Jean-Luc Bannalec

En fait, Dupin tenait en piètre estime les festivités touristiques. Mais peut-être l’une de ces attractions avait-elle lieu pendant les heures de plage ?

Si le commissaire aimait les rituels choisis par lui, il détestait ceux qui lui étaient imposés. Les vacances en comprenaient tout un lot.

_Vous pensez que ce détail est important pour le bon déroulement de l'enquête? répliqua Dupin avec autant de bonhomie que son interlocuteur grincheux.

Dupin extirpa son calepin rouge de son pantalon ainsi qu'un des stylos qu'il achetait en quantités industrielles au tabac- presse à côté de l'Amiral, et qu'il perdait à une vitesse ahurissante.

Le coup de fil au préfet s'était révélé encore plus désagréable que prévu. Compliqué, laborieuse, la conversation s'était prolongé interminablement, Dupin avait eu le temps de faire à nouveau le tour de l'île.

_D'une certaine façon, oui. Vous comprenez certainement que cela m'intéresse, dit-il en pesant chaque mot, puisque deux jeunes femmes ont été assassinées et que rien ne nous conduit à penser que les meurtres ont été commis par un étranger. Je suis inquiet. Très inquiet.

_Vous... Vous devriez faire attention, patron. Vous ne devriez pas prendre cette histoire de septième tombe à la légère.

Dupin avait à présent un très mauvais pressentiment, mais il devait garder la tête froide.

_ Personne n'en a dit un mot. Aucun des deux, ni personne d'autre. (Dupin secoua la tête. C'était incroyable.) Ce matin, quelqu'un tue son ex-mari et elle ne laisse rien paraître, rien du tout!

Quoi qu'il en soit, un rapport quotidien me semble approprié. Ne serait-ce qu'à cause de la presse, que j'ai informée du statut particulier qui est le vôtre.

Le pire , c'est qu'il avait comme un pressentiment depuis la veille. La coïncidence serait trop énorme.

_Cela ne va pas vous faciliter la tâche, n'est ce pas? Le monde entier aura les yeux rivés sur votre enquête.

_Est-il vrai, monsieur le commissaire, que le meurtrier retourne toujours une fois au moins sur les lieux de son crime?
_Eh bien, c'est un peu plus compliqué que cela. Il n'y a pas de règle quand il s'agit de meurtres_ il n'y a pas de règle du tout, d'ailleurs, croyez-moi.

Il oubliait souvent de se nourrir quand il était plongé dans une enquête, et ne s'en apercevait généralement qu'au moment de défaillir.

Peu de choses étaient aussi typiquement bretonnes qu'un changement de temps brutal.

Parfois, les clichés ne sont qu'une pâle imitation de la réalité. Ou plutôt, la réalité fait encore plus cliché que les clichés eux-mêmes.

— Quelqu’un a forcé la fenêtre du lieu de crime, cette nuit.
— Au Central ?
— Dans le bar, oui. Là où Pierre-Louis Pennec a été assassiné.
— Pour quoi faire ?
— Je n’en sais rien.

La journée tenait ses promesses en affichant une température merveilleusement estivale. Un peu plus de trente degrés, c’était plus que de coutume dans la région. Après l’atmosphère oppressante du domicile des Pennec, Dupin était heureux de retrouver l’air marin. Il aimait profondément la brise à la fois douce, discrète et pourtant omniprésente qui arrivait de l’océan Atlantique. Un coup d’œil à sa montre lui indiqua qu’il était bien plus tard qu’il ne le pensait, la matinée était finie depuis bien longtemps.

-"La porte est en dedans", peut on lire au dessus de la porte de l'église, dit Le Ber. Et on trouve une autre phrase: "Dites-vous bien que ce que vous voyez n'existe pas mais ce que vous ne voyez pas existe bien."

Dupin ne détestait rien autant que les hommes politiques. Lisses comme des anguilles, versatiles et sans scrupules, ils savaient à merveille faire leur petit show rhétorique pour cacher autre chose, généralement leurs intérêts propres, tout en traçant implacablement leur route.