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Citations de Henri de Régnier (268)


La Princesse de Clèves est le roman de l'indiscrétion. Tout y arrive parce que les gens y parlent les uns des autres réciproquement, et c'est le hasard de verbiages inconscients qui modifie les sentiments des personnages et influe sur la suite et la direction de leur vie.
Je crois avoir trouvé dans la Valérie de Madame de Krüdener un des livres qui modelèrent l'imagination de Barbey d'Aurevilly. Il semble qu'en lui, ce genre de sentiment ait trouvé son aboutissement. C'est le même décor ossianique, et telle phrase de Valérie, comme " "Il lui envoya une table de marbre de Carrare rose comme l'espérance et veinée de noir comme la vie" n'a-t-elle pas des échos dans toute l'oeuvre du grand romancier occidental ?
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Madame Gautier me montre des lettres et des manuscrits de Hugo. L'écriture de ces pièces diffère. Dans les lettres, elle est cursive et inclinée ; dans les textes, elle se redresse et se solidifie. Elle devient ordonnée et comme réfléchie et les lignes se surplombent, égales, fortes et droites, barrée de ratures si larges qu'elles semblent faites au pinceau, d'une encre un peu pâle, à travers laquelle se distingue encore aisément le texte oblitéré. (...)
Je relis Balzac dans la grande édition in-folio illustrée, presque populaire : les larges feuilles sur papier mince, aux caractères communs, donnent à l'ouvrage un aspect de gazette ou de journal, qui confère aux aventures et aux êtres qui les subissent et les motivent un aspect d'authenticité, une allure comme d'aujourd'hui, et ils paraissent plus près de nous et presque plus vivants.
Qu'est-ce que Balzac ? A-t-il cru à la vie, à la réalité ? Est-ce un livre aristotélicien sur les catégories des êtres ? Le répertoire des destins ? Un bréviaire de l'action ? Les personnages ne sont pas parfaits, à l'image de la vie : ils y rentrent et en sortent. Ils font partie des morts et continuent à être des vivants.
Balzac n'a pas de style, mais il a tout ce sans quoi il n'y a pas de style. Il a la force de l'expression et n'en a pas l'agencement. Il a la trouvaille et en ignore l'emploi.
Année 1892. pages 290-291
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La pensée de l’amour se mêlait bien parfois à mes rêveries et les colorait parfois de nuances romanesques, mais cette pensée s’y dissipait aisément, faute d’objet sur quoi se fixer. Elle demeurait errante et vague et n’avait jamais pris aucune forme précise.
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C’est pourquoi je ne saurais prétendre à passer pour un homme raisonnable. L’est-on, en effet, quand on se laisse aller à la fâcheuse inclination de ne voir en toute chose que ce qu’elle peut comporter de plaisir et de beauté sans se soucier autrement de l’utilité qu’elle peut avoir ?
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D’autres ont recherché le tumulte et la gloire,
Mais moi je n’ai voulu que cet humble laurier
Qui pousse sobrement sa feuille presque noire
Au seuil du probe artiste et du bon ouvrier,

Et c’est pourquoi, Seigneur, ayant vécu mon âge,
Au moment de mourir aux lieux où je suis né,
Je t’offre ces yeux clairs en un pauvre visage
Et ce front et ces mains et cet œil obstiné.

Accepte-les et prends aussi ces pommes rondes,
Ces grappes et ces fruits que j’ai peints de mon mieux,
Car leur contour pour moi fut la forme du monde
Et toute la lumière éternelle est en eux.
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LE FEU

Rentre. Je ne vois plus ton visage. Rentrons.
Il est trop tard déjà pour s'asseoir au perron
Où la mousse est humide et la pierre mouillée.
La serrure tend à nos mains sa clef rouillée;
La porte s'ouvrira toute grande pour nous
Avec un bruit d'accueil que le soir fait plus doux ;
Plus tard le gond rétif et le loquet rebelle
Grinceraient, car toute demeure garde en elle,
Taciturne, invisible et qui vit en secret,
Une âme que l'on blesse ou que l'on satisfait.
Obéis à son ordre et cède. Sois pieuse
A cette âme éloquente, humble et mystérieuse
Qui t'appelle. Sais-tu si quelque esprit divin
N'habite pas la pierre où se tourmente en vain
Son angoisse? Es-tu sûr encore qu'il ne vive
Plus rien de l'arbre dans la poutre et la solive
Qui craquent sourdement et semblent s'étirer ?
Quelqu'un t'attend dans l'ombre et te regarde entrer.
Va vers lui. L'âtre clair ébauche dans son rire
Équivoque le masque à demi d'un Satyre
Qui se crispe, s'efface et soudain reparaît.
Ce tison rouge, c'est sa bouche qui rirait ;
Cette flamme lui mit aux tempes deux oreilles ;
La bûche chante avec un bruit rauque d'abeilles
Et le feu tour à tour gronde et murmure et tord
Des pampres embrasés autour des cornes d'or.
La figure sylvestre, indécise et camuse
Tour à tour se recule et tour à tour s'accuse.
La voici qui s'éteint, la voici qui décroît
Et qu'il n'en reste plus, éparse devant toi,
Qu'un peu de cendre grise où rougeoie une braise ;
Les abeilles ont fui et la ruche s'apaise.
Mais si tu veux revoir le masque qui t'a ri
Et que l'essaim bourdonne innombrable, il suffit,
Pour les faire sortir de la flamme nouvelle,
De jeter à la cendre où couve l'étincelle,
Une à une, dans l'âtre, en offrande au Sylvain,
Des écorces de hêtre et des pommes de pin.
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LE FLEUVE

