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Critiques de Joe Casey (71)
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Corps de pierre

Un malheur n'arrive jamais seul.

John vient de divorcer car il a mis une de ses maîtresse enceintes.

Mais depuis quelques jours, il se sent lourd, a du mal à bouger une main. Peu à peu, son corps se pétrifie. Il va mourir. Mais quand il apprend que son étrange maladie est héréditaire, le problème se complique.

Comment réagi un type ordinaire à un problème extraordinaire ?



Un comics bien sympa, au graphisme très blanc.

Un langage assez cru, à éviter pour les enfants
Lien : https://sites.google.com/sit..
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Corps de pierre

Malgré une procédure de divorce jamais vraiment agréable à vivre, ce sont d’autres soucis qui commencent à peser sur les épaules de Tom Dare. Pianiste dans un groupe, il éprouve de plus en plus de mal à jouer convenablement. Tout débute par une perte d’agilité au niveau des doigts, qui semble ensuite se propager dans le reste du corps. D’un membre engourdi à une sensation de lourdeur généralisée, il commence à s’inquiéter et finit par consulter son médecin généraliste. Les résultats des tests sont pour le moins surprenants et l’avis des spécialistes est sans appel : le corps de Tom se transforme progressivement en pierre !



Profitant de la célébrité grandissante de la saga Walking dead, les éditions Delcourt décident de publier ce one-shot mis en image par le dessinateur attitré des zombies à succès. Réalisé en parallèle de la série de Kirkman, Rock Bottom s’inscrit cependant dans un tout autre genre.



Comme indiqué par le titre de cette version française, Corps de pierre raconte l’histoire d’un homme qui se solidifie au fil des pages. Si la recherche scientifique concernant les origines et les conséquences de cette maladie inconnue et incurable est intégrée au récit, ainsi qu’un clin d’œil quasi inévitable aux capacités super-héroïques de ce corps bâti dans le roc, l’auteur se concentre surtout sur le quotidien totalement chamboulé de ce personnage condamné à l’immobilisation perpétuelle. Si le dénouement ne fait aucun doute, le drame personnel vécu par cet homme ne laisse pas indifférent. En froid avec tous ses proches, il n’aurait de toute façon nulle part où aller ... indépendamment de son incapacité à bouger. Abordant le thème de la paternité et interrogeant le lecteur quant au sens de la vie face à une fin inéluctable, la descente aux enfers de Tom est ponctuée d’une chute connue de tous, mais en tout point remarquable.



Le style très épuré du dessin noir et blanc de Charlie Adlard pourrait rebuter au premier abord. L’absence d’aplats de noirs et le manque de relief, combiné à un trait extrêmement fin surprennent par rapport à son travail sur les morts-vivants. Cette impression de légèreté sied cependant assez bien à l’ambiance et à la sensibilité du récit, tandis que les remplissages grisâtres au niveau du personnage central, permettent de mettre en avant la progression de cette mystérieuse maladie.



Construit sur une idée en béton et suivant une trame sans véritables surprises, Corps de pierre est une lecture qui ne laisse pas de marbre.
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Corps de pierre

J'ai été très agréablement surpris par la lecture de ce one shot qui ne payait pas de mine au niveau de son graphisme dénudé. Le récit est tout ce qu'il y a d'ordinaire mais de dramatique quand un homme se sait condamné par une terrible maladie. Tout s'effondre autour de lui d'autant qu'il venait juste de divorcer. On va éviter la niaiserie avec des personnages et des dialogues réalistes. Bon, j'admets que quelques fois, cela va faire un peu Dr House ce qui ne déplaira pas aux nombreux fans de la série.



Le récit est si bien construit qu'on se demande si c'est tiré d'une histoire vraie : existe-t-il vraiment une maladie rare qui transforme le corps petit à petit en pierre suite à une véritable calcification ?

Pour autant, la conclusion du récit est si peu conventionnelle que cela ne laissait plus la place au doute.



J'ai beaucoup aimé cette plongée dans le quotidien de cet homme ordinaire dans sa manière d'appréhender son mal. On arrive à ressentir une vraie émotion pour peu d'avoir été confronté à la maladie une fois dans sa vie. Cela ne va pas bouleverser le genre mais c'est une oeuvre suffisamment forte pour attirer notre attention.
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Fantastic Four : La première famille

Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre, qui ne nécessite pas de connaissance préalable pour l’apprécier. Il comprend les 6 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2006, écrits par Joe Casey, dessinés par Chris Weston, encrés par Gary Erskine, et mis en couleurs par Chris Chuckry.



Il y a quelques temps, un hélicoptère de l'armée américaine vient récupérer 4 individus se tenant debout dans leur combinaison d'astronaute au milieu des débris de leur fusée. Au milieu de la nuit, un colonel appelle le général Walter Montgomery pour l'avertir de la présence de ces 4 individus dans une base isolée de l'armée américaine Heyford. Il se rend sur place et est accueilli par les professeurs Sanford et Rutgard. Ils l'amènent dans la salle de contrôle. Puis il accompagne les 2 professeurs dans les couloirs et passe devant les vitres donnant sur quatre chambres : une combinaison vide donnant l'impression de se verser du thé dans l'encolure, un jeune homme couché sur un bat-flanc dans une pièce maintenu à une température inférieure à zéro, un homme recouvert d'un épiderme pierreux qui balance sa chaise contre la paroi vitrée, un individu en caleçon dont les bras sont étirés sur plusieurs mètres. Walter Montgomery entre dans la pièce où se trouve Reed Richards et lui parle. Il n'obtient aucune réponse, pas même un cillement. Dans son esprit, Richards se trouve habillé dans sa combinaison d'astronaute, devant une silhouette entièrement blanche, évoquant l'évolution. Les doigts de Richards s'allongent et s'emberlificotent entre eux. La silhouette évoque la situation de Raymond Perryn, un assistant de laboratoire emmailloté dans des bandelettes et inanimé, sur un lit médical. Il a été irradié par des rayons cosmiques.



Johnny Storm est toujours couché sur son bat-flanc et il entend la voix de sa sœur. Elle se tient invisible devant lui et lui indique qu'elle cherche une solution. Son frère lui répond qu'il est surpris que ses cheveux ne brûlent pas. Susan Storm se rend ensuite dans la cellule de Benjamin Grimm : elle dit des paroles rassurantes. Ben répond qu'on ne le laisse voir personne, pas même sa copine Linda McGill qui est pourtant médecin. Il se redresse sur son séant et se rend compte qu'il n'y a personne à ses côtés. Enfin elle se rend dans la cellule de Reed, sans parvenir à le tirer de son mutisme. Le lendemain, Walter Montgomery a fait sortir Reed Richards sur sa chaise de bureau à roulette et les 2 professeurs s'apprêtent à lui faire subir des tests. Dans son esprit, Reed se trouve à nouveau devant la silhouette blanche qui lui parle de pensée et de conscience. À une question de Reed, elle répond qu'il est un scientifique comme lui, qu'il s'est aussi intéressé aux radiations cosmiques suite à la chute d'une grande météorite sur terre. Au fur et à mesure qu'elle parle, un squelette commence à se reconstituer à l'intérieur de la silhouette blanche. Puis apparaissent les muscles, puis la peau, et enfin une tête, un visage et des vêtements. L'individu finit par se présenter : professeur Franz Stahl.



Ce n'est pas la première fois que Joe Casey revient sur les origines d'un groupe de superhéros Marvel. Il l'avait fait en 1999/2000 avec X-Men, Tome 0 : Les enfants de l'atome illustré par Steve Rude, Paul Smith, Esad Ribic. Il avait également revisité les premières années des The Avengers, Tome 1 : Les plus grands héros de la Terre (2005 & 2007) avec Scott Kolins et Will Rosado. L'exercice n'est pas simple : les auteurs sont amenés à revisiter très régulièrement les origines des superhéros (Marvel ou DC), soit dans un mode révérencieux, soit pour y apporter un éclairage différent. Le lecteur chevronné sait que dans le premier cas la redite est assurée, et que dans le deuxième cas toutes les nouveautés seront rapidement oubliées, à de rares exceptions près. Ici, le scénariste fait en sorte de s'insérer dans les interstices de l'origine parue en 1961 et racontée par Jack Kirby & Stan Lee, pour ne pas déranger, sans être obligé de répéter ad nauseam les mêmes choses. Le fan se rend bien compte qu'il anticipe quand même de plusieurs années la capacité de Sue Storm à créer des champs force. Le principe est donc de dire qu'entre deux aventures canoniques, les 4 astronautes avaient eu à gérer une autre menace : Franz Stahl. Il s'agit bien d'ajouter puisqu'il est fait référence au crash de la fusée qui survient juste avant la première page, et qu'il est fait mention du combat sur l'île des monstres et de l'affrontement contre Miracle Man (Joshua Ayers apparu dans le numéro 3 de la série Fantastic Four) sans qu'il n'apparaisse sur la page.



Du coup, le lecteur découvre bien une nouvelle histoire : elle a juste la particularité de se dérouler dans un contexte déjà connu qui est celui du tout début de l'équipe. Alors que le récit commence, Reed Richards et Sue Storm ne sont pas encore mariés, et les quatre Fantastiques ne se sont pas encore installés dans le Baxter Building à Manhattan. Joe Casey montre comment se passent les relations entre l'équipe et l'armée des États-Unis, comment l'équipe réussit à acquérir son autonomie, dans quelles conditions elle effectue sa première apparition publique. Il développe également la question de la raison pour laquelle ils sont amenés à former une équipe, à habiter au même endroit (dans le Baxter Building), de pourquoi ils en viennent à se battre contre des monstres. Le scénariste joue donc le jeu d'étoffer le récit initial paru en 1961, avec une approche un peu réaliste et adulte, moins dans les évidences enfantines. Le lecteur guette bien sûr les éléments classiques de la mythologie de cette série. Il a droit à une courte séquence entre The Thing et le Gang de Yancy Street, ainsi qu'à plusieurs scènes se déroulant dans le garage automobile où travaille Johnny Storm. Reed Richards est déjà facilement oublieux de sa copine, en scientifique obsédé par ses expériences. Au cours du récit, est abordée la question des origines des molécules instables des costumes des Fantastic Four. En attendant, Chris Weston détoure la silhouette de Sue Storm invisible comme se déplaçant nue car elle ne peut pas rendre invisible ses vêtements.



Chris Weston & Gary Erskine réalisent des dessins descriptifs avec un haut degré de détails, dans un registre réaliste. Weston avait déjà collaboré avec Grant Morrison pour The Filth (2002/2003, également encré par Erskine), et avec Warren Ellis pour Ministère de l'espace (2001). Le lecteur est frappé par la minutie apporté à la représentation des environnements et des tenues vestimentaires. Le récit commence par un dessin en pleine page : il peut distinguer les débris de la navette au pied des 4 astronautes, chaque pli dans leur combinaison, le harnachement et les pochettes des combinaisons, les sapins en fond de case, les pales des rotors, chaque vitre de la cabine des hélicoptères, les roues, etc. Il ne manque aucun détail. Sur la deuxième page, il peut voir le lit du général, les plis du drap, les motifs sur l'oreiller, sa femme allongée à ses côtés, le combiné téléphonique, la lampe de chevet, les pantoufles au pied du lit, la table de chevet, le liseré de la descente de lit, et tout ça dans la première case. Il identifie le modèle de voiture dans la troisième case. La quatrième comprend un luxe de détail alors que la voiture est arrêtée au poste de contrôle de la base militaire. La troisième page comprend une case avec une vue complète de la façade du long bâtiment de la base militaire, et tous les appareils technologiques et conduites de fluide sont représentés avec minutie. Le lecteur habitué des comics se dit que ça ne va pas durer longtemps comme ça : les artistes vont se fatiguer et le niveau de détail va baisser de manière significative d'épisode en épisode. Il n'en est rien : le niveau de qualité des dessins reste constant du début jusqu'à la fin. Il suffit pour s'en persuader de comparer le degré de détails et de cohérence entre la façade de la base dans le premier épisode et dans l'épisode 6, totalement raccord.



Ce soin dans les détails génère une intensité d'immersion remarquable pour le lecteur et participe grandement à rendre la narration plus mature que celle de Jack Kirby dans les premiers épisodes de la série. Weston & Erskine appliquent la même approche graphique pour les personnages : haut degré de détails et de réalisme dans leur visage. L'effet produit est moins convaincant parce que le dessinateur éprouve parfois des difficultés à assurer la cohérence d'apparence sur certaines pages pour un personnage ou pour un autre. De même, la morphologie de The Thing donne la sensation de subir des variations étranges dans certaines scènes. S'il est un peu troublant de voir la silhouette nue de Susan Storm au début, il est plus horrifique de voir les membres démesurément allongés des Reed Richards, Weston proposant une représentation littérale versant vers l'horreur corporelle. Il reste dans un registre beaucoup plus classique pour la manifestation des pouvoirs de Human Torch et de The Thing, avec sa peau rocailleuse.



