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Citations de Jeanne Puchol (22)


- Ah, v'là que ça recommence ! Y en a marre !
- Qu'est-ce qui se passe ?
- Ce qui se passe ? T'as le nez bouché, ou quoi ? Tu ne sens pas toute cette abomination ? C'est encore l'autre qui brûle je ne sais quelles saloperies !
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Au début, on était une bande de jeunes enseignantes-chercheuses en sociologie. Certaines avaient fini leur thèse, d’autres non. On était plutôt des spécialistes de la famille, du logement, de l’État. On a dû se mettre à la sociologie du droit et de la justice. Des dizaines d’étudiant.es se sont mis.es à suivre notre séminaire. Une vingtaine chaque année entre 2008 et 2012. Plusieurs ont continué une thèse et sont devenu.es collègues. Avec, hélas, des inégalités de statut importantes : il y a de moins en moins de postes de fonctionnaires, de postes correctement payés dans la recherche. Le principe du séminaire, c’est qu’on menait l’enquête dans les tribunaux ensemble et qu’on discutait ensuite. On essayait toujours d’être au moins deux aux audiences, ce qui permettait de se relayer pour la prise de notes. Une matinée d’audience, ça dure en moyenne trois heures où s’enchaînent une dizaine d’affaires, et parfois, ça va très vite. On avait du mal à suivre. Il fallait garder un silence absolu. Et ce n’était pas toujours facile quand la situation au sein des couples était tendue, ou quand les juges, les avocat.es, les greffier.ères nous prenaient à partie. Être deux permettait de supporter la charge émotionnelle de certaines affaires, de prendre du recul. Et ensuite, on débriefait avec toute l’équipe. En tout, on a été plus d’une cinquantaine à participer à cette enquête. Entre 2008 et 2012, on a assisté à trois centre trente audiences, dans cinq tribunaux différents, partout en France. Ça a donné lieu à la publication d’un ouvrage collectif en 2013, qu’on a signé à onze : Au tribunal des couples. Après la sortie du livre, une partie de l’équipe de recherche a continué l’enquête dans les cours d’appel et dans les cabinets d’avocat.es. Au total, on a fait des interviews avec une vingtaine de juges de première instance ; une dizaine de coseiller.ères de cour d’appel et une cinquantaine d’avocat.es chez qui on a réalisé quarante-cinq observations de rendez-vous avec leurs clientes et clients. Notre idée, c’était de suivre au maximum les dossiers, depuis le cabinet jusqu’au tribunal. Et on a constitué une base de données de quatre mille affaires familiales à partir de dossiers archivés en 2013 dans plusieurs tribunaux sur laquelle on travaille encore. On n’aurait jamais pu faire ça seules, ou même à deux. Et puis, grâce au travail d’équipe, on a pu observer plein de configurations différentes : des juges plus ou moins jeunes ou expérimenté.es, dans des tribunaux très divers, et des justiciables de milieux sociaux variés. Ça nous a permis de faire ce constat : l’absence de prise en considération du travail domestique assuré par les femmes ne joue pas seulement dans le calcul des prestations compensatoires pour les femmes de la bourgeoisie, elle a aussi un impact sur le calcul des pensions alimentaires dans les classes populaires.
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Le moins qu’on puisse dire, c’est que le rapport des notaires à l’impôt est ambigu. Ce sont des officiers ministériels chargés par l’État de collecter l’impôt, mais qui conseillent une partie de leur clientèle afin qu’elle en paie le moins possible en faisant de l’optimisation fiscale. On retrouve cette position équivoque face à l’impôt dans leur travail de conseil en matière de liquidation du régime matrimonial.
