Citations de Jim Fergus (863)
Eveillée, blottie sous sa couverture, elle écoutait la chouette qui ululait dans la forêt et dont le chant la terrifiait. Il ne pouvait y avoir plus mauvais présage, car celle-ci annonçait la mort de quelqu'un. (...)
Allongée sous sa couverture, essayant de retrouver courage, elle écoutait le ululement de la chouette, messagère de la mort. Elle avait peur de cheminer en plein nuit, surtout avec et oiseau de malheur car, si en plus elle le croisait, ou si la chouette volait au-dessus d'elle, alors elle serait elle-même désignée comme victime.
Par-dessus les hautes flammes brillaient des milliards d'étoiles, vapeur tumultueuse d'infimes étincelles dans la noirceur du ciel. Malgré nos vastes différences d'éducation et d'origine, de sexe, de race et de nationalité, nous paraissons plus près les uns des autres depuis qu'on nous a confié la nina bronca. Nous avons assisté à sa renaissance dans l'eau, doublée en somme d'un vrai baptême, et c'est comme si nous étions devenus sa famille adoptive. j'essaie d'imaginer la vie sauvage et archaique qu'elle mène avec son peuple dans les profondeurs secrètes de ces redoutables montagnes auxquelles nous la rendons.
Je n'arrive pas à la chasser de mon esprit; quand je ferme les yeux, son image continue de me hanter. Je dois comprendre qu'elle va mourir ainsi, que la chambre noire ne peut rien faire pour elle, sinon garder une trace de l'horrible vérité.
La place est dominée par une énorme église d'un baroque incongru. Tout en brique d'adobe, elle a été construite au siècle dernier par des missionnaires franciscains, ou par les indigènes, plutôt, qui étaient leurs esclaves. La présence de cet édifice au milieu du village est carrément sinistre, angoissante. Mais, à peine éclairé par les cierges et las appliques murales, l'intérieur était frais et sombre. j'ai entendu le prêtre dire la messe du matin. Dans cette obscurité, je le devinais seulement.
Planté sur son plateau verdoyant, le camp ressemblait lui-même à un petit village, avec ses tentes blanches de formes différentes, figées dans la fraîcheur, joliment disposées en quartiers bien distincts pour les volontaires, le personnel et l'intendance. Des spirales de fumée s'élevaient au-dessus du mess, où l'on avait rallumé les feux pour le petit déjeuner. dans la prairie foisonnante, les bêtes paissaient l'herbe humide du matin.
L'air était frais dehors, et les cheminées du village avaient répandu un brouillard de fumée dans le fond de la vallée; Encore ignorées par le soleil, les collines avaient une teinte de nacre. Le long de la rivière, la rosée déposée sur l'herbe complétait le tableau. Tout était recouvert d'un voile glacé et argenté. Une vraie carte postale.
Certes, il s'était imaginé trouver Satan devant lui, mais il ne croyait guère en vérité aux manifestations surnaturelles. Il préférait penser que Dieu et Diable s'affairaient en silence dans l'âme des hommes.
Après la mort de maman et de papa, pendant les mois où j'ai vécu à la maison, rassuré finalement par leurs affaires et leurs odeurs, j'ai dû finir par croire qu'ils allaient revenir. Et il a fallu que je m'en aille, que je parcoure les routes pendant ces quelques semaines pour comprendre réellement que je ne les verrai plus.
Bien des gens retiennent d'une photo son caractère figé, arrêté dans le temps et l'espace. c'est une illusion. L'image photographique incarne un moment spécifique entre ce qui vient d'être et ce qui suit aussitôt, c'est un court instant de vie qui circule sans arrêt entre le passé et l'avenir.
Fermant les yeux, je revois parfaitement une fille brune, jeune comme moi, dévalant un ravin vers le lit asséché d'une rivière. Elle est tout à la fois frêle et forte et farouche, sa peau a une teinte de châtaigne, ses cheveux sont noirs et drus comme la crinière d'un cheval. Je veux la figer dans le viseur de mon appareil, mais elle a la mobilité des rêves et elle refuse que je la prenne.
Il pensait avoir vu à peu près tout ce que la nature avait à lui montrer, et il s'attendait à n'importe quoi sauf à cette créature qui, sur le chêne, sifflait, grondait et tentait d'érafler les chiens, comme si elle avait des griffes au bout de ses doigts minces; Il se demanda un instant si ce n'était pas le diable en personne, venu enfin le mettre à l'épreuve sous la forme de cet être sauvage, mi-homme, mi-animal, accroupi presque nu dans l'arbre, avec ses cheveux sales et hirsutes, et des lambeaux de vêtements sur un corps filiforme. Cette chose avait le visage peint de bandes grossières, jaunes et crasseuses, qui cernaient des yeux noirs et sans fond comme le temps lui-même, et, priser d'une rage bouillante, elle grognait et crachait en repoussant la meute.
Soulagé malgré lui, Flowers comprit que ce n'était pas Satan, tout au plus un de ses avatars femelles, à savoir une sauvage, et d'une saleté spectaculaire avec ça.
La nina bronca
J'ai vraiment appris cette chasse quand j'étais à la fac en Louisiane avec de vrai cajuns et des acadiens du bayou. Ils parlaient entre eux en français. Ils étaient vraiment drôles, intéressants et pittoresque. Tout ce qu'ils faisaient ils le faisaient bien. C'est avec eux que j'ai appris l'art de la chasse dans les marais.
Pour le pire et le meilleur, avec ses épreuves et ses douleurs, la vie continue...
Ce soir-là, Gabrielle connu une nouvelle naissance, sous le nom de Chrysis, et comme une affirmation constamment réitérée de sa libération, elle choisit d'adopter ce nom. Tout le reste de sa longue vie, elle signerait toutes ses œuvres Chrysis Jungbluth, même ses travaux à l'atelier, malgré la désapprobation manifeste du professeur Humbert, qui savait l'origine de ce nom.
C'est l'un des mystères persistants de l'enfance, de ceux qui nous hantent jusqu'au bout, que de se voir opposer les erreurs de nos parents, à commencer par leur union, puis notre aspect physique. Cela revient presque à nous reprocher d'être nés, comme si, du simple fait de notre existence, nous étions complices de leur désastre.
-Vous, les hommes, vous essayez toujours de réprimer ce que vous ressentez, alors que nous, les femmes, nous aimons bien l'exprimer.
-J'écris dans mes carnets, dit Bogey. C'est comme cela que je l'exprime.
-Non, fit Chrysis. C'est comme cela que tu essaies de le réprimer, parce que, après, tu ne laisses jamais personne lire ce que tu as écrit.
Gabrielle se rendit compte qu'elle avait jusque là vécu avec deux personnalités différentes et qu'elle avait toujours eu la capacité de faire taire sa vraie nature, de contrôler ses élans secrets.