Le lecteur se laisse facilement entraîner par la qualité de la narration visuelle, qui reste facile à lire indépendamment du nombre de détails. Il comprend rapidement que l'enjeu du récit ne réside pas la reprise des origines des Fantastic Four, Joe Casey écrivant en ayant conscience que ses lecteurs les connaissent déjà. L'enjeu réside dans l'intervention de Franz Stahl, personnage créé pour l'occasion. Casey n'a pas la prétention de créer un nouvel ennemi inoubliable pour les FF, mais il le développe de telle sorte à ce que des scénaristes ultérieurs puissent le faire. D'ailleurs il ne sera pas repris par la suite. Les pouvoirs de Stahl sont également un produit des rayons cosmiques et Stahl devient un miroir déformant des Fantastic Four, un dispositif narratif classique permettant de faire ressortir les différences entre eux et lui, et par voie de conséquence ce qui fait la spécificité et donc l'identité des FF. Joe Casey utilise ce dispositif avec maîtrise et efficacité, sans réussir à dire des choses nouvelles sur les 4 équipiers.



Du fait de la longévité des personnages de fiction récurrents, les éditeurs sont amenés à faire en sorte de rappeler leurs origines régulièrement, et à en commander de nouvelles versions mises à jour à leurs auteurs, au point que ce soit devenu un sous-genre à part entière. À ce jeu, Chris Weston & Gary Erskine réalisent une narration visuelle adaptée et immersive, à l'exception des personnages parfois un peu fluctuants. Joe Casey trouve la place de s'insérer dans le canon des épisodes originaux, en développant une histoire originale et en apportant des compléments d'information à ce que contenait les tout premiers épisodes de la série. L'histoire est intéressante et divertissante, même si elle ne parvient pas à s'imposer comme une nouvelle référence.
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Godland Volume 2: Another Sunny Delight

Ce tome fait suite à Hello, Cosmic! (épisodes 1 à 6) qu'il faut avoir lu avant. Il contient les épisodes 7 à 12, initialement parus en 2006, écrits par Joe Casey, dessinés et encrés par Tom Scioli, et mis en couleurs par Nick Filardi.



En orbite autour de la Terre, des astronautes voient passer une pluie d'un millier de points de lumière qui foncent droit vers New York. Le cadavre de Discordia est l'objet d'un affrontement entre Eghad (l'homme de main de Friedrich Nickelhead) et une troupe de rats anthropomorphes habillés comme Superman (sans le S sur la poitrine).



Neela Archer vient dire au revoir à ses 2 sœurs (Angie et Stella) avant de partir en mission dans l'espace. L'opinion publique se soulève contre Adam Archer du fait des conséquences trop importantes sur la population de New York lors de son dernier combat. Maxim provoque la révélation de l'origine de l'univers dans l'esprit d'Adam Archer. Puis ce dernier est capturé alors qu'un vaisseau en forme de pyramide monumentale est en position stationnaire au-dessus de l'océan, à proximité de New York (après avoir percuté la statue de la Liberté).



Pas de changement par rapport au tome précédent, les auteurs continuent de réaliser des comics à la manière de Jack Kirby en mode cosmique. Tom Scioli augmente le nombre de cadrage à la Kirby, c’est-à-dire avec les mains en avant, ou même les pieds en avant. Il réalise de magnifiques séquences cosmiques dignes de Kirby en particulier lors de la révélation relative à l'origine de l'univers.



Il y a des corps célestes à profusion, des entités anthropomorphes de taille gigantesque, de l'énergie qui crépite sous forme de Kirby Crackles. Le vaisseau en forme de pyramide est gigantesque, la texture de la pierre de son "hangar" est rendu presqu'aussi bien que l'aurait fait Kirby. Les personnages ont souvent cette expression exagérée d'emphase avec la bouche ouverte.



Joe Casey continue également de faire son Kirby. Il y a bien sûr les péripéties, qu'il s'agisse des combats physiques avec superpouvoirs, et des personnages qui discutent pendant (ou qui exprime leurs réflexions à travers des bulles de pensée), de l'origine de l'univers, de races extraterrestres, ou bien d'un visionnaire illuminé très humain. Ce qui apparaît de manière plus patente dans ce deuxième tome, c'est également le rythme très soutenu du récit, similaire à ceux de Kirby. Les péripéties s'enchaînent sans temps mort, avec une grande inventivité et une belle capacité de renouvellement. Casey utilise également les tourments intérieurs des personnages, mais sur un ton moins intense que celui de Kirby. Le départ de Neela Archer est plus raisonné, et moins émotif que les réactions de Johnny Storm ou Ben Grimm.



Bien sûr le lecteur ne peut que constater à nouveau qu'à eux 2, Casey et Scioli ne sont pas Jack Kirby. Scioli n'arrive toujours pas à maîtriser les ombrages conceptuels à la Kirby, et sa représentation de la technologie est plus laborieuse et moins convaincante que celle de Kirby. Les piercings d'Angie Archer changent de place et de nombre d'une séquence à l'autre, dans un manque de cohérence peu professionnel (à moins qu'il n'y ait une explication à cet étrange phénomène dans les tomes suivants). Casey n'arrive pas à rattacher son récit aux grandes mythologies et aux grands mystères de l'humanité. Ils réalisent une ou deux séquences à la naïveté désarmante. Il y a par exemple Angie pilotant un avion monoplace au-dessus de New York capable de dialoguer avec Adam Archer, comme si de rien n'était malgré la vitesse, le vent, et le fracas du moteur. Il s'amuse à faire discrètement référence à une autre de ses histoires (The milkman murders), de manière gratuite, sans rapport avec le récit.



D'un autre côté, Casey et Scioli ne limitent pas leur narration à faire du sous-Jack Kirby, comme un hommage bon marché pour un profit rapide. À plusieurs reprises, Scioli s'abreuve à la même source que Kirby pour le merveilleux. La pluie de points de lumière est enchanteresse, les paysages cosmiques sont imposants, l'énergie crépite avec une vivacité indomptable, Eghad (une sorte de décalque de Toad, Mortimer Toynbee) est bondissant et enjoué, la créature tentaculaire au sein de laquelle Adam Archer se retrouve est un amalgame parfait du dessin et des effets spéciaux de couleurs (infographie qui n'existait pas du temps de Kirby).



Joe Casey fait preuve d'une belle imagination pour les menaces cosmiques et il continue de sonder le concept de la création par une créature d'un ordre supérieur. L'impression donnée par ce thème est assez amusante car Casey et Scioli montrent le créateur comme une sorte d'extraterrestre de grande taille, dans une armure technologique indéchiffrable. Difficile de ne pas y voir comme une déclaration d'athéisme devant cette image infantile du créateur.



La narration des auteurs mélangent images naïves et rebondissements improbables, dans une histoire pétillante et enlevée qui s'adresse aussi bien à des adultes qu'à des enfants. En effet, ils réalisent un hommage, ce qui invite à un deuxième degré de lecture en tant que commentaire sur les comics de Jack Kirby. Le ton n'a rien de pédant car ils font preuve d'un humour bon enfant qu'il s'agisse du comportement de Friedrich Nickelback (assez imbu de sa supériorité déambulant avec un verre de vin à la main), ou de celui de Basil Cronus (toujours flottant de guingois dans son bocal, en attente d'un prochain fix).



Le lecteur de comics plonge donc un récit à la forme aisément reconnaissable, aux thèmes classiques, et à l'humour sympathique qui ne verse jamais dans la parodie moqueuse. Il constate également qu'il ressent l'émerveillement d'Adam Archer (et de sa sœur Neela) devant l'immensité de l'univers, ses phénomènes indicibles, et le sens de l'inconnu. Les auteurs ne se contentent pas de faire du Kirby, ils réussissent à se connecter sur cette soif de la découverte, cette volonté d'aventure, ce besoin de remettre en question la place de l'homme dans l'univers. Il est possible de s'agacer des facilités narratives (bulles de pensées, ou situations trop infantiles dans leur conception) ; il est impossible de résister à cette pulsion de découverte, à cet environnement dont l'enchantement n'a pas disparu dans l'œil de celui qui le contemple. Le lecteur aura bien du mal à résister à l'envie de savoir ce que les aventures d'Adam Archer lui permettront de découvrir.
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Godland Volume 3: Proto-Plastic Party

Ce tome fait suite à Another sunny delight (épisodes 7 à 12). Il contient les épisodes 13 à 18, initialement parus en 2007, écrits par Joe Casey, dessinés et encrés par Tom Scioli, mis en couleurs par Nick Filardi. Il commence par une page de présentation des personnages, et une page de résumé. Cependant il vaut mieux avoir commencé la série par le premier tome.



Épisode 13 – The Never et Adam Archer sont prisonniers dans une dimension parallèle et asservis en esclavage pour exécuter des travaux forcés. Épisodes 14 à 18 – Adam Archer est de retour sur Terre, creusant un petit cratère en plein Central Park (mais sans blessés à déplorer). Neela Archer est toujours portée disparue dans une mission spatiale. Son frère n'arrive pas à la contacter mentalement, ce qui le conduit à supposer qu'elle n'est plus de ce monde.



Le Tourmenteur poursuit ses préparatifs pour se venger de Friedrich Nickelhead, qui a placé la tête de Basil Cronus sur le corps de la fille du Tourmenteur. La triade (Ed, Supra et Eeg-Ho) poursuit ses préparatifs pour faire exploser le noyau de la Terre. Neela subit des expérimentations aux mains de mystérieuses entités. Le général Beaumont Brigg (l'officier de liaison entre Adam Archer, et l'armée) constate qu'Archer agit de plus en plus de manière indépendante.



Ce tome commence par un résumé en 1 page des 2 précédents, et le lecteur peut ainsi constater de visu la quantité impressionnante de péripéties déjà survenues (il y a également une forme de résumé dans l'épisode 16, en quelques pages, le général Brigg rappelant les principaux événements à d'autres officiels). En cela, Joe Casey continue de respecter l'une des caractéristiques des comics des années 1960 : une intrigue dense (Haro sur la décompression !). Ce nouveau tome ne déroge pas à la règle : le récit avance vite, avec plusieurs intrigues secondaires. Comme la narration est dense, le lecteur n'éprouve jamais la sensation que les intrigues secondaires viennent détourner l'attention d'une histoire principale qui ne serait pas assez fournie.



Respectueux de leur lettre de mission d'origine, Casey et Scioli poursuivent leur histoire dans ce genre assez pointu qu'est le "Jack Kirby cosmique". Le lecteur retrouve les points d'énergie (Kirby crackles), le superhéros cosmique, les voyages dans l'espace, les dimensions alternatives, les gros monstres étrangers à l'humanité. Scioli continue de jouer avec les tics graphiques de Kirby : personnages avec les mains en avant, personnages ayant souvent la bouche grande ouverte ou entrouverte, ombrages plus conceptuels que réalistes, individus tout muscles bandés et prêts à bondir, costumes théâtraux pour les supercriminels.



Comme dans les tomes précédents, Tom Scioli respecte l'apparence des dessins de Jack Kirby, sans en reprendre l'esprit. C'est particulièrement patent pour les ombrages dont il se sert plus comme habillage des formes, sans qu'ils ne forment une composition à l'échelle de la case. C'est également manifeste dans la technologie d'anticipation, aussi vague que celle de Kirby, mais plus générique et moins conceptuelle d'un point de vue graphique. La conception des environnements souffrent parfois de ce manque de vision globale, en particulier dans la dimension de l'épisode 13. Paradoxalement, par comparaison, cela en devient un hommage d'autant plus poignant aux capacités imaginatives de Kirby, supérieures à celles de Scioli.



D'un autre côté, Tom Scioli réussit à faire coexister toutes les bizarreries du scénario dans un environnement visuel très cohérent. Il sait également donner l'apparence de Jack Kirby à ses dessins à chaque planche, à chaque case. Il adapte son découpage à la nature de chaque séquence, de 4 cases par page à 13 cases sur une page pour être cohérent avec le rythme de la narration. Il sait conserver la bonne mesure de naïveté visuelle pour que les passages les plus bizarres conservent une part de poésie (le corps de Neela démonté en pièces détachées).



Nick Filardi réalise la mise en couleurs à l'infographie, sans se restreindre au schéma chromatique des comics de la fin des années 1970. Il utilise des couleurs moins criardes, avec quelques nuances dans chaque teinte pour donner un peu de volume aux formes délimitées. Il réserve les teintes plus vives aux manifestations des superpouvoirs d'Adam Archer et aux rats anthropomorphes (habillés de bleu et rouge, serviteurs de Friedrich Nicklehead).