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Vous ne me croyez pas ? Puisque rien ne vaut un bon exemple, écoutez l’histoire étonnante d’une famille de boulangers en Gironde, que Sybille a étudiée au début des années 2000. Il s’agit de la famille Pilon. Marcelle, la mère, est veuve depuis plus de quinze ans quand elle part à la retraite. Elle organise alors sa succession grâce à une donation-partage devant notaire. Celle-ci permet de transmettre et de répartir, de son vivant, tout ou partie de ses biens à ses héritiers-ères. Et les parts doivent être égales, bien sûr. Marcelle donne la boulangerie, ainsi que la maison attenante, à son fils Pierre qui travaillait déjà avec elle. Ses trois filles, Micheline, Monique et Roseline, reçoivent quelques biens immobiliers et terrains avoisinants. Comme leur valeur n’est pas équivalente à celle de la part de Pierre, il est convenu que ce dernier fournira gratuitement pain et chocolatines à ses sœurs pendant dix ans. Mais l’achat d’un fonds de pâtisserie pour Pierre, alors qu’il était âgé de 14 ans, n’a pas été pris en compte dans les calculs, ni déclaré au fisc. Et toute la famille le sait. Chez les Pilon, mère et enfants semblent s’accommoder de cette irrégularité. Marcelle la justifie ainsi : contrairement à ses sœurs, Pierre n’a pas fait d’études supérieures. Elle explique qu’elle a venu un moulin pour payer les études de ses filles. Mais, en entretien, Micheline raconte qu’elle a interrompu sa scolarité à 17 ans. Roseline précise que Monique et elle ont été boursières. Et toutes trois affirment avoir aidé gratuitement à la boutique. Les trois sœurs acceptent la situation pour préserver la bonne entente familiale. Elles ont aussi le souci de maintenir le statut social de la famille. Roseline est devenue conseillère municipale et Monique directrice de l’école. Leur frère est à la tête de la boulangerie-pâtisserie du même village.
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En fait, il faut tenir compte ici du statut matrimonial des hommes et des femmes. Pendant longtemps, la plupart des couples se sont mariés. Et, en France, le régime matrimonial par défaut, c’est la communauté de biens réduite aux acquêts. Tout ce que les époux acquièrent pendant la durée du mariage, est possédé moitié-moitié, d’où que viennent les revenus. Le mariage a ainsi constitué un lisseur des inégalités de patrimoine entre femmes et hommes par rapport aux inégalités de revenus. Mais les féministes disent souvent que le mariage est une institution patriarcale ? Elles ont raison. Jusqu’en 1965, une femme qui se mariait en France renonçait au pouvoir de gestion des biens du couple, mais aussi de ses propres revenus. Et il a fallu attendre 1985 pour que les épouses soient considérées comme gestionnaires du patrimoine commun au même titre que leur époux. Mais c’est là que se joue ce que l’on pourrait appeler une arnaque historique. Au moment où les femmes gagnent ce pouvoir de gestion, de plus en plus y renoncent. De moins en moins de couples se marient. Dans les classes supérieures, quand on se marie encore, c’est de plus en plus sous le régime de la séparation de biens, au nom de l’autonomie des conjoints. C’est ce que nos collègues ont appelé l’individualisation des patrimoines, qui explique en grande partie l’augmentation récente des inégalités de patrimoine entre hommes et femmes. Celles-ci reflètent de plus en plus les inégalités de revenus qui s’accumulent tout au long de la vie.
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J’ai bien compris que les inégalités de classe entraînent des inégalités dans la connaissance du droit de la famille. Mais qu’en est-il des inégalités de genre ? C’est simple : en général, les hommes et les femmes ne gèrent ni le même volume, ni le même type de patrimoine. En ce qui concerne le patrimoine professionnel, les femmes sont sous-représentées chez les agriculteurs, les commerçants, les artisans, sans parler des chefs d’entreprise de plus de dix salariés. Et pour le patrimoine immobilier, quand il atteint une certaine ampleur, c’est, dans la majorité des cas, un homme qui le gère.
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Trois mois après son divorce, MacKenzie Bezos renonce à tous ses intérêts dans le Washington Post et dans Blue Origin, à 75% de ses actions Amazon, ainsi qu’à ses droits dans cette entreprise. Ceci afin de soutenir l’action de son ex-mari, a-t-elle précisé. Jeff Bezos garde donc le contrôle d’Amazon et reste l’homme le plus riche du monde. Les marchés financiers peuvent respirer.
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Moi, j’ai travaillé sur les entreprises de Cognac. La propriété viticole était systématiquement transmise au fils. Les seules héritières que j’ai rencontrées n’avaient pas de frère, ou bien leurs frères avaient un gros problème. Mais de fait, on observe ces mécanismes dans les familles qui ont un patrimoine professionnel à transmettre. À la ville comme à la campagne. Les agriculteurs, les artisans et commerçants, mais aussi les chefs d’entreprise et les professions libérales.
