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Critiques de Julie Estève (159)
Simple

Antoine Orsini meurt à un âge d’homme mur. On peut supposer que la plupart des habitants du village se déplacent à son enterrement, mais il est peu probable que qui que ce soit y verse la moindre larme. Surtout pas la mère Biancarelli, la maman de Florence. Car Antoine, dit le Baoul, est simplet. L’histoire a beau se jouer à la fin du vingtième siècle, c’est la vie reculée d’un village corse haut perché que raconte Julie Estève. Tellement encastré dans la montagne, qu’au cimetière, les cercueils sont ensevelis à la verticale.

Antoine, dit le Baoul, raconte sa vie à sa chaise, devenue sa confidente. Il la raconte à la façon de l’arriéré qu’il est, avec un vocabulaire tout à lui, haché, sautant en permanence du coq à l’âne dans un discours incohérent.

L’incohérence est bien entendu construite, dans ce roman. Ne craignez pas d’entendre pérorer un fou dans un discours sans queue ni tête. Julie Estève a su, tout en conservant une structure totalement désorganisée du langage et des idées, monter au contraire une histoire qui a un début, un milieu et une fin. Si Antoine, dit le Baoul ne saura jamais qui a assassiné Florence dans les bois dans sa seizième année, n’ayez aucune crainte : le lecteur, lui, finira par le savoir.

« En 1985 moi j’ai trente-deux ans, et j’suis pareil qu’un gardien de phare, mais dans la montagne. Je m’assoie avec Magic en face la cabine et je note dans mon cahier qui appelle qui à quelle heure. C’est du boulot sept jours sur sept ! A trois heures du matin jeudi onze juillet mille neuf cent quatre-vingt-cinq, Dominique Casanova a passé un coup de fil à une fille alors qu’il est marié. Je l’ai consigné dans mon carnet. Il était saoul parce qu’il pensait parler tout bas alors que pas du tout. C’est facile pour lui de boire l’œil vu qu’il est le patron du bar ici. Il a aucun mérite. Sa femme, c’est Noëlle la murène. Elle se doute pas qu’elle est cocue en plus de son utérus bon à rien. »

J’ai eu beaucoup de mal, dans les premières pages, à rentrer dans le style si surprenant de Simple. Le langage primaire a de quoi dérouter. Puis j’ai réussi à me prendre d’intérêt pour l’histoire et son héros principal, au point d’en oublier les mots. Lorsque je m’en suis rendue compte, j’ai réalisé aussi avec surprise que j’appréciais la fusion entre l’histoire et la narration, qu’elle était même nécessaire. Simple ne pouvait pas être écrit autrement parce qu’Antoine, dit le Baoul est animal plus qu’humain.

Ce n’est pas la première fois qu’un simplet a un rôle principal, dans la littérature. Marcus Malte par exemple, s’est emparé du même type de personnage dans Le garçon (Zulma, 2016). Mais l’objectif des deux auteurs est très différent : Marcus Malte utilise son propre sauvage, muet, pour décrire des sensations et des odeurs et en cela, il utilise un vocabulaire à la fois naïf et chargé d’émotion d’une puissance extraordinaire. Julie Estève, quant à elle, se sert d’Antoine pour évoquer les rapports humains. Primaire et animal, mais social, comme il est le narrateur de son histoire, son langage ne peut qu’être pauvre et direct ainsi que Julie Estève l’a choisi et réussi à maintenir tout au long de l’histoire. Hélas pour Julie Estève, la force des deux romans en est très différente.

Je pense que je ne retiendrai vraisemblablement pas grand-chose de ce texte et je le regrette. Il n’est, hélas, à mes yeux, qu’un exercice de style, aussi intéressant soit-il. Comme l’auteur ne prend aucun recul avec son personnage principal (et comment en prendre, lorsque la narration est à la première personne ?), je ne sais pas où elle veut en venir, en matière de message, avec son intrigue. Et sans finalité autre que celle d’un polar écrit de manière originale, pour moi l’histoire n’a pas un énorme intérêt.
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Simple

Abruti, ahuri, andouille, arriéré, bêta, ballot, cloche cornichon, couillon, crétin, cruche, débile dégénéré, emmanché, faible d'esprit, fou, ignorant, idiot, imbécile, jacques, manche, niais, nul retardé, sot, stupide, simple d'esprit, simple, baoul…



Qu’il en existe des mots, des insultes, des méchancetés toujours plus élaborés pour désigner la différence, ou plutôt nommer notre intolérance à cette différence.



