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Citations de Etaf Rum (88)


 La peur a cela de particulier qu’elle bouleverse notre sens des priorités. 
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 Pendant tant d’années, elle avait cru que si une femme était assez dévouée, assez obéissante, elle pouvait espérer gagner l’amour d’un homme. Mais à présent qu’elle s’était remise à lire, elle découvrait une nouvelle forme d’amour. Un amour qui naissait au fond d’elle-même, un amour qu’elle éprouvait lorsqu’elle lisait toute seule à la fenêtre. Et grâce à cet amour, elle commençait à croire, pour la première fois de toute son existence, qu’en fin de compte, elle valait quelque chose. 
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C’était un jour froid et nuageux, empli d’un parfum d’arbre humide et d’un faible relent difficile à cerner. Les gaz d’échappement, peut-être. Ou une odeur de chats errants. L’un des arômes de Brooklyn qu’elle sentait souvent au cours du trajet à pied, long de neuf blocs, entre chez elle et l’arrêt de bus. Il y avait un gobelet de café vide près du caniveau, en carton bleu et blanc, écrasé, souillé de boue. Elle lut la phrase imprimée en lettres dorées – RAVIS DE VOUS SERVIR ! – et soupira. Impossible de s’imaginer un homme avoir l’idée d’une pareille phrase. Non, c’était sûrement une femme qui l’avait trouvée. 
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- Les Contes des mille et une nuits. C'est celui que je préfère. (...)

- C'est plein de génies et de vizirs, des choses qui n'existent pas. Je préfère les histoires qui parlent de la vraie vie.