De son côté, Joe Casey semble prendre beaucoup de plaisir à rendre hommage à son idole, sans laisser de côté ses propres thèmes. Il insère quelques notes d'humour, soit par le biais du caractère d'Angie qui ne s'en laisse pas conter, soit par une remarque pince-sans-rire rappelant que les auteurs ont conscience de la nature de leur récit. Par exemple le narrateur omniscient observe que "Neela Archer ne peut même pas réussir une simple bulle de pensée" (= une réflexion intégrant la nature du media). Le lecteur ressent donc qu'il s'agit d'un récit bon enfant dont les péripéties sont à prendre au premier degré comme des aventures merveilleuses, sans plausibilité aucune.



Le lecteur constate également que Casey continue de développer une thématique sous-jacente, déjà présente dans les tomes précédents. Au premier abord, il est possible d'apprécier ce regard d'enfant capable de s'émerveiller devant les mystères enchanteurs de l'univers. Certes les péripéties participent d'un imaginaire enfantin, mais Casey sait transcrire et faire éprouver au lecteur ce plaisir à se lancer dans la découverte de contrées inconnues, d'explorer et d'apprécier les spectacles offerts par la création.



Le récit creuse encore la notion d'être suprême et de relation à l'autre. Dans le premier épisode, les créatures extradimensionnelles asservissent les autres races pour leur profit, sans chercher à établir une relation autre que de dominant à dominé. De la même manière Friedrich Nickelhead n'envisage la relation à l'autre que sous la forme de domination. À l'évidence les entités ayant capturé Neela Archer ne la considère que comme une créature de laboratoire sur laquelle conduire des expérimentations. Le superhéros Crashman est motivé par la gloire et son engagement à servir sa patrie. Stella et Angie Archer ont choisi une vie dans l'ombre de celle de leur frère.



Le lecteur en vient alors à considérer les motivations des individus qui semblent échapper à toute forme d'asservissement. Les motivations de Maxim (l'extraterrestre dont la morphologie évoque celle de Lockjaw, le chien des Inhumans) sont d'aider Adam Archer à maîtriser ses capacités pour aider l'humanité à évoluer vers un stade supérieur. Adam Archer reste guidé par ses émotions (son inquiétude vis-à-vis de sa sœur), et par son sens du devoir (avec de grands pouvoirs viennent de grandes responsabilités). Le général Brigg est motivé par son sens du bien de la communauté, dépassant le stéréotype du militaire borné ou inféodé à son devoir, sans capacité de réflexion. Basil Cronus est toujours à la recherche de la substance psychotrope qui lui permettra de se défoncer.



Les actions d'Adam Archer (avec Maxim et dans une moindre mesure Neela Archer) vont dans le sens d'une quête de la compréhension de l'ordre des choses, d'une interrogation sur l'existence éventuelle d'un être suprême (appelé Iboga), ce qui donnerait un sens à l'existence. Casey ne développe pas ces thèmes sous la forme d'une réflexion philosophique, mais les propos des personnages montrent qu'Iboga et les autres ennemis ne sont pas que de simples artifices pour créer une situation conflictuelle requérant l'usage de superpouvoirs.



Avec ce troisième tome, les auteurs persistent et signent : leur série sera entièrement dans le genre (assez pointu) "Kirby cosmique", sans concession (il ne s'agissait pas d'un dispositif artificiel pour attirer l'attention sur leur produit ; il suffit de regarder le nouveau personnage Lucky). La densité narrative ne faiblit pas, et l'usage des tics graphiques de Kirby est systématique. L'aventure grand spectacle est au rendez-vous, avec tout ce qu'elle peut avoir d'improbable : superpouvoirs, créatures extraterrestres, expédition spatiale, dimensions étrangères, etc. À eux deux, Joe Casey et Tom Scioli ne sont pas Jack Kirby (même le temps de cette histoire), mais ils racontent une histoire bien ficelée dans ce genre très pointu. En prenant un peu de recul, le lecteur constate que l'histoire de Joe Casey ne se limite pas à une suite de péripéties échevelées. Elle comprend également une dimension ayant trait à la soif de découverte, et une autre relative aux différentes formes de tutelles.
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Godland Volume 4: Amplified Now

Ce tome fait suite à Proto-plastic party (épisodes 13 à 18) ; il faut avoir commencé cette série par le premier tome. Celui-ci contient les épisodes 19 à 26, initialement parus en 2007/2008, écrits par Joe Casey, dessinés et encrés par Tom Scioli, avec une mise en couleurs de Nick Filardi. Le tome commence par une page de résumé, bienvenue même pour les lecteurs réguliers, car Casey a adopté une narration bien dense, quasiment compressée.



Adam Archer est emprisonné dans le building qui lui sert de quartier général, l'armée ayant estimé qu'il constitue une menace pour les États-Unis. Ce QG a été infiltré par Crashman (un superhéros en mission commanditée) qui doit neutraliser Adam Archer. À l'extérieur une entité en forme d'insecte s'attaque à la barrière qui empêche Archer de sortir, pour pouvoir l'attaquer.



Quelque part dans le désert du Nevada la Triade (3 entités extraterrestres Ed, Supra, et Eeg-Oh) a achevé la construction de leur bombe qui s'enfonce dans l'écorce terrestre pour faire exploser le cœur de notre planète, et anéantir ainsi toute vie sur Terre. Pendant que la bombe s'enfonce, la Triade va s'éclater en rasant Las Vegas. Neela Archer est toujours portée disparue dans l'espace. Le Tourmenteur a retrouvé la trace de Friedrich Nickelhead.



L'inspiration de Joe Casey ne faiblit pas pour alimenter son scénario en situation digne des récits de Kirby des années 1970, toujours aussi riche en péripéties et en rebondissements. Pourtant le cœur n'y est pas pour le premier épisode, et même le deuxième. Le lecteur constate que Scioli s'est lassé de concevoir des décors, ou même des arrières plans. Il se contente de traits vite faits pour figurer à la hâte les murs du QG des Archer, ou du QG militaire. Puis l'affrontement à Las Vegas semble se dérouler une scène quasi vide, avec de vagues silhouettes de buildings en arrière-plan, de temps en temps. Scioli s'investit uniquement dans les silhouettes des personnages. Il a même arrêté de s'inspirer des postures caractéristiques de Jack Kirby.



Heureusement Nick Filardi meuble les dessins avec entrain et habilité, ajoutant des couleurs vibrantes sur Adam Archer, les membres de la Triade et les monstres, pour un effet pop très séduisant. Il faut donc attendre le quatrième épisode pour que Scioli reprenne un peu du poil de la bête et propose des images plus élaborées, qui décoiffent et surprennent. La deuxième moitié est donc visuellement plus intéressante et plus réussie, peut-être aussi parce que l'intrigue se focalise moins sur des affrontements physiques. Encore que Casey s'amuse à intégrer une troupe de danseuses venues prêter main forte à Archer pour sauver Las Vegas dans la première partie, mais même cet élément burlesque, Scioli réussit à le rendre visuellement inintéressant.



Dans la deuxième partie, Scioli retrouve l'inspiration avec un des mythes fondateurs rattachés à Iboga, puis avec une version décalée de la réalité. Le lecteur retrouve le souffle cosmique de Kirby, et retrouve par là même son intérêt pour le récit. Dans la première moitié, Casey fait également un peu de recyclage, avec les mêmes blagues sur les sentiments éprouvés par la Triade, les mêmes dangers pour Adam Archer (dont lecteur sait déjà qu'il se sortira sans une égratignure, grâce à une nouvelle capacité de ses superpouvoirs).



Il faut donc là encore attendre la deuxième moitié du tome pour que Casey puise dans une inspiration plus novatrice (par rapport aux épisodes précédents de cette même série), avec un mythe sur Iboga (retour au thème de la déité toute puissante), et avec l'arrivée d'un autre humain doté de pouvoirs cosmiques. Le récit peut alors repartir, abandonnant les ennemis très méchants (et pas très futés), pour un axe de développement moins basique, avec plus de suspense.



Le lecteur constate que tout du long de ces épisodes la narration est centrée sur Adam Archer, un peu sur Maxim et sur Neela Archer. En ce sens, Joe Casey respecte bien la forme de narration des récits de superhéros qui font du personnage principal, un individu à part et au-dessus de la mêlée, capable d'améliorer le sort de l'humanité par le biais de ses seules capacités extraordinaires. Il ne plane aucun doute sur la fibre morale d'Adam Archer, se servant de ses pouvoirs pour le bien de tous. Ses actions sont dictées à la fois par la volonté consciente de protéger ses semblables des incroyables périls qui s'abattent sur la Terre, mais aussi par une volonté de comprendre. En cela, Casey dépasse le modèle traditionnel du superhéros, et s'inscrit dans la démarche de Jack Kirby : comprendre le monde qui m'entoure, observer ses merveilles, s'éveiller aux mystères insondables du cosmos.



Les épisodes 19 à 21 concluent de manière un peu mécanique les intrigues en suspens, sans réel enjeu pour Adam Archer dont les superpouvoirs viennent à bout de toutes les menaces physiques, avec une implication moindre de Tom Scioli (malgré un bon travail de Nick Filardi). Dans la deuxième moitié, le scénario introduit de nouveaux éléments et une dynamique différente, avec des dessins plus inspirés par Jack Kirby et plus étoffés.
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Godland Volume 5: Far Beyond The Bang

Ce tome fait suite à Amplified now (épisodes 19 à 24). Il s'agit de l'avant dernier tome, et il faut avoir commencé la série par le premier. Il contient les épisodes 25 à 30, initialement parus en 2008/2009, écrits par Joe Casey, dessinés et encrés par Tom Scioli, avec une mise en couleurs de Nick Filardi. L'histoire se termine dans Goodbye, Divine! (épisodes 31 à 36).



Adam Archer a obtenu l'aide de la NASA pour pouvoir retrouver sa sœur Neela Archer. Il commence par se rendre au siège de l'entreprise qui l'avait embauchée pour piloter un vaisseau spatial. Puis il utilise sa maîtrise récente de la téléportation pour se rendre sur une planète éloignée de la galaxie. Il se retrouve face à des entités cosmiques anthropomorphes à la puissance monumentale.



Sur Terre, Friedrich Nickelhead harangue les clients de sa résidence hôtelière pour réclamer des revendications sociales, à savoir la reconnaissance de droits pour les supercriminels. Ils décident d'investir le Capitol à Washington, puis de s'installer à la Maison Blanche. Une nouvelle entité cosmique a atterri sur Terre : Decimator, rien que ce patronyme constitue tout un programme.



Après un tome 4 en demi-teinte, Joe Casey et Tom Scioli ont retrouvé la source de leur inspiration et le récit repart de plus belle. Scioli continue de s'inspirer de Jack Kirby, pour les points crépitants (Kirby crackles) et les postures des personnages (main en avant vers le lecteur, bouche grande ouverte). Il ne se limite pas à reproduire ces particularités graphiques. Il utilise également d'autres aspects visuels de l'œuvre de Kirby. N'Ull Pax Mizer a des allures de croisement entre Psycho-Man (un ennemi des Fantastic Four) et Kang (un ennemi des Avengers). Suite à une transformation, son apparence s'approche de celle d'un Céleste (voir la série des Eternals). Leviticus a des allures d'Orion (des New Gods) avec son engin pour se déplacer dans les airs.



Le lecteur constate que Tom Scioli ne se prend pas au sérieux, il sait qu'il n'est pas Kirby et qu'il ne fait que perpétuer sa tradition. Le lecteur n'en apprécie que plus les éléments tellement exagérés qu'ils en deviennent absurdes. Il retrouve les souris anthropomorphes qui aident le Tourmentor, habillées soit en costume cravate, soit en costume de Superman. La tête de Basil Discordia continue de flotter de travers dans le bocal fixé sur le corps de la fille du Tourmenteur. Lucky est un monstre incroyable avec ses cerveaux au bout des tentacules sortant de son crâne. Scioli embrasse le côté enfantin, candide et kitch de l'imagination débridée de Jack Kirby.



Avec ces épisodes, le lecteur a l'impression que Tom Scioli a retrouvé toute sa motivation pour se montrer à la hauteur de cet hommage au Roi des comics. L'histoire se déroule majoritairement dans l'espace avec des combats grandioses plein de décharge d'énergie, entre des individus en armures technologiques, aux statures imposantes. Le lecteur en prend plein les yeux, le grandiose et le merveilleux sont au rendez-vous.



Même pour les scènes se déroulant sur Terre, Scioli se montre inspiré. La décoration de l'appartement d'Angie Archer est superbe et personnelle. Les discours de Nickelhead au sénat permettent d'apprécier le volume de la salle des débats.



