Citations de Gilles Boyer (37)
Arriver à Matignon , c’est comme se marier en sachant que ça va mal finir .
Elle avait en elle cette imperceptible sécheresse des femmes qui ne seraient jamais mères, ce qui en faisait, assurément, une redoutable politique : un cœur d’homme dans un corps de femme.
La démocratie interne est une invention récente dans les partis.
C'est tout sauf silencieux, la mer.
Parfois, je prends le temps de lever la tête et d'observer les merveilles de l'endroit. C'est le plus bel endroit pour travailler. Probablement aussi le moins fonctionnel. Je ne connais pas de bâtiment plus inadapté à la pratique du travail gouvernemental, à la pratique de tout travail, pour dire la vérité. Pour le prestige, je vois bien : les visiteurs étrangers sont tellement contents de venir ici et de se faire photographier sur le perron. Mais pour bosser, quel enfer !
Une campagne présidentielle, ça se prépare. Le Patron était prêt. Moi aussi. J'allais le faire gagner. J'allais faire en sorte que tout se passe bien, que tous ceux qui, avec moi, dans l'ombre, portaient sa candidature soient au meilleur d'eux-mêmes. Et puis rien ne s'est passé comme prévu. Aujourd'hui, après ce déchaînement de violence, je ne suis plus sûr de rien. Ni de ses chances, ni de lui, ni de moi. »
Je suis un apparatchik. Dans mon monde, les politiques et les apparatchiks vivent ensemble. Ni les uns, ni les autres ne peuvent survivre seuls. L’apparatchik, c’est un guerrier qui sert un maître, un professionnel qui connaît son milieu, qui utilise ses armes, qui pare les coups qu’on veut porter à son patron. C’est un mécanicien, un organisateur, un inspirateur, un souffleur. C’est le bras, les oreilles, les jambes et parfois le cerveau du politique.
Un jour quelqu' un m' a dit "t' es con, t'aimes tout le monde ". Comme s' il fallait détester la terre entière pour être intelligent.
La peur de partir, qui prive de sommeil, bientôt remplacée par une peur pire encore : celle de rester, encore et toujours, pour tenter de remplir le tonneau qui fuit par tant de trous, ce mauvais rêve, ne jamais être libéré, être condamné à perpétuité à ce job impossible que tous ont tant désiré.
Les jardins étaient petits, tous séparés par des plantations de buis ou de haies revendicatives/ L'horticulture semblait illustrer le cadastre, comme si le règne végétal avait été contraint de rendre un hommage contre nature à la propriété privée.
Nous avions tellement de mal à cicatriser les plaies de la primaire que chaque détail serait examiné à la loupe. La tension était encore vive, et pourtant, il fallait qu’elle soit impalpable.
Cette femme, objet de toutes nos détestations, aurait donné cher pour être ailleurs, comme c’est souvent le cas des hommes ou femmes politiques de haut niveau.
Dans mon monde, on trouve beaucoup de gens qui sont là pour des raisons qui n’ont pas grand-chose à voir avec leur talent politique : des femmes parce qu’il en faut, des veules parce qu’il y en a, des flatteurs parce qu’ils ne représentent rien, et que rien, en politique, c’est souvent moins dangereux que quelque chose. Tous ceux-là, je fais avec. Mais ceux que je ne peux pas supporter, ce sont les apparatchiks qui se prennent pour des politiques.
Le temps politique et le temps de la planète sont incompatibles.
Du reste, quand on fait de la politique, si on n'est même pas capable de s'assurer un résultat tout au moins dans son parti, il est urgent de penser, soit à changer de parti, soit à changer de métier.
Quelques minutes auparavant, il avait ouvert le lien contenu dans le mail, et le premier moment d'effondrement passé, il s'était aussitôt souvenu de sa théorie des 20 000 jours.
Premier Ministre, c'est déjà très bien ! Pourquoi vouloir devenir Président ? Sans doute parce que les Présidents les ont martyrisés, et qu'ils ont eu envie d'en martyriser d'autres à leur tour. (p. 108)
Je ne sais pas pourquoi, J' ai toujours senti que la mort rodait dans cet endroit. J' y pense précisément au moment d' en partir, mais je me fais sûrement des idées : après tout, la mort rôde dans la vie, tout simplement, ici comme ailleurs.
Ceux qui vivent au-dessus n' ont aucune idée de ce qui se joue à l' étage au-dessous.
Pour Lartigue cependant, le monde se divisait entre ceux qui exercent le pouvoir et ceux qui l'incarnent. L'exercer, c'était décider, mettre en place, exécuter. L'incarner, c'était faire des papouilles aux électeurs, prononcer des discours écrits par d'autres, déposer des gerbes le 11 novembre. Et tous ceux qui délaissaient le premier monde, où, dans la discrétion, on gouverne la France, pour rejoindre le second, dans lequel prévalent l'hystérie et petits phrases, le laissaient franchement dubitatif.
Alexandre savait trop bien qu'un petit mot à chacun et une main sur l'épaule valent, dans un magasin, dans un salon, sur un marché ou dans un train, bien plus que tous les discours d'estrade. En politique, donner l'impression que l'on sait prendre son temps, alors qu'il s'agit au fond de le perdre, est un art consommé et une pratique nécessaire.