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Citations de Eugen Ruge (37)


Le communisme, Charlotte, c'est comme la croyance des anciens Aztèques : il est assoiffé de sang.
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Quand elle fermait les yeux, elle savait déjà comment elle se sentirait à la fin de cette journée, elle sentait ses joues figées par les faux sourires, elle sentait les relents de mayonnaise qui remontaient de son estomac après qu'elle avait écumé le buffet par ennui, elle sentait le goût d'aluminium du cognac servi dans ces gobelets de couleur.
Quoiqu’il en soit, elle n'aimait pas aller chez ses beaux-parents et la seule idée de devoir y aller lui était désagréable. Elle détestait les meubles lourds et sombres, les portes, les tapis. Tout dans cette maison était lourd et sombre.
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"Allez, viens, Melitta. Bois un cognac avec nous", dit Irina.
Mais Melitta ne voulait pas de cognac. Plutôt de l'eau. Et maintenant qu'Irina avait commencé à prendre un peu la nouvelle sous son aile, elle se sentit offensée. C'était quoi, cette attitude ! Faisait-elle partie en plus de la ligue anti-alcoolique ? Végétarienne et anti-alcoolique !
"Bon, eh bien, dans ce cas nous allons boire tous seuls", dit Irina.
Les deux jeunes gens échangèrent un regard et soudain Irina comprit.
Elle comprit que cette femme, cette femme à l'apparence anodine, avec ses jambes courtes et ses yeux perçants, avec ses ongles qui n'étaient pas particulièrement bien soignés et sa coiffure qui ne ressemblait à rien, que cette femme était en train de faire d'elle, Irina Petrovna, à peine cinquante ans, une grand-mère.
_ C'est pas vrai, lâcha Irina.
_ Maman, dit Sacha, tu fais comme si c'était une catastrophe.
_ Qu'est-ce qui se passe ? demanda Kurt.
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Quelle ironie du sort quand même, se dit Alexander, que la déchéance de Kurt ait justement commencé par la perte de la parole. Kurt, l'orateur. Kurt, le grand raconteur d'histoires. Tout le monde était suspendu à ses lèvres quand il racontait ses histoires, monsieur le professeur ! Avec ses anecdotes. C'est drôle : dans la bouche de Kurt, tout devenait anecdote. Peu importe ce qu'il racontait - même quand il racontait comment il avait failli crever dans le camp - il y avait toujours une saillie, un bon mot. Il y avait eu... ! Passé archi-lointain. La dernière phrase que Kurt avait pu prononcer correctement avait été : "J'ai perdu l'usage de la parole."
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- Sa beauté, dit Adrian, vient de ce que l'effroi est contenu par l'esthétique de la forme.
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Kurt mangeait, bouffait pour vivre. Manger = vivre. Cette formule, se disait Alexander, il l'avait apprise dans le camp de travail - de façon indélébile. Une fois pour toutes.
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Nadejna Ivanovna écoutait avec respect même si elle ne comprenait pas grand chose, elle se renversa dans son fauteuil, son regard glissa vers la grande fenêtre pendant que l'orateur retraçait la vie de Wilhelm, la nuit commençait à tomber, la lumière n'éclairait plus que la cime des arbres, les feuilles badinaient sans bruit, et Nadejna Ivanovna crut sentir la brise du soir, cette fraîcheur sur le visage quand on avait rassemblé les braises des fanes de pomme de terre et que l'on rentrait au village d'un pas lent... Quand la récolte était finie, à la mi-octobre, il y avait parfois déjà de la neige mais il ne faisait pas encore froid, et on se sentait bien, tout le monde avait rentré ses pommes de terre, c'était le bon moment pour faire un peu la fête, la veille ils avaient fait des pelmeni tous ensemble, et on chantait, on dansait, et quand on avait bien bu on chantait encore des chansons tristes, et tout le monde se mettait à pleurer et on s'embrassait, ma foi, et on se mettait à danser, c'était comme ça à Slava, se disait Nadejna Ivanovna, à tel point qu'elle en aurait presque oublié d'applaudir à la fin du discours, au moment où l'homme remettait sa décoration à Wilhelm.
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Il pensera à Christophe Colomb qui à rapporté le hamac en Europe, et l'idée qu'il pourrait s'agir là de l'un des plus grands malentendus de l'histoire entre les deux civilisations - le fait que Christophe Colomb en voyant les hamacs indiens n'y ait rien vu d'autres que la possibilité d'entasser des marins dans un bateau-, apparaitra un instant à Alexander comme une grande découverte.
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Oui heureusement il y a l'arbre généalogique qui permet de s'y retrouver, j'y suis revenue régulièrement pendant la lecture de cette histoire familiale. Je ne dis pas que j'ai été captivée mais j'ai lu avec envie de savoir mais aussi d'en savoir plus. Le contexte historique est connu , il reste pourtant des points obscurs, la grand- mère et ses filles qui ont erré jusqu'au koulak, les fils de Wilhelm au goulag pour un complot anecdotique, le bannissement de Kurt mais il revient, le retour tardif et les affectations des Wilhelm et Charlotte.....J'ai vraiment l'impression de n'avoir pas tout compris !