Joe Casey est lui aussi en pleine forme, avec une verve cosmique en prise directe avec Jack Kirby. Adam Archer décide d'utiliser son pouvoir à des fins personnelles : retrouver sa sœur. Cela l'entraîne dans l'inconnu du cosmos, à faire face à des entités quasi divines, se tapant dessus pour cause de philosophie irréconciliable.



Casey reprend l'habitude de Kirby d'énoncer des préceptes parfois fumeux au travers de ses personnages. Ici N'Ull Pax Mizer croit au principe de la Finalité qu'il énonce tout haut, alors qu'il est tout seul. Casey réussit à faire croire au lecteur à la possibilité de ce principe en restant assez vague. Il ne s'agit pas de développer une thèse philosophique, mais de donner une dimension spirituelle à l'ennemi, ainsi qu'aux autres entités.



Le scénariste continue de raconter un récit compressé, sans être épileptique. Adam Archer continue de découvrir son rôle dans l'ordre des choses, ainsi que l'ordre supérieur des choses (à commencer par l'existence de races extraterrestres et d'autres divinités). Casey intègre les scènes obligatoires d'affrontements physiques avec des libérations d'énergie à une échelle inimaginable.



Comme Scioli, Casey ne se prend pas non plus au sérieux, il ne s'imagine pas Kirby à la place de Kirby. Cette conscience d'écrire un hommage lui permet d'introduire un peu d'humour. Ce dernier peut prendre la forme de la présence de Barak Obama à la Maison Blanche. Il peut également s'agir d'un papillon doré qui demande aux personnes présentes de regarder ses phylactères.



Ce cinquième tome repart de plus belle, rendant un hommage réussi à Jack Kirby, avec une intrigue cosmique à souhait, des visuels adéquats, pour une aventure ébouriffante. À l'issue du récit, le lecteur a retrouvé son goût pour l'inconnu fascinant de l'univers, ce qui pourrait exister au loin, d'autres intelligences, d'autres civilisations peut-être.
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Godland Volume 6: Goodbye, Divine!

Ce tome est le dernier de la série qu'il faut impérativement avoir commencé par le début, c’est-à-dire Hello, Cosmic!. Il contient les épisodes 31 à 36, ainsi que le numéro spécial "Finale", initialement parus entre 2010 et 2013, tous écrits par Joe Casey, dessinés et encrés par Tom Scioli, avec une mise en couleurs de Bill Crabtree (épisodes 31 à 35), puis Brad Simpson (épisodes 36 et Finale).



Le Tourmenteur a décidé de passer à l'action : il envoie ses souris anthropomorphes injecter un produit psychotrope à Basil Cronus, pour récupérer le corps de sa fille. Adam Archer et Neela Archer luttent au fin fond de l'espace contre R@d_Ur Rezz (celui qui a précédé Neela au niveau cosmique), avec l'aide inattendue de Maxim.



Sur Terre, Friedrich Nickelhead galvanise ses troupes pour que ces supercriminels aillent affronter Almighty Decimator. Le papillon cosmique commence à révéler les secrets de la réalité à Nickelhead.



Avec cette série, Joe Casey et Tom Scioli avaient décidé de rendre un hommage intelligent à Jack Kirby, en prenant ses aventures cosmiques comme un genre en soi, et en racontant un récit respectant les conventions de ce genre. Avec ce dernier tome, le lecteur retrouve Tom Scioli au meilleur de sa forme. Il ne se contente pas de singer les dessins de Kirby, ce qui n'aurait que l'apparence d'une mauvaise imitation. Il reprend les codes graphiques du maître : mains tendues en avant, individu aux proportions gigantesques, créatures flottant dans l'espace, avec des points d'énergie parcourant leur corps, technologie futuriste et monumentale, les mains géantes dans le ciel.



Le lecteur connaissant l'œuvre de Kirby repère également les citations de ses séries. Il voit des personnages évoquant les Éternels, les Forever People, les New Gods. Il sourit en voyant apparaître un robot géant évoquant les Sleepers des aventures de Captain America, avec la tête de Basil Cronus fixé sur son bas-ventre, comme une sorte de pénis à tête chercheuse.



En surface les dessins de Scioli rendent hommage à Kirby, mais en moins bien. Il ne maîtrise pas le rendu des textures. Il n'essaye même pas de de jouer avec les ombres pour les rendre expressionnistes. Heureusement, il bénéficie d'un metteur en couleurs (Bill Crabtree, puis Brad Simpson) qui habille ses dessins avec des couleurs ajoutant un peu de volume, sans en abuser. Cette technologie infographique n'existait pas à l'époque de Jack Kirby. Ici elle complète les dessins de Scioli pour leur donner le lustre et la profondeur nécessaires.



À l'évidence, Tom Scioli n'est pas Jack Kirby, mais il réussit des compositions de page parlantes, malgré le degré d'abstraction du récit. Toujours en utilisant les tics graphiques de Kirby, il donne à voir des combats titanesques, transcrivant avec conviction les conflits idéologiques qui opposent les combattants.



Dans le registre de l'innovation, Scioli s'émancipe de Kirby (sans rien perdre de sa démesure) dans le dernier épisode (Finale) qui se déroule 100 ans dans le futur, avec des représentations intelligentes de concepts échevelés, et une influence inattendue d'Osamu Tezuka dans la façon de dessiner le personnage principal (évoquant Phénix, l'oiseau de feu). Il est également très convaincant quand il imagine la fusion visuelle de 2 individus Adam Archer et Maxim (en Adamaxim).



Le lecteur attendait beaucoup de ce dernier tome. Depuis le départ, Joe Casey a conçu sa narration comme une quête d'un sens à la vie. Adam Archer a bénéficié d'un saut quantique dans l'évolution de la race humaine, lui permettant de voyager dans les étoiles, de rencontrer des races extraterrestres. Ce don lui a été octroyé par une entité supérieure dénommée Iboga. Les aventures d'Adam Archer s'accompagnent donc d'une quête spirituelle, d'une confrontation avec des formes de vie plus évoluées, avec une déité toute puissante.



Dans un premier temps, le lecteur a le plaisir de voir que Joe Casey mène ses intrigues à terme, qu'il s'agisse du devenir de Neela Archer, du Almighty Decimator, ou du sort de l'humanité. Il découvre même que l'épisode "Finale" se déroule 100 ans dans le futur apportant plus qu'une forme de coda au récit, puisqu'il s'agit d'une ouverture d'une ampleur inimaginable. Le conflit opposant Basil Cronus à Friedrich Nickelhead trouve sa résolution et le Tourmenteur n'est pas oublié. Il n'y a que le rôle de Lucky qui ne justifie pas sa présence dans le récit.



Comme dans les tomes précédents, le lecteur est frappé par la narration papillonnante de Joe Casey. Alors qu'il aborde des thèmes ardus et ambitieux tels que la place de l'homme dans l'univers, et sa possible évolution dans les siècles à venir, les séquences alternent entre les différents personnages, au beau milieu de l'exposition de leurs convictions. Casey provoque même le lecteur avec le papillon omniscient qui commence une phrase indiquant qu'il va tout expliquer et révéler à Friedrich Nickelhead, pour être coupé au beau milieu et ne jamais finir (un peu facétieux, ce Joe Casey).



Du coup le lecteur se retrouve balloté d'un point de vue à l'autre, passant d'une notion à l'autre, sans savoir laquelle prédomine vraiment. Il y a R@d_Ur Rezz qui évoque et promeut l'entropie (la perte d'énergie inéluctable jusqu'à la mort ou l'arrêt de tout système). Il y a Basil Cronus qui demande si vous avez fait des expériences (comme Jimi Hendrix, Are you experienced ?). Il y a ce personnage qui place la nécessité de s'adapter comme priorité. Lorsqu'Adam Archer recrée l'univers dans son entièreté, Joe Casey pose également la question de ce que pourrait être l'univers à l'image d'un unique individu.



Le scénariste aborde donc des thèmes philosophiques fondamentaux dans une pagaille organisée, mais non linéaire, et à la progression qui semble hasardeuse. Le lecteur attend pourtant que le scénariste tienne sa promesse d'une révélation sur l'ordre des choses, sur le sens de la vie, sur un Dieu. D'un côté, c'est déraisonnable d'en attendre autant d'un simple comics. D'un autre côté, Joe Casey tient sa promesse à sa manière. Il apporte des réponses d'une candeur exaspérante quand un des personnages dit que le sens de la vie est simplement d'être vécue, de vivre des expériences. Il envoie un message peu clair quand Basil Cronus insiste sur la défonce comme objectif, comme moyen de se divertir, sans autre souci.



Toutefois, au fil des épisodes, le lecteur constate qu'une évolution revient à plusieurs reprises comme une l'alternative à l'individualité. Casey reprend un thème déjà développé par Kirby dans la série Eternals, celui de la conscience collective. Il le présente et le développe à sa manière, apportant une réponse à la question du sens de la vie (non pas ce qu'elle signifie, mais vers quoi elle pourrait se diriger). Au fur et à mesure des épisodes (et avec "Finale"), le lecteur constate qu'il ne s'agit pas d'une fumisterie de la part de Casey, mais bien d'une proposition logique.



En terminant ce dernier tome, le lecteur se dit que Joe Casey et Tom Scioli se sont montrés bien plus ambitieux que ces combats à grands coups de poing et décharge d'énergie ne le laissaient supposer, bien plus ambitieux que de faire un récit à la manière de Jack Kirby en mode cosmique. Ils ont respecté à la lettre l'idée de se servir des conventions du genre cosmique pour interroger la place de l'être humain dans l'univers, l'existence potentielle d'un Dieu, les prochains stades de l'évolution de l'humanité. Leur mode narratif à base de superhéros (superpouvoirs et altruisme comme le sacrifice de Neela) et de contre-culture (Basil Cronus et son usage de psychotropes) peut agacer, mais la sincérité de leur démarche ne fait pas de doute.



La façon désinvolte dont ils intègrent les conventions les plus bas du front (un coup de pied dans les joyeuses d'une entité cosmique) peuvent faire grincer des dents, ou sourire, ou encore prouver qu'ils ne souhaitent pas péter plus haut que leur derrière. Ils ne se prennent pas pour des philosophes académiques, ils transcrivent ce que leurs expériences leur ont enseigné. Leur récit est une déclaration sur la force de la volonté, la limitation de la perception humaine, le pouvoir de créer, la possibilité d'un Dieu tout puissant, le besoin de spiritualité, la soif de progresser. Pour Adam Archer et ses descendants, il y a et il y aura toujours des choses à découvrir. Il y aura toujours une progression à effectuer. C'est une profession de foi honnête qui revêt une forme bizarre, mais aussi idiosyncrasique que cohérente pour un lecteur de comics chevronné.
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Godland, tome 1 : Hello, Cosmic !

Ce tome est le premier d'un récit complet en 6 tomes. Il contient les épisodes 1 à 6, initialement parus en 2005, écrits par Joe Casey, dessinés et encrés par Tom Scioli, avec une mise en couleurs de Bill Crabtree.



De nos jours, sur Terre, le centre spatial Kennedy (à Cap Canaveral) a détecté la chute d'un corps céleste sur Terre. Ils préviennent l'armée. Un général relaie l'information à la Tour de l'Infini à New York, pour qu'Adam Archer se rende sur place et utilise ses fabuleux superpouvoirs pour prendre la mesure de ce mystère. Sur place (en Chine), il découvre qu'il s'agit d'un extraterrestre dont la forme évoque celle d'un chien géant.



La prise de contact est brutale mais semble s'acheminer vers une compréhension mutuelle, quand arrive Basil Cronus (une tête flottant dans un bocal relié à un corps mécanique), bien décidé à capturer l'extraterrestre par la force, pour l'asservir. Dans sa forteresse arctique, Discordia retient captif Crashman (un superhéros) et le soumet à la torture régulièrement.



À la découverte de la couverture (et en feuilletant l'intérieur), le lecteur est frappé par l'aspect graphique qui ressemble de très près à du Jack Kirby en mode cosmique. Le lecteur identifie facilement les emprunts faits aux dessins de Kirby. Le premier qui saute aux yeux est les points d'énergie (Kirby crackles), ces gros points noirs assemblés en agrégat qui évoquent l'énergie bouillonnante qui habite certains personnages, ou qu'ils émettent.



De même, le lecteur reconnaît les ombres portées aux formes plus conceptuelles que réalistes, les bouts de doigts carrés, et les postures de personnages (le bras tendu en avant vers le lecteur). Il y a aussi le registre limité des expressions de visage, avec la bouche entrouverte, le vide de l'espace encombré par des corps céleste sphérique, la forme de l'extraterrestre qui évoque Lockjaw (le chien des Inhumains), la forme simplifiée des canons des armes à feu, la combinaison antiradiation des scientifiques (qui évoquent les combinaisons de l'AIM), etc.



