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Citations de Ernst Lothar (51)


... les fondements de l'éternel autrichien. Ils ont de toute éternité pour nom: Joseph II ou la religion de la tolérance, Mozart ou l'élévation de l'âme, la forêt viennoise ou les bienfaits de la beauté.
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Pourquoi l'âge ne se voyait-il que dans le miroir ou chez les autres et pas en soi?
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Thomas Mann, un grand allemand, disait avoir perdu définitivement, à cause d'Hitler, tout respect des Allemands. Felix Geldern, un petit autrichien qui partageait l'avis du grand Allemand avant son retour à Vienne, se demandait maintenant si c'était admissible. Est-ce juste de refuser de comprendre, s'interrogeait-il, planté à côté d'un ouvreur chagrin, qui n'avait, lui, visiblement aucune compréhension pour ce spectateur coupable d'un grossier retard ? En a-t-on le droit ? Peut-on dire : je refuse de voir tes brûlures car tu les as méritées ? On ne remue pas le couteau dans la plaie, monsieur le professeur ? Sous le coup d'archet clair et puissant du violoniste, dans cette salle qui défiait toute idée de pesanteur, la réponse était presque encore plus évidente que la question. Un voyageur de passage en a peut-être le droit, quelqu'un dont ce n'est pas le pays ; mais qui aime son pays n'en a pas le droit, il se doit d' en être aussi le médecin. Même si nul ne l'a appelé.
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L'état du pays se voyait, il se sentait. Aux vêtements des gens. Qui échangeaient leurs livres contre de la farine. À leur fierté amère. Aux grappes de passagers qui s'accrochaient aux marchepieds des tramways. À ces camions non bâchés que les gens attendaient des heures comme le messie dans la poussière des routes et sous la pluie avec leurs valises, dans l'espoir que l'un d'eux les prendrait à son bord, c'était l'unique possibilité de voyager et peut-être pourraient-ils s'y tasser, serrés comme des sardines ; pour y monter ils apportaient des caisses que les vieillards escaladaient au risque de se rompre le cou. À ces innombrables cas de décès par asphyxie au gaz, qu'on oubliait de fermer parce qu'on en avait chaque jour à une heure différente. Aux immeubles sinistres portant les inscriptions LSR, Lufschutzraum : abris antiaériens. Aux flèches blanches indiquant les endroits où l'on pouvait déterrer des personnes éventuellement enfouies sous les décombres. Aux fleurs jaunâtres qui poussaient sur les gravats. Le mot " espoir" ne faisait plus partie du vocabulaire.
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Paris, que Hans ne connaissait pas, le déçut. Fritz ne protesta pas, bien qu'il fût un fervent partisan des Français et de tout ce qui était parisien ( tant qu'on ne parlait pas musique). Il était assez tolérant pour reconnaître que ce qui déplaisait à son cousin en Paris était justement ce qui les gênait tous les deux à Vienne : une insincérité paresseuse et myope, faite à la fois d'autodérision et d'autocélébration. Les deux villes présentaient une ressemblance presque effrayante : aussi séduisantes, sensuelles et décadentes l'une que l'autre. Mais la grâce de Vienne était plus naturelle, le charme de Paris plus artificiel. p. 547.
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C'est mon deuxième voyage aux Etats-Unis, dit-il. Eh bien, crois-moi, le sens du théâtre leur est, à ce jour, complètement étranger. Ils vont voir des pièces comme ils vont à la cafétéria. Te souviens-tu de ce que le théâtre signifiait pour nous quand nous étions jeunes ? Et même plus tard ? De Nora nous est venue l'émancipation des femmes. Des Tisserands la protection des travailleurs à domicile. Des Revenants une part de l'hygiène sociale. Le splendide Girardi nous a appris ce qui beau en Vienne, le sublime Kainz ce qu'il fallait y combattre. Ici, en revanche, le théâtre est affaire de routine ou de commerce." Are you in the show business ?" vous demande-t-on pour savoir si vous travaillez dans le théâtre. Ils ont détruit ce qui en faisait un événement. Les pièces sont sophistiquées, trop construites, au mieux elles effraient le bourgeois. Leurs productions sont entre les mains des marchands d'orange et compagnie. Les acteurs-mon dieu-, ils sont lisses, ils sont rapides, ils sont naturels, d'un naturel si ravageur qu'une heure après, on ne sait plus qui jouait quoi. Chez nous, ils sont plus lents et pas si naturels, mais ce sont des personnalités. P.548.
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Jusqu'ici j'ignorais que j'étais juive.
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[...] qu'en est-il de la mémoire humaine? [...] Les hommes ont-ils naturellement une si piètre mémoire? Ou comptent-ils seulement sur la faiblesse de celle des autres?
p.650-651
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A ceux-là, je dis: non, il y a des progrès qui ne font pas avancer, mais au contraire brutalement régresser jusqu'au début de l'évolution, jusqu'au néant, c'est à cette étape de la civilisation qu'est maintenant parvenue notre époque.
p.583
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Travailleur ou pas, pourquoi ne pas se défendre ardemment quand tout ce qui vous importe est en jeu? [...] On ne peut pas vivre quand on vous prive de l'air que vous respirez, de l'être ou de la liberté qui font partie intégrante de vous-même! L'autorité de l’État ? Elle perd tous ses droits quand elle vous contraint à une situation indigne.
p. 515
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Car l'esprit de l'Europe se nomme Platon, Érasme et Mozart, et non Napoléon et Hitler. Et parce que la force ne cède qu'à la force, c'est la force de Mozart qui arrachera définitivement son inhumanité à la puissance des machines et à la logique de pouvoir.
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Ils étaient si convaincus d’avoir souffert le martyre lors de leur émigration plus ou moins forcée (cabines de luxe sur le Queen Mary et le Normandie) qu’ils se posaient en victimes héroïques dans leurs suites au Plaza, leurs appartements au coin de la 5e Avenue et de la 68e Rue, leurs villégiatures au Lake Placid et leurs week-ends de golf au Westchester Country Club.
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Avec la haine, on raccourcit tout, même la vie.

