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Citations de Giosuè Calaciura (105)


En plongeant le long de la côte, on prend tout de suite un poulpe, à la main. Inutile de le rapporter à terre pour le cuisiner : les plus malins le remettent dans l'eau avec un poids, entre la Karace et la grotte chaude de Nikà. Tout au fond, la source thermale est comme une marmite à la limite de l'ébullition. à quatre-vingt-dix degrés. Le poulpe, au bout de quelques minutes, est cuit. C'est ça, la pêche, à Pantelleria.
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Ce devait être un spectacle, cette île anthracite tout éclose de coton blanc, comme une vision depuis la mer, une promesse de paradis pour les marins de toutes les religions.
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"Je me souviens comme d'un rêve de la plaine solaire aux roches volcaniques, de la mer éternelle, de la maison peinte à la chaux et des marches de son perron, des fenêtres d'où l'on voyait, les nuits sans vent, les ailes lumineuses des phares d'Afrique."
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Le SOS de très jeunes insulaires isolés ayant perdu la qualité anthropologique de l'autarcie, de l'indépendance par rapport aux autres et à l'horizon, de l'autosuffisance, laquelle n'est pas seulement une question alimentaire, mais aussi la capacité de ne jamais se sentir seul.
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Ces protagonistes et leurs comparses bouleversent le marché, le rendent économiquement impraticable : seul un tout petit nombre de personnes peuvent se permettre un dammuso à Pantelleria. L'île devient sélective, une sorte de club, mais aussi une troupe ambulante qui se donne rendez-vous à Pantelleria directement depuis les magazines des salles d'attente.
C'est L'île des stars.
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Le câprier est une idée de soi-même, la conscience de sa propre histoire, de sa sagesse et de son ardeur au travail. C'est un retour, dans le cadre d'une modernité acceptable, vers la dignité du travail manuel.
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Peut-être est-il aussi la métaphore de la condition humaine. Ce qui l'est sans aucun doute, c'est la ténacité fleurie des câpriers de Pantelleria, agrippés à la pierre comme des reptiles végétaux, feuilles et fruits de serpents lunaires, endémiques et invasifs, plus indigènes et anciens que le zibibbo, capables de trouver l'humidité en eux-mêmes, dans les alvéoles de la lave que le soleil fait grésiller.
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Dans les années soixante-dix, les ventes et achats de dammusi ont commencé, entre les Pantesques, des paysans de la diaspora qui avaient cherché sur le continent des emplois et un futur pour leurs enfants, et la bourgeoisie cultivée qui découvrait la Sicile en regardant plus loin que les cartes postales de Taormine et Cefalù. C'était encore l'époque du tourisme ethnologique des lieux et des choses. Pour quelques millions de lires, les dammusi qui conservaient les histoires des familles changeaient de mains, changeaient de signe anthropologique. Ce n'était pas encore un "projet touristique", car l'île mère elle-même n'avait pas encore compris que le boom économique avait pour corollaires les vacances estivales et le séjour à la mer.
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Ce sont parmi les vignes les plus vieilles du monde, leurs racines très profondes s'enfoncent jusqu'à douze mètres, elles vont chercher l'humidité et les sels, comme d'antiques fondations plantées pour empêcher l'île de dériver.
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Et il en meurt, des paysans, sans autre relève que les mille Roumains (sur moins de huit mille habitants) embauchés dans les plus grandes et renommées entreprises vinicoles pour s'occuper de la racìna, le muscat d'Alexandrie, le zibibbo d'autrefois, taillé "en gobelet", dont la culture est extrêmement difficile, car il n'y a pas de véhicules ni d'instruments adaptés au terrain de Pantelleria, tout en ravines, cuddìe et terrasses. Une agriculture travaillée avec les seules mains, lesquelles jour après jour renoncent, se soustraient au labeur. Souvent pour rester au fond des poches, ou prendre un billet d'avion, l'aller seulement.
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Ils attendent l'automne comme une libération : libération des vacanciers, des calmes plats de l'été, de la chaleur africaine.
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C'est un face-à-face exténué entre la peine de la vie et la simplicité de la mort.
