa correspondance, ses récits de voyage... Il faut feuilleter ce recueil par petites touches, le parcourir avec délice au gré des différents thèmes, pour retrouver l'humour, l'ironie, l'engagement politique mais aussi la poésie de Dumas. S'il tire un peu à la ligne dans certains romans, on voit bien ici qu'il a l'art de la formule.

Si ce n'est pas un ouvrage essentiel, c'est un complément appréciable pour les admirateurs de Dumas comme moi.
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L'origine du monde

"L'origine du monde" de Courbet. Peint en 1866 pour un richissime individu dénommé Khalil Bey Pacha.



Ce tableau ,vu par Maxime Descamps et Léon Gambetta en leur temps, vient enrichir la collection privée du viveur, flambeur, propriétaire de chevaux de courses, amant notamment de Constance Queniaux, danseuse à l'Opéra de Paris et demi-mondaine.



Un autre tableau, "Le sommeil" complète la contribution de Courbet à l'art "licencieux" si prisé du commanditaire.



Qui est cette femme dont la posture offre au peintre réaliste et provocateur l'occasion de s'en donner à coeur joie, de faire une bonne affaire et d'effectuer un bras d'honneur à la societé corsetée bonapartiste des années 1850-1860 ? C'est Constance Queniaux comme le démontre magistralement Claude Schopp.



L'enquête magistrale se lit à la façon dont on se jette dans une nouvelle Sherlockienne.



Au passage, C. Schopp dresse un portrait terrible de la condition féminine. Une jeune femme cornaquée par sa mère négocie son corps contre des avantages matériels éphémères. Constance mène sa barque avec discernement, intelligence, habileté. Elle s'en sort et réussit une belle ascension sociale. Cependant elle a été un jouet. On sent la chape de plomb imposée par les préjugés sociaux dans cette façon de considérer la sexualité, le désir et les moyens de parvenir à un consentement.



La postface écrite par Sylvie Aubenas retrace la trajectoire du tableau depuis le cabinet particulier de Khalil Bey Pacha jusqu'au musée d'Orsay. cen'est pas la partie la moins intéressante de cet excellent livre.



A lire+++
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L'origine du monde

Un livre très agréable à lire non seulement sur la découverte de la femme qui posa pour le célèbre tableau de Courbet mais aussi sur toute une époque et mode de vie à Paris.



L’Origine du monde est une œuvre réalisée par Gustave Courbet en 1866. Il s’agit d’une huile sur toile de 46 × 55 cm, le tableau, qui fut dans les années 1950 la propriété du psychanalyste Jacques Lacan, est exposé au musé d’Orsey depuis 1995.



Camille Laurens dans son livre « La petite danseuse de quatorze ans » sur la muse de Degas abordait déjà la situation et les salaires des danseuses de l’Opera tout comme leurs espoirs et le vivier que les jeunes ballerines représentaient pour devenir les maîtresses plus ou moins fortunées des bourgeois et nobles de la capitale.



Constance Quéniaux « protégée » de Khalil Bey (commanditaire du tableau) fut danseuse à l’Opéra de Paris de 14 à 27 ans, puis se reconvertit, comme presque toutes ses consœurs à la fin de leur carrière dans la « bicherie ».



Constance sera elle même mécène et terminera sa vie avec une fortune considérable qu’elle lèguera à ses amis et ses domestiques.



Un essai qui se lit comme un roman.


Lien : https://blog.lhorizonetlinfi..
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L'origine du monde

Le mystère a son charme, mais j'ai voulu en savoir plus sur cette " Mlle Quéniaux" de l'opéra, qui serait le modèle du célèbre tableau de Courbet.

L'auteur relate comment il a fait cette découverte, au détour de l'analyse de la correspondance entre George Sand et Alexandre Dumas fils dont il est spécialiste.

Il a ensuite cherché à en savoir plus sur Constance Quéniaux, danseuse à l'opéra, et maîtresse entre autres du diplomate turco-égyptien Khalil-Bey, qui commanda plusieurs toiles à Courbet.



Le livre comporte de multiples citations, ce qui rend la lecture parfois un peu chaotique, entre le récit de l'enquête menée par l'auteur, les textes anciens, et le récit historique. C'est un essai, ce n'est pas un roman, mais elle aurait pu être l'héroïne de dizaines d'histoires!



L'auteur a retrouvé de nombreuses archives concernant la jeune femme, de sa carrière à l'opéra à l'inventaire de ses biens après son décès dans lequel figure un tableau peint par Courbet : Fleurs dans un vase, aux fleurs symboles des courtisanes.

L'ancienne danseuse devenue demi-mondaine saura gérer son patrimoine.

Elle terminera sa vie à Cabourg, où elle possédait une villa, et s'adonnait aux oeuvres de bienfaisance.

Un destin plus heureux que bon nombre de ses "collègues" danseuses et courtisanes, que l'on découvre au fil de chapitres très documentées autour des différentes facettes de sa vie.



Une belle mise en lumière de la femme à l'origine du monde!
Lien : http://lecture-spectacle.blo..
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