Citations de Georges Simenon (3601)
Je ne peux pas jurer qu’ils couchent ensemble. Ce qui est sûr, c’est qu’ils font bien la paire et qu’ils n’ont pas besoin de parler pour se comprendre. Cela se sent tout de suite.
— On a l’impression d’une vraie femme, je ne sais pas si vous comprenez ce que je veux dire, d’une femme qui est faite pour aimer un homme. Pas pour aimer d’une façon ordinaire, mais comme tous les hommes rêvent d’être aimés…
c’est une vraie bousculade, comme à une sortie d’école
« les psychopathes s’enferment dans un monde à eux, dans un monde de rêve qui a plus d’importance pour eux que la réalité ».
Elle n’en paraissait pas impressionnée et continuait à le regarder à la façon dont un enfant regarde un gros ours qui ne lui fait pas peur, mais qu’il n’en surveille pas moins du coin de l’œil.
Il distinguait de fines pattes d’oie au coin des paupières mais, au lieu de la vieillir, cela lui donnait un charme de plus. Ses yeux gris bleu avaient la douceur pétillante des yeux de myope.
Elle paraissait la quarantaine, elle aussi, cette quarantaine particulière aux Parisiennes qui se soignent et, dans sa voix comme dans ses attitudes, on sentait la personne qui est à l’aise partout et dans toutes les circonstances.
Si tous ceux qui ont un comportement bizarre devaient devenir des meurtriers ou des victimes, on trouverait plus d’appartements libres qu’aujourd’hui.
L’homme était libre de s’en aller, puisque personne ne lui avait demandé de venir.
jeta un coup d’œil à la fenêtre derrière laquelle il n’y avait que du gris pâle. On aurait dit une toile de fond déjà usée dans un théâtre de province.
Il sourit alors d’un sourire mécanique, signe de timidité sans doute.
Sa femme, à présent. Cela signifiait qu’ils avaient atteint tout doucement l’âge des menus ennuis, des petites réparations nécessaires, un peu comme les autos qui, tout à coup, ont besoin de passer presque chaque semaine au garage.
Seulement, pour les autos, on achète des pièces de rechange. On peut même installer un nouveau moteur.
Je crois que je vais me faire maigrir un peu, avait-elle lancé en plaisantant. Je commence à éclater dans mes robes…
Le ciel, à l’unisson des consciences et des humeurs, était d’un gris neutre, du même gris, à peu près, que les pavés. Il faisait froid, pas assez pour que ce soit pittoresque et qu’on en parle dans les journaux, un froid déplaisant, sans plus, dont on ne s’apercevait qu’après avoir marché un certain temps dans les rues.
On était le 10 janvier. Les gens, après les fêtes, vivaient au ralenti, avec une vague gueule de bois, la perspective du terme proche et des déclarations d’impôts.
Il y a longtemps que Prou est son amant ?
— Son amant, je n’en sais rien… Mais voilà bien deux ans qu’il couche dans la maison…
— Et quelle était, depuis lors, l’attitude de Planchon ?
Le vieux peintre eut un sourire goguenard.
— L’attitude d’un cocu, quoi !
— Vous voulez dire qu’il acceptait de bon cœur la situation ?
— Bon cœur ou pas bon cœur, il n’avait pas grand-chose d’autre à faire…
— Vous êtes donc au courant de ce qui se passe dans la maison de la rue Tholozé ?
— Cela dépend…
— Cela dépend de quoi ?
— De ce que vous ferez de ce que je pourrais dire…
— Je ne comprends pas…
— Si c’est pour en parler ensuite à la patronne ou à M. Roger, je ne suis qu’un ouvrier qui ne sait rien… À plus forte raison si je dois répéter mes paroles devant le tribunal…
— Pourquoi le tribunal ?
— Parce que, quand on convoque les gens ici, c’est qu’il se passe quelque chose de pas catholique, non ?
Tu m’as dit une fois qu’il est rare que les gens qui parlent beaucoup agissent.
— Rare, certainement… Mais cela arrive…
Soyez calme, monsieur Planchon…
Il ne trouvait que de ces formules bêtes dont on se sert pour les condoléances.
Il y avait un décalage, certes. Alcool ou pas alcool, l’homme s’exaltait, s’enfonçait délibérément dans son désespoir.