-Mais ça parle de la vraie vie, insista Isra. ça parle de la force et de la ténacité des femmes. Personne ne demande à Schéhérazade d'épouser le roi. C'est elle qui se propose, au nom de toutes les femmes, afin de sauver toutes les musulmanes en âge de se marier. Ces histoires qu'elle raconte pendant mille et une nuits, c'est la résistance. Sa voix est une arme, qui illustre le pouvoir extraordinaire des histoires en général, et la force des femmes en tant qu'individus. (p. 134)
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Il est très difficile de trouver sa place dans le monde quand on ne s’est pas encore trouvé soi-même. 
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Elle avait enfin compris. La vie n'était rien de plus qu'une méchante blague pour les femmes. Une blague qui était loin de la faire rire.
"tu sais ce que c'est ton problème ? reprit Sarah.
-Dis-moi.
-Tu ne lis plus.
Je n'ai pas le temps de lire.
- Eh bien, tu devrais en trouver, du temps. ça te ferait beaucoup de bien. " (...)
-Alors lis en secret, comme moi. Ce n'est pas comme ça que tu faisais, en Palestine ?
-Si." Isra se laissa brièvement séduire par cette idée, avant de la rejeter, et sa propre soumission à l'ordre familial la frappa. (p. 208)
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Mais à présent qu'elle s'était remise à lire, elle découvrait une nouvelle forme d'amour. Un amour qui naissait au fond d'elle-même, un amour qu'elle éprouvait lorsqu'elle lisait toute seule à la fenêtre. Et grâce à cet amour, elle commençait à croire , pour la première fois de toute son existence, qu'en fin de compte, elle valait quelque chose. (p. 278)
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-ça n'a rien d'étrange, répliqua Sarah. Ce sont les personnes les plus seules qui aiment le plus lire.
- C'est pour ça que tu aimais lire ? Parce que tu te sentais seule ?
- Quelque chose dans ce goût-là. Sarah regarda de nouveau par la fenêtre. " ça été très dur de grandir dans cette famille, d'être traitée différemment de mes frères parce que j'étais une fille, de me réveiller tous les jours en sachant que mes perspectives d'avenir étaient si limitées. (...) c'était bien plus que de la solitude. Je me dis parfois que c'était aussi l'opposé, la sensation qu'il y avait trop de monde autour de moi, trop de liens imposés: il y avait aussi en moi un désir d'isolement pour pouvoir réfléchir par moi-même. (p. 231)
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La peur a cela de particulier qu'elle bouleverse notre sens des priorités. (p. 196)
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Isra baissa les yeux. Elle savait que Mama avait raison, mais elle ne parvenait pas à s'imaginer vivre en Amérique. Le problème c'est qu'elle n'avait pas non plus l'impression d'être à sa place en Palestine, où les gens menaient des existences prudentes, suivant les traditions à la lettre afin de ne pas être ostracisés. (p. 23)
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INCIPIT
Je suis née sans voix, par un jour nuageux et froid à Brooklyn. Personne ne parlait jamais de ce mal. Ce n'est que des années plus tard que j'ai su que j'étais muette, lorsque j'ai ouvert la bouche afin de demander ce que je désirais : j'ai alors pris conscience que personne ne pouvait m'aider. Là d'où je viens, le mutisme est la condition même de mon genre, aussi naturel que les seins d'une femme, aussi impératif que la génération à venir qui couve dans son ventre. Mais jamais nous ne vous l'avouerons, bien entendu. Là d'où je viens, on nous apprenait à dissimuler notre condition. On nous apprenait à nous réduire nous-mêmes au silence, on nous apprenait que notre silence nous sauverait. Ce n'est que maintenant, bien des années plus tard, que je sais que tout cela est faux. Ce n'est que maintenant, en écrivant cette histoire, que je sens venir ma voix.
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Isra se demanda ce qui avait pu rendre Farida aussi forte. Elle avait dû subir quelque chose de bien pire que des coups, songea -t-elle. La vie avait fait d'elle une vraie guerrière. (p. 242)
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Isra ne mit pas longtemps à comprendre que la vie de Farida était quasi identique à celle de Mama. Elle passait ses journées à cuisiner et à nettoyer (...) Lorsque ses fils étaient là, elle les choyait comme s'ils étaient des poupées de porcelaine et non des hommes. (p. 103)
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Ce sont les personnes les plus seules qui aiment le plus lire.
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Isra se dit alors pour la première fois de sa vie que c'était en vérité pour cette raison que les violences sur les femmes étaient si communes. Ce n'était pas qu'à cause de l'absence d'une police à proprement parler, mais parce que les femmes étaient éduquées dans la croyance qu'elles étaient des créatures honteuses et sans valeur qui méritaient d'être battues, éduquées à être totalement dépendantes des hommes qui les battaient. A cette simple pensée, Isra eu envie de pleurer. Elle avait honte d'être une femme, honte pour elle, honte pour ses filles.
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Souvent, elle se demandait combien de personnes au monde étaient aussi ensorcelées qu’elle par les mots, combien n’aspiraient comme elle qu’à se plonger dans un livre et à ne jamais en ressortir. Combien espéraient trouver entre des pages imprimées leur propre histoire, combien auraient tout donné pour comprendre. Et pourtant, peu importait le nombre de livres qu’elle lisait, le nombre d’histoires qu’elle se racontait, Deya se sentait toujours aussi seule à la fin. Elle avait passé sa vie à la recherche d’une histoire qui l’aiderait à comprendre qui elle était et quelle était sa place dans le monde. Mais son histoire à elle était confinée aux murs de cette maison, à ce sous-sol de la Soixante-Douzième Rue, et elle désespérait de la comprendre un jour.
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La peur a cela de particulier qu'elle bouleverse notre sens des priorités.
p196
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Deya la dévisageait, impassible. Farida savait que sa petite-fille ne pouvait comprendre comment le déshonneur pouvait croître, muter et engloutir
quelqu'un, ne lui laissant d'autre choix que de transmettre sa honte afin de ne plus être le seul à la supporter. (p. 359)
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Isra priait depuis ses sept ans , s'agenouillait à côté de Mama cinq fois par jour, entre le lever et le coucher de soleil. Ces derniers temps, elle attendait la prière comme un moment privilégié: elle avait hâte de se tenir à côté de Mama, épaule contre épaule, son pied frôlant celui de sa mère. Pour elle, c'était le seul contact physique de la journée. (p. 16)
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Je suis née sans voix, par un jour nuageux et froid à Brooklyn. Personne ne parlait jamais de ce mal. Ce n'est que des années plus tard que j'ai su que j'étais muette, lorsque j'ai ouvert la bouche afin de demander ce que je désirais : j'ai alors pris conscience que personne ne pouvait m'aider. Là d'où je viens, le mutisme est la condition même de mon genre, aussi naturel que les seins d'une femme, aussi impératif que la génération à venir qui couve dans mon ventre. Mais jamais nous ne vous l'avouerons, bien entendu. Là d'où je viens, on nous apprenait à dissimuler notre condition. On nous apprenait à nous réduire nous-mêmes au silence, on nous apprenait que notre silence nous sauverait. Ce n'est que maintenant, bien des années plus tard, que je sais que tout cela est faux. Ce n'est que maintenant, en écrivant cette histoire, que je sens venir ma voix.
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