Arthur Schnitzler
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Agrippé des deux mains à la balustrade du petit pont supérieur, l'émigré de retour voyait resurgir la côte d'ù il était partie dans l'incertain, huit ans auparavant. Il se souvenait de tout.
De douces collines. Des maisons. Lui avait-on dit que Le Havre n'était plus ? Il était là. Le Havre avait toujours été le lieu où commençaient et finissaient les voyages dans l'inconnu.
Le "Brésil" avait réellement ralenti. Ce n'étaient plus de vagues contours qu'on voyait maintenant mais la réalité. Elle lui sauta à nouveau à la figure, brutalement cette fois. Et il vit les premières traces de la destruction. Jusque-là, il les avait vues dans des films ou en photos, à présent elles étaient sous ses yeux. Le Havre n'existait plus. Le plus terrible est qu'il semblait tout de même encore là. Sa silhouette y était. Elle se dessinait dans des ruines de murs et de fenêtres calcinées derrière lesquelles béait le néant intégral. On avait vu ces images au cinéma ; les reporters avaient écrit un tas d'articles, on avait reçu des lettres qui tentaient de les dépeindre, mais tout cela restait bien en deçà de cette réalité indescriptible. Apercevoir des gens devant les ruines proprement dégagées et une voiture rouler là où il n'y avait pas de route rendait le tout encore plus sinistrement irréel.

page 74
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Les yeux exercés de Madame Sacher observaient et supputaient. Sur le compte de l'Italien, elle fit à Jean quelques observations biens senties : un de ces parasites que Vienne attirait comme des mouches depuis la signature de la paix, ils débarquaient des quatre coins du monde pour pomper à la ville son reste de sang et vivaient royalement depuis que la monnaie autrichienne s'effondrait chaque jour davantage et qu'on obtenait pour une poignée de devises étrangères des sommes astronomiques de couronnes autrichiennes. Mais cet idiot de gouvernement prétendait que ces gens représentaient l'étranger et qu'il fallait se les concilier à tout prix pour obtenir des prêts et des vivres. Elle les vouait aux gémonies. "J'espère que vous vous sentirez bien chez nous", dit-elle aux nouveaux clients.