Simple, ce n’est pas seulement l’histoire d’Antoine mais d’Antoine et de Florence, malmenés tous les deux, abimés par la haine, la vilénie et la bassesse des hommes. Ce que seul l’homme peut faire à son prochain.

Le drame couve, on le voit arriver tout comme l’opprobre s’abattre sur celui tout désigné, le baoul, celui que tout le monde souhaite coupable. Car il est bien plus simple d’imaginer le mal associé à la différence que le mal chez Monsieur tout le monde. Parce que suspecté tout le monde reviendrait presque à se suspecter soi-même, accepter sa part d’ombre et ces possibilités toujours plus infinies et infamante d’atteindre l’autre.



Ce roman est attendrissant, bouleversant, incisif. Comme une envie de pleurer pour Antoine, sur Antoine. De pleurer sur notre inhumanité si humaine pourtant. Un espoir aussi pour ceux qui osent être autre, être en lien, qui traitent l’altérité avec bienveillance, humanité et qui parfois sont acteurs et accompagnateurs de résilience. Comme Madeleine, cette douce institutrice qui prend en compte, qui fait en sorte qu’Antoine compte, parce que sans amour, la violence parfois devient le seul repli.
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Simple

« Simple » est une qualification positive pour désigner une personne atteinte de débilité légère. Ici, il désigne le personnage principal de ce roman écrit à la première personne du singulier, Antoine Orsini. Effectivement, Antoine est né trop tard, avec une tête trop grosse, dans laquelle, selon son père « il n’y a rien dedans » et souffre d’un handicap mental depuis sa naissance.

Dans son village corse, il est devenu, le « baoul », autrement dit, l’idiot du coin.

Sa différence, il la vit (ou devrait-on dire, subit) dans l’indifférence liée à sa naïveté, à son incompréhension des phénomènes qui l’entourent. Les autres rient de lui ; il rit avec eux.

Et lorsque la plus belle fille du village disparaît, il faut un coupable et c’est le « baoul » qui se retrouve en prison sans plus d’explication.

Tout cela, c’est l’auteure qui nous le raconte à travers la voix de son personnage. Elle s’immisce dans sa tête et analyse l’entourage dans une position d’omniscience qui permet au lecteur d’avoir une compréhension fine de ce qui se déroule au fil des pages.

C’est un récit intéressant, plutôt bien écrit, mais je n’ai pas réussi à me laisser embarquer dans ce roman, dans le rythme que lui donne l’auteure. Je suis pourtant très sensible au domaine du handicap, mais ici, il m’a semblé parfois un peu trop caricatural. Et puis cette manie qu’ont les primo romanciers actuels de nous débiter des énumérations sans fin commence à m’agacer.

Je pense que « Simple », que j’ai vite lu, sera tout aussi vite oublié dans mon esprit.



Lu dans le cadre des 68 premières fois.

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Simple

C'est l'enterrement d'Antoine Orsini. Qui ça, me dites-vous ? Antoine Orsini ?



Ah oui le baoul, c'est comme cela qu'on l'appelait dans le village.





Nous sommes dans un village de montagne corse. Antoine se souvient et nous raconte sa vie, enfin pas à nous mais à cette chaise trouée en plastique blanc qu'il avait trouvée.





Antoine lui raconte sa vie. A la marge, il était. C'était le "simplet" du village, différent des autres, il était la cause de tous les maux.





Antoine nous parle de son enfance. Cadet de trois enfants, à la maison il était déjà rejeté.





A l'école, les enfants étaient cruels avec lui, c'était le marginal que seule Mademoiselle Madeleine avait aimé, mais elle était au cimetière aujourd'hui ! tout comme son amie Florence Biancarelli qu'il avait retrouvée morte sous les pins l'été 87.





Mais qu'était-il arrivé ? Ses souvenirs, ils nous les conte comme ils lui reviennent, dans le désordre, lui qui un peu chapardeur, un petit peu voyeur savait tout ce qui se passait dans ce village.





Avec lucidité, poésie , il nous partage ses émotions, les secrets du village.





La construction est particulière, un peu déstabilisante au départ mais toute appropriée au récit. Une écriture poétique, un style bien propre qui nous permet d'entrer en quelque sorte dans la tête du "baoul", de le comprendre.





Un très joli récit sur la différence, le regard des autres, c'est si facile de juger, de rendre responsable de tous les maux celui que l'on ne connaît pas, ne comprend pas. C'est facile d'être jugé coupable lorsqu'on est différent.