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Les propos de cette avocate montrent le fossé entre son univers social de référence et celui de ce couple modeste. La possibilité de prendre une nounou est tout simplement hors de leur portée. Quant à l’avocat du père, elle considère que la mère est, par défaut, disponible pour s’occuper de l’enfant tous les débuts de week-end si cela peut remédier aux contraintes professionnelles de son ex. À nouveau, le travail rémunéré des hommes est valorisé et protégé tandis que l’exploitation du travail domestique gratuit des femmes va de soi ! Les femmes sont censées organiser leur emploi du temps professionnel en fonction de leurs enfants. Elles n’apparaissent pas légitimes à demander des compensations financières en retour. Ce biais à une implication économique majeure : quand les enfants résident chez elle, les frais de garde qui incombent aux mères ne sont pas pris en compte dans les calculs des compensations, pas plus que les pertes de revenus liées aux réductions d’activité qu’elles endurent pour s’occuper de leurs enfants.
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Sentence prononcée par une juge – J’ai finalement prononcé le divorce aux torts exclusifs de l’épouse. Et si je m’étais écoutée, je n’aurais accordé aucune prestation compensatoire. J’ai en effet considéré qu’il n’y avait pas de disparité dans les situations économiques des époux. Mais le collègue qui siégeait avec moi a intercédé en sa faveur et nous avons fixé un montant de 85.00€. À mes yeux, c’est une femme entretenue. Et elle a foutu le bazar dans l’entreprise ! Il paraît qu’elle ne fichait rien. Il a beaucoup de sous, le monsieur. D’ailleurs, je pense que c’était ce qui l’intéressait, elle. On en voit beaucoup comme ça. Les femmes, c’est pas brillant, hein, à ce niveau-là. J’en ai eu un paquet de dossiers en trois ans, des dossiers où il y a beaucoup d’argent et où les femmes sont, dans l’ensemble, elles sont quand même assez minables.
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La prestation compensatoire ne concerne pas les enfants mais les conjoint.es. C’est le seul mécanisme du droit qui vise à corriger les inégalités économiques créées par un divorce. Mais attention, ça ne s’applique qu’en cas de divorce. Les couples non mariés ne peuvent en bénéficier. Depuis une vingtaine d’années, elle est versée sous forme de capital au moment du divorce et non plus sous forme de rente mensuelle comme par le passé. Pour résumer, cette prestation cherche à corriger un dommage constaté au moment de la rupture mais né au cours du mariage. Par exemple, le fait que la femme ait cessé de travailler pour élever les enfants ou pour seconder son époux dans son métier.
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Alors cette enquête chez les avocat.es, on l’a mené avec toute une équipe de recherches. On avait commencé en 2008 par une enquête sur le traitement judiciaire des séparations conjugales dans les tribunaux, en obtenant les autorisations des présidents de cinq d’entre eux. D’où le nom que nous avons choisi pour notre équipe : Ruptures. En 2013, on a écrit aux bâtonniers de différents barreaux qui connaissait notre travail, pour pouvoir aller observer la pratique des avocat.es dans leur cabinet. En amont du tribunal. Ça nous a ouvert des portes : on a réalisé des entretiens avec une cinquantaine d’avocats. Quatorze ont accepté qu’on les observe en rendez-vous avec les leurs cient.es. On est retournées au tribunal avec certnain.es. Mais au final, on a été plus d’une cinquantaine pour faire ça. Rencontrer des notaires, c’est une enquête qu’on a menée toutes les deux, grâce aux recommandations de juristes avec qui on travaillait, dans le cadre d’un partenariat avec le Conseil supérieur du notariat. Sinon, ce n’est pas facile d’obtenir des entretiens avec les notaires : ils et elles sont très soucieux-ses du secret professionnel. On a pu en rencontrer dix-sept : treize hommes et quatre femmes, âgée.es de 30 à plus de 60 ans. En entretien, on a réussi à faire parler une quinzaine d’entre elles et eux de leur origine sociale. La moitié a repris une étude familiale, dont six directement par héritage. La quasi-totalité provient de familles d’indépendants : parents et beaux-parents médecins, pharmaciens, restaurateurs et hôteliers, boulangers, agriculteurs, viticulteurs… Et quand les notaires ont des enfants en fin d’études, la question se pose de leur transmettre l’office. Ils et elles exercent dans des études plus ou moins grandes, situées dans des zones géographiques très éloignées. Certains.es nous ont reçues dans de beaux immeubles de quartiers chics de grandes métropoles. On n’était jamais habillées comme il fallait. D’autres travaillaient dans des bâtiments plutôt moches, à côté de parkings de supermarchés. […] Les clientèles sont différentes, bien sûr. Mais pour les notaires, le but est le même : se constituer et fidéliser la bonne clientèle, celle dont le capital économique fera tourner leur étude. Ils peuvent rencontrer leurs futur.es client.es au cours de dîners en ville, pendant des formations à la chambre de commerce, à l’occasion de manifestations sportives, ou dans des clubs réservés aux chefs d’entreprise ou aux professions libérales. Les notaires hommes s’appuient souvent sur une sociabilité d’entre-soi masculin, typique de la bourgeoisie locale. Ils se retrouvent entre possédant qui possèdent un intérêt commun : la préservation de leur richesse dans le temps, et sa transmission familiale. Et ils sont parfois très décomplexés quand il s’agit de favoriser l’héritier masculin dans la transmission du patrimoine professionnel. Je me souviens des propos provocants d’une pointure de la profession.