Page 406 - La "sachertorte" cela vous parle? La recette est tenue secrète et il vaut mieux aller la déguster chez Sacher à Vienne (chocolat et abricot)! Terrible!
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L'Autriche est une communauté obligée, ça ne t'avait jamais frappé? Une cohabitation d'éléments disparates! Les Tchèques détestent les Allemands, les Polonais les Tchèques, les Italiens les Allemands, les Slovènes les Slovaques, les Ruthènes les Slovènes, les Serbes les Italiens, les Roumains les Ruthènes. Et les Hongrois tout ce qui n'est pas eux - extra Hungariam non est vita et si est vita, non est ita! Ce que tu as concocté dans ce devoir de baccalauréat dont tu es si fier est complètement absurde ! Qu'est-ce que ça veut dire finalement "l'Autrichien"? Ca n'existe pas! C'est une appellation inventée par les Habsbourg pour justifier leur pouvoir ! Quand l'Autrichien parle allemand comme toi et moi, il se considère comme l'Autrichien par excellence et s'imagine que le Tchèque, l'Italien et le Polonais ressentent la même chose et vénèrent comme lui la ville impériale, le Prater des polichinelles, la valse, les guinguettes, le célèbre "cœur des Viennois" et les tra-la-la-i-ou des tyroliennes! Idiot, le Polonais de Przemysl, l'Italien de Trente et le Tchèque de Budweiss passent, eux, leur vie à se demander comment ils vont bien pouvoir sortir de cette fichue prison où leur propre langue n'a pas le statut de langue officielle mais d'infâme petit-nègre et où on leur prouve du matin au soir qu'ils sont des individus de troisième catégorie, tout en exigeant, néanmoins, ben voyons, qu'ils fassent trois ans de service militaire pour les Viennois de la première catégorie et paient des impôts leurs vie durant!

page 288
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Un jour il lui demanderait, et cela se dresserait ensuite toujours entre eux : Qu'as-tu fait le 14 mars 1938, quand ils ont traîné dehors madame Polatschek, ta voisine de soixante-quatorze ans, pour lui faire effacer neuf heures d'affilée les croix potencées du trottoir ? Tu étais à ta fenêtre et tu regardais. Tu t'es même dit : « C'est bien fait pour cette vieille pimbêche ! » Qu'as-tu fait, quand le vieux Dr Emil Geyer, l'ancien directeur du théâtre in der Josefstadt, a couvert son étoile jaune de sa main en te croisant, gêné, dans la Singerstrasse, et qu'un voyou lui a ôté sa main et son chapeau ? Il t'a crié comme pour t'appeler à l'aide : « Bonjour, mademoiselle Wagner ! », et tu as fait comme si tu ne le voyais pas (…). Qu'as-tu fait, quand Feldmann, l'oto-rhino qui t'avait sauvé la vie quand tu avais onze ans, t'a implorée de cacher sa sœur chez toi une quinzaine de jours ? Tu lui as donné asile deux jours, puis tu es partie chanter à Cologne. Et ils l'ont trouvée et ils l'ont gazée.
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Ce n'est pas un hasard si la musique de l'âme vient d'Autriche. Ce n'est pas un hasard si Mozart est né à Salzbourg et Schubert à Vienne, c'est l'expression organique de ces villes qui ne sont pas pétrifiées mais sont restées des paysages autrichiens.
On peut vivre sans Mozart et Schubert? Non !
On a besoin du symbole qu'ils incarnent et qui toujours se réincarnera en d'autres génies _pour vivre et pour mourir.
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Depuis longtemps il soupçonnait la culture de ne pouvoir être sanctionnée par un examen, un bulletin scolaire ou des études, mais de devoir rester à l'état de quelque chose d'indicible qui n'effleurait même pas les gens dits "cultivés", il pensait qu'elle servait aussi surtout à reconnaître ce qui est obsolète dans la tradition et à accéder à de nouvelles avancées.
Et il faisait la pénible expérience que la plupart des gens "cultivés" érigeaient leur culture en barrière contre l'avenir.
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L'Autriche était plus qu'un pays. Elle incarnait cette idée du supranational qui avait fait cohabiter jadis sous un même toit douze nations différentes: les Etats-Unis d'Europe, unis non par la langue, la géographie ou le régime, seulement par la vie. Et aussi par la vie des contraires: de la haine, de l'amour - toutefois par la vie, donc par la nature.
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