Henry Martin

Ce qui caractérise plus particulièrement l'École de Fontainebleau, c'est la décoration lourde en haut relief, qui contraste avec l'ornementation légère en très bas relief et à petite échelle généralement adoptée à l'époque antérieure. La décoration de la chambre de la duchesse d'Étainpes, au palais de Fontainebleau, aujourd'hui partie supérieure du grand escalier, est l'œuvre de Francesco Primaticcio, dit le Primatice. On lui doit aussi la cheminée du salon François V, où s'entassent les chimères, les génies ailés aux attitudes contorsionnées, les peintures allégoriques. Toute cette décoration en ronde-bosse annonce le style Henri II.

Le style Henri II accuse une orientation très nette vers l'antiquité classique. Cette orientation est due en partie à la publication de certains ouvrages, tels que ceux de Vitruve, de Vignole, de Palladio, de Serlio. D'autre part, l'art antique avait trouvé d'ardents apôtres dans plusieurs artistes appartenant à l'École de Fontainebleau, comme Serlio et le Primatice. C'est au Primatice qu'on doit le château d'Ancy-le-Franc, le premier château classique construit en France. Enfin, nos peintres, sculpteurs et architectes français vont de plus en plus puiser leur inspiration en Italie.

C'est au VIe siècle, avec l'introduction du bouddhisme par des prêtres venus de Corée, que commence la civilisation japonaise. Durant cinq siècles, les seuls centres d'enseignement, les seuls foyers d'art seront, comme en France durant le moyen âge, les monastères; mais il s'agit ici, on le comprend, des monastères bouddhiques.

Il est encore une autre question qui n'a pas été abordée par le commentateur des Quarante Fouquet. Dans sa belle publication, M. Gruyer a classé les miniatures suivant l'ordre chronologique des événements. Ce serait bien là, en effet, l'ordre naturel, si Ton devait considérer ces délicates peintures comme formant une collection de tableaux. Mais si l'on remarque qu'il s'agit certainement ici des illustrations d'un livre, il apparaîtra que l'ordre logique est celui qu'elles occupaient dans le volume.

L'art musulman est peut-être le plus somptueux des arts. Peut-être serait-il aussi l'un des plus complets, si l'interdiction religieuse de représenter des êtres vivants n'en avait exclu presque complètement la peinture et la sculpture.

Le problème des origines de l'art byzantin est assez complexe ; il s'est posé pendant longtemps sous la forme suivante : Orient ou Rome ? En d'autres termes, est-ce l'art oriental ou l'art romain qui a engendré l'art byzantin ? Aujourd'hui, la réponse n'est pas douteuse : l'art byzantin doit tout ou presque tout à l'art oriental. Cependant l'apport de l'art classique n'est pas à dédaigner et durant toute l'histoire de l'art byzantin on assiste à un véritable dualisme de deux traditions opposées. Suivant le mot de Choisy, « l'art byzantin est l'esprit grec s'exerçant sur des éléments empruntés à l'Asie ».

L'art byzantin se constitue aux IVe et Ve siècles en Syrie, en Egypte et en Asie Mineure ; aux Ve et VIe siècles, il est constitué et il vivra jusqu'au XVIe siècle avec quelques éclipses importantes. La première résulte de l'invasion musulmane au VIIe siècle ; ensuite c'est la querelle des iconoclastes aux VIIIe et IXe siècles.

D'abord, les Quarante Fouquet sont-ils vraiment de Jean Fouquet? A cette question il ne me paraît pas possible, dans l'état actuel de nos connaissances, de faire une réponse absolument affirmative. Bien qu'il soit toujours pénible d'obscurcir d'un doute une séduisante légende, on doit avouer loyalement que jusqu'à présent aucune-preuve n'est-encore venue étayer cette hypothèse très vraisemblable. En réalité, nous ne pouvons de façon sûre attribuer à Jean Fouquet qu'une partie de l'illustration d'un très beau manuscrit en deux volumes de la Bibliothèque nationale, les Antiquités judaïques de Josephe On ne saurait là-dessus que partager l'avis
autorisé de mon savant ami le:comte Paul Durrieu, qui constate qu'aucun document ne vient appuyer cette opinion,: émise pour la première fois par Waagen, mais qui, d'ailleurs, s'empresse d'ajouter qu'il ne lui semble pas admissible de mettre sérieusement en doute l'attribution des Heures d'Étienne Chevalier à Jean Fouquet.

Les Arabes n'avaient aucun art qui leur fût propre, aucun passé artistique ; et pourtant ils sont parvenus à former un style avec des éléments empruntés aux arts étrangers, notamment à l'art perse et à l'art byzantin. C'est là un exemple à peu près unique dans l'histoire de l'art.
L'art musulman n'est point un art spontané, mais le produit d'une fusion entre l'art oriental et l'art des pays conquis.

On a donné à l'art musulman diverses appellations assez peu exactes.
Pendant longtemps, le nom le plus répandu fut celui d'art arabe. Or, L'art musulman n'est point l'art des Arabes, population nomade qui n'avait aucun passé artistique.
Le nom d'art mauresque n'est pas plus justifié. Les Maures sont les Berbères du Sahara, ou Almoravides, et les Berbères de l'Atlas, ou Almohades, dont l'activité artistique s'est étendue principalement sur le Maroc et sur une partie de l'Espagne.
Aussi limitative est l'appellation art sarrasin, terme vague, employé d'abord par les Grecs et par les Romains, puis par les Croisés, pour désigner les corps de cavalerie qu'ils avaient à combattre en Syrie et en Egypte.
Le nom d'art musulman semble donc être le seul admissible au double point de vue de la géographie historique et de l'histoire de l'art. Ce terme vient du mot arabe mouslim (celui qui se confie à Dieu), nom que Mahomet donna à ses premiers adeptes.

