Interview de Julien Rampin par Patsy Monsoon pour parler de son nouveau roman La chanteuse de bal paru aux Editions charleston.
D'autres interviews d'auteurs par Patsy sur la page youtube officielle : https://www.youtube.com/channel/UCN97lQDaGGU-2b7Wc8k6oFg
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Le cœur , c'est un cimetière qui occupe de plus en plus de place au fur et à mesure qu'on vieillit .
Il se remplit de gens que l'on a aimés et qui chacun leur tour partent .
Les hommes que l'on aime , qui nous aiment .
Que nous laissons .
Qui nous laissent .
Dont on se lasse .
Ils viennent alors s'étendre dans les allées de notre cimetière intime .
Les gens qui changent , qu'on a adorés , à un moment de nos vies , puis qu'on ne voit plus .
Ces amitiés qui disparaissent . Qui , elles aussi viennent s'étendre au milieu de ce qui fut .
Les êtres que nous avons croisés et que nous n'avons pas eu le courage de rencontrer. Comme des étincelles , qu'on n'a pas su laisser s'enflammer.
[...]
Et , évidemment , ces gens qui partent , définitivement .
P.180-181
On peut passer des années à côtoyer des gens qui effleurent à peine ce que nous sommes. Et un matin, on croise quelqu’un qui percute nos ambitions intimes. Fracasse nos millions de carapaces, en un éclat de rire.
Se taire. Après tout, cela ne la dérange pas. Ce silence, c'est aussi leur réconfort. La preuve qu'une amitié est bel et bien née entre eux. Il n'y a qu'avec les êtres chers que l'on peut se taire vraiment, et partager, pourtant, quelque chose de fort.
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Journée ensoleillée .
Journée qui sent l'herbe fraîchement coupée .
Une certaine odeur du bonheur .
Lorsque rien n'est compliqué .
Lorsque le mois de juin offre ses premiers vrais rayons de soleil et que sa langueur pénètre jusqu'à l'âme .
p. 103
Il farfouille dans son portefeuille et dépose, comme à l'accoutumée, un généreux pourboire sur la table. Ce geste, mille fois répété, lui fait apercevoir cette main parcheminée qu'est la sienne et encore une fois, il s'en étonne.
Comment peut-on autant changer à l'extérieur et rester le même pourtant en dedans ?
Il y a tellement de façons d'aimer les autres. Ses billets doux, ce sont des saucisses grillées. Ses déclarations, du boudin blanc. Ses câlins, des cookies au chocolat. Il sent bon, son amour. Il fleure bon la cannelle et le sucre caramélisé. Il a le goût des pommes au four. Il a la rondeur d'un gratin dauphinois. Il atterrit dans l'estomac et fait du bien.
Il ne fait pas de bruit, mais il prend au corps. Tout entier.
Les livres sont des messagers.Ils sont porteurs de ce qu'on n'ose pas dire.Ils te parlent de ce que tu ignores de toi- même,et mettent en lumière ces sentiments que tu n'oses avouer à personne.C'est comme ça qu'ils te soulagent.C'est pour ça que parfois,un livre nous transperce et que jamais,jamais, on ne peut l'oublier.Quoi qu'on lise après.
Il connaissait déjà l'abandon à venir. Maman le lui avait confié en héritage. Papa le lui avait carrément balancé au visage. Il était bien placé pour savoir qu'on ne pouvait pas faire grand-chose avec l'absence. À part apprendre à vivre avec.
Paul-Henry jette un coup d'oeil à son compte et ne peut s'empêcher de ressentir une petite fierté mal placée : il a deux nouveaux abonnés depuis hier. Soit un total de deux cent trois personnes qui suivent sa page Paul-en-lit.
Il sait que ça ne devrait pas avoir d'importance, et pourtant, il ne peut s'empêcher d'éprouver une bouffée de plaisir. Un inconnu s'est baladé sur les réseaux, est tombé sur sa page et a eu envie d'y revenir suffisamment pour s'abonner.
Ce n'est rien et c'est immense.
Ce matin, la journée est belle, le soleil brille et Paul-Henry a deux cent trois abonnés.
Elle aurait dû rentrer plus tôt. Prendre le dernier métro. Le pire. Celui qui n'aura fait qu'effleurer la nuit.