À la lecture, il apparait des différences notables, comme les ombres portées conceptuelles inexistantes sur les décors (alors que très présentes chez Kirby), la représentation de la technologie (plus concrète chez Scioli, plus abstraite chez Kirby), les piercings d'Angie Archer (impensable chez Kirby), les épaules hypertrophiées (tics graphiques spécifique à Scioli). De même Scioli développe plus ses arrières plans que Kirby. Par contre c'est avec plaisir que le lecteur constate que Scioli n'a pas peur de faire sourire ses personnages, comme pouvait le faire Kirby.



Du point de vue du récit, Joe Casey emprunte tout autant à Jack Kirby, qu'il s'agisse des éléments de science-fiction de la série Fantastic Four, ou de l'influence de "2001, l'odyssée de l'espace" (film de Stanley Kubrick, dont Jack Kirby avait réalisé l'adaptation en comics). L'influence de Kirby ne s'arrête pas là. Casey a également repris les modalités narratives telles que les personnages qui parlent à haute voix pour expliquer ce qu'ils font et leurs motivations, quelques bulles de pensée (pas très nombreuses), et un langage un peu écrit et emphatique.



Oui, mais pourtant ce n'est pas du Jack Kirby des années 1970, ou 1980. Tom Scioli ne donne pas entièrement le change. C'est comme s'il maîtrisait le vocabulaire de la langue Kirby, sans en maîtriser totalement la grammaire. Ça ressemble à du Kirby, mais ça n'a pas le goût du Kirby, ce qui au final est plutôt un compliment qu'un reproche. Scioli réalise des dessins mémorables : des pas d'Adam Archer sur le sol de Mars, à la tête flottante dans son bocal de Basil Cronus, en passant par l'assurance arrogante de Discordia.



À condition de supporter cette apparence très années 1970, le lecteur se plonge confortablement dans un récit dont il connaît les codes sur les bouts des doigts. C'est comme de revêtir un vieux pull, ou de s'installer dans son vieux canapé un peu défraîchi. Il sourit même devant ce bouton d'appel au secours, dissimulé dans la botte de Crashman.



Derrière cette tonalité globalement d'un autre âge, le lecteur commence par être saisi de l'intensité de certaines séquences. Casey et Scioli ne font pas que rendre hommage à Jack Kirby, ils s'abreuvent à la même source d'inspiration que lui. Ils transcrivent avec la même intensité que lui l'émerveillement un peu terrifié du cosmonaute sur Mars, saisi par la conscience de la beauté de l'univers et par son insignifiance et sa fragilité d'être humain. Même dans les affrontements physiques, les auteurs capturent l'énergie de Kirby, montrent l'implication totale des combattants dans l'instant présent, et la réalité du danger qu'ils affrontent.



Enfin presque parce qu'il y a un ou deux clin d'œil indiquant que les auteurs jouent avec les conventions des comics de superhéros. Il peut s'agit de cette flottant dans un bocal, avec toujours une forte inclinaison, lui donnant une allure comique. Il y a également Friedrich Nicklehead en train de manger du popcorn devant sa télé, pendant le procès de Discordia. Ils ne se moquent pas des personnages qu'ils mettent en scène, ou des conventions des comics. Ils montrent qu'ils savent qu'ils s'adressent à des adultes, eux-mêmes conscients du caractère enfantin des comics de superhéros.



Néanmoins, Casey et Scioli ne se cantonnent pas à réaliser un comics de superhéros à la manière de Jack Kirby (ce qui n'est déjà pas une mince affaire). Ils conservent leur propre identité, ce qui aboutit à un comics qui est à ranger dans les hommages récits, et non dans les plagiats insipides. En outre, ils développent plusieurs thèmes sur la base d'opinions différentes de celles exposées par Kirby dans ces comics.



Cela commence avec ce conclave de têtes flottantes qui ont donné des pouvoirs à Adam Archer, qui ont artificiellement accéléré son évolution pour le faire passer au stade supérieur. Pris au premier degré, il s'agit d'une intervention similaire à celle du monolithe dans "2001 l'odyssée de l'espace". Mais par la suite, les auteurs pointent du doigt le côté anthropocentrique du dispositif, accordant une importance démesurée à la race humaine, par le biais d'un cadeau désintéressé.



Il y a également les tortures infligées par Discordia qui sonnent faux, et qui sont justifiées par une inclination à faire le mal (une motivation classique et idiote dans les comics de superhéros). L'issue du procès montre que ces motivations n'ont que peu de poids face à un criminel endurci. Casey s'amuse également beaucoup avec Maxim (l'extraterrestre dont la forme évoque celle de Lockjaw) car il est capable de lire les motivations réelles et intimes de chaque personnage, disant tout haut ce qu'ils préfèreraient rester tu.



Par le biais de ces exagérations ou de ces remarques, Joe Casey interroge les conventions des comics de superhéros, non pas en s'en moquant, mais en les rendant apparentes. Il incite le lecteur à être critique face à ces éléments auxquels il attribue sa suspension consentie d'incrédulité de manière mécanique à la lecture de comics de superhéros. Il ne s'agit pas d'une déconstruction à proprement parler puisque Casey utilise ces conventions au premier degré. Il s'agit plus de leur redonner du sens grâce à un point de vue conscient de ce qu'elles sont.



Joe Casey et Tom Scioli réalise un hommage impressionnant aux comics de Jack Kirby, appartenant au registre de la science-fiction. Cet hommage fait honneur au maître, et il contient également des idées propres aux auteurs qui explorent les en douceur les conventions admises des comics de superhéros.
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Haunt, Tome 4 : Rupture

Nathan Fox a un style très vif qui rappelle par certain côté l'énergie de gens comme Paul Pope. C'est très personnel avec une vraie vie qui explose dans chaque planche. Son sens des noirs, des ombres, de la texture font de la plupart des cases un vrai plaisir des yeux !
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Haunt, Tome 4 : Rupture

Un volume 4 qui pourrait permettre au nouveau lecteur d'entrer dans la série, sans forcément aller se boulotter tout ce qui précède. Malgré tout, c'est une très sympathique série qui mérite toute votre attention !
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Hip Flask, Tome 1 : Sélection contre nature

intéressant mais dérangeant tant pour le graphisme que pour le scénario
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Jesusfreak

Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. Ce récit est initialement paru en 2019, sans prépublication. Il est écrit par Joe Casey, dessiné et encré par Benjamin Marra, avec une mise en couleurs réalisée par Brad Simpson. Le design de l'ouvrage a été conçu par Sonia Harris, et le lettrage réalisé par Rus Wooton. Dans l'introduction d'une page, les auteurs précisent qu'il ne s'agit pas d'une reconstitution historique, ou religieuse. Ils ont effectué des recherches préalables, mais ont choisi d'appliquer quelques simplifications, à commencer par un langage unifié (l'araméen). Ils écrivent noir sur blanc (l'inverse en l'occurrence, des lettres blanches sur une page noire) que leur récit n'est pas dépendant de l'existence ou non d'un individu nommé Jésus. Ce tome comprend également une note des auteurs d'un peu plus d'une page revenant sur le fait que les comics permettent d'aborder tous les sujets possibles et imaginables. La page précédant l'histoire présente une carte situant les villes de Jérusalem, Bethléem, Bethabara, Sepphoris, Nazareth et Macheronte.



En 26 de notre ère, à Sepphoris la capitale de la Galilée, Jésus est en train de se recueillir plutôt que de travailler au chantier du palais. Simon vient le trouver pour lui dire qu'il doit se remettre à l'ouvrage. Il lui répond que ses migraines sont de retour, plus fortes que jamais. Il leur rappelle qu'ils sont venus là depuis Nazareth parce qu'il y a du travail rémunéré. Mais il ne voit pas pourquoi il devrait consacrer sa vie à bâtir une construction à la gloire d'un empereur romain. À Jérusalem, le nouveau préfet de Judée est en train d'entrer en ville pour prendre ses fonctions : Ponce Pilate, succédant à Valérius Gratus. Il se dirige vers le temple pour rencontrer Caïphe le grand prêtre du Temple de Jérusalem. Il souhaite en effet mettre un terme très rapide aux prêches des faux prophètes et des soi-disant messies. La nuit tombée, les travailleurs vont dormir dans un camp de fortune, n'ayant plus la force de faire le trajet retour vers leur ville. Mais les nuits de Jésus sont agitées car il est en proie à des cauchemars douloureux dans lesquels des démons se battent contre la divinité, le conflit entre l'amour et la haine. Les autres n'ayant pas ces cauchemars, il estime que cela le rend différent, et il se demande si ces cauchemars ne sont pas des paroles proférées par il ne sait qui.



Réveillé par ses cauchemars, Jésus se lève et retourne dans Sepphoris. Il est conscient des injustices sociales perpétuées par la bureaucratie romaine. Alors qu'il se tient dans un théâtre en plein air, un gros lézard s'adresse à lui. Jésus se demande s'il est encore en train de rêver. Le lézard lui répond que c'est à Jésus de décider ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas. Alors que Jésus évoque les prophètes qui entendent une voix divine, le lézard indique qu'il s'agit de charlatans religieux uniquement dans la partie pour faire des affaires, mêmes les Zélotes ne sont en fait intéressés que par leurs objectifs politiques. Il lui dit que la vérité qu'il cherche est en lui. Le lendemain, Jésus ne rejoint pas ses compagnons au chantier. Il s'installe en position de tailleur pour méditer, pour étudier la rage qui est en lui, mais aussi la confusion et l'illumination. Il entreprend de voyager jusqu'à la rivière du Jourdain. Sur ses rives, il assiste à un baptême réalisé par Jean le Baptiste. Ce dernier sent immédiatement sa présence. Jean le Baptiste rentre avec lui dans Bethabara pour lui expliquer la raison de ses actions. Après l'avoir écouté, Jésus voit une femme s'avancer vers lui : Marie de Magdala.



En découvrant cette bande dessinée, le lecteur perçoit tout de suite les signes d'un ouvrage de type underground : jaune vif de la couverture, plusieurs images pour composer la couverture avec des couleurs délavées par endroit, police de caractère évoquant celles utilisées pour les titres de films de genre exploitation dans les années 1970. Au fur et à mesure, il relève d'autres signes, à commencer par une forme de naïveté dans les dessins, lui faisant se demander si l'artiste maîtrise bien son métier, ou s'il s'agit d'un amateur. Jésus porte le même pantalon du début jusqu'à la fin, toujours pied nu. Ponce Pilate apparaît systématiquement en armure d'apparat. Les autres personnages portent des vêtements génériques, possiblement d'époque, mais sans assurance. Quand il y en a, les décors semblent en carton-pâte. Quand Jésus se tient devant la ville de Sepphoris, le dessinateur représente un groupement de maisons déposées au petit bonheur sur une surface désertique, sans distinction entre les maisons (elles sont toutes construites sur le même modèle), sans logique d'urbanisme. 50% des cases sont dépourvues d'arrière-plan. Le lecteur sourit franchement quand il voit que le corps de Jésus est celui d'un individu à la musculature bien découplée, qu'il ne porte pas de chemise ce qui permet d'admirer ses pectoraux et qu'il ressemble fortement à Bruce Lee. Il adopte d'ailleurs des postures évoquant l'acteur, aussi bien quand il se bat à main nue, que quand il se met en position de méditation. Le lecteur relève également que le scénariste confond Bethabara avec Béthanie-au-delà-du-Jourdain, et Marie de Magdala avec Marie de Béthanie. Pourtant…



Pourtant, malgré des cases frisant parfois l'amateurisme et les imprécisions sur les éléments bibliques, le lecteur se rend compte qu'il accepte bien volontiers de suivre les auteurs dans leur récit. Joe Casey n'en est pas à son premier récit étrange : il est également l'auteur d'une série de superhéros dont le thème est annoncé dans le titre Sex avec Piotr Kowalski, d'un superhéros à la morale très personnelle Butcher Baker The Righteous Maker avec Mike Huddleston, ou encore d'une série prenant les récits cosmiques de Jack Kirby comme un genre à part entière Godland avec Tom Scioli. De même, Benjamin Marra est l'auteur de plusieurs récits jouant sur des conventions de genre représentées au premier degré pour un décalage analytique, comme Terror Assaulter: O.m.w.o.t. (One Man War on Terror), American Blood,Night Business. En outre, dans la postface, ils indiquent que leur intention est de revenir à forme narrative plus libre pour retrouver l'inventivité de défricheurs dans les comics, citant plusieurs œuvres dont Brought to Light: Shadowplay (1989) par Bill Sienkiewicz & Alan Moore.



