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Critiques de Julien Suaudeau (80)
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Le Français

« Plus tard, en nettoyant la vitre sur le parking de l’entrepôt, j’ai pensé qu’on était des hommes. Il y avait dans cette évidence comme l’ombre d’un très grand malheur. »



L’itinéraire de ce jeune homme de presque vingt-et-un ans est le récit d’un effacement, d’un renoncement, d’un reniement. Le personnage principal de ce roman, « Le Français », également surnom donné au jeune homme par ses compagnons de guerre, est un jeune homme d’une banalité crasse : petite vie miséreuse, mais vie quand même, dans une banlieue d’Evreux, entouré de sa mère, accidenté de la route, de son beau-père qui le frappe sans que personne, y compris le cogneur, ne sache vraiment pourquoi, de ses collègues de travail qui consiste à faire commis-livreur.



Cette vie aussi misérable et glauque soit-elle va tout lui prendre : méthodiquement elle va le priver de toutes ses attaches familiales (le jour ou son beau-père frappe une fois de trop, une fois trop fort), sentimentales (le jour où il croise Stéphanie dont il est amoureux dans les bras d’un autre) et sociales (le jour où il est pratiquement contraint de fuir).



Sa fuite, il l’organise à Bamako. Grâce à Ali, un de ses anciens collègues, et Mirko, un trafiquant venu d’Europe de l’Est, il quittera sa misère française pour une autre misère. Sauf qu’à Bamako, on va lui tendre la main et à travers la détresse qu’il porte en lui, celui qui deviendra « Le Français » se voit offrir une lueur d’espoir dont il ne peut pas pressentir qu’elle toute relative et basée sur le mensonge. Alors il s’engouffre dans la brèche de l’islam et de la taqiya, l’art de la duperie et de la dissimulation… Le seul hic c’est qu’il ne fait finalement que se duper lui-même jusqu’à commettre l’impensable, malgré la tentative de manipulation des services secrets français, et décapiter à visage découvert des otages occidentaux aux mains des terroristes.



Le jeune garçon n’est pas la victime d’une radicalisation opérée en France avant qu’il ne parte sur les traces du terrorisme. Il est l’aboutissement d’un processus lent et pernicieux. La force du processus qui s’opère insidieusement chez « Le Français » est de proposer une alternative au néant. D’ailleurs le personnage central ne demande que cela : exister, être quelqu’un, rester un homme… Il n’en aura finalement que l’illusion, marionnette dans les mains de ses manipulateurs, qu’ils soient terroristes ou agents français fréquentant un Radisson qui fonctionne comme une vitrine de ce que haïssent les terroristes (femmes, sexe, extravagance, colonialisme et tant d’autres choses) quand bien même leurs comportements ne seraient pas si différents.



C'est d'ailleurs toute l'ambiguïté et la dichotomie entre le discours et les actes. Les terroristes décrédibilisent ainsi ce qu'ils considèrent comme un acte de foi et qui n'est rien d'autre qu'un mensonge et une tromperie de plus.



A la lumière de ce qui se passe dans le monde depuis quelques semaines, ce livre n’est ni une excuse, ni une explication. Il a quelque chose de prémonitoire (il est sorti fin août 2015). Il est une lumière projetée sur un drame humain auquel notre société n’apporte aucune réponse, un mal profondément encré que le fossé entre les malades (potentiellement la jeunesse dans son ensemble car elle partage de manière aveugle le sentiment de rejet) et les médecins (notre classe politique qui n’a jamais aussi peu maîtrisé la situation). Et personnellement, je ne vois pas comment nous pouvons nous en sortir…



Le très bel article de Samuel Dock :

http://www.huffingtonpost.fr/samuel-dock/la-naissance-des-monstres-djihad-francais_b_8240032.html



Une interview de l’auteur :

http://www.parismatch.com/Culture/Livres/Le-vide-de-notre-sous-culture-nous-revient-en-pleine-gueule-Julien-Suaudeau-870719
Lien : http://wp.me/p2X8E2-y5
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Dawa



Voici un polar socio-politique passionnant où l’intrigue complexe est servie par une écriture sophistiquée et une atmosphère explosive car elle reflète l’actualité d’aujourd’hui avec un réalisme qui fait froid dans le dos. 

Julien Suaudeau situe son action en 2014, à Paris à la veille des élections municipales. L’auteur dresse un constat sans concession de notre « Société « à partir de points de vue différents . Des réunions des plus hautes sphères politiques aux caves inquiétantes des banlieues « chaudes » tout le monde va y passer et la « République « ne s’en sort pas indemne.



Paris tremble sous le coup d’une vidéo annonçant six attentats dans six gares parisiennes, nom de code de ces attentats « Dawa » .



