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Citations de Emmanuel Carrère (1617)


P 156 : "Les professeurs d’allégresse pour qui la tristesse est une faute de goût, la dépression est une marque de paresse, la mélancolie un pêché. Je suis d’accord, c’est un péché, c’est même le péché mortel, mais il y a des gens qui naissent pêcheurs, qui naissent damnés, et que tous leurs efforts, tout leur courage, toute leur bonne volonté n’arracheront pas à leur condition. »
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Jésus était la petite enfance de cet organisme. Paul et l'Église des premiers siècles, son adolescence rebelle et passionnée. Avec la conversion de Constantin commence la longue histoire de la chrétienté en Occident, soit une vie adulte et une carrière professionnelle faite de lourdes responsabilités, de grandes réussites, de pouvoirs immenses, de compromissions et fautes qui font honte. Les Lumières et la modernité sonnent l'heure de la retraite. L'Église n'est plus aux affaires, elle a de toute évidence fait son temps et il est difficile de dire si son grand âge, dont nous sommes les témoins assez indifférents, tend plutôt au gâtisme hargneux ou à la sagesse lumineuse qu'on se souhaite, moi en tout cas, quand on pense à sa propre vieillesse.
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Vous voulez vraiment savoir ce qui s'y passe, dans le Royaume de Dieu? Écoutez. C'est un grand dîner, dont les invités se décommandent à la dernière minute, sous des prétextes divers. L'un vient d'acheter un champ, l'autre marie sa fille, tous ont mieux à faire. Furieux, le maître de maison envoie ses serviteurs inviter tous les mendiants de la ville. On exécute son ordre, mais il reste encore de la place. Alors qu'on sorte de la ville, qu'on fasse une battue, tous les gens qu'on trouvera qu'on les amène, de force s'il le faut : il faut que la maison soit pleine. Quant à ceux qui ont fait faux bond, ils peuvent toujours courir pour être réinvités.
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Dans mon cahier, je note cette sentence biblique : « Ce que tu peux faire avec ta main, fais-le. » (cela peut aussi se lire, je m'en avise aujourd'hui, comme une invite à la masturbation)...
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Les esprits, dit Nietzsche, sont jugés - et, contrairement à ce que dit Jésus, il faut juger - par leur capacité à ne pas se raconter d'histoires, à aimer le réel et pas les fictions consolantes dont ils le doublent. Ils sont jugés par la dose de vérité qu'ils sont capables de supporter.
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Je pensais : la grâce qu'on laisse filer détruit la vie. Si elle ne la change pas du tout au tout, elle la ravage. La refuser, s'éloigner d'elle quand on l'a entrevue, c'est se condamner à vivre en enfer. Mais peut-être pas.
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Bien sûr, que la foi a des soubassements psychiques. Bien sûr que la grâce, pour nous atteindre, se sert de nos manques, de notre faiblesse, de notre désir enfantin d'être consolés et protégés.
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Nous ne tendons jamais, de nous-mêmes, qu'à prendre toute la place.
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(...) et les prophètes, objet après coup de la vénération d'Israël, ont dû être en leur temps des énergumènes encombrants dans le genre de Jamie, râlant sans cesse, exhibant leurs plaies de façon indécente, emmerdant le monde avec leur exigence et leur misère - ce n'est pas pour rien si le nom de Jérémie a dans le langage courant donné le mot « jérémiade ».
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Les librairies, pour un écrivain qui ne peut plus écrire, sont un terrain dangereux.
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Elle a tout connu de la névrose religieuse : l'horreur du sexe, le scrupule torturant, la tristesse couvrant tout.
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Le bonheur, c'est de se mettre hors d'atteinte. Il faut en s'exerçant tous le jours, à toute heure - et cet exercice, en latin, se nomme meditatio -, se libérer de l'emprise des affects, ne pas regretter, ne pas espérer, ne pas anticiper, distinguer ce qui dépend de nous de ce qui n'en dépend pas, si son enfant vient à mourir se persuader qu'on n'y peut rien et qu'il n'y a pas lieu d'être triste plus que de raison, voir dans toute circonstance de la vie (surtout celles qui paraissent défavorables) une occasion de pratique, et par une progression constante de la folie commune à la santé de l'âme atteindre l'idéal du sage - idéal dont les stoïciens reconnaissaient sans embarras qu'il y avait peu d'exemples, peut-être un tous les cinq cents ans.