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Ces chiffres montrent que quand il y a des fils et des filles, et un patrimoine suffisamment important et diversifié, ce sont très majoritairement les premiers des fils qui reçoivent les biens structurants du patrimoine, et de façon anticipée.
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Pour Bourdieu, la reproduction, c’est à la fois la reproduction de l’ordre social, et la reproduction de la position de chaque famille dans cet ordre social. À partir des années 1970, il insiste effectivement sur le rôle de l’école dans ces mécanismes. La réussite scolaire des plus doté.es valide le capital culturel dans la famille. Mais en mettant au jour le rôle de l’école, Bourdieu perd de vue les transmissions économiques.
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Les conditions sont rarement réunies pour qu’une femme prenne l’ascendant patrimonial sur son mari. Pour y parvenir, il faudrait que la femme vienne d’une famille plus riche, qu’elle soit fille unique ou qu’elle n’ait que des sœurs, qu’elle ait un meilleur salaire que son conjoint, et qu’elle soit plus âgée que lui. Bref, un cas de figure aussi fréquent qu’un mouton à cinq pattes… Non, ça, ça n’existe pas. Qu’un trèfle à quatre feuilles plutôt.
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Combattre l’ordre racial et l’ordre du genre contribue aussi à saper les bases du capitalisme.
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Ma chère petite maman
Quand tu liras cette lettre je suis sur qu'elle te fera une peine extrême, mais je serai mort depuis un certain temps et tu seras consolée par mon frère qui vivra heureux avec toi et te donnera toute la joie que j'aurais voulu te donner.
Excuse moi de ne pas t'écrire plus longuement mais nous sommes tous tellement joyeux que cela m'est impossible quand je pense à la peine que tu auras.
Je ne puis te dire qu'une chose : c'est que je t'aime plus que tout au monde. Je t'aime , je t'embrasse, mais les mots ne peuvent dépeindre ce que je ressens.
Ton Marcel qui t'adore et pensera à toi à la dernière minute, je t'adore.. et vive la vie !
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Ceux qui rendent une révolution pacifique impossible rendront une révolution violente inévitable.
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- Chaque fois que je vois un soldat allemand, je voudrais lui faire payer toute la haine qu’il a produite en moi.
- Je comprends. Seulement, nous ne sommes pas des terroristes comme voudraient le faire croire nos ennemis. Nous sommes une armée de libération. Si tu veux participer au combat, tu devras obéir aux ordres de tes supérieurs. Tu comprends ?
- Oui. Je serai un soldat.
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Ma chère Tante, Oncle et Cousines, au moment où vous lirez cette lettre, je ne serai plus. Je vais être fusillé aujourd'hui à 3 heures. Je ne regrette rien de ce que j'ai fait. Je suis tout à fait tranquille et calme. Je vous aime tous et j'espère que vous vivrez heureux. Vous remettrez quelques mots suivants à maman et Simon s'ils reviennent comme je l'espère. Ma chère Tante, j'aurai voulu te revoir ainsi que ma dernière petite cousine que je n'ai presque pas vue. Je suis réuni, en ce moment avec trois de mes camarades ayant le même sort que moi. Je vous embrasse tous une dernière fois, toi ma Tante, mon Oncle, ma petite Fernande, ma petite Madeleine et aussi petite Elise. Je suis sûr que cela vous fera plus de peine qu'à nous. Marcel
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