« « Dawa «,ou plus précisément « da’wa » ….signifie à l’origine « l’appel « - appel à répandre l’islam et invitation à rejoindre les enseignements du prophète. Dans la sourate 30, Allah réveille les morts le jour de la résurrection. Sur la base de son sens coranique, le mot désigne dans les premiers siècle de l’ère musulmane la technique de propagande utilisée par différentes sectes pour étendre leur aire d’influence parmi les populations infidèles. Par extension, il prend ensuite le sens dérivé d’appel à la subversion de l’ordre établi, dans le but ultime d’établir la charia. Dans l’argot d’aujourd’hui,…, pour les jeunes des banlieues comme les petits-bourgeois, la connotation religieuse s’efface derrière un sens, la manifestation d’une énergie spontanée , impossible à canaliser : dawa signifie la bringue, la tête sauvage, à fond les ballons, mais aussi la pagaille, le désordre, le grand bazar. « ( extrait page 139)



Chaque protagoniste suit un objectif précis dans cette tragédie en douze actes.

Paoli, un flic chargé du terrorisme d’origine Corse qui poursuit une vengeance personnelle.

Des politiciens qui acceptent des compromis à la limite de la corruption souvent portés par un besoin de réussite personnelle au détriment des règles républicaines.

Assan, agrégé d’arabe , un algérien en quête d’une reconnaissance aux parfums de revanche envers son pays d’adoption.

Et des jeunes de banlieue preuves d’une génération en quête d’idéaux qui se sont trop facilement happés dans des combats qui ne devraient pas les concerner comme ces jeunes qui partent faire le djihad.



Des personnages écorchés dans une intrigues tellement réaliste .



Passée la présentation des personnages du roman on rentre très vite dans l’intrigue et dans ce compte à rebours inexorable. Treize chapitres pour arriver à ce vendredi 13 date à laquelle doivent exploser les bombes. Le rythme est pesant, l’atmosphère est noire, pesante et on s’étonne du réalisme clairvoyant et cruel dont fait preuve l’auteur, règle-t'il des comptes en assenant certaines vérités que beaucoup pensent out bas? Exprime-t'il une colère intérieure?



Un roman dense qui dresse une peinture sociale sans hypocrisie , un polar qui n’a rien à envier à certaines intrigues des séries américaines à succès sur le thème du terrorisme , un roman qui mériterait d’être porté sur grand écran.



Je ne le vote pas coup de coeur mais il ne manquait pas grand chose .
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Dawa

Dawa est un vrai pavé dans les eaux troubles de la société française. Et dans ce marigot, les crocodiles les plus redoutables ne sont pas forcément ceux que l'on croit.

D'un côté, un groupe de jeunes gens désespérés menace de faire sauter Paris, sous la houlette d'un agrégé d'arabe dévoré par la haine de soi.

De l'autre, dans les hautes sphères du pouvoir, les politiques intriguent et se vendent au plus offrant, jouant avec le destin des quidams comme de vulgaires pions.

Entre les deux, des flics, une journaliste, un caïd de la drogue font de leur mieux pour tracer leur route au milieu du chaos.

Dawa, c'est ça : le désordre dans lequel s'agite tout un pays, véritable cocotte-minute susceptible d'exploser à tout moment.

J'ai lu le livre en trois jours, fasciné par le rythme et les personnages, avec des sensations très proches de celles que me procurent les meilleurs romans de John Le Carré.

La brièveté des chapitres fait qu'on ne voit pas le temps passer, un tour de force pour un livre de cette épaisseur.

On attend la série ou le film avec impatience.
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Dawa

Enfin un romancier français qui ne se regarde pas le nombril !

La France d'aujourd'hui, ses tensions et ses fractures, est le grand sujet de Dawa, que Julien Suaudeau traite avec audace, pertinence, et surtout beaucoup de sensibilité pour tous ses personnages. On se laisse happer par cette histoire qui nous balade des deux côtés de la vie, on ferme les yeux en espérant que ça n'est qu'un roman, et quand on les rouvre on s'aperçoit que celui-ci est encore plus vrai que nature. Un véritable tour de force, notamment par son art de capter toutes les voix dissonantes de notre république en proie à ses démons, identité, soif de pouvoir, corruption, et un style d'une grande pureté, une façon de faire résonner la langue française qu'on n'avait pas entendue depuis longtemps.

Plus que prometteur: le grand roman de notre époque.

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Dawa

Dawa est le nom de code de la plus grande attaque terroriste jamais intentée dans la capitale française et vise à faire exploser 5 gares parisiennes. Assan, brillant enseignant à la fac de Paris VIII, est le leader de ce projet. Il vit dans l’ombre de son père Al Mansour ancien chef du FLN en Algérie et de son frère Kader tué par Paoli, directeur de la DGSE. Il est donc d’abord question de vengeance dans ce roman… mais pas seulement… En toile de fond, il y a aussi la politique et les élections municipales de 2014 qui se trouvent chamboulées par ce projet d’attaque terroriste…



On s’attend donc à un polar « explosif », mais le résultat donne plutôt la sensation d’un pétard mouillé…Beaucoup (trop) de personnages, beaucoup d’histoires parallèles, de conflits d’intérêts, des mots…des paroles… la vie des personnages scrutée en détail… et au final très peu d’actions et de suspens, qui pour un roman de 500 pages classé sous la catégorie « Polar », est gênant…

Il y avait de quoi, avec une telle connaissance du sujet que l’on ne peut renier chez l’auteur, équilibrer davantage le roman entre l’action et les mots, à l’instar d’une des questions que pose le roman, l’intégrisme par le débat ou par l’action, l’infiltration souterraine des réseaux islamistes radicaux ou le terrorisme ?

