Citations de Graham Swift (227)
"J'étais orpheline, révélait-elle pour la énième fois. Je n'ai jamais connu ni mon père ni ma mère. Ni mon vrai nom. Si tant est que j'en aie jamais eu un. Cela m'a toujours paru la condition idéale pour devenir écrivain - surtout romancière. N'avoir aucune référence. Partir avec une feuille vierge ou, plutôt, être soi-même une feuille vierge. N'être personne. Comment peut-on devenir quelqu'un si l'on a pas d'abord été personne ?"
Un miroir peut-il garder une image? Peut-on s'y regarder et voir quelqu'un d'autre? Peut-on passer de l'autre côté du miroir et être quelqu'un d'autre?
J'étais orpheline. [...] Cela m'a toujours paru la condition idéale pour devenir écrivain - surtout romancière. N'avoir aucune référence. Partir avec une feuille vierge ou, plutôt être soi-même une feuille vierge. N'être personne. Comment peut-on devenir quelqu'un si l'on n'a pas d'abord été personne ?
Les mots étaient comme une peau invisible qui enveloppait le monde, qui lui conférait une réalité. Pourtant vous ne pouviez pas dire que le monde n'existerait pas, ne serait pas réel si vous supprimiez les mots. Au mieux, il semblait que les choses pouvaient remercier les mots qui les distinguaient les unes des autres et que les mots pouvaient remercier toute chose.
Comment peut-on devenir quelqu'un si l'on n'a pas d'abord été personne ?
"Oh, vous êtes toute pâle, Jane !". Il lui vint à l'esprit que ce genre de choses n'arrivait que dans les livres. Les gens ne "devenaient tout pâles", ils n'avaient des visages "menaçants", des yeux qui "lançaient des éclairs" ou le sang qui "se glaçait dans leurs veines" que dans les livres.
"Fairchild est l'un de ces noms que l'on donnait aux enfants trouvés. De nombreux Fairchild, Goodchild, Goodbody et ainsi de suite sortaient des orphelinats, une façon de leur assurer un départ favorable dans la vie, je présume.
"Oh, les livres pour garçons, les livres d'aventures, voilà ce que j'aimais. Qui a envie de lire ces histoires à l'eau de rose pour filles ? "
Les bonnes devaient sans cesse épousseter, astiquer tout ce bazar, en prenant garde de ne rien déplacer. Enfin... une coiffeuse d'homme était plus facile à nettoyer que celle d'une femme.
Si vous grandissiez entouré de ce genre d'attirail ou d'attributs, sans doute était-il alors facile d'avoir confiance en vous. Sans parler du contenu de sa garde-robe, dans le dressing attenant à sa chambre ...
Jack n'était pas du genre à se fiancer, encore que s'il n'accompagnait pas Ronnie et Evie au Walpole Arms, c'était d'ordinaire parce qu'il courtisait ailleurs quelque jeune femme. Parfois celle-ci se joignait à eux. Elle n'avait que trop conscience de son extériorité face à ce trio, et donc de la précarité de son statut, mais comme Evie le fit un jour observer à Ronnie : "Au moins, elle a eu droit à son tour." Puisque ces jeunes femmes de passage se ressemblaient au point de n'en faire plus qu'une, Ronnie et Evie finirent par toutes les baptiser "Flora". Qui est Flora, cette semaine ? Peu importaient apparemment leurs véritables prénoms.
De toute façon, si vous étiez une bonniche, on ne vous accordait guère le loisir de fêter votre anniversaire - à supposer que quelqu'un le connaisse. On ne vous donnait pas congé pour la journée. Etre une bonne, c'était un peu comme être une orpheline : vous viviez dans la maison d'autrui, vous n'aviez pas de chez vous.
L'utilité des bibliothèques, se disait-elle parfois, tenait moins au fait qu'elles contenaient des livres, qu'à celui qu'elles préservaient cette atmosphère sacrée de "prière de ne pas déranger" d'un sanctuaire masculin.
Les gens lisent des livres pour échapper à eux-mêmes, pour oublier leurs problèmes, n'est-ce pas ?
Mais qu’aurait-elle fait d’elle-même, de sa vie, si ell n’avait pas été une bonne ? Elle supposait - et son visage ridé s’épanouissait à nouveau - que c’était là une situation très fréquente chez les êtres humains. D’être dérouté, de ne pas savoir que faire de soi.
Car la vie elle-même pouvait être une aventure. Tel était le message sous-jacent……de tous ces ouvrages. Y avait-il, en fait une autre façon de vivre ? Et l’aventure ne devait pas nécessairement comporter des pirates ou des situations dont on se tirait de justesse. Elle pouvait être une permanente prise de risque mentale. Supposer, imaginer.
On dit que vous êtes moins égoïstes, que vous avez appris à partager. On dit que vous êtes le contraire: votre égoisme est programmé pour deux. Il n'est rien que vous ne feriez l'un pour l'autre dans la lutte éternelle avec les non-jumeaux. A moins, encore une fois, que derrière vos sourires interchangeables (mais je n'ai jamais trouvé vos sourires identiques), vous ne soyez en réalité en guerre l'un avec l'autre: une rivalité sans limites entre enfants.
On dit que vous constituez une race a part, une tradition séparée. Vous n'êtes pas comme le reste d'entre nous, que ce soit dans votre relation au monde ou l'un avec l'autre. Vous pensez que tout ça, c'est du blabla? Une compréhension spéciale se forme sûrement lors de ce double confinement dans la matrice. Cela, du moins, ne ressemble pas à l'expérience commune, où il n'y a de la place que pour un et où notre arrivée sur la scène est un grand numéro de braillements en solo. Moi! Moi! Moi!
Un mot n'était pas une chose, loin de là. Une
chose n'était pas un mot. Cependant, d'une cer
taine façon, les deux
choses
devenaient
inséparables. Tout n'était-il qu'une pure et
simple fabrication? Les mots étaient comme une
peau invisible qui enveloppait le monde, qui lui
conférait une réalité. Pourtant vous ne pouviez
pas dire que le monde n'existerait pas, ne serait
pas réel si vous supprimiez les mots. Au mieux,
il semblait que les choses pouvaient remercier
les mots qui les distinguaient les unes des autres
et que les mots pouvaient remercier toute chose.
It was about being true to the very stuff of life, it was about trying to capture, though you never could, the very feel of being alive. It was about finding a language. And it was about being true to the fact, the one thing only followed from the other, that many things in life—oh so many more than we think—can never be explained at all.
And it was what she would have to do to become a writer: cross an impossible barrier. And she too, she would come to understand this, would have to find a language, even though she had a language, since finding a language, finding the language—that was what, she would come to understand, writing really was.