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La voilà, l'île, noire de lave, verte de vignobles, dorée de zibibbo, jaune de soufre veiné de rouge par la chimie volcanique, bleue et indigo de mer. La descente vaut à elle seule le reste du voyage. Voilà le miroir de Vénus, on l'appelle u bagnu, bleu comme l'œil unique d'un cyclope fou, écarquillés vers le ciel en une interrogation éternelle, sans réponse.
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Mais ces quatre mots d'anglais nautique, les marins ont réussi à les recycler en un condensé de baratin amoureux pour don Juan des mers qu'ils baragouinent tout au long des six heures de la traversée dès que, ayant évité le Stagnone et Isola Grande, et laissant Marsala sur la gauche, on fonce tout droit vers le coeur du canal. Canal de Sicile et de Tunis, d'Europe, et d'Afrique, du monde occidental, et aussi de tous les autres mondes qui pointent tenacement leur proue vers le seul point cardinal permis : le Nord, toujours.
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Ils la sentirent encore toute chaude du four, croquante de pierre ponce et d'obsidienne, vaporeuse d'anhydride carbonique et de souffles évoquant un chaos inextinguible, persistant, latent sous la croûte de consistance illusoire.
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Enfin, lorsqu’on arrive au port en évitant les vestiges à fleur d’eau de la jetée carthaginoise qui semblent rappeler que tout accostage à Pantelleria doit être fortement désiré, avec le choc annonciateur du noir d’obsidienne et du vert phosphorescent du zibibbo – nommé ailleurs muscat d’Alexandrie – s’impose ‘langoisse inexprimable d’avoir posé le pied sur les limites ultimes de la Création et dans l’atelier où la Nature expérimente son acte définitif tout en se mettant elle-même à l’épreuve. Alors, pour certains, le malaise se transforme en véritable panique.
À la jetée, malgré quelques touches, le poisson reste au loin. La bonace est chose rare à Pantelleria, elle est annoncée par des fantômes brumeux qui ondoient au coeur de la mer, fluctuent à la limite de l’horizon sans suivre aucun cap, sans loi, poussés par de soudains caprices, jeux de la physique en équilibre entre densité, température et humidité.
La bonace est l’ennemie des pêcheurs de jetée. Le poisson sédentaire du port s’aventure, par curiosité ou pour la chasse, dans des environs plus frais. C’est seulement au premier souffle du mistral ou du libeccio, au premier clapot à la surface de l’eau que le poisson rentre chez lui au port et que le vent nouveau efface les mauvaises pensées météorologiques des ectoplasmes de brume.
La Méditerranée étire ses vents et ses courants au gré de ses propres routes maritimes.
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Différente de toutes les autres par sa conformation et son âme, Pantelleria est une île de pôles magnétiques qui, se repoussant et s’attirant, font qu’elle continue à flotter. Contradictions palpables, parfois jusqu’au refus. Au môle, durant les après-midi de malura de poisson parce que le courant est contrariuso, ou parce que même les créatures aquatiques sont effrayées par les fonds sous-marins, les pêcheurs à la ligne se racontent des légendes de voyageurs tout juste débarqués qui, pris d’une soudaine sensation de malaise, ont traîné leurs valises à roulettes sur toute la longueur du quai, jusqu’aux bureaux de la Siremar pour y acheter un billet de retour par le même ferry vers l’île mère, vers Trapani, avec l’idée incongrue que la Sicile semble tout à coup plus rassurante. C’est là l’acmé du malaise qui n’a fait que croître depuis que l’île a été en vue, comme un reflet de la fée Morgane au début, limite bleutée du monde connu, car au-delà de l’île s’ouvrent et se ferment les portes d’Hercule de l’Afrique : on en perçoit les odeurs, bouleversantes ; la proximité de ce continent pèse sur la densité de l’air, chaque goutte d’eau transporte l’écho d’une tragédie qui se transmet au jeu des marées, aux vagues qui se creusent.