Du haut de ce rocher qu'il baigne à son passage
Je vois le fleuve lent s'enfuir dans les lointains
Et je suis, longuement, les contours du rivage
Enserrant la torpeur de ses flots incertains.

Il passe, reflétant dans son onde dormante
Les vieux arbres penchés qui s'inclinent vers lui;
Dans sa tranquillité sinueuse il serpente,
Et selon le terrain il s'éteint ou luit;

Plus loin il longera des villes entassées,
Il courbera son dos sous le joug des vieux ponts,
Il coulera captif entre les deux chaussées,
Où dorment les vaisseaux amarrés aux crampons.

Maintenant, il s'égare aux plaines sablonneuses,
Attarde, sans souci, son courant ralenti,
En frôlant ses bords où les battoirs des laveuses
Frappent des coups égaux dont l'écho retentit.

Suivre le fil de l'eau sur quelque barque errante
En songeant vaguement aux vieux rêves défunts,
Tandis que, devant vous, la rive différente
Passe, envoyant l'odeur de ses mille parfums,

Voguer longtemps, bercé du rythme monotone
De l'onde qui se fend sous l'élan du bateau,
Voguer à travers des paysages d'automne
Dans l'espoir d'arriver on ne sait où, bientôt;

Aspirer la fraîcheur des aubes renaissantes,
S'imprégner longuement de la langueur des soirs,
Où flottent des senteurs étranges et puissantes.
Et les frissonnements qui tombent des cieux noirs.

Car on peut supposer — ce rêve est doux à l'âme
Souffrant du souvenir qu'en vain elle a banni —
Qu'on s'en ira bien loin toujours et que la rame
Vous conduira finalement dans l'infini.
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VERS LE PASSÉ

Sur l'étang endormi palpitent les roseaux;
Et l'on entend passer en subites bouffées,
Gomme le vol craintif d'invisibles oiseaux,
Le léger tremblement de brises étouffées ;

La lune fait tomber sa divine pâleur
Sur le déroulement infini des prairies
D'où le vent, par instants, apporte la senteur
Des buissons verdoyants et des herbes fleuries;

Mais voici que, tout bas, chuchote la chanson
Que chantent, dans la nuit, les plaintives fontaines
Dans le cœur secoué d'un intime frisson
S'éveille le regret des tendresses lointaines.

Et, du fond du passé, monte le souvenir
Triste et délicieux de pareilles soirées,
Et de bien loin on sent aux lèvres revenir
Les paroles d'amour en l'ombre murmurées.
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je ne pouvais pas supporter la présence de ce petit homme prétentieux et nul, chamarré de tous les préjugés bourgeois, bedonnant et solennel en sa taille minuscule, avec sa tête d’oiseau à lunettes, fort riche et misérablement avare, en un mot le parfait provincial, la parfaite incarnation de la province en sa plus médiocre médiocrité).
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Que les femmes soient plus faciles, les hommes qui les ont seront plus discrets, car les ayant eues plus facilement, ils se vanteront moins facilement de les avoir.
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La vanité se mêle à tout, même à l'amour. On est vain d'aimer et d'être aimé.
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Il faut, comme dit le proverbe, tourner sept fois sa langue avant de parler – et se taire.
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L'amour est un sentiment singulier, le plus changeant à la fois et le plus indestructible. Il se transforme, s'effrite, s'éparpille, mais, à l'analyse et dans le souvenir, se recompose et se reconstitue intact.
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Il vaut mieux savoir écouter que savoir répondre. Chacun est plus content de ce qu'il dit que de ce qu'on lui saurait dire.
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L'amitié donne le sentiment du durable ; l'amour, celui de l'éternel, et c'est l'égoïsme qui survit à l'un et à l'autre.
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Le rêve secret de l'amitié est que nous puissions compter sur nos amis sans qu'ils aient le droit de faire fond sur nous.
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Quand l'amour n'est plus un besoin, il reste un plaisir, jusqu'à ce qu'il devienne une fatigue. Alors, prenez garde que le feu éteigne la chandelle !
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La solitude est un silence où tout se tait pour que nous entendions.
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Une religion a son utilité. Elle a une économie de force. Elle donne sur des questions insolubles des solutions apparentes. Elle dispense des recherches personnelles ; elle permet à notre activité de se fixer aux choses de la vie et de l'art au lieu de s'épuiser à des problèmes de morale et de métaphysique.
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Une femme aime ses enfants plus que son amant, son amant plus que son mari et le tout moins qu'elle-même, peut-être.
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