De fait, derrière l'usage de conventions de genre inattendues (à commencer par celles du Kung-Fu), le lecteur se rend compte que les auteurs évoquent le parcours de Jésus, en s'attachant à montrer comment il a pu devenir un meneur religieux de première importance, suivi par des disciples et par le peuple. Casey & Marra se livrent à un exercice délicat dans lequel le lecteur connaît déjà le résultat (l'avènement du Messie), où ils montrent comment il en arrive là. Mine de rien, ils évoquent (très) rapidement le contexte de l'époque, en particulier l'existence de nombreux prophètes et de messies. Ils s'attachent au questionnement intérieur de Jésus, le scénariste faisant usage du commentaire de Simon reconstituant à posteriori l'évolution de la pensée de Jésus, ou mettant en scène des allégories comme ce lézard qui parle. S'il parvient à dépasser l'apparence naïve des dessins, le lecteur se rend compte qu'il peut aussi envisager la narration visuelle comme une interprétation imagée de ce que ressent Jésus, de sa façon d'envisager les choses. Avec ce point de vue, la narration visuelle fait plus sens. Effectivement, elle rend visible les conflits intérieurs qui agitent l'esprit de Jésus. Il ne s'agit plus de réaliser une reconstitution historique fidèle, mais de rendre apparents des états d'esprit, une forme populaire d'art naïf (même si des fois le lecteur se dit que le dessinateur serait bien en peine de réaliser des dessins plus techniques).



Avec ce point de vue, le récit fait sens : Jésus se forge progressivement une conviction intime sur les inégalités sociales qu'il voit tous les jours, sur la nature de la tourmente qui agit son esprit. Joe Casey se garde bien de porter un jugement sur la réalité de la présence divine, mais il se garde bien également de railler Jean le Baptiste ou Jésus, ou même de prendre un ton moqueur. Au regard des positions d'art martial utilisées pendant les 2 combats physiques, les convictions des 2 hommes ne sont pas plus incongrues. L'approche politique fait sens : Jésus refuse d'accepter que la domination des romains en Judée condamne le peuple à la pérennité des injustices. Il devient logique et légitime que Jésus se révolte en utilisant la force à 2 reprises. Lorsqu'il se retrouve face à Jean le Baptiste dans la forteresse de Macheronte, Jésus se retrouve à nouveau face aux convictions de Jean le Baptiste, à sa révolte non-violente. Le lecteur y voit les prémices de la nouvelle foi professée par Jésus par la suite.



Peut-être attiré par les auteurs, le lecteur sait en voyant la couverture et le titre qu'il va plonger dans un récit marqué par une forme désuète, utilisant des conventions de genre naïves, et mettant en scène Jésus de manière peu conventionnelle. Effectivement, Benjamin Marra réalise des dessins naïfs, au point parfois de faire se questionner le lecteur sur le niveau réel de l'artiste. Le scénario transforme Jésus en un combattant à main nue, extraordinaire, une sorte de guerrier maîtrisant un art martial et enclin à la méditation. Sous réserve qu'il accepte ces formes de surréalisme et qu'il accepte que les auteurs manient sciemment le symbolisme, le lecteur se rend compte que les Marra & Casey mettent en scène un questionnement pertinent : comment Jésus a-t-il pu avoir la conviction qu'il était un prophète légitime ? Comment a-t-il pu convaincre une partie significative de la population quant à l'honnêteté de ses convictions, l'intelligence de ses propos ? Cette lecture est à réserver à des lecteurs consentants par une forme volontairement naïve, pour mieux dérouler un propos réfléchi.
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Les Vengeurs 02 : Les plus grands héros de la..

On continue sur la lancé du premier tome, et cette fois on revisite les origines de la seconde équipe des Avengers, avec Hawkeye, la Sorcière Rouge et Quicksilver.



Un second tome que j'ai trouvé un peu en deçà du premier.

Le scénario tout comme pour le premier n'est pas le point fort de l'œuvre. Mais la où sur le premier tome le traitement des personnages était intéressant, sur la longueur cela marche moins bien.
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MCMLXXV, tome 1

Ce tome comprend une histoire complète et indépendante de toute autre. Il contient les 3 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2018, écrits par Joe Casey, dessinés et encrés par Ian Macewan, avec une mise en couleurs réalisée par Brad Simpson. Il y a également les 3 couvertures originales réalisées par Macewan, ainsi que les couvertures variantes réalisées par Dustin Weaver, Sloane Leong, Morgan Jeske, Farel Dalrymple, Artyom Trakhanov.



En 1975, la nuit, Prefect Patterson prend l'antenne sur la radio WMAK FM pour une émission de musique et d'informations, à Manhattan. Dans une rue de l'île, un homme en imperméable avec un attaché-case hèle un taxi. Il monte à l'arrière et indique l'adresse : Ryders Alley. Pamela Evans enclenche le compteur et commence à rouler avec la radio sur WMAK FM. Patterson annonce que la soirée va commencer avec Kool & the Gang, suivi par les O'Jays, dans la pure veine du Rythm & Blues. Il demande aux auditeurs de faire à attention à eux car c'est un monde étrange. Alors que la circulation est fluide, des ninjas surgissent en plein milieu de la rue où Pamela Evans est en train de circuler. Elle écrase l'accélérateur et en renverse une bonne dizaine, mais n'arrive pas à contrôler son dérapage et va percuter un stand de journaux sur le trottoir, inoccupé à cette heure. Elle conseille à son passager de rester dans le taxi et de n'en sortir sous aucun prétexte. Elle prend son démonte-pneu sur le siège passager et sort dans la rue. Elle est vite entourée par les ninjas car ils en ont après elle.



Pamela Evans s'avance vers les ninjas et son démonte-pneu se met à luire d'une lumière électrique bleutée. Elle fait tournoyer son démonte-pneu autour d'elle, blessant mortellement plusieurs ninjas. Au micro, Prefect Patterson annonce le titre suivant : Superstition de Stevie Wonder. Il ne reste plus qu'un seul ninja debout. Il interpelle Pamela Evans en lui indiquant qu'elle a encore de beaux restes en combat, mais pas assez pour la sauver de l'inéluctable. Il lui rappelle la nature des forces qu'elle combat, et lui annonce que se seront bientôt des armées entières qui fouleront le sol de Manhattan. Elle l'achève en lançant son démonte-pneu qui lui fracasse le crâne. Elle remonte dans son taxi et amène son client à bon port. Celui-ci descend et oublie presque de payer. Elle le rappelle à l'ordre. Sa nuit finie, elle ramène son taxi à la compagnie qui l'emploie. Grizzly, le propriétaire, lui remonte les bretelles au vu de l'état de la calandre. Elle le rabroue en indiquant qu'elle est son meilleur employé et rentre chez elle, dans un appartement de Harlem. Elle y retrouve Prefect Patterson qui a sorti un disque de Marvin Gaye de sa pochette et s'apprête à le mettre sur la platine. Pamela Evans évite savamment ses questions trop précises sur sa nuit de travail et ils finissent au lit.



L'éditeur Image Comics laisse les auteurs libres de choisir le format de leur histoire, tout en les conseillant sur les ventes potentielles. Ainsi Joe Casey peut régulièrement proposer des projets sortant du format traditionnel de la minisérie, sortant des sentiers battus de la production mensuelle : The Milkman Murders avec Steve Parkhouse, Valhalla Mad avec Paul Maybury, ou encore Jesusfreak avec Benjamin Marra. Au bout de quelques pages, le lecteur identifie la nature de l'histoire : un hommage pas tant à la Blaxploitation, qu'aux films urbains des années 1970 comme [[ASIN:B000059H1Z The Warriors]) (1979) de Walter Hill, avec une pincée de surnaturel. Pamela Evans n'est pas Pam Grier, mais une femme noire avec une bonne carrure, se battant comme un homme contre des créatures surnaturelles qui ne l'impressionnent pas le moins du monde. Il s'agit d'un récit court (3*20 pages) et les auteurs doivent aller à l'essentiel. Joe Casey indique que Pamela Evans a été enlevée à ce monde quand elle était encore enfant, qu'elle a appris à se battre, et qu'elle a combattu des années durant pour de mystérieux individus sur une planète dans une autre dimension. Elle n'a pas froid aux yeux, et elle semble habituée à voir ses proches mourir. Aucun détail superflu, droit à l'essentiel. L'intrigue est à l'avenant : simple et directe. Pamela Evans se bat contre chaque apparition de créatures surnaturelles et leur défonce la tronche à coup de démonte-pneu.



Joe Casey rend hommage à The Warriors de plusieurs manières. Il y a d'abord la présence de l'animateur de radio qui accompagne les nuits de travail d'Evans dans son taxi. Le scénariste a choisi une bande son très classique : Kool & the Gang, O'Jays, Ben E. King, Marvin Gaye, Stevie Wonder. Là encore il s'agit d'aller à l'essentiel, et il n'y a pas le temps d'étaler une culture musicale de spécialiste. Il y a ensuite les gangs de rue : Morningside Hooligans, MG Arzachs, Aristocrats, Diamond Dogs, Sapphire Stompers. Le lecteur peut détecter un hommage à Moebius (avec Arzach) et un autre à David Bowie (avec Diamond Dog). Là encore l'évocation des gangs de rue va droit au but : chaque gang dispose de sa tenue spécifique (ses couleurs) en lien direct avec son appellation (les chapeaux allongés des Arzachs), ce qui fait son unité. Aucun membre de gang n'est individualisé ou nommé : il s'agit d'un groupe unifié par un quartier ou un trait de culture populaire.



Il appartient donc à l'artiste de donner de la consistance à chaque élément évoqué rapidement pour que les éléments du récit ne se limite pas à une simple enfilade de noms sans consistance ou d'éléments en carton-pâte. Dans les 3 ou 4 pages où il représente les façades d'immeubles, l'artiste sait retranscrire les enseignes au néon de l'époque, et retrouver l'ambiance nocturne de la rue. La case de la largeur de la page avec uniquement la bouche de Prefect Patterson proche du micro capture bien également l'impression donnée par les images de The Warriors (et d'autres films), avec cette présence désincarnée au milieu de la nuit susurrant des phrases aux auditeurs, aux oiseaux de nuit. Cette image fait prendre conscience au lecteur que Joe Casey a inversé le cliché : c'est un homme qui adopte un ton sensuel, au lieu d'une femme. Par contre les images n'indiquent pas comment Prefect Patterson peut être informé aussi rapidement de ce qui passe dans les rues. L'évocation de l'époque apparaît également dans les tenues vestimentaires. Ian Macewan n'en fait pas trop de ce côté-là. Pamela Evans porte des fringues utilitaires, sans recherche particulière, sans suivre une mode. Le dessinateur réserve cette approche aux tenues des gangs : les costumes d'Arzach tous droit sortis de la bande dessinée du même nom de Moebius, les cuirs classiques des Sapphire Stompers, les tenues de footballeur pour un autre gang avec de belles chaussettes montantes, les tenues affriolantes blanches et les rollers pour les Sukkas. En termes d'évocation de l'époque, ce qu'il capture le mieux, ce sont les gestes de Prefect Patterson pour manipuler avec une infinie précaution ses disques vinyle. Le lecteur qui en a manipulé reconnaît tout de suite cette manière de se saisir de la galette.



Dans ce mélange entre film de genre de type urbain des années 1970 et film de Fantasy, il revient également à l'artiste de donner corps aux créatures surnaturelles. Les ninjas ont une apparence très classique avec une tunique rouge, des pieds dans des bandelettes qui montent jusqu'au genou et des bandelettes autour des main et des poignets. La créature humanoïde qui apparaît à la fin du premier épisode n'est pas très originale sur le plan visuel, oubliée dès Pamela Evans lui a fait avaler son extrait de naissance. Les autres créatures apparaissant par la suite ne bénéficient pas de gros plan, et ne constituent pas un intérêt visuel significatif. Le lecteur se rend compte que la force graphique d'Ian Macewan réside plus dans sa mise en scène des combats. Dans le premier épisode, le lecteur peut voir la détermination de Pamela Evans fonçant dans le tas, avec es ninjas qui en prennent pour leur grade. Dans le second épisode, le lecteur souffre pour elle alors qu'elle se fait pilonner par l'humanoïde surnaturel. Puis il ressent sa douleur alors qu'elle regagne son appartement en claudiquant et en perdant du sang. Enfin dans le troisième épisode, il s'en donne à cœur joie pour montrer les différents gangs se lançant dans la mêlée, et les créatures accusant le coup de leur attaque.



