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Citations de Gustave Flaubert (2964)


Son agonie commença. Un râle, de plus en plus précipité, lui soulevait les côtes. Des bouillons d'écume venaient aux coins de sa bouche, et tout son corps tremblait.
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Deux jours après la noce, les époux s’en allèrent : Charles, à cause de ses malades, ne pouvait s’absenter plus longtemps. Le père Rouault les fit reconduire dans sa carriole et les accompagna lui-même jusqu’à Vassonville. Là, il embrassa sa fille une dernière fois, mit pied à terre et reprit sa route. Lorsqu’il eut fait cent pas environ, il s’arrêta, et, comme il vit la carriole s’éloignant, dont les roues tournaient dans la poussière, il poussa un gros soupir. Puis il se rappela ses noces, son temps d’autrefois, la première grossesse de sa femme ; il était bien joyeux, lui aussi, le jour qu’il l’avait emmenée de chez son père dans sa maison, quand il la portait en croupe en trottant sur la neige ; car on était aux environs de Noël et la campagne était toute blanche ; elle le tenait par un bras, à l’autre était accroché son panier ; le vent agitait les longues dentelles de sa coiffure cauchoise, qui lui passaient quelquefois sur la bouche, et, lorsqu’il tournait la tête, il voyait près de lui, sur son épaule, sa petite mine rosée qui souriait silencieusement, sous la plaque d’or de son bonnet. Pour se réchauffer les doigts, elle les lui mettait, de temps en temps, dans la poitrine. Comme c’était vieux tout cela ! Leur fils, à présent, aurait trente ans ! Alors il regarda derrière lui, il n’aperçut rien sur la route. Il se sentit triste comme une maison démeublée ; et, les souvenirs tendres se mêlant aux pensées noires dans sa cervelle obscurcie par les vapeurs de la bombance, il eut bien envie un moment d’aller faire un tour du côté de l’église. Comme il eut peur, cependant, que cette vue ne le rendît plus triste encore, il s’en revint tout droit chez lui.

