Littérature du Nord de mon pays, une LC avec Anne, Maryline et Kathel dans le cadre du mois belge, l'envie de prolonger "le flirt flamand" initié par la Foire du Livre de Bruxelles.
Wilfried Wils écrit ses confessions à l'attention de son arrière-petit-fils, il est au seuil de sa vie et revient sur sa jeunesse et les périodes "troubles" du début de la seconde guerre mondiale.
Est-il sincère ? On peut en douter, lui qui publia après la guerre de la poésie sous le titre évocateur de "Confession d'un acteur"?
Anvers 1940, Wilfried Wils a 22 ans et pour échapper au Travail Obligatoire, s'engage comme auxiliaire de police. C'est le tout début et avec son collègue Lode - fils d'un boucher qui deviendra son beau-frère - ils sont "réquisitionnés" pour participer à l'arrestation de la famille de Chaïm Lizke.
Le décor est planté, Anvers, cité diamantaire avec forte concentration de population juive. Wil va participer bon gré, mal gré à la mise en place de la politique anti-juive, arrestation, déportation, lynchage.
Partagé entre Lode, son beau-frère résistant et son ancien prof collabo "Barbiche Teigneuse", Will ne choisira pas son camp. Wil est passif, il exécute pour sauver sa peau dira-t-il .
Trouble, le personnage qui dans sa petite enfance a perdu la mémoire suite à une méningite. Il a dû réapprendre son nom, celui de ses parents et a développé une double personnalité. Il y a Wil dans la normalité et Angelo pour le côté obscur, violent, passionné, poète et hargneux.
Trouble est sa relation avec Lode qui un moment lui fait des avances, attiré par lui mais aussi résistant et sensible.
Trouble l'histoire de la tante de Wil qui mène la grande vie avec l'ennemi.
Trouble enfin (le roman porte très bien son titre) la construction du roman qui sans chronologie, nous livre les souvenirs d'hier ou d'aujourd'hui de son narrateur. De quoi se perdre au début j'avoue , les personnages multiples, les faits qui s'entremêlent. Il m'a fallu un certain temps pour apprécier cette structure chaotique qui fait en réalité parfaitement écho au récit. Les pièces s'imbriquent finalement les unes dans les autres et tout s'éclaircit et captive.
Une histoire sombre, celle de la ville d'Anvers où l'administration et la police sont à la botte de l'occupant, un récit illuminé par la présence d'Yvette la future épouse de Wil.
Pris continuellement entre deux réalités, à l'image de lui même Wil versus Angelo, c'est l'absence de choix qui est marquante. Une dualité à l'image de ses actes ; d'une part il participe à des rafles, de l'autre il prend soin d'un juif.
Le bien, le mal, où se situe la frontière ?
Cette absence de choix mais peut-il objectivement faire un choix dans sa réalité ? et l'inévitable question comment aurais-je agi en de telles circonstances ?
C'est sur un fond de tableau de Bruegel avec Margot la Folle et la poésie de Rimbaud que Jeroen Olyslaegers nous livre ce récit magistral sur Anvers et son histoire. Une histoire qui malheureusement semble toujours dans une moindre mesure à l'ordre du jour.... Malgré la narration coupée, non chronologique, un roman complexe, riche avec un vrai style. Un récit marquant, incontournable.
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