En découvrant ce récit en 3 épisodes, le lecteur sait qu'il va s'agir d'une histoire rapide. Effectivement, Joe Casey n'a pas de temps à perdre. Il intègre des éléments piochant dans des conventions de genre, avec un hommage appuyé au film The Warriors de Walter Hill. Le résultat est rapide et concis. Ian Macewan fait le nécessaire pour représenter les différents éléments avec un niveau de détails suffisant pour qu'ils soient consistants. Certains sont très réussis (les tenues des différents gangs, le taxi), d'autres sont moins développés (les monstres surnaturels). Le plaisir du lecteur dépend de sa sensibilité et de ce qu'il est venu chercher. Si un simple hommage à ce film suffit à lui faire revivre les sensations associées, 4 étoiles. S'il souhaite une histoire suffisante pour elle-même, 2 étoiles.
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Nixon's Pal

Un album qui démontre une nouvelle fois que les comics ne sont pas que du super héros, d'une part, et, ensuite, que ces jeunes générations d'auteurs ont encore pas mal de bonnes choses dans leur manches.
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Nixon's Pal

Il s'agit d'un récit complet et indépendant de tout autre, écrit par Joe Casey, dessiné et encré par Chris Burnham. Ce tome est paru pour la première fois en 2008. Il est réédité en 2015, en format plus grand que les comics, avec une couverture rigide. Joe Casey est un scénariste original dans le monde des comics, avec un ton assez débridé, voir Butcher Baker, The righteous maker, The Bounce, ou encore SEX, ou la série "Godland", à commencer par Hello, Cosmic!. Depuis 2008, Chris Burnham a travaillé avec Grant Morrison sur Batman (voir Batman Incorporated Vol. 1: Demon Star), ce qui a certainement conduit Image à ressortir cette histoire dans un meilleur format.



Nixon Cooper exerce le métier de contrôleur judiciaire (probation offier). Alors que l'histoire commence, il attend devant l'immeuble d'un de ses "clients", en répondant de manière acerbe au téléphone à sa femme Angela qui se plaint de son absence. Il lance une dernière réplique pour l'agacer, raccroche et monte jusqu'à l'appartement de Bricklayer.



La reprise de contact avec Bricklayer est assez conflictuelle, et Nixon Cooper se retrouve à l'hôpital avec un bras dans le plâtre. Pendant son évanouissement, il éprouve la sensation de se retrouver à flotter dans l'espace, dans une combinaison d'astronaute. Il retourne faire son rapport à Murphy (son supérieur) qui lui conseille d'aller voir son protégé suivant : Steven Kandevitch (Sputter Kane).



Sur la quatrième de couverture, les éditeurs ont accolé une citation de de Chris Burnham, dans laquelle il déclare que "Nixon's pals" est une des meilleures choses que Joe Casey ait écrite. Il y a va peut-être un peu fort (sachant que Casey a écrit des histoires vraiment exceptionnelles, voir le début de ce commentaire). Dans cette histoire, ce scénariste mélange les conventions de 2 genre : celui des superhéros, et celui des polars de type hardboiled.



Côté superhéros, Joe Casey choisit une approche de type cyberpunk. Il n'enjolive pas les individus dotés de superpouvoirs. Il n'y a pas de jolis costumes colorés, ni de démonstration de décharges d'énergie pyrotechniques. En fait il n'y a pas même pas de superhéros, mais que des supercriminels. L'existence de superpouvoirs n'a pas rendu le monde plus beau ou plus enchanteur, il a juste donné naissance à des individus déformés par leurs capacités, des monstres souhaitant profiter de leurs pouvoirs pour se faire du pognon facile, à condition qu'ils n'en meurent pas avant.



Côté hardboiled, le lecteur retrouve également quelques spécificités de ce genre. Cela commence par le privé (ici un contrôleur judiciaire) qui aime son boulot, bien qu'il s'agisse d'une tâche ingrate, qui subit le mauvais caractère de son chef, et les sarcasmes de Carlisle son collègue moins impliqué et plus brutal. Joe Casey ajoute une couche avec le mariage qui bat de l'aile, et encore une autre avec des dérouillées successives. Comme souvent, le lecteur est épaté par la capacité à encaisser du personnage principal, au point qu'il finit par se demander s'il ne s'agit pas d'un superpouvoir (mais non !).



Casey n'oublie pas une intrigue un peu tordue qui fait ressortir les aspects les moins reluisants de l'humanité. Il termine son récit avec un coup bien tordu, sans qu'il ne s'agisse simplement d'un retournement relevant d'une justice poétique trop pratique. De son côté, Chris Burnham n'a pas encore acquis l'élégance que l'on peut voir dans "Batman inc.", mais il réalise des dessins un petit peu sales sur eux qui transcrivent avec conviction les aspects les plus outrés du récit.



Il force peut-être un peu la dose quant à la description des chocs et coups qu'encaisse Nixon Cooper, obligeant le lecteur à accepter que ce personnage dispose d'une capacité à encaisser qui relève du surnaturel. Par contre, il donne une apparence convaincante à des éléments loufoques, comme cette femme qui a les tétons à la place des yeux, et une petite bouche à la place de chaque téton. Il réussit également à rendre acceptable un malfrat dont la peau semble être comme drapée autour du visage, évoquant les criminels les plus dérangeants de Dick Tracy.



Par le biais des images de Burnham, le lecteur plonge dans l'environnement peu ragoûtant de Nixon Cooper, avec ces quartiers malfamés, ces immeubles qui auraient besoin d'un bon ravalement, des endroits sordides, ces individus qui se donnent une apparence de durs à la propreté douteuse. Burnham ne renâcle pas non plus à dessiner les pires horreurs quand une séquence le requiert. Il suffit de voir cet individu se faire dépecer le crâne pour en être convaincu.



Le tome se termine avec une série de 10 pin-ups dessinés par autant d'artistes différents, dont Tradd Moore, ou encore Rob Guillory, ou Jenny Frison, ainsi que 8 pages de crayonnés de Chris Burnham.



Le lecteur peut comprendre l'entrain de Cris Burnham à qualifier ce récit de l'un des meilleurs de Joe Casey, mais il se doute que cet artiste n'a pas du tout lire de ce scénariste. Casey et Burnham réussissent un récit bien noir utilisant avec habileté les conventions des récits de roman noir, et de superhéros, pour un polar poisseux et glauque, sans aller jusqu'à révolutionner un genre ou l'autre.
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Officer Downe : Bigger Better

Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Il s'agit de la réédition d'un comics initialement paru en 2010, écrit par Joe Casey, dessiné et encré par Chris Burnham. La mise en couleurs a été réalisée par Marc Letzmann. La bande dessinée comprend 53 pages. Pour cette édition, ont été ajouté une postface de 2 pages du scénariste, 11 pages commentées par l'artiste allant du script à la page encrée, 6 pages d'étude graphique, et 6 illustrations en pleine page réalisées par Charles Paul Wilson III, Chris Chua, Kyle Strahm, Nathan Fox, Nick Pitarra, Reily Brown, Richard Sala, Rus Wooton, Ryan Browne, Sean Dove, Shane White, Steve Wilhite. Enfin se trouve une page annonçant Butcher baker (2012) du même scénariste, illustré par Mike Huddleston.



L'officier Terry Downe est totalement concentré sur sa tâche : il est en train de réaliser un cunnilingus d'anthologie à une femme couchée sur le dos sur son lit, en train de monter au septième ciel comme jamais. Il a conservé ses lunettes de soleil réfléchissantes. Après sept orgasmes d'affilée, elle remercie son amant. L'officier Downe indique qu'il ne faisait que son devoir : être au service du public. Elle s'étonne d'une odeur bizarre, mais lui ne la remarque pas. Il est interrompu dans sa phrase par un appel sur sa radio professionnelle. Il écoute et indique à sa partenaire que c'est pour lui. Il se rhabille et à sa demande il promet qu'il reviendra. Quelque part dans un entrepôt de Los Angeles, Headcase Harry surveille le processus de fabrication d'une drogue de synthèse, le super-crank. Les doigts de sa main gauche sont ensanglantés, et il laisse tomber deux globes oculaires dans un des vases utilisés pour la distillation. Les gardes prennent leur arme à feu en main car ils ont entendu du bruit à l'extérieur. Un poing ganté traverse un mur. Officer Down lance son pied en avant et continue de démolir le mur préfabriqué, permettant de lire le mot Police sur la semelle de sa botte. Il écrase le poing qui tient son pistolet sur le visage d'un trafiquant, tout en en saisissant un autre de la main gauche en le prenant par les bijoux de famille, et il écrase la trachée d'un troisième en marchant dessus. Il perfore le torse d'un quatrième en lui tirant dessus.



Officer Downe est dans la place et il a tôt fait de tuer tous les trafiquants. Headcase Harry est toujours vivant abrité derrière une table renversée ; il se relève et appuie sur un détonateur. Il se produit une énorme explosion qui pulvérise littéralement le bâtiment. Vingt et une minutes plus tard, deux fourgons du médecin légiste arrivent sur place. Une demi-douzaine d'agents du coroner fouillent les décombres et trouvent le cadavre d'Officer Downe. Ils le récupèrent et l'emmènent. Dans une autre partie de la ville, trois responsables du crime organisé tempêtent contre l'intervention de Downe qui vient de leur coûter cher. Ils décident d'avoir recours à Zen Master Flash, assassin à louer, et chef d'une bande organisée de tueurs qu'il forme dans une école implantée dans un endroit reculé. Les trois parrains, l'un avec une tête de lion, l'autre de tigre et le troisième de vautour, se rendent dans un sauna, et ils bénéficient chacun des services sexuels d'une jeune femme pour les détendre avec une fellation.



Ce n'est pas du Shakespeare. Le scénariste est dans une phase où il écrit des histoires courtes, totalement focalisées vers l'action, sans faire dans le détail. Il faut donc que le lecteur ait un goût certain pour la violence graphique pour pouvoir apprécier ce déchaînement de brutalité, cette extermination de criminels, avec force et sadisme. En 53 pages, il va droit au but, enchaînant trois massacres, avec des blessures ouvertes, des arrachages de membre et des morts subites. L'artiste se fait un plaisir de montrer tout ça de manière explicite, avec une forme d'entrain un peu caricatural, du gore avec une touche d'exagération. Par exemple pour la première intervention d'Officer Downe, il réalise un dessin en double page pour montrer la force de son coup de pied, et une bande de 8 petites cases qui courent en-dessous. Le lecteur peut voir en gros plan, la grosse paluche gantée de Downe saisir l'entrejambe d'un type dont on ne voit rien d'autre, et il sait que ça doit faire mal. Bien sur ce nettoyage par le vide a généré des projections de sang, et il y a une demi-douzaine de gouttelettes sur le visage de Downe, dont une sur un verre de lunette. Le coloriste utilise un rouge bien vif pour le sang, jouant à la fois sur l'horreur et sur l'exagération pop.



Le lecteur retrouve ce brave officier sur une table d'opération en train d'être ramené à la vie, et il peut voir une plaie ouverte au ventre, le radius brisé est apparent, il manque la partie gauche du visage. À nouveau il y a une forme d'exagération qui apporte une vitalité épatante, et qui invite à une prise de recul ne permettant pas un premier degré bas du front. Pour l'intervention suivante, Downe fracasse le mur où se tiennent les criminels, en le défonçant avec son énorme 4*4. Un individu est éventré par le parechoc en forme de crocs, la moitié supérieure d'une tête (la partie avec la mâchoire supérieure, le nez, les yeux, le front) vole au premier plan en direction du lecteur. Parmi les horreurs bien gore, il est encore possible de mentionner des globes oculaires éjectés de leur orbite par la force du coup porté sur la tête, une main arrachée au niveau poignet, des dents délogées de la mâchoire, des chairs tuméfiées, de la matière cervicale mise à nu la calotte crânienne ayant été brisée, un poing traversant un crâne avec force, etc. Un vrai festival de violence sans retenue, de lutte sans merci, de déchaînement de force sans une once de remords ou de respect pour l'intégrité physique de l'individu. Le scénariste a conçu un dispositif qui fait en sorte que le personnage principal n'ait pas à se préoccuper de l'état de son corps, et ses ennemis adaptent leur mode de réponse pour en tenir compte. Une vraie boucherie, avec une touche d'exagération grand guignol.



D'un côté, ce comics n'est pas très long, ce qui évite au lecteur de se lasser, et ce qui permet au scénariste de ne pas avoir à étayer son intrigue, ou à passer par des scènes d'exposition. Pour autant il prend quand le temps d'expliquer d'où provient l'énergie qui anime Terry Downe, et comment ses supérieurs le ramènent à la vie. Cela donne lieu à deux séquences fort impressionnantes où le dessinateur montrent les individus qui fournissent cette énergie, et ce qui peut leur en coûter quand il en faut encore plus à Downe. Même si la trame est simpliste, l'intrigue comprend plusieurs phases et ne se limitent pas à une longue séquence de massacre, prenant ainsi exemple sur Geoff Darrow et le combat hallucinant de Shaolin Cowboy (2004-2007) ou ceux de Carl Seltz dans Hard Boiled (1990-1992) avec Frank Miller. Il y a une progression dans l'intrigue, et dans la dimension des combats. L'artiste effectue un peu plus que le minimum dans la représentation des différents lieux, ne se limitant pas à un arrière-plan au début et plus rien après, et le scénariste intègre d'autres informations, en particulier sur l'histoire personnelle de Terry Downe, et la manière dont il est devenu cette machine de guerre. Par contre, il n'y a pas de commentaire social autre que la police doit exterminer les criminels qui sont monolithiques, violents et irrécupérables. Cette histoire a été adaptée en film : Officer Downe (2016) réalisé par Shawn Crahan, percussionniste de Slipknot, avec Kim Coates dans le rôle principal. Il semblerait qu'il soit également dans un registre très premier degré.