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Après le troisième chapitre, le style se délite. On a l'impression de lire des notes pour un livre à venir. Explication : l'éditeur aurait proposé un contrat à la lecture des premières pages de ce premier roman. Ensuite un prix littéraire, et roule l'opération commerciale... Dommage car le début est remarquablement bien écrit. Ah ! l'argent !
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Les trois premiers chapitres sont splendides. Les personnages sont bien décrits, le style épouse leurs façons de penser et l'auteur fait preuve d'une lucidité, d'un cynisme réjouissants. Après cela se gâte. On a l'impression qu'il s'agit d'un canevas pour un livre à écrire. Peut-être cela correspond-il au moment ou un éditeur, enthousiasmé par les premières pages de ce premier livre, lui a fait signer un confortable contrat ? Le reste est une opération commerciale...
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Pour ce mètre de science, Kurt avait travaillé dur pendant trois ans. C'est pour ce mètre qu'Irina avait fait la cuisine et le lessive. C'est pour ce mètre que Kurt avait reçu des médailles et des décorations mais aussi essuyé des réprimandes et même un blâme de la part du parti, qu'il avait marchandé ses tirages avec les maisons d'éditions sans cesse aux abois par manque de papier, qu'il avait bataillé pour imposer des formulations et des titres, qu'il avait dû faire machine arrière ou parfois obtenu gain de cause à force de ruse et de ténacité et maintenant tout cela était bon pour le REBUT.
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Elle se rappela qu’il y a très longtemps (…) une voyante lui avait prédit son avenir en lisant dans ces mains délicates ou presque rien n’était encore imprimé, et elle lui avait prédit la prospérité et le bonheur – et c’était bien ce qui était arrivé. Elle avait eu sa propre maison, sa propre petite exploitation et même une vache pie, marron et blanche et elle l’avait appelée Marfa en l’honneur de sa mère qui ne vivait plus. Oui. Tout était simple.
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PTACIIH, d. 146, on. 2, A. 38 Nous avons unifié l'Etat de telle maniere que toute partie qui se sépare de l'entité socialiste, non seulement inflige des dommages à celle-ci mais ne peut exister seule, livrée à elle-même sans tomber un jour ou l'autre sous le joug étranger. Celui qui tente de détruire cette unité de l'Etat socialiste est un ennemi, celui qui s efforce d'en séparer une partie ou une nationalité est un ennemi juré de l'Etat et du peuple del 'URSS. Et cet ennemi füt-il un ancien bolchevik, nous l'éliminerons ainsi que ses parents et sa famille. Celui qui, par ses actions ou en pensée, oui, même en pensée, agit contre l'unité de l'Etat socialiste Sera impitoyablement éliminé. A la destruction de tous les ennemis, jusqu au dernier, à la destruction des ennemis et de leur parenté!

Toast de Staline le 7 novembre 1937, pour le vingtième anniversaire de la révolution d'Octobre, lors du repas chez Vorochilov.
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Alexander réchauffa le repas de son père. Micro-ondes, remettre le
fusible. Kurt restait debout à côté de lui et regardait d’un air
intéressé.
— Tu as faim ? demanda Alexander.
— Oui, dit Kurt.
— Tu as toujours faim.
— Oui, dit Kurt.
Il y avait du goulasch accompagné de chou rouge (depuis que Kurt
avait failli s’étrangler avec un morceau de viande, on ne lui donnait
plus que des choses coupées très fin). Alexander se prépara un café.
Puis il sortit le goulasch du micro-ondes et le posa sur la nappe en
toile cirée.
— Bon appétit, dit-il.
— Oui, dit Kurt.
[…]
Kurt n’était plus capable de rien. Ne pouvait pas parler, ne pouvait
plus se laver les dents. La seule chose que Kurt savait encore faire,
se dit Alexander, la seule chose qu’il faisait encore de son plein gré,
la seule chose qui l’intéressait vraiment et pour laquelle il recourait
à l’ultime part de ruse dont il était capable, c’était manger. Absorber
de la nourriture. Bouffer. Kurt ne mangeait pas avec plaisir. Kurt ne
mangeait pas parce qu’il trouvait ça bon (ses papilles, Alexander
en était convaincu, étaient totalement détruites par le tabac de la
pipe, qu’il avait fumée pendant des dizaines d’années). Kurt mangeait,
bouffait pour vivre. Manger = vivre. Cette formule, se disait
Alexander, il l’avait apprise dans le camp de travail – de façon indélébile.
Une fois pour toutes. L’avidité avec laquelle Kurt mangeait,
avec laquelle il se fourrait des morceaux de goulasch dans la bouche,
n’était rien d’autre qu’une volonté de survivre
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Il se balance légèrement, se poussant de temps en temps du bout des doigts sur la rambarde de la terrasse. Les sonorités d'Allemagne du Sud qui arrivaient parfois de la grande table installée de l'autre côté se sont tue. Fin aussi les cris et les rires montant parfois du village, la rumeur des moteurs de voiture, les voix fantomatiques de la radio apportées de temps à autre par le vent, et les cliquetis affairés venus de la cuisine de l'auberge. Même les palmiers ont cessé de bruire. Le monde semble s'être arrêté un instant dans la canicule de cet après-midi. On entend seulement le grincement régulier des cordages. Et la rumeur lointaine et indifférente de la mer. Etat de lévitation. Passivité embryonnaire.
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