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Citations de Jules Barbey d`Aurevilly (720)


Je me trouverais obligé d’insister beaucoup sur la nature virile de Jeanne, de cette brave et simple femme d’action, pour qui le mot familièrement héroïque : « Un homme est toujours assez beau quand il ne fait pas peur à son cheval », semblait avoir été inventé. Dieu merci, toute cette psychologie est inutile. Je ne suis qu’un simple conteur.
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Quant à Jeanne, elle n’était plus pâle. Sur sa pâleur sortaient de partout des taches rouges, un semis de plaques ardentes, comme si la vie, un instant refoulée au cœur, revenait frapper contre sa cloison de chair avec furie. À chaque mot, à chaque geste de l’abbé, apparaissaient ces taches effrayantes. Il y en avait sur le front, aux joues. Plusieurs se montraient déjà sur le cou et sur la poitrine, et c’était à croire, à tous ces désordres de teint, que maître Tainnebouy avait raison avec sa grossière physiologie, et qu’elle avait le sang tourné !
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La nuit, en passant sur la joue de Jeanne, n’y avait point éteint la flamme que les troubles de son âme avaient allumée presque sous ses yeux. On aurait pu même remarquer que plus la journée s’avança, plus se fonça cette trace enflammée.
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Partout ailleurs, on pouvait confondre la femme de Thomas Le Hardouey avec les paysannes des environs, avec toutes ces magnifiques mères de conscrits qui avaient donné ses plus beaux régiments à l’Empire ; mais aux yeux, non ! il n’était plus permis de s’y tromper. Jeanne avait les regards de faucon de sa race paternelle, ces larges prunelles d’un opulent bleu d’indigo foncé comme les quinte-feuilles veloutées de la pensée, et qui étaient aussi caractéristiques des Feuardent que les émaux de leur blason. Il n’y a que des femmes ou des artistes pour tenir compte de ces détails. Naturellement, ils avaient échappé à maître Louis Tainnebouy, comme bien d’autres choses d’ailleurs, quand il m’avait raconté l’histoire que j’ai complétée depuis qu’il m’en eut touché la première note, dans cette lande de Lessay où nous nous étions rencontrés. Lui, mon rustique herbager, jugeait un peu les femmes comme il jugeait les génisses de ses troupeaux, comme les pasteurs romains durent juger les Sabines qu’ils enlevèrent dans leurs bras nerveux : il ne voyait guère en elle que les signes de la force et les aptitudes de la santé. Avec sa taille moyenne, mais bien prise, sa hanche et son sein proéminents, comme toutes ses compatriotes dont la destination est de devenir mères, si Jeanne n’était plus alors une femme belle, pour maître Tainnebouy, elle était encore une belle femme.
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Elle avait été belle comme le jour à dix-huit ans : moins belle cependant que sa mère ; mais cette beauté, qui passe plus vite dans les femmes de la campagne que dans les femmes du monde, parce qu’elles ne font rien pour la retenir, elle ne l’avait plus.

Je veux parler de cette chair lumineuse de roses fondues et devenues fruit sur des joues virginales, de cette perle de fraîcheur des filles normandes près de laquelle la plus pure nacre des huîtres de leurs rochers semble manquer de transparence et d’humidité.
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C’était la ruine abandonnée, il y avait longtemps déjà, de l’ancienne maison du curé, située dans un carrefour solitaire où six chemins aboutissaient et se coupaient à angle aigu. Un assez vaste corps de bâtiment qui subsistait encore appartenait alors à un cultivateur qui ne l’habitait pas, mais qui l’utilisait en y engrangeant ses orges et ses foins. On disait que c’était un lieu hanté par les mauvais esprits et qu’on y rencontrait parfois de gros chats, qui marchaient obstinément à côté de vous, dans la route, et qui tout à coup se mettaient à vous dire bonsoir avec des airs fort singuliers.
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Lui, sous ce masque de cicatrices, il gardait une âme dans laquelle, comme dans cette face labourée, on ne pouvait marquer une blessure de plus. Jeanne eut peur, elle l’a avoué depuis, en voyant la terrible tête encadrée dans ce capuchon noir ; ou plutôt non, elle n’eut pas peur : elle eut un frisson, elle eut une espèce de vertige, un étonnement cruel qui lui fit mal comme la morsure de l’acier. Elle eut enfin une sensation sans nom, produite par ce visage qui était aussi une chose sans nom.
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Qu’on sache seulement que le Chouan défiguré ne mourut pas. Le rayonnement des balles de l’espingole lui avait sauvé la vie. L’enflure du visage, qui cachait ses yeux quand les Bleus poudrèrent ses plaies avec du feu, le sauva de la cécité. Après la guerre de la Chouannerie, et lorsqu’on rouvrit les églises, on le vit un jour se dresser dans une stalle, aux vêpres de Blanchelande, enveloppé dans un capuchon noir. C’était l’ancien moine de l’abbaye dévastée : le fameux abbé de La Croix-Jugan.
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— Qu’est donc cette cloche de mauvais présage ? – dis-je à mon Cotentinais, dont l’impression me gagnait.