C'est une LC avec ma binôme Julie des Petites lectures de Scarlett. J'ai été séduite par l'histoire, la sensibilité et la poésie apportée au personnage, en est-il de même pour elle ?





Son avis se trouve ici







Ma note : 8/10
Lien : https://nathavh49.blogspot.c..
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Simple

J'ai découvert ce roman dans le cadre des 68 premières fois.

Après toutes ces belles critiques, je suis désolée de vous avouer que j’ai fait le choix d’abandonner cette lecture vers la page 80. Je n’ai pas réussi à rentrer dans l’histoire, à me rapprocher d’Antoine. Je l’ai trouvée très décousue. Et j’avais plein d’autres romans qui m’attendaient!!!

Malgré cela, j’ai été très heureuse de faire la connaissance de Julie Estève lors de la rencontre du Mans et de l’entendre parler de son roman et de son expérience de l’écriture.

Peut-être à un autre moment, pourrais-je retenter l’expérience de Simple ou de son premier roman Moro Sphinx! On verra!
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Simple

Est-ce l’histoire ? L’homme ? L’enquête ?

Les trois peut-être ou pas !

Nous sommes en Corse, dans un petit village en haut des montagnes où une jeune fille : Florence Biancarelli va être retrouvé morte.

Dans ce lieu reculé vit également Antoine Orsini qui est surtout connu pour être le baoul : l’idiot du village.

Nous allons donc suivre la vie de cet homme qui n’est pas tout à fait seul car ses plus proches amis sont au nombre de deux : magic et une chaise !

Vous n’imaginez pas ce que l’on peut raconter à un objet ou même lui faire faire. Le personnage est attendrissant mais si son regard est naïf ce qu’il raconte est loin de l’être.



Un roman étonnant qui nous présente l’anti-héros par excellence. Ce baoul, on va le suivre, apprendre à le connaître et même l’apprécier. Il va nous faire voyager dans cette nature corse hostile dans tous les sens du terme. Et peut être qu’il bousculera un peu nos idées reçues sur ces personnes différentes mais néanmoins plus humaines que la plupart d’entre nous.

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Simple

Antoine est le Fou, le benêt du village, aimé, détesté, moqué. Il habite dans un village perché dans les montagnes corses, et pour certains_es,, il est lui même perché !! En effet, son amie et confidente est 1 chaise ébréchée en plastique.

Il évoque son lien ambigu avec Florence Biancarelli, une gamine de seize ans retrouvée morte au milieu des pins et des années 80. et ses relations avec certains habitants. La question qui se pose est de savoir qui est le meurtrier de cette femme?????

Le ton est donné dès le début. L'auteur s'est mise à la hauteur d'Antoine en terme de langage: il est simple, direct, cru comme la pensée de cet héros.

Malheureusement, je n'ai pas réussi à entrer dans le monde d'Antoine car l'écriture m'a décontenancée...
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Simple

Un type qui parle à une chaise, on aura tout vu…Bien la preuve qu’il est cintré, Antoine Orsini, gaga, barré, baoul, quoi…et peut-être pire, non ?Tous les doutes sont permis, toutes les questions sont ouvertes quand c’est un simple d’esprit qui raconte sa propre histoire, un peu en désordre, un peu en bazar, un peu comme ça lui vient, à la va comme j’te pousse.

Sous la plume de Julie Estève, extrêmement finaude, elle, pour le coup, on se laisse porter par cette voix rapidement familière et touchante, on se laisse mener, par la main ou par le bout du nez, dans la vie d’Anto, de Florence, de la Murène et de l’Extra-terrestre, on joue les voyeurs dans cette vie de village, dans cette Corse profonde où on ne rigole pas avec l’honneur , où les réputations se lavent dans le sang, où le silence n’est pas d’or mais de plomb.

Les chemins de la pensée d’Antoine sont escarpés et sinueux, ils nous offrent une balade magnifique dans un paysage humain varié, subtile et changeant selon les points de vue que propose la progression dans le récit. La langue, elle, est à l’image de ce baoul qui se raconte, simple, imagée, ensoleillée. Simple, comme ne le seront jamais les liens et relations qui gèrent cette microsociété de derrière les rideaux, où tout se sait sauf l’essentiel, où tout se tait sauf la rumeur, où l’on prête à autrui toute la noirceur dont on se sait capable.