p. 224
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Tout le projet de Renan est de donner à des événements réputés surnaturels une explication naturelle, de ramener le divin à l'humain et la religion sur le terrain de l'histoire. Il veut bien que chacun pense ce qu'il veut, croie ce qu'il veut, il est tout sauf sectaire, simplement chacun son métier. Lui a choisi d'être historien, pas prêtre, et le rôle d'un historien n'est pas, ne peut pas être de dire que Jésus est ressuscité, ni qu'il est le fils de Dieu, seulement qu'un groupe de gens, à un certain moment, dans des circonstances qui méritent d'être racontées en détail, se sont mis en tête qu'il était ressuscité, qu'il était le fils de Dieu, et sont même parvenus à en persuader d'autres.
p. 181
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Refusant de croire à la résurrection et plus généralement aux miracles, Renan raconte la vie de Jésus en essayant de savoir ce qui a pu réellement, historiquement se passer, que les premiers récits rapportent en le déformant en fonction de leur croyance. Devant chaque épisode de l'Evangile, il fait le tri : ça oui, ça non, ça peut-être. Sous sa plume, Jésus devient un des hommes les plus remarquables et influents qui aient vécu sur terre, un révolutionnaire moral, un maître de sagesse comme le Bouddha - mais pas le fils de Dieu, pour la simple raison que Dieu n'existe pas.
p. 181
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On y lit des phrases aussi stupéfiantes, et à vrai dire aussi choquantes, que "Celui qui me mange vivra en moi" ou " Si vous ne mangez pas ma chair et ne buvez pas mon sang, vous n'aurez pas la vie en vous". Avoir la vie en soi, qu'est-ce que cela veut dire? Je ne sais pas, mais je sais que j'y aspire. j'aspire sans la connaître à une autre manière d'être présent au monde, à autrui, à moi-même, que ce mélange de peur, d'ignorance, de préférence étroite pour soi, d'inclination au mal quand on voudrait le bien, qui est notre maladie à tous et que l'Eglise désigne d'un seul mot, générique : le péché. Au péché je sais depuis peu qu'il existe un remède, aussi efficace, au moins dans l'Evangile de Jean. Jacqueline ne cesse de me le répéter. Il est curieux, si c'est bien vrai, que tout le monde ne se rue pas dessus. Pour ma part, je suis preneur.
p. 102
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Par un matin de dimanche, quand nous entendons bourdonner les vieilles cloches, nous nous demandons : mais est-ce possible ? Tout cela pour un Juif mort il y a deux mille ans et qui disait être le fils de Dieu - encore qu'il n'y ait pas de preuve de cette affirmation. Un dieu qui engendre avec une femme mortelle. Un sage qui recommande de ne plus travailler, de ne plus rendre la justice, mais de guetter les signes de la fin du monde imminente. Une justice qui accepte de prendre un innocent comme victime suppléante. Un maître qui ordonne à ses disciples de boire son sang. Des prières pour obtenir des miracles. Des péchés commis contre un dieu, expiés par un Dieu. La peur d'un au-delà dont la mort est la porte. La figure de la croix pour symbole, à une époque qui ne sait plus rien de la fonction ni de l'ignominie de la croix. Quel frisson d'horreur nous vient de tout cela, comme un souffle exhalé par le sépulcre d'un passé sans fond? Qui peut croire que l'on croie encore une chose pareille?
p.14
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- Mes filles ne se souviendront pas de moi.
- Tu ne te souviens pas non plus de ta mère quand tu étais petite. Ni moi de la mienne. On ne voit plus le visage qu'elles avaient. Pourtant, elles nous habitent.
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Elle répétait : quand nous retournerons à la maison, peut-être que Maman sera là. Elle ne pouvait s'empêcher d'imaginer qu'à un moment une porte s'ouvrirait et que sa maman serait là, sur le seuil. J'ai pensé que c'était une bonne chose, ces visites fréquentes à la tombe : au moins, il y avait un lieu où elle était, ce n'était pas partout et nulle part. Peu à peu, elle cesserait d'être derrière toutes les portes.
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Il aurait préféré souffrir pour de bon du cancer que du mensonge - car le mensonge était une maladie, avec son étiologie, ses risques de métastases, son pronostic vital réservé - , mais le destin avait voulu qu'il attrape le mensonge et ce n'était pas sa faute s'il l'avait attrapé.
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En pure logique libérale, les gens sont libres, égaux et assez grands pour s'entendre sans que l'Etat s'en mêle. En pure logique libérale, un propriétaire a parfaitement le droit de proposer à son locataire un bail aux termes duquel il peut le chasser ou doubler son loyer quand ça lui chante, exiger qu'il éteigne la lumière à sept heures du soir ou porte une chemise de nuit plutôt qu'un pyjama : du moment que le locataire a le droit symétrique de ne pas accepter ce bail, tout va bien.
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