— Ah ! – fit-il, – c’est la cloche de Blanchelande qui sonne la messe de l’abbé de La Croix-Jugan.

— La messe, maître Tainnebouy ! – m’écriai-je. – Oubliez-vous que nous sommes en octobre, et non pas à Noël, en décembre, pour qu’on sonne la messe de minuit ?

— Je le sais aussi bien que vous, Monsieur, – dit-il d’un ton grave ; – mais la messe de l’abbé de La Croix-Jugan n’est pas une messe de Noël, c’est une messe des Morts, sans répons et sans assistance, une terrible et horrible messe, si ce qu’on en rapporte est vrai.
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Ce mot de Chouans, jeté là en passant comme un souvenir de hasard par cette énergique veste rousse qui avait peut-être, dans sa jeunesse, fait le coup de fusil par-dessus la haie avec eux, évoqua en ce moment, aux yeux de mon esprit, ces fantômes du temps passé devant lesquels toute réalité présente pâlit et s’efface. Je venais précisément d’une ville où la guerre des Chouans a laissé une empreinte profonde.
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C’était un homme de quarante-cinq ans environ, bâti en force, comme on dit énergiquement dans le pays, car de tels hommes sont des bâtisses, un de ces êtres virils, à la contenance hardie, au regard franc et ferme, qui font penser qu’après tout, le mâle de la femme a aussi son genre de beauté. Il avait à peu près cinq pieds quatre pouces de stature, mais jamais le refrain de la vieille chanson normande :


C’est dans la Manche
Qu’on trouve le bon bras.


n’avait trouvé d’application plus heureuse et plus complète.
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Ces lacunes de culture, ces places vides de végétation, ces têtes chauves pour ainsi dire, forment d’ordinaire un frappant contraste avec les terrains qui les environnent. Elles sont à ces pays cultivés des oasis arides, comme il y a dans les sables du désert des oasis de verdure. Elles jettent dans ces paysages frais, riants et féconds, de soudaines interruptions de mélancolie, des airs soucieux, des aspects sévères. Elles les ombrent d’une estompe plus noire…
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"Pour elle, la comtesse était une curiosité funeste. Elle contemplait trop Marigny à travers cette femme qu'il tuait... Chaque fois qu'elle la rencontrait , elle épiait avec un intérêt aussi dissimulé que s'il avait été coupable, le progrès du mal qui la minait, mettait le sentiment partout où il y avait la maladie. Elle ne se doutait pas qu'elle aimait déjà, qu'elle caressait les ailes d'épervier de la terrible Chimère
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[...] ... CXXXIV - Je sortis, ce soir-là, un des derniers de chez Mme de Dorff. Elle demeurait rue de Castiglione, et je m'en revenais tout songeant comme un joueur en perte, - car j'avais joué et perdu, - par la rue de Rivoli. Il faisait un clair de lune d'une grande amabilité pour les tuteurs, les maris, les voleurs et les poètes, et autres personnages intéressés par état à l'observation nocturne. C'était une nuit transparente et sonore, quoique silencieuse, - la doublure de celle de la veille.