Après l'histoire se trouve un dossier très complet. La postface de Joe Casey est rédigée avec un ton sarcastique, indiquant qu'il s'est servi du modèle d'un ami policier pour créer l'officier Downe, et en particulier de sa propension à faire un usage immodéré de sa matraque, témoignage dont peut douter le lecteur au vu du ton employé. Il se trouve également un page d'information sur la réédition de la première collaboration entre ce scénariste et ce dessinateur : Nixon's Pals (2008). Les pages d'explication de Burnham s'avèrent plus enrichissantes avec des exemples de script de Casey, et le processus pas à pas : l'établissement d'esquisses pour découper la page, la réalisation au crayon, puis la phase d'encrage. Les études graphiques s'adressent avant tout aux artistes en herbe. Parmi les illustrations en pleine page, le lecteur sera plus ou moins marqué par celle très sale de Strahm, celle très charnelle de Fox, celle avec une figurine de Pitarra, ou encore celle de Browne tout à fait dans le ton de la série.



Voilà une histoire rondement menée qui n'est pas pour lecteur sensible ou émotif. Casey & Burhnam ne font pas semblant de chercher des excuses : il raconte une nouvelle brutale et sadique, avec blessures explicites, qui fonce dans le tas, sans autre ambition qu'un défouloir gore, d'un policier surpuissant exterminant la vermine avec brutalité et de manière définitive. Parfait pour les amateurs du genre.
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Savage Sword

Ce tome est le premier d'une série de 2, rassemblant des histoires mettant en scène des personnages créés par Robert Ervin Howard. Il contient les épisodes 1 à 4 de la série initialement parus en 2010/2012. Il comprend 10 histoires indépendantes, un texte de Robert E. Howard accompagné de quelques illustrations (réalises par Tim Seeley) et un texte de contextualisation du personnage d'El Borak.



(1) Conan and the Jewels of Hesterm (24 pages, scénario de Paul Tobin, dessins de Welligton Alves) - Un groupe de voleurs a réussi à dérober le joyau du temple de Hesterm. Pendant ce temps-là, Conan est en train de descendre des pintes à la taverne et il décide d'en repartir avec la serveuse à ses bras. En sortant ils sont bousculés par le groupe de voleurs, et le démon à leur poursuite repart avec la serveuse. Conan se lance à sa poursuite et pénètre dans temple de Hesterm. (2) John Silent: The earthbound dead (8 pages, scénario de Scott Allie, dessins de Ben Dewey) - À Prague, au seizième siècle, John Silent transporte un artefact rectangulaire, soigneusement enveloppé et attirant la convoitise. Il n'hésite pas à égorger le premier qu'il soupçonne de vouloir le voler. (3) Six Guns and Scimitas: The wild west in the middle East (4 pages, texte de Mark Finn, illustrations de Tim Bradstreet) - Mark Finn resitue le personnage d'El Borak dans le contexte du moyen orient dans les années 1920. (4) El Borak: The incident at Hakim's rest (8 pages, scénario de Mark Finn, dessins de Greg Scott) - El Borak intervient pour neutraliser Hakim Khan qui en prend trop à son aise avec la population.



(5) Dark Agnes Storytelling (16 pages, scénario de Marc Andreyko, dessins de Robert Atkins) - En France au seizième siècle, un mercenaire costaud fait une entrée fracassante dans une taverne, réclamant de savoir où se trouve Dark Agnes. Un autre homme attablé lui propose de boire un coup et de lui raconter une histoire. (6) Sailor Steve Costigan: A new game for Costingan (8 pages, scénario de Joe Casey, dessins de Pop Mhan) - Steve Costigan a accepté de rédiger un article sur les 2 boxeurs qui doivent s'affronter le lendemain. Cela lui attire l'inimitié des 2 boxeurs, et en plus il doit se mêler d'une histoire d'enlèvement de jeune femme. (7) Sea Curse (6 pages, texte de Robert E. Howard, illustrations de Tim Seeley) - Dans un village pauvre en bordure de mer, 2 mercenaires imposent leur loi par la force chaque fois qu'ils reviennent à terre. Ils finissent par en prendre trop à leur aise avec la fille d'une vieille un peu sorcière. (8) The Sonora Kid: Knife, bullet, and noose (16 pages, scénario de Jeremy Barlow, dessins de Tony Parker) - Sonora Kid a réussi à amener le troupeau de vaches jusqu'à son acheteur, bien qu'il ait perdu quelques têtes en chemin du fait de l'agression d'un cowboy mal intentionné. Il lui reste à se faire payer, et à tenir tête aux copains du cowboy qui n'a pas survécu à sa rencontre.



(9) Brule: The spear and the siren (16 pages, scénario de David Lapham, dessins de Fabio Cabiosco) - Brule, le compagnon d'armes du Roi Kull, a pris la mer sur un frêle esquif. Il croise la route d'un navire plus imposant et découvre en montant sur le pont qu'il y a une sirène dans une cage. (10) Steve Harrison: Pinot noir (8 pages, scénario de Joshua Williamson, dessins de Patric Reynolds) - L'inspecteur Steve Harrison découvre l'existence d'un culte à l'occasion d'un meurtre, diffusant son poison dans des bouteilles de Pinot Noir. (11) The thing on the roof (8 pages, scénario de Dave Lan, dessins de M.S. Corley) - Un individu a ramené un joyau d'une crypte scellé lors d'un voyage en Amérique Centrale. Ce soir-là, il entend des bruits de sabot sur le toit de sa maison. (12) Conan: White death (9 pages, scénario de Peter Doree, peintures dessins peints de Sean Phillips) - Dans une région enneigée, Conan croise la route d'une guerrière Aesir qui lui propose de partager son repas. La nuit est mouvementée.



Le principe de cette anthologie est de fournir l'occasion au lecteur de découvrir des personnages créés par Robert Ervin Howard (1906-1936) et moins connus que le célèbre cimmérien Conan. Pour ce faire, l'éditeur a commandité des récits de longueur variable (de 8 à 26 pages) à des équipes différentes, proposant à chaque fois une histoire originale. Les 2 seules exceptions à ce principe sont le texte de présentation d'El Borak (intéressant, mais les illustrations de Tim Bradstreet ne sont pas à la hauteur des couvertures qu'il a pu réaliser pour des séries comme Punisher MAX de Garth Ennis, ou Hellblazer de Mike Carey), et le texte de Robert E. Howard, avec des illustrations trop littérales de Tim Seeley. En fonction de sa familiarité avec l'œuvre de l'écrivain, le lecteur découvre donc des héros moins connus comme Dark Agnes, John Silent, El Borak, Steve Costigan, The Sonora Kid, Brule, ou Steve Harrison. Pour être sûr d'appâter le lecteur, les responsables éditoriaux ont placé en ouverture et en fin de volume une histoire de Conan, personnage le plus connu et donc le plus vendeur.



Malheureusement la première histoire de Conan inaugure mal le recueil : le scénariste déroule une intrigue convenue et très dérivative de celles de Roy Thomas pour la série Conan publiée par Marvel. Effectivement le lecteur un peu curieux sait qu'il peut trouver des trésors d'histoires originales du personnage, par exemple dans les rééditions de la série Savage Sword of Conan à laquelle le titre de la présente série fait directement référence. La prestation de Wellignton Alves reste dans les clichés associés à Conan, avec une économie de décors, des gros biscottos et des dames accortes. S'il est déjà familier des comics de Conan, le lecteur trouve que l'artiste le plus impliqué reste Michael Atiyeh, le metteur en couleurs qui soigne es éclairages, les contrastes et les effets spéciaux. Cependant, il y a plus de chance que les récits consacrés à des personnages ayant bénéficié de moins d'exposition médiatique se révèlent plus surprenants.



Il n'est pas bien sûr que John Silent soit vraiment un héros récurrent dans l'œuvre de Robert E. Howard, au vu du récit qui est servi au lecteur, à nouveau très classique, avec un objet maléfique entraînant son possesseur dans une spirale d'horreur et de crime. Ben Dewey réalise des dessins un peu plus personnels que ceux d'Alves, avec un effort réel pour évoquer le seizième siècle (un peu générique, pas forcément celui de Prague) et pour conserver des arrière-plans dans une majorité de cases. Finalement le lecteur passe aux 4 pages de texte présentant le contexte d'El Borak, avec un quasi soulagement, alors qu'il ne s'agit pas d'une bande dessinée. Mark Finn se montre informatif et éclaire le contexte géopolitique qui a conduit Howard à situer un personnage dans cette région, à cette époque. Malheureusement le soufflé retombe avec l'histoire en BD d'El Borak, à nouveau linéaire et convenue à souhait, sans que le scénariste ou le dessinateur n'arrivent à transcrire le souffle épique de la prose d'Howard, ou son ode à la virilité, à la force de caractère, ou encore à la force physique. Malgré tout, les dessins de Greg Scott arrivent à transporter le lecteur dans cette région désertique.



Dark Agnes est un personnage qui a inspiré plus de récits, en tant que femme capable de se défendre par elle-même. Alors que le scénariste fait le malin avec le titre de son histoire (storytelling = raconter une histoire), il aligne tous les poncifs possibles sur le personnage, avec un humour indigne d'être qualifié de tel, et Atkins réalise une prestation de narration visuelle compétente, mais totalement insipide. Si le lecteur arrive à terminer ces 16 pages, il décèle une remarque féministe ras-les-pâquerettes. Il oublie vite ce récit pour passer à celui de Steve Costigan, plus dans le ton, avec des dessins évoquant ceux de Gary Gianni en moins aboutis. Joe Casey se montre un peu plus aventureux que ses collègues en plaçant le boxeur à contre-emploi, avec une pointe d'humour pas très léger, mais méritant plus cette appellation. Un peu rasséréné, le lecteur passe à la courte nouvelle de Robert E. Howard, et se rend compte qu'il se laisse entraîner par sa prose, même s'il devine la chute du récit dès la première page. Il regrette la place que font perdre les dessins insipides de Tim Seeley.



Le lecteur découvre ensuite une histoire s'inscrivant dans le genre western, avec un vrai scénario et des dessins beaucoup plus personnels. Le scénariste Jeremy Barlow s'en tient à un récit premier degré, avec un cowboy qui tire plus vite que les autres, qui n'hésite pas à tuer ses ennemis et les dessins de Tony Parker présentent un bon niveau descriptif et de densité d'informations visuelles, avec une discrète exagération qui amplifie l'aura du Kid, sans être dupe. Remis en confiance, il passe à l'aventure maritime du compagnon de Kull. David Lapham écrit lui aussi une histoire convenue d'une platitude confondante, et Fabio Cobiaco s'en tire un peu mieux, mais reste fâché avec les décors de bout en bout ce qui obère d'autant l'immersion du lecteur, à la fois dans l'histoire et dans l'océan. Les 2 histoires suivantes relèvent le niveau grâce à leur concision, et la froide efficacité de Steve Harrison pour la première, la tonalité digne d'HP Lovecraft pour la seconde. Le lecteur n'est pas fâché d'arriver à la fin avec une histoire beaucoup plus prometteuse sur le plan visuel grâce aux peintures de Sean Phillips. Effectivement, par comparaison, le lecteur peut tout de suite constater ce qu'apporte un dessinateur impliqué et maîtrisant son art, à quel point les images nourrissent l'histoire, à nouveau d'une pauvreté difficile à croire. Mais malgré le plaisir plastique des pages de Phillips, le lecteur ne peut que déplorer qu'il reproduise les conventions les plus difficiles à avaler des aventures de Conan quand il se promène sur les champs de neige, en simple pagne, absolument insensible au froid, sans aucune explication autre qu'une capacité surnaturelle de son métabolisme à réguler sa température.



Alors que cette anthologie partait d'une bonne idée (= faire découvrir les autres personnages créés par Robert Ervin Howard), l'exécution platounette de la plupart des histoires fait regretter son achat au lecteur, et lui fait espérer que les suivants (dans le tome 2, ou dans d'autres projets du même genre) ne pourront pas faire pire.
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