Première partie, Chapitre IV.
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Il fallait qu’elle pût retirer des choses une sorte de projet personnel, et elle rejetait comme inutile tout ce qui ne contribuait pas à la satisfaction immédiate de son cœur, étant de tempérament plus sentimental qu’artiste, cherchant des émotions et non des paysages
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Gustave Flaubert
L'artiste doit être dans son oeuvre comme Dieu dans la création, présent partout et visible nulle-part.
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Elle expira, ayant juste soixante-douze ans. (...) Félicité la pleura, comme on ne pleure pas les maîtres. (...) Dix jours après, (...) les héritiers survinrent. La bru fouilla les tiroirs, choisit des meubles, vendit les autres. (...) Le fauteuil de Madame, son guéridon, sa chaufferette, les huit chaises, étaient partis ! La place des gravures se dessinait en carrés jaunes au milieu des cloisons. Ils avaient emporté les deux couchettes, avec leurs matelas, et dans le placard on ne voyait plus rien de toutes les affaires de Virginie ! Félicité remonta les étages, ivre de tristesse.
Le lendemain il y avait sur la porte une affiche ; l'apothicaire lui cria dans l'oreille que la maison était à vendre.
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M. Lheureux revint à la charge, et, tour à tour menaçant et gémissant, manoeuvra de telle façon, que Bovary finit par souscrire un billet à six mois d’échéance. Mais à peine eut-il signé ce billet, qu’une idée audacieuse lui surgit : c’était d’emprunter mille francs à M. Lheureux. Donc, il demanda, d’un air embarrassé, s’il n’y avait pas moyen de les avoir, ajoutant que ce serait pour un an et au taux que l’on voudrait. Lheureux courut à sa boutique, en rapporta les écus et dicta un autre billet, par lequel Bovary déclarait devoir payer à son ordre, le Ier septembre prochain, la somme de mille soixante et dix francs ; ce qui, avec les cent quatre-vingts déjà stipulés, faisait juste douze cent cinquante. Ainsi, prêtant à six pour cent, augmenté d’un quart de commission, et les fournitures lui rapportant un bon tiers pour le moins, cela devait, en douze mois, donner cent trente francs de bénéfice ; et il espérait que l’affaire ne s’arrêterait pas là, qu’on ne pourrait payer les billets, qu’on les renouvellerait, et que son pauvre argent, s’étant nourri chez le médecin comme dans une maison de santé, lui reviendrait, un jour, considérablement plus dodu, et gros à faire craquer le sac.
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et le Gaulois, les lèvres collées contre les trous de sa tente, râlait d’épuisement et de mélancolie. Il songeait à la senteur des pâturages par les matins d’automne, à des flocons de neige, aux beuglements des aurochs perdus dans le brouillard, et fermant ses paupières. Il croyait apercevoir les feux des longues cabanes, couvertes de paille, trembler sur les marais, au fond des bois.
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— Où Monsieur va-t-il ? demanda le cocher.
— Où vous voudrez ! dit Léon poussant Emma dans la voiture.
Et la lourde machine se mit en route.
Elle descendit la rue Grand-Pont, traversa la place des Arts, le quai Napoléon, le pont Neuf et s’arrêta court devant la statue de Pierre Corneille.
— Continuez ! fit une voix qui sortait de l’intérieur.
[…]
— Non, tout droit ! cria la même voix.
[…]
— Marchez donc ! s’écria la voix plus furieusement.
[…]
De temps à autre, le cocher sur son siège jetait aux cabarets des regards désespérés. Il ne comprenait pas quelle fureur de la locomotion poussait ces individus à ne vouloir point s’arrêter. Il essayait quelquefois, et aussitôt il entendait derrière lui partir des exclamations de colère. Alors il cinglait de plus belle ses deux rosses tout en sueur, mais sans prendre garde aux cahots, accrochant par-ci par-là, ne s’en souciant, démoralisé, et presque pleurant de soif, de fatigue et de tristesse.
Et sur le port, au milieu des camions et des barriques, et dans les rues, au coin des bornes, les bourgeois ouvraient de grands yeux ébahis devant cette chose si extraordinaire en province, une voiture à stores tendus, et qui apparaissait ainsi continuellement, plus close qu’un tombeau et ballottée comme un navire.
Une fois, au milieu du jour, en pleine campagne, au moment où le soleil dardait le plus fort contre les vieilles lanternes argentées, une main nue passa sous les petits rideaux de toile jaune et jeta des déchirures de papier, qui se dispersèrent au vent et s’abattirent plus loin, comme des papillons blancs, sur un champ de trèfles rouges tout en fleur.
Puis, vers six heures, la voiture s’arrêta dans une ruelle du quartier Beauvoisine, et une femme en descendit qui marchait le voile baissé, sans détourner la tête.