CXXXV - "Est-ce un voleur ou sommes-nous en Espagne ?" me dis-je, en braquant ma lorgnette sur une espèce de corps épais suspendu entre le ciel et le pavé. Je regardai mieux, - je regardai encore. - Une femme se penchait timidement sur la rampe du balcon, et dessinait la plus gracieuse courbe sur l'azur du ciel. - Ce n'était pas la scène charmante de l'adieu, à la venue du jour, comme tu nous l'as montrée, ô Shakespeare ! mais plutôt celle qui dut la précéder. Et franchement, illusion ou perspective favorable, la femme penchée, ô Shakespeare, était aussi jolie que ta Juliette.

(...)

CXXXVII - Mais Roméo. Etait-ce ton Roméo, ô mon grand Shakespeare ! ou en était-ce une parodie cruelle ? Ah ! le beau Montaigu, c'était vous, M. Baudoin d'Artinel. Je vous reconnus fort bien avec votre dos un peu arrondi - mais Platon avait les épaules hautes, et qui n'est pas, d'ailleurs, un peu bossu ? ... En montant la poétique échelle de soie verte, vous étiez précieux d'élégance, de souplesse, d'agilité, de grâce ! Que votre gravité vous allait bien, ainsi perché dans les airs ! Ah ! pauvres mortels que nous sommes, ayons donc cinquante ans passés et allons juger, après cela !

CXXXVIII - Et il arriva au balcon sans encombre. - Or, - je dois l'avouer ici, Madame, - je n'entendis et je ne vis rien de ce qui dut suivre. - La porte vitrée se referma sur l'heureux couple ... et la lune alla toujours son train dans le ciel tranquille. Elle ne rougit pas, cette lune impudente, et moi, qui m'étais arrêté pour regarder cette scène singulière, je fis comme elle, j'allai me coucher. ... [...]
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[...] ... XXV - M. d'Artinel ... Baudoin d'Artinel, je crois, - oui ! c'est Baudoin qu'il s'appelait ... ou d'un nom à peu près pareil et qu'on s'étonnait toujours de voir accolé à un tel personnage, - M. Baudoin d'Artinel était un homme grave et respectable, jouissant au plus haut degré de l'estime publique, conseiller en Cour royale, ou juge, - je ne sais plus trop lequel - ayant passé trente ans de sa vie, au su de tout le monde, à faire trois enfants à sa femme et un nombre illimité de rapports.

XXVI - Il avait donc été marié . mais sa femme était morte. Il l'avait pleurée - convenablement ; car on disait que son mariage avait été autrefois un mariage d'inclination. Mais le temps tue la douleur sur le cadavre qu'elle fait, et d'ailleurs un conseiller en Cour royale ne peut décemment pleurer toujours. Cependant, il n'avait point déposé l'air mélancolique, et souvent il aimait encore à glisser de ces mots qui résonnent si bien dans l'oreille des femmes, quand il voulait faire allusion à des chagrins ineffaçables et à un cruel isolement.

XXVII - Soit que Joséphine l'eût séduit avec son bavardage de robes ou de chiffons, - ou par ses grands mots de vertu ou d'estime publique, de sentiments purs et doux, - le vénérable conseiller recherchait avidement l'inexplicable créature. Peut-être le mariage et les peines qui en avaient été la suite ne l'avaient point assez maltraité pour qu'il ne s'aperçût pas des agréments extérieurs de Mme d'Alcy. C'était une nature double et indécise, moitié vieux fat, moitié sentimental ; et c'est ainsi qu'en louvoyant entre ces deux manières d'être, il avait passé autrefois pour un homme à bonnes fortunes. ... [...]
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[...] ... "Non, je n'ai pas d'amour pour vous, mon ami, et pourtant j'ai besoin et désir de vous voir. Je suis froide, c'est la vérité ; et pourtant vous me faites éprouver une émotion inconnue lorsque vous brûlez ma froideur sous vos transports. Je n'ai jamais été ainsi, même avec la personne que j'ai le plus aimée ... Il n'y a rien de véritablement intime entre nous, dites-vous ; et pourtant j'ai eu tout de suite confiance en votre caractère, si ce n'est dans votre affection que vous m'avez niée si longtemps. Rappelez-vous tout ce que vous m'avez dit ; jugez si je puis avoir la foi qu'il faudrait pour devenir ce que ... je ne suis pas encore. Si vous tenez à ce changement aussi véritablement que vous le dites, ne vous repentez pas de m'avoir ouvert votre coeur. La crainte de vous voir trop souffrir pourrait seule l'emporter sur ma rebelle nature. Si vous saviez comme je vous serais reconnaissante de bannir de mon âme la défiance qui fait ma réserve ! Trompée, toujours trompée, dupe sans cesse ! jugeant toujours les autres d'après ce que j'éprouvais. Et ne m'accusez pas de mensonge ; quand j'ai le plus aimé, j'ai toujours gardé au fond de mon coeur les expressions qui eussent pu faire croire à une exagération que je redoutais plus que tout au monde. Adieu ; voilà de la confiance. J'espère que vous ne vous plaindrez pas ce soir comme hier de ma réserve. Venez, venez, je vous attends.