C’est avec constance et avec une force mêlée de grâce que Julie Estève trace le sillon de son personnage et de son récit, feignant de les laisser se perdre dans des situations complexes voire sordides, là où il n’y a, finalement, qu’une histoire simple.

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Simple

Simple, c'est l'histoire d'Antoine Orsini qui habite un village perché dans les montagnes Corse. Tout le monde le surnomme le baoul, ce qui signifie en langue corse : l'idiot, le crétin... Parce qu'il n'est pas comme les autres, il est donc le souffre douleur. Et pourtant, sa différence fait de lui une autre richesse, Antoine a un don, il sait parler avec la nature., il a des visions, de ses cauchemars, il sait ce qui va advenir... entre réalité et songe ? Et puis comme il est indésirable, il parle aux objets, et là dans ce récit, il se confie à une chaise. Il lui raconte avec ses mots à lui, dans une langue très simple, son enfance, ses parents, la mort étrange de cette jeune fille Florence. Nous livrant les secrets de certains habitants du village que nous pouvons, au fil de la lecture, les uns après les autres soupçonner du meurtre. Cet Antoine est troublant, on l'aime très vite et en même temps il reste insaisissable et effrayant ... Il questionne inévitablement voir même dérange. Ce roman nous offre un portrait fort d'un homme différent dans une langue âpre et violente souvent, au reflet de l'âme torturée du personnage comme poétique parfois. Finalement Antoine n'est pas si simple que cela, il nous désoriente et nous interroge quant à savoir qui a vraiment tué cette jeune fille. Qui est le véritable coupable ?
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Simple

Antoine, fils du village, différent des autres, simple. Attachant de part sa différence qui lui vaut moqueries et brutalité de la part de son père.. et des autres. Attachant car différent et sensible à la détresse des autres. Il est toujours là pour les autres quand eux ne vont pas bien.



Mais voilà cela ne suffit pas pour qu’il puisse faire sa place dans ce monde différent du sien.

Alors évidemment quand tout va de travers, c’est forcément à cause d’Antoine.



Bien que le personnage principal de cette histoire puisse paraître sympathique, l’histoire ne m’a pas convaincue du tout : un scénario trop évident ? Une histoire déjà lue, sans apport significatif dans ce récit qui puisse le distinguer par rapport aux autres ? J e ne saurais le dire.



Je l'ai lu jusqu'au bout - il se lit facilement - pensant trouver peut-être l'étincelle qui ferait briller ce récit à la fin de l'histoire, mais je n'ai pas trouvé le petit plus qui me ferait aimer ce livre.

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Simple

Simple est un récit brut de décoffrage dont la narration se confond avec le personnage sans filtre et plein de candeur. Julie Estève nous place au plus près de ses émotions, de ses rires, de ses sentiments. Comme lui, elle nous offre la capacité à neutraliser (parfois) la forme de violence dont il est victime, par ses éclats de rires, ses petites manies et ses drôlerie (c’est aussi un personnage un peu farceur). Mais ne soyons pas dupe, on comprend qu’il a fait l’objet de persécution et a été désigné coupable et on s’en émeut forcément, on s’énerve même. Parce qu’Antoine est un bon gars, un peu maladroit mais plein de sensibilité.







Excellente lecture, Simple possède la belle qualité de nous parler et de célébrer de différence à travers un héros inoubliable, attachant et d’une grande beauté intérieure. Oui, Antoine est un simplet mais certainement le plus innocent de tous.



La langue au tempo rapide, pleine d’accidents narratifs et de contresens, offre une lecture étourdissante. Difficile à quitter, on est pris entre le désir de savoir la vérité et irrésistiblement attiré par le récit de ce narrateur qu’on ne peut qu’apprécier.



Et lorsque la fin arrive, c’est évidement sous le coup de l’émotion qu’on referme ce bouquin, avec à l’esprit qu’on n’est pas près d’oublier cette affaire (loin d’être simple) et surtout Antoine, un simplet bouleversant par sa candeur et sa lucidité.......................................
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Simple

Deuxième roman après ma lecture apprécié de moro-sphinx. Simple, c'est la voix d'Antoine, un enfant un peu différent, mogol diront certains, d'un village corse. Le "baoul" va nous raconter ce qui est arrivé un soir à Florence, sa jeune voisine qui a été retrouvée morte dans la forêt. Avec une écriture parlée, poétique, l'auteure nous entraîne dans les rues du village, dans les bois environnants, dans les arbres où Antoine aime se réfugier et observer la vie des villageois. La Corse y est décrite par ce simple d'esprit qui raconte sa vie à une pauvre chaise qu'il a trouvé au bord de la rue. Des personnages touchants pour ce conte poétique, avec en arrière plan la situation sociale, politique de la Corse. A nouveau, un texte très surprenant pour cette jeune auteure. Auteure a suivre.