Il n'est pas rare de voir, dans les villes , des Japonais en contemplation devant de minuscules jardins, installés sur un simple plateau ou dans une boîte profonde. Gardons -nous de taxer de puérilité ces manifestations d'une race douée d'une sensibilité exquise. Les deux qualités essentielles du génie artistique japonais sont l'appropriation du décor à la forme et la puissance d'évocation.

Aucun peuple n'a aimé la nature d'une façon à la fois aussi ardente et aussi poétique. Le jour de la fête des cerisiers en fleurs, qui est une fête nationale, toute la population abandonne les villes pour aller aux champs admirer la nature dans son épanouissement printanier.

L'art japonais doit beaucoup à l'art chinois ; et, pourtant, les races japonaise et chinoise ne se ressemblent nullement.
Le tempérament chinois est empreint de philosophie, de calme, de patience et de discipline ; le Japonais, au contraire, est vif, enjoué, spirituel et très raffiné.

On a souvent parlé de l'isolement de la Chine et, par suite, de l'originalité de l'art chinois. Cet isolement, à la vérité, a été très relatif : en effet, un siècle avant J.-C, des caravanes composées d'Arabes et de Parthes reliaient déjà la Chine à la Syrie et à la Perse. En 648, les Chinois s'emparaient du Turkestan et du nord de l'Inde. Au X^ siècle, l'empereur Mou -Wang conquérait la Chaldée et établissait un protectorat en Mésopotamie. Au XIIIe siècle, la dynastie mongole faisait des incursions en Arabie. Enfin, au XVII^ siècle, les Chinois envahissaient la Birmanie et la Cochinchine. Sans entamer l'originalité de l'art chinois, ces différentes conquêtes ont eu pour résultat de soumettre la Chine à des influences syriennes, perses et arabes, dont on peut constater notamment les effets dans les produits de la céramique et dans certains bronzes. L'art chinois est un art puissant, profond et assez
subtil.

L'art égyptien est imposant et majestueux. A aucune époque, on n'a employé des moyens aussi simples pour obtenir des effets aussi grandioses. Les édifices, qui sont d'énormes masses aux lignes horizontales, ont une mouluration très rudimentaire. L'architecture égyptienne est gigantesque. La salle hypostyle du temple de Karnak, qui n'a pas moins de 5.300 mètres superficiels, pourrait contenir Notre-Dame de Paris : elle n'est pourtant qu'une partie de ce temple immense. L'art égyptien est un art empreint de gravité. La gaieté et l'humour sont deux choses inconnues en Egypte, qu'on a souvent appelée la terre du silence : prononcer des paroles trop nombreuses y était considéré comme une impiété. C'est dans la sculpture que ce caractère de gravité est le plus frappant.

Le domaine de l'art égyptien comprend deux régions: la Basse-Egypte qui va de l'embouchure du Nil, le Delta, jusqu'à une ligne passant au sud de Memphis; la Haute-Egypte, qui part de cette ligne pour s'étendre jusqu'à la première cataracte. C'est Thèbes qui en est la ville principale. On estime que le nombre de ses habitants se montait à 700.000.

Le style Directoire marque une date malheureuse dans l'histoire de l'art. C'est en 1791 que furent supprimées les Académies et les Jurandes. Les Académies avaient été, depuis deux siècles, les animatrices du mouvement artistique et n'avaient nullement, quoi qu'on en ait dit, entravé l'effort individuel. Quant aux Jurandes, elles avaient été les gardiennes de la supériorité de la main-d'oeuvre artistique en France. On sait que, depuis le moyen âge, les métiers d'art industriel n'étaient point libres et que seuls pouvaient s'établir ceux qui, après un assez long apprentissage, avaient soumis aux Jurandes, qui étaient des syndicats de patrons, le chef-d'oeuvre prouvant la capacité de l'apprenti. La suppression des Jurandes eut des conséquences désastreuses.

On nourrissait alors une confiance aveugle et un peu naïve dans la pureté et l'austérité des moeurs de l'Antiquité. L'idéal était de copier en tout ces lointains ancêtres, de s'habiller à la romaine, d'habiter un temple sans fenêtres, de s'asseoir sur des chaises curules et de manger, sur des tables en forme de trépieds antiques, du brouet noir à la Spartiate, tandis qu'on s'éclairait avec des candélabres pompéiens. Cet amour pour tout ce qui était grec ou romain était tellement aveugle que le sens du ridicule s'en trouvait aboli et que certaines gens de qualité imposaient à leurs fils, et cela avec le plus grand sérieux, les noms d'Astyanax ou de Scaevola.

Le style Louis XV exprime admirablement le caractère de l'esprit français de cette époque : il est léger, vif, spirituel, séduisant, galant, un peu libertin, un peu désordonné, mais toujours avec une grâce qui désarme. Les influences qu'il a subies ont des origines assez différentes. A l'Italie, il emprunte l'esprit du style baroque. On sait quelle vogue ce style obtenait en Italie à la fin du XVIIe siècle. Le style baroque, nul ne l'ignore, est caractérisé par l'horreur de la ligne droite et de la symétrie. Or, on observe déjà, et d'une façon frappante, dans les détails de sculpture de l'église de la Madeleine (1686), à Rome, la liberté de composition du style Louis XV.

C'est à Paris que le mouvement prend naissance et se développe. Grands seigneurs, financiers, fermiers généraux se font construire des hôtels qui rivalisent d'élégance. A cette époque de galanterie, chacun veut avoir sa « folie » : on appelait ainsi une petite maison de campagne qui bien souvent servait de lieu de rendez-vous galant.