Bérangère"

En somme, ce billet était digne de la main qui l'avait tracé. Soit instinct, soit calcul, Mme de Gesvres avait exactement mesuré la dose d'espoir qu'il fallait à M. de Maulévrier pour que, fatigué d'une résistance sans terme, il ne s'en allât pas visiter Florence ou Naples, seule manière de se suicider que les gens de bas étage n'aient pas prise encore aux gens comme il faut ! De tels billets, envoyés aux époques critiques d'un amour qu'on redoute de voir expirer, sont de l'élixir de longue vie ; c'est du lait d'ânesse pour la phtisie du coeur. Sans doute, ce billet avait toute la séduction du mensonge ; mais il était vrai cependant comme s'il n'eût pas dû séduire, vrai comme peut l'être la pensée d'une femme, dont les vérités les plus claires ne peuvent jamais avoir, comme l'on sait, une limpidité parfaite. ... [...]
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[...] ... Une voiture roulait sur la route de Neuilly. Deux jeunes hommes, en habit de voyage, en occupaient le fond, et semblaient s'abandonner au nonchaloir, d'une de ces conversations molles et mille fois brisées, imprégnées du charme de l'habitude et de l'intimité.

- "Tu regrettes l'Italie, j'en suis sûr, - dit à celui qui eût paru le moins beau à la foule, mais dont la face était largement empreinte de génie et de passion, le plus jeune et le plus frais de ces deux jeunes gens.

- J'aime l'Italie, il est vrai, - répondit l'autre. - C'est là que j'ai vécu de cette vie d'artiste imaginée avec tant de bonheur avant de la connaître. Mais, auprès de toi, mon ami, il n'y a pas de place pour un regret."

Et, en-dessus de la barre d'acajou, les mains des deux amis se pressèrent.

- "J'ai craint longtemps, - reprit le premier interlocuteur - que la générosité de ton sacrifice ne te devînt amère. Quitter Florence, tes études, tes plaisirs, pour revenir avec moi à Neuilly, te faire le témoin des souffrances de ma pauvre soeur, et partager mes inquiétudes et celles de ma mère, n'est-ce pas là le plus triste échange ?

- En supposant qu'il y ait du mérite à éprouver un sentiment tout à fait involontaire, mon cher Amédée, tu t'exagérerais encore ce que ton amitié fait pour toi. Quant ta soeur ira mieux, ne pourrons-nous pas reprendre le chemin de cette Italie que nous venons de quitter ? Oh ! espérons que les craintes exprimées dans la lettre de ta mère n'ont aucun fondement.

- Je le saurai bientôt, - dit Amédée, et il frappa du fouet qu'il tenait le cheval qui redoubla de vitesse ; - mais je n'augure rien que de sinistre du style de ma mère : croirais-tu qu'elle me parle d'un commencement d'anévrisme." ... [...]
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Te souviens-tu ?

Te souviens-tu du soir, où près de la fenêtre
Ouverte d’un salon plein de joyeux ébats,
Tu n’avais pas seize ans… les avais-tu ?… peut-être…
Sous le rideau tombé, nous nous parlions tout bas ?…
Ce n’était pas l’amour que t’exprimait ma bouche,
Mon cœur était trop vieux, trop glacé, trop hautain
Pour parler à ton cœur ; mais, prophète farouche,
Je te prédisais ton destin.