Troisième partie, Chapitre I.
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Gustave Flaubert
Bonheur : as-tu réfléchi combien cet horrible mot a fait couler de larmes ? Sans ce mot-là, on dormirait plus tranquille et l'on vivrait à l'aise.
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Elle souhaitait un fils; il serait fort et brun, elle l'appellerait Georges; et cette idée d'avoir pour enfant un mâle était comme la revanche en espoir de toutes ses impuissances passées. Un homme, au moins, est libre; il peut parcourir les passions et les pays, traverser les obstacles, mordre aux bonheurs les plus lointains. Mais une femme est empêchée continuellement. Inerte et flexible à la fois, elle a contre elle les mollesses de la chair avec les dépendances de la loi. Sa volonté, comme le voile de son chapeau retenu par un cordon, palpite à tous vents; il y a toujours quelque désir qui entraîne, quelque convenance qui retient.
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Gustave Flaubert
Rodolphe s’était rapproché d’Emma, et il disait d’une voix basse, en parlant vite : – Est-ce que cette conjuration du monde ne vous révolte pas ? Est-il un seul sentiment qu’il ne condamne ? Les instincts les plus nobles, les sympathies les plus pures sont persécutés, calomniés, et, s’il se rencontre enfin deux pauvres âmes, tout est organisé pour qu’elles ne puissent se joindre. Elles essayeront cependant, elles battront des ailes, elles s’appelleront. Oh ! n’importe, tôt ou tard, dans six mois, dix ans, elles se réuniront, s’aimeront, parce que la fatalité l’exige et qu’elles sont nées l’une pour l’autre.
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Il ne faut pas toucher aux idoles: la dorure en reste aux mains
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Quelle meilleure chose, en effet, que d'être le soir au coin du feu avec un livre, pendant que le vent bat les carreaux.
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- [...] et si Madame aime le jardinage, elle pourra…
- Ma femme ne s’en occupe guère, dit Charles ; elle aime
mieux, quoiqu’on lui recommande l’exercice, toujours rester dans
sa chambre, à lire.
- C’est comme moi, répliqua Léon ; quelle meilleure chose,
en effet, que d’être le soir au coin du feu avec un livre, pendant
que le vent bat les carreaux, que la lampe brûle ?…
- N’est-ce pas ? dit-elle, en fixant sur lui ses grands yeux
noirs tout ouverts.
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Ce qui l’exaspérait, c’est que Charles n’avait pas l’air de se douter de son supplice. La conviction où il était de la rendre heureuse lui semblait une insulte imbécile, et sa sécurité : là-dessus de l’ingratitude. […]
Donc, elle reporta sur lui seul la haine nombreuse qui résultait de ses ennuis, et chaque effort pour l’amoindrir ne servait qu’à l’augmenter ; car cette peine inutile s’ajoutait aux autres motifs de désespoir et contribuait encore plus à l’écartement. Sa propre douceur à elle-même lui donnait des rébellions. La médiocrité domestique la poussait à des fantaisies luxueuses, la tendresse matrimoniale en des désirs adultères. Elle aurait voulu que Charles la battît, pour pouvoir plus justement le détester, s’en venger. Elle s’étonnait parfois des conjectures atroces qui lui arrivaient à la pensée ; et il fallait continuer à sourire, s’entendre répéter qu’elle était heureuse, faire semblant de l’être, le laisser croire !

Deuxième partie, Chapitre V.
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Gustave Flaubert
Madame Bovary n'a rien de vrai. C'est une histoire totalement inventée ; je n'y ai rien ni de mes sentiments ni de mon existence. L'illusion (s'il y en a une) vient au contraire de l'impersonnalité de l'oeuvre. C'est un de mes principes, qu'il ne faut pas s'écrire. L'artiste doit être dans son oeuvre comme Dieu dans la création, invisible et tout puissant ; qu'on le sente partout, mais qu'on ne le voie pas.
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HACHISCH : Ne pas confondre avec "hachis" qui se fait avec de la viande, et qui ne provoque aucune extase voluptueuse.
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Gustave Flaubert
Être connu n'est pas ma principale affaire. Cela ne satisfait entièrement que les très médiocres vanités. Je vise mieux, à me plaire.
[Cité dans La grande librairie du 8 décembre 2021]
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“la haine que l’on porte au bédouin, à l’hérétique, au philosophe, au solitaire, au poète et il y a de la peur dans cette haine. Moi qui suis toujours pour les minorités, elle m’exaspère.”
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Je ne crois pas plus que vous aux distinctions des classes. Les castes sont de l'archéologie. Mais je crois que les pauvres haïssent les riches et que les riches ont peur des pauvres. Cela sera éternellement. Prêcher l'amour aux uns comme aux autres est inutile. Le plus pressé est d'instruire les riches, qui, en somme, sont les plus forts. Eclairez le bourgeois, d'abord, car il ne sait rien, absolument rien. Tout le rêve de la démocratie est d'élever le prolétaire au niveau de bêtise du bourgeois. Le rêve est en partie accompli. Il lit les mêmes journaux et a les mêmes passions. - ---A George Sand, 4 ou 5 octobre 1871
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Fumichon, concernant la propriété, évoque les arguments d'un homme politique dont Flaubert parle en ces terme dans une lettre à George Sand: "Peut-on voir un plus triomphant imbécile, un croûtard plus abject, un plus étroniforme bourgeois! Non! Rien ne peut donner l'idée du vomissement que m'inspire ce vieux melon diplomatique, arrondissant sa bêtise sur le fumier de la Bourgeoisie!". De qui s'agit-il?

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