Depuis les ferries, on devine très vite qu’on n’a pas affaire à la mer apprivoisée de nos archipels à portée d’hydroglisseur, là où les agaves se reflètent tels des Narcisse dans les tranquilles petites anses de baignade estivale, où un cri suffit pour battre le rappel des enfants à l’heure du déjeuner sur la terrasse du restaurant Miramare, construit à même la plage. Ici, il n’y a pas de plages. La mer, entre l’île mère et Pantelleria, fait percevoir en peu de mots, à la sicilienne, qu’elle est capable de fureurs océaniques parce que les aventures qu’elle vit sont à la mesure des deux continents dont elle est la sentinelle.
Le malaise ressenti à l’approche de l’île croît à la vue de la matérialité absurde des huit cent trente-six mètres du volcan de la Montagna Grande qui apparaît et disparaît dans la chevauchée des nuages libres, dont la migration heureuse n’est freinée par aucun poste de douane. Et puis, en approchant encore, viennent les frissons provoqués par la découverte du Monte Gibele et de toutes les cuddìe, brûlées ou non, les collines de Pantelleria, excroissances tumorales d’une Création indécise qui semblent éclater encore dans l’ébullition des temps primordiaux.
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L’île de Pantelleria ne sera jamais la proie du tourisme de masse et de ses menaces, ni des foules qui débarquent pour un séjour éclair, ni des ferries rapides et corsaires qui vomissent des visiteurs hébétés et épuisés le temps d’un plongeon, d’un déjeuner de produits typiques et du shopping en bord de mer pour repartir avec quelques obsidiennes et le tee-shirt imprimé d’un profil insulaire évanescent.
La ville de Trapani restaurée, comme les Égades presque voisines – ces îles découvertes à la télévision en 2005 lors de l’America’s Cup, plus caribéennes que les Caraïbes, mais autrefois perçues comme trop rudes par la vulgate vacancière -, voilà des lieux qui ont infléchi leur destin en s’ouvrant au saccage d’août. Et aussi à ce sentiment d’abandon, en septembre, lorsque, avec les premiers nuages ouatés venus du nord, arrive l’amère certitude de ne vivre que le temps d’une saison.
Le centre historique de Trapani est devenu un salon raffiné. À Levanzo, à Favignana, à Marettimo, les habitants ont fait un peu d’argent. La nouvelle richesse des Égades se perçoit même dans un soupçon de redistribution publique, la grand-rue auparavant goudronnée est à présent pavée d’une pierre plus raffinée, le long des quais les réverbères ont été repeints, les voitures et les motos, autrefois inexistantes ou interdites, se fraient aujourd’hui une place jusque dans le bourg de la minuscule île de Levanzo. Et des hélicoptères atterrissent, appartenant aux nouveaux propriétaires qui ont acheté les zones les plus prisées de l’archipel.
Dès l’automne les Égades se figent, elles ont perdu les saisons, désormais aplaties en un mois d’août perpétuel, chimère des tour operators, des vacanciers et des habitants, carte postale définitive d’une illusion sous formol.
À partir de septembre, les îles deviennent une fiction.
Mais, Pantelleria, non, elle n’en deviendra jamais une malgré le cirque des atterrissages et décollages de l’été à l’aéroport de Margana, malgré l’élastique toujours trop lâche entre présences saisonnières et désirs des bookmakers touristiques, malgré le développement de la plongée sous-marine et la découverte du patrimoine gastronomique et viticole : Pantelleria possède encore toutes ses saisons.
La Nature de l’île crie sous l’effort, tiraillée de part et d’autre, fouettée et disputée. Arrivant par la mer ou par le ciel, on sent la tension et le contraste qui font de Pantelleria une île unique dans la Méditerranée, étrangère et pourtant capable de refonder la perception que nous avons de cette mer redevenue limite et frontière, mer tragique, hécatombe pour ceux qui viennent du sud, rassurant grillage liquide pour ceux qui observent depuis le nord.
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"Sei un angelo" gli diceva la mamma morta con la voce della pioggia.Cadeva a scrocio in un tintinnio di monete d'oro.Non aveva mai visto l'oro ,ma quella voce brillava.
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... le jour où naquit Mimmo, la brume avait la consistance des contes. C'est ce que lui avait raconté sa mère.
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