Et toi, tu m’écoutais, sur la barre accoudée ;
Tu me montrais ta nuque, en me cachant ton front,
Et tu restais muette à la cruelle idée
De ce premier amour qui, t’ayant possédée,

Deviendra mon dernier affront !
Nuit, ciel, jardin, massifs, dehors tout était sombre,
Et tu regardais dans ce noir.
Mais ton cœur de seize ans avait encor plus d’ombre
Et là, comme dehors, tu ne pouvais rien voir !

Mais moi, moi j’y voyais ! mes yeux perçaient le voile
Qui te cachait ton avenir,
Et je voyais au loin monter l’affreuse étoile
De ce premier amour qui pour toi doit venir !
Je te disais alors : « Il va bientôt paraître
Celui-là qui prendra d’autorité vos jours !
Mais moi qui ne veux pas vous voir subir un maître,
J’aurai disparu pour toujours ! »

C’est fait… Je suis sorti maintenant de ta vie
Sans t’avoir dit l’adieu qu’on se dit quand on part ;
Silencieusement j’emporte ma folie…
Pour être aimé de toi, j’étais venu trop tard.
Tu ne m’as pas trahi. Je n’ai rien à te dire…
Ce qui fut entre nous, c’est la Fatalité.
D’aucune illusion tu n’eus sur moi l’empire,
Sinon celle de ta fierté !

Te l’avais-je assez exaltée
Pour résister à ton futur vainqueur ?
Ai-je cru te l’avoir plantée
Assez avant dans ton trop faible cœur ?
J’avais donc mis trop haut ton âme.
En toi de la fierté ? non ! pas même d’orgueil !
Est-ce que tu pouvais être plus qu’une femme ?
Les bras fermés sur toi sont pour moi ton cercueil.
Et si, devant mes yeux, un de ces soirs peut-être,
Tu passes, entraînant tous les cœurs sous tes pas,
Ne baisse pas les tiens ; ? car tu m’as fait connaître
Ce genre de mépris qui même ne voit pas !
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Chanson.

Oui ! restons masqués pour le monde !
Il ne vaut pas ce qu’il verrait
Dans notre intimité profonde,
S’il en surprenait le secret !
Il en abuserait, sans doute ;
Il est si cruel et si bas !
Ma Clara, pour toi je redoute
Ce que, toi, tu ne connais pas !

Toi, tu ne connais de la vie
Que ce qu’en a rêvé ton cœur…
Mais moi, Clara, je m’en défie…
Je sais ce qu’elle a de menteur.

Je sais combien font de blessures
Les cœurs jaloux aux cœurs heureux…
Nos masques seront nos armures !
Masquons-nous, Clara, tu le veux !

Glace tes yeux charmants que j’aime ;
Fais mieux, ma Clara ! — remplis-les
De dédain, de cruauté même…
Ris de moi, je te le permets !
Que jamais on ne puisse dire :
« Voyez ! ils se font les yeux doux !
« Ils ont l’un sur l’autre un empire… »
Masquons-nous, Clara, masquons-nous !

Tu n’en seras pas moins charmante,
Et peut-être que tu seras,
Fausse, encore plus enivrante,
Et que mieux tu m’enivreras !
Le charme est si grand, du mystère !
Aux fronts blancs sied le masque noir…
Mentir, c’est mieux que de se taire ;
Se savoir, c’est plus que se voir !
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Les Spectres.

Vous les connaissez bien ces amants des clairières,
Ces spectres, revenant, de la tombe transis,
Sous la lune bleuâtre et ses pâles lumières…
Ils dansent dans les cimetières,
Mais dans mon cœur, ils sont assis.

Ils sont là, tous, assis avec mélancolie,
Dans l’immobilité des morts, sous leurs tombeaux :
Et pâles et navrés, croyant qu’on les oublie,
Ils ne se doutent pas qu’ils sont pour nous la Vie,
Plus puissants qu’elle et bien plus beaux !

O spectres des amours finis, — spectres de femmes,
Qui faites nos regrets pires que des remords…
Vous ne revenez pas que la nuit dans nos âmes…
Mais des jours les plus clairs vous noircissez les flammes
Et, morts, faites de nous des morts !

Et toi, toi qui me crois vivant, — vivant encore,
Car je le redeviens sous tes regards si doux, —
Crains les sentiments fous des cœurs à leur aurore,
Et n’apprends pas qu’il est dans ce cœur qui t’adore
Un mur de mortes entre nous !
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