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Simple

L’idiot du village



Julie Estève est de retour avec un roman formidablement cruel et un suspense admirablement construit, le tout servi par une langue d’une inventivité rare, celle du baoul, le narrateur considéré par tous comme l’idiot du village.



À propos de Moro-Sphinx, son premier roman, je disais que Julie Estève « fait montre d’un beau savoir-écrire et parvient à ménager le suspense, à nous livrer chapitre après chapitre les bribes d’une vie qui se dissout dans une sorte d’ordinaire peu ordinaire. » Un jugement que je peux réitérer avec ce second roman, même s’il est situé à mille lieues du premier.

La jeune femme à la sexualité débridée a laissé la place à un homme qui vit dans un petit village en Corse sur les hauteurs d’Ajaccio. Nous allons le suivre à plusieurs époques de son existence, chroniqueur des faits divers – et des bribes de sa vie – qui vont secouer cette communauté.

Disons d’emblée combien ce personnage est bien campé et combien Julie Estève a réussi le pari de créer une langue propre au baoul qui donne à ce second roman un parfum très original. Le baoul, c’est le nom que l’on donne en Corse au simplet, à l’idiot du village. Antoine est donc un être à part, mais contrairement à ceux que croit la majorité des habitants, son dérangement n’affecte nullement sa mémoire.

Quand l’histoire commence, il vient de dénicher une chaise en plastique qui va devenir sa confidente. Tout au long du roman, il va s’adresser à elle pour lui raconter ses souvenirs ou pour préciser un point.

Il se souvient de sa scolarité, de la cruauté dont il a été victime, mais aussi de la gentillesse de sa maîtresse, Madame Madeleine, qui repose aujourd’hui au cimetière et à laquelle il rend régulièrement visite: «Je la couvre d’immortelles parce qu’elle mérite un champ de fleurs au-dessus d’elle. Même si ça sert à rien vu qu’elle est morte, c’est bien mieux avec, que rien.»

Mais un autre corps en décomposition va faire grimper l’intensité dramatique et le suspense, celui de Florence Biancarelli, retrouvée morte à seize ans en 1987. «Florence, elle ressemblait au soleil au zénith. La regarder, ça faisait suinter les yeux. Quand je l’ai trouvée dans la forêt de pins, elle était plus une star pour un sou! Magic, il était planté par terre à côté, on sait pas ce qu’elle a pu lui raconter, il a pas dit un mot ! En tout cas, la petite, moi j’ai failli pas la reconnaître, comme de la cire elle était sa peau. Avec les globes enfoncés! j’dis à ma chaise. C’est en 1987 que j’l’ai découverte! Un jeudi. Ça fait vingt-neuf ans, ça fait du chemin. Florence, c’est la pire chose qui me soit arrivée dans la vie. Les autres y disent que c’est ma faute si elle est morte, y disent que j’suis une saloperie et qu’y faudrait m’arracher les couilles! » Avec la chaise en plastique du bar, le lecteur va petit à petit découvrir la vérité, entendre parler d’autres morts et découvrir les secrets que le village préfèrerait voir rester enfouis. Après tout, c’est si facile de condamner le baoul. Si même si la police le voit comme un coupable idéal, il n’a pourtant pas tué Florence. Bien au contraire, il était chargé de la surveiller pour le compte de son ami Yvan, l’employé de la poste, qui rêvait de l’épouser et pouvait disposait en échange de la cabine téléphonique à partir de laquelle il pouvait appeler le monde entier.

Aujourd’hui, après avoir purgé une longue peine de prison, il est de retour mais il est seul. Il n’y a guère que son ami Magic pour l’accompagner.

Julie Estève réussit tout à la fois une chronique sociale, une ode à la différence et un manuel sur la cruauté. Et nous voilà à nouveau du côté de Moro-Sphinx !


