Julie Bonnie célèbre la conclusion de sa tétralogie L'Internat de l'Île aux Cigales (Albin Michel Jeunesse) avec une lecture en musique.
dimanche 4 décembre Avec l'autrice-compositrice-interprète
Julie Bonnie et le musicien Stanislas Grimbert.
Avec la séquence En cuisine
La creme de la litterature jeunesse devoile ses recettes.
Avec l'auteur
Vincent Mondiot
Je ne sais pas si c'est un passage obligé, mais quand on a perdu un bébé on se rend compte qu'on peut donner la mort.
C'est une possibilité. Donner la vie/donner la mort.
Donner la vie donner la mort.
Le corps peut fabriquer l'un ou l'autre. Pas forcement par notre faute, pas du tout notre décision. On est dépossédé du choix.
J'ai parfois été cruelle. Pour rendre. Mais on ne se débarrasse pas des blessures en blessant.
Avec le temps, j’ai appris à montrer beaucoup plus que mon corps. J’ai exposé mes blessures, exhibé mes émotions. J’ai dévêtu mon corps puis déshabillé mon âme. Plus que mes seins ou mes fesses, j’ai fait danser mon sang, nue.
L'histoire était-elle un virus? S'est-elle, avec le temps, adaptée à mon organisme, à ms cellules est-elle incrustée dans tout ce que je suis maintenant?
Je voulais être danseuse. Je crois que ce qui m'importait le plus, à l'époque, c'était qu'on me regarde. Je passais des heures devant la glace, touchant mes hanches, attrapant mes seins. Je maîtrisais à merveille toutes les moues sexy des actrices qui paradaient sur les cartes postales en noir et blanc épinglées sur mon mur. J'étais Bardot, j'étais Monroe. Je me trouvais aussi belle qu'elles, et mon avenir était tout tracé. Danseuse, puis actrice. Je danserais, puis je serais repérée, puis je serais adulée et malheureuse et je mourrais. (...)
Montrer mon corps, que je trouvais sublime, est devenu, à cette époque, un besoin, une urgence. Oui, j'étais celle qui finit nue sur la table quand la musique est trop belle. J'étais une Marilyn de province, prête à tout montrer à chaque instant pour être "repérée", pour qu'on me regarde.
(p. 29-30)
[aux jeunes filles/femmes qui rêvent de gloire et se brûlent les ailes]
Chaque fois que je vois un nouveau-né garçon, je me dis que j'ai un tueur dans les mains, un animal fou qui massacrera son voisin au nom de je ne sais quelles conneries de racisme, ou d'idée politique, chaque fois que j'ai une fille dans les mains, je me dis qu'elle est programmée pour avoir des chaleurs et reproduire un garçon tueur.
Elle a noté un truc dans son dossier et m'a dit au revoir, mais j'ai entendu pauvre fille, je lui ai répondu au revoir, mais j'ai pensé connasse.
Ce que l’hôpital préconise en ce moment changera bientôt, mais ce n’est pas grave.
L’hôpital a toujours raison et protège bien les bébés de la folie maternelle. (p.46)
En général, c'est la césarienne en urgence. La dame coupée en deux. Quand la chirurgienne lui a découpé le ventre, elle lui a aussi découpé l'âme. Mais les chirurgiens ne savent pas ce qu'ils découpent. On leur a appris la chair, la peau, l'utérus, le muscle.
Pas l'âme.
Elle a un sourire magnifique. Francesca ne supporte pas l'injustice, ou l'hypocrisie.
Elle, elle ne se tait jamais.
A tel point d'ailleurs qu'elle est toujours en colère. Ses yeux virent au noir, elle regarde ses sabots, et quand elle relève la tête c'est un orage qui s'abat sur le monde. Cette fille a l'énergie de la tempête. Et ses couleurs.