Si nous boudons nos « trop », si nous refoulons nos explosions, nos exubérances, nous fabriquons notre mort. Elle a plusieurs visages, elle est bien maquillée, nous fait la danse du ventre et nous appâte avec des valeurs construites sur le profit, l’argent, l’apparence et l’hypocrisie. Elle nous éloigne de notre centre, de notre cœur, de notre âme. Si nous abandonnons notre âme, nous mourons, par définition. Nous devenons des enveloppes obéissantes, formatées, codées, « likées », mais une enveloppe tout de même. Vide.
Heureusement que les docteurs ont des calmants, pour nous neutraliser sans avoir rien à nous expliquer. C’est leur langage, les calmants. C’est étrange, pourquoi avoir envie de calmer tout le monde, d’ailleurs ? Qu’y a-t-il de si bon dans le calme ? On me dit tout le temps “calme-toi, calmez-vous”, mais quelle idée ! Est-ce qu’on donne des calmants à un volcan ? Est-ce qu’on s’approche de lui, juste au bord, en lui jetant des comprimés pour qu’il arrête de bouillir ? Non, bien sûr que non. Parce qu’un volcan a sa place et sa légitimité dans la nature et dans l’ordre des choses, tout comme un être humain excité, agité, bouillant, a sa place dans l’humanité.
Les émotions sont nos trésors. Je ne comprends pas pourquoi on les étouffe. On les tasse. Sous prétexte de devenir adulte. On ne les dit plus. Pourquoi ? ça ne se fait pas ? çà devrait se faire.
J’aime tes poignées de main, tes réconforts, tes confidences, tes conseils. J’aime ta chaleur, ta spontanéité. Et je te crois. Je te crois quand tu me dis que tu m’aimes et que je te fais du bien, que je te donne du bonheur et que tu me pousses à dire ce que je pense. Que tu admires ça. Mais tu sais, on reconnaît chez l’autre ce que l’on est soi-même, et si tu me confies ces convictions c’est que toi aussi tu les as.
Cette maladie, on la porte et on la traîne, mais on en fait ce qu’on en veut. Il y a des êtres qui sont assommés par ça complètement. Mais surtout, hors de question de glisser ce mot dans la conversation. Tu as déjà entendu quelqu’un dans un dîner mondain lancer à la cantonade : « Ah tiens, j’ai eu un cancer, quelle aventure, mais maintenant c’est fini, on me l’a retiré, j’ai fait un peu de chimio et tout va bien ! » Jamais personne n’ose ça, parce qu’il est implicitement interdit de parler du cancer. « Ça ne se fait pas. » Je comprends très bien que certains veuillent garder le secret. Ce n’est pas leur comportement qui est responsable bien sûr, et personne n’a le droit de juger, ce qui est honteux. C’est la raison qui les amène à penser comme ça.
Des « bijoux de valeur », c’est un truc qui m’a toujours fait rire. Je ne vois pas de valeur dans les bijoux, même un diamant. Je ne vois pas où elle est la fameuse valeur. Je ne vois pas la valeur d’un objet de toute façon, quel qu’il soit. Je vois de la valeur dans mon foulard que je porte autour du cou, en train d’écrire, parce que la personne qui me l’a donné a de la valeur pour moi, et qu’elle, je l’aime, donc j’aime ce foulard.
N'importe quoi avec ce qu'on aime repose le coeur.
Les histoires d’amour sont essentielles à nos vies, qu’elles soient réelles, qu’elles soient rêvées, qu’elles soient espérées, trahies.
Elles peuvent nous arriver n’importe quand.
On peut en avoir à tout âge.
Personne n’est à l’abri de l’amour.
Tout le monde cherche l’amour.
L’amour est notre essence, notre cœur, et sans notre cœur, on ne pourrait pas vivre.
Cette fleur était particulièrement belle parce qu’elle n’avait pas de couleurs. Elle les avait toutes, mais esquissées. Cette rose était une aquarelle vivante et changeait de teinte selon le temps, imperceptiblement, comme quelqu’un rougit de honte, de timidité, ou devient blanc de peur.
Le mensonge entretient d’autres mensonges. Je voulais protéger mes enfants, c’est autre chose que de contribuer aux tabous en se taisant. Nous sommes responsables de ces tabous que nous nous infligeons et qui nous tuent à petit feu sûrement autant et peut-être plus que les maladies déclarées. Les interdits que nous nous fabriquons nous étouffent, nous brident, nous embrigadent de feux rouges dont nous n’avons pas besoin, et nous forcent à entrer dans un défilé rangé, avec uniforme et cadence imposés, rythme ronronnant et musique sans notes. Et nous nous laissons faire, façonnant nos propres cages, forgeant nos propres chaînes, alors que nous devrions danser à l’air libre.