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Simple

Il en est souvent ainsi du deuxième roman d’un auteur dont j’ai beaucoup aimé le premier. Je commence toujours la lecture avec, à la fois, espoir et crainte : l’espoir d’être à nouveau emportée, subjuguée, ravie, et la crainte d’être déçue. "Simple" de Julie Estève n’a pas dérogé à la règle. J’ai d’ailleurs attendu avant d’ouvrir le livre, attendu quelques jours, je l’ai regardé, la sobriété de la couverture, la jolie illustration du bandeau…



Et puis, j’ai lu "Antoine Orsini est mort et le soleil n’y peut rien.", et ne me suis plus arrêtée. "Simple" raconte, en effet, l’histoire d’Antoine Orsini, même si on a oublié ce nom depuis longtemps au profit de "baoul". Il est le baoul de ce petit village corse, l’idiot, quoi, le simple, simple d’esprit, simple de tout, celui qui parle à sa chaise, une chaise trouée, fendue, à jeter. Il est celui que tout le monde rejette, surtout depuis qu’il a fait de la taule, depuis la mort de Florence Biancarelli, elle avait seize ans.



Lire "Simple" de Julie Estève, c’est entrer dans un monde poétique, un monde où la poésie enveloppe de soie la différence, cette espèce de folie que l’on attribue à celui que l’on ne comprend pas. C’est se plonger dans une langue particulière, celle d’un homme à l’âme d’enfant. Anto, je préfère l’appeler ainsi parle, parle, parle. Il raconte ce qu’il voit, les gens qui l’entourent et surtout Florence "La petite, on pourrait la regarder des heures et s’ennuyer jamais. Elle est un pays lointain à portée de main, pas obligé de prendre l’avion pour le paysage. Dans le village, c’est tombé sur elle la beauté et y a tout le monde qui la dévisage du haut, et du bas aussi. Les autres filles, elles existent plus quand Flo est là, c’est des figurantes comme dans les films."



Lire "Simple" c’est découvrir le talent fou que l’auteure a de parer ses héros, quels qu’ils soient, d’une part d’humanité, d’intelligence, de tendresse, d’amour. Certes, tous ont des faiblesses, mais certains possèdent aussi des forces, des qualités, des valeurs insoupçonnées, et surtout le héros de l’histoire : "Me suis penché au-dessus de la flotte et suis tombé nez à nez sur mon reflet : en or massif ! Tête en or. Muscles en or. Même les couilles ! Un super-héros j’étais. Me suis dit qu’elle avait bien de la chance Vanina que son type brille autant. Ça m’a fait penser au con du mythe qui est amoureux de lui-même, celui qu’a donné son nom à la fleur." Le mythe de Narcisse revisité par Antoine vaut, en effet, de l’or.



Lire "Simple" m’a enchantée, captivée, émue. Il m’a permis d’entrer dans le cœur d’un homme différent, de comprendre ses tourments, ses difficultés, ses douleurs. Julie Estève a su me faire partager l’intérêt qu’elle porte à ses personnages, sans faiblir, de la première à la dernière ligne. Quant à la fin… je vous laisse la découvrir.



"Simple" : un très beau roman, tout simplement.


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Simple

Un roman qui se lit facilement

C'est beau l'innocence du héros mais malgré tout il sait ce qu il fait il n'est pas si naif que l on peut le croire.

Les paysages corses sont tès bien décrits on s'y croirait

Ils sont très austères à l'image des personnages de ce roman.
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Simple

****



Antoine Orsini est ce qu'on appelle dans les villages, un simplet, un idiot, un mongol. C'est le baoul en corse. Il traine toute la journée dans les rues, entend et voit tout. Il n'a d'autres amis que l'Extraterrestre, un petit doué des PTT, Magic le dictaphone et Florence, la plus jolie fille du village. Mais l'innocence de Tonio ne suffit pas toujours et on lui prête souvent des intentions qu'il n'a pas... Comme celle d'avoir assassiné Florence...



Il était une fois Antoine... Parce qu'il s'agit bien de cela dans le deuxième roman de Julie Estève, un conte poétique sur la différence et les difficultés de vivre avec.

Dotée d'une très belle écriture, l'auteur nous emmène dans le maquis corse, au sein d'un petit village avec ses habitants faussement aimables. Troisième enfant d'une famille endeuillée par la mort de la mère en couches, Antoine est un homme simple qui nous raconte son histoire.

Mais être innocent ne veut pas dire que tout est toujours facile, pour lui comme pour les autres. Il faut apprendre à composer, accepter la différence et comprendre les réactions des uns et des autres. Pour Antoine, chaque mot a sa place, chaque image a son sens, et ils ne sont pas toujours les mêmes pour ceux qui lui font face.



Simple est une histoire à la fois triste et belle, douce et brutale, d'un homme qui vit dans un autre monde que le notre...



Un grand merci aux 68 premières fois pour cette belle découverte de la rentrée littéraire !
Lien : https://lire-et-vous.fr/2018..
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Simple

Antoine Orsini est le baoul d’un village de Corse où tout se sait et tout se raconte. Le baoul c’est le fou, l’idiot, le mec paumé à qui il manque une case. Celui qui crie aussi, qui pleure pour un rien, qui s’intéresse à tout d’une curiosité enfantine et parfois tordue. Qui fait peur, qui raconte des histoires effrayantes aux enfants, qui parle à Florence depuis les branches d’un figuier. Florence qui est morte, d’un trou dans le ventres. Mais ça le baoul il le savait qu’elle allait finir toute bleue dans les pins. Mais, juré, il ne l’a tuée que dans ses rêves qu’il dit à tout le monde. Mais personne le croit bien sûr, un baoul, c’est forcément lui, le coupable.



« Antoine Orsini est mort et le soleil n’y peut rien. »



A travers ses pages Antoine Orsini est pourtant bien vivant. Revenu de ses quinze années de prison dans ce village qui l’a vu grandir il raconte les gens, la religion, les paysages, Florence et ses chats, Noëlle et son ventre stérile, ses cauchemars et ses ciels roses. Avec des mots simples, ses crises d’hystéries et de violence, les insultes qu’on lui lance nous avançons petit à petit dans le dédale de ses pensées. Ses propos sont décousus, et pourtant… pourtant quand il parle à sa chaise, cette chaise fendue et délaissée, il y a tant de beauté, de poésie et de rêverie. Peut-être même n’aurait-il suffit que d’un envol, d’un peu de bonté, de patience...mais non, Antoine Orsini est le garçon qu’on abandonne, celui dont personne ne veut.



A travers son regard simple la brutalité des hommes côtoie la douceur d’une maîtresse d’école, les coups de son père sur son corps apprivoisent ceux de son frère pour le défendre, mais pourtant, tout au fond et pour tout le monde il reste le tueur né, celui qui dès la naissance a assassiné sa mère. Lui même n’est pas persuadé de l’avoir fait ou pas, d’ailleurs on a finalement que peu de fois son point de vue sur ce qui se passe, ce sont souvent des faits alignés les uns à la suite des autres qui nous offrent un regard clairvoyant sur ce qui l’entoure, ce qui l’isole, ce qui fait de lui un personnage si singulier.



Dans son récit essoufflé on tisse, petit à petit, la toile qui s’est refermée sur Florence Biancarelli, sa seule amie avec l’Extraterrestre (un opération téléphonique) et Magic (un enregistreur vocal), son amour d’enfance aussi sans doute. La seule à lui adresser la parole en tout cas. On s’élance sur des pistes qui ne mènent nul part, on s’interroge, on cherche, on creuse… Comme il est facile de condamner quelqu’un pour son étrangeté, sa bizarrerie, sa violence. Comme il est utile de se débarrasser du baoul, afin de ne pas voir, de ne pas comprendre que tant d’autres choses ont pu se produire, dont la plus cruelle, la plus terrible, des fins. Celle qui laisse un trou dans le ventre et un vide dans le coeur.



En résumé



Simple est un roman qui se lit d’une traite, sans discontinuer. A mi chemin entre le polar et la critique sociale il impose un regard simple, extravagant et émouvant sur ce petit village de Corse, sur la brutalité des hommes et la poésie du ciel. A travers le point de vue d’Antoine Orsini c’est le monde qui s’offre à vous.
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Simple



Le « baoul » et une chaise toute rouillée, même pas jolie. Et voilà que Julie Estève fait une rétrospective de la vie d’Antoine Orisini. Un garçon simplet, moqué depuis son plus jeune âge, en marge des autres. Un personnage profondément encré dans le temps. Le temps de la différence de ceux qui ne perçoivent pas le monde comme la société l’entend. Un monde qui fout le camp et qui prend pour cible les plus faibles. Le monde a besoin d’un bouc émissaire. Les gens ont besoin d’un coupable à leurs fautes. Ici, c’est tout un village contre un enfant, puis un homme. Lorsque la petite Florence est retrouvée morte dans les bois, on accuse Antoine. Pourquoi chercher plus loin ?

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Les personnages qui gravitent autour de lui sont vils, cruels et profondément égoïstes. Tous se servent de lui pour arriver à leur fin. Il y a Florence, l’Extraterrestre, amoureux de la jeune fille, qui le paie pour l’observer. C’est malsain, mais Antoine s’y prête quand même. Parce qu’il est l’être à l’esprit le plus innocent de ce village.

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Bien qu’il soit adulte, Antoine a un langage enfantin, sans code et retenue. Il parle comme ça lui vient. C’est désordonné, vulgaire, parfois. Cela m’a parfois dérangé, je trouvais que c’était trop, lourd. Lourd, comme Antoine. Mais après réflexion, j’ai compris le personnage. Il est prêt à tout pour se faire aimer. Il aime mal, c’est parfois démesuré, obsessionnel. Mais Antoine est pur, si pur. Les autres le rendent sale.

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Florence est un personnage intéressant, dommage qu’il n’y ait pas quelques chapitres de son pdv. La cruelle vérité qui l’entoure est glaciale. Le seul à connaître la vérité ? Antoine. Antoine, le baoul. L’idiot, le fou. Celui que personne n’entend, ne croit. Nul être ne devrait subir la cruauté des autres.

Bien que l’écriture soit enfantine liée au langage d’Antoine, l’histoire est rudement menée, et on sent la maturité de la plume de l’auteure. Une plume qui décrit le monde, la société, le monde dans leur plus bref appareil.
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Simple

Comme il est simple de désigner coupable le "baoul", "le mongol", qui, pourtant, dans sa langue à lui, est bien le plus lucide de ce village de Corse. Beau. Simple. Fort.
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Simple

Chronique de Scarlett sur Léa Touch Book



« Simple » de Julie Estève, c’est l’histoire d’Antoine qu'on surnomme le baoul dans son village, baoul comme demeuré, idiot. Antoine lui nous raconte tout ce qui lui passe par la tête, son passé, son village, les drames et les petits riens de sa vie mais aussi son ressenti, ses sentiments avec ses mots à lui. Il nous parle des rêves étranges qu’il fait ainsi que de l’avant, pendant et après drame, celui qui a marqué le village et changé sa vie à lui le baoul. Antoine il est différent depuis toujours, il aime Ayrton Senna, les belles voitures , les cailloux et les figues entre autres . Il a de l’humour, un sens aigu de l’observation et une logique très simple et tellement évidente. Et comme il ne reste plus personne pour l’écouter et bien Antoine il parle à sa chaise. C’est le personnage central de ce roman, et il est touchant mais il fait peur parce que ce qui se passe dans sa tête il n’arrive pas à l’exprimer.



Dans son village en Corse il a fait de belles rencontres comme Madame Madeleine l’institutrice et Magic un dictaphone que lui ont offert son frère et sa sœur et qu’il considère comme un ami comme sa chaise parce que finalement les objets ils ne vous jugent pas. Il aime aussi beaucoup Florence Antoine, elle qui faisait rêver beaucoup de garçons car elle était attentionnée avec lui avant de mourir dans les bois.



Dans le village il y a aussi tous les autres, son père alcoolique qui lui reproche d’avoir tué sa mère en naissant, son frère Pierre qu’il voit peu maintenant qu’il s’est fatigué de le défendre contre tous, et sa sœur Tomasine qui est partie à Paris pour fuir le village et aller à la rencontre de son rêve de devenir actrice.



La mère Biancarelli quant à elle, l’insulte dès que possible car elle le pense responsable de la mort de Florence sa fille. Il y a aussi Noëlle qu’Antoine surnomme la murène si désespérée de ne pouvoir enfanter qu’elle en devient aigrie, Yvan « l’extraterrestre » fou d’amour pour Florence. Et puis en prison, et oui Antoine fera de la prison pour une raison que vous comprendrez en lisant le livre il rencontre Saguézé un taulard mafieux qui le protègera tout le long de son séjour en taule parce qu’Antoine lui rappelle son frangin.



Ce roman est touchant et très drôle parfois comme lorsque qu’Antoine décrit la « merde » qu’est Doumé, ce pauvre mec qui fanfaronne , « engrosse » en douce une jeune femme amoureuse tout en étant bien marié et se dégonfle et se débine quand surviennent les problèmes. Antoine utilisera pas moins de 27 mots pour dire ce qu’il pense de ce pauvre type, lui le simplet il peut aligner 27 termes différents pour décrire un sombre nullard.

C’est un livre très agréable à lire, qui vous fait sourire même si c’est de tristesse et les personnages sont réels, vivants, tangibles quant à Antoine son rire, ses mots résonnent encore dans ma tête.
Lien : https://leatouchbook.blogspo..
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