J’ai donc eu l’impression que l’auteur se servait de cette histoire d’attaque terroriste pour en réalité livrer un portrait, plutôt pessimiste de la société française d’aujourd’hui : politiques corrompu(e)s, misère sociale, échec de l’intégration…

D’ailleurs ce roman ressemble davantage à un récit journaliste authentique où on a simplement changé le nom de personnages réels, qu’à une fiction policière entraînante… Maintenant si vous savez à quoi vous attendre, vous serez peut-être captivés…Hélas, ça n’a pas été mon cas.



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Dawa

Un enfant qui voit ses parents mourir sous ses yeux. Adulte, il poursuit son envie de se venger.



Un professeur qui tente de vouloir faire sauter des bombes dans Paris. Il veut se venger également.



La cité des 3000 et toutes ces familles pour lesquelles il est difficile de s'en sortir.



Et le Qatar dans tout ça ?



Je commence par quoi, le négatif ou le positif ? Allez, je me lance dans le premier car j'aime terminer sur le positif et l'espoir.



Ce roman me laisse toutefois un goût amer qui a entravé mon plaisir de lecture. Je ne connais pas l'orientation politique de l'auteur. On peut ne pas aimer le gouvernement en place, les personnes qui le composent, mais critiquer le Ministre de l'Intérieur à ce point et le Ministre de la Justice, je ne suis pas d'accord. Je ne me fais pas d'illusion pour le premier, ses opinions sont clairement établies depuis qu'il s'est présenté à l'élection présidentielle, mais il ne fait pas pire ni mieux que ses prédécesseurs. Quant aux relations de la France avec le grand Imam de France, elles n'ont, je pense, jamais varié, quel que soit le gouvernement. Droite ou gauche font en sorte de ne pas le heurter pour que les communautés tentent de vivre ensemble dans ce pays. Et le Qatar. Le Qatar ! Est-ce seulement ce gouvernement actuel qui fait en sorte que la France bascule dans ses mains. Il ne me semble pas. Cela a commencé bien avant et sous l'ère NS. Je ne vais pas être mauvaise langue car il y en a aussi pour la droite et ses guéguerres et cette députée qui tente de s'en sortir hors de ce parti et faisant de la politique en dilettante.



Le principe et la vie des jeunes, des maghrébins dans ces cités près de Paris ne sont pas nouvelles. Leurs révoltes non plus, les envois de cars de CRS non plus. Mais tous ces jeunes veulent-ils réellement faire peur à la France, aux Parisiens ? Y a-t-il dans toutes ces cités des gens, des jeunes, qui sont endoctrinés pour faire sauter des bombes ?



Je juge donc son auteur sur son ensemble. Sur son style d'écriture, très bon, sur l'histoire véhiculée, j'ai franchement adhéré, sur les personnages avec leurs fêlures, leurs forces..., là, il n'y a pas photo et sur ce qu'il tente d'apporter au lecteur. S'il n'y avait pas eu le point précédent, j'aurais pu attribuer une excellente note à ce roman. Je ne veux pas dire que les auteurs ne font pas passer de messages politiques. Mais il faut que cela soit subtil, pas autant rentre dedans, surtout quand le lecteur s'intéresse un tant soit peu à l'actualité.



Trop de politique tue un roman très dense, bien écrit, même s'il y a quelques longueurs.



J'ai espéré que le projet ne soit pas mis à exécution.



Je n'aime pas quand un enfant souffre parce qu'il a vu l'indicible. Je pense qu'il ne s'en remet jamais et c'est ce qui arrive dans ce roman. Cet enfant est devenu un homme plus que mûr, proche de la retraite. Il occupe un très haut poste et il utilise ce poste pour se venger de l'homme qui l'a fait autant souffrir. I



Pour un premier roman, même si l'auteur est vraiment très en colère, il y a énormément de potentiel pour une nouvelle histoire, pour d'autres personnages aussi forts. Car j'ai un attachement particulier tous ces personnages, ces portraits d'hommes et de femmes cassés, avec leurs nombreuses forces et surtout leurs nombreuses faiblesses, qui sont obligés de prendre des décisions, selon leur passé, leur vécu du moment, leur travail. Pour cela, l'auteur est réellement très fort. Il nous détaille bien tous les conflits humains entre les diverses personnalités politiques, de la police, de l'armée, ce qui se trame en sous main, qui on veut faire tomber car il ne correspond pas à l'idéal du moment qui est bien fourbe. Bref, ce sont des êtres humains.



Nous avons donc deux histoires de vengeance. Nous avons également des histoires de famille et elles sont nombreuses, des familles musulmanes, une famille assez riche avec une fille qui tente de ne pas se conformer à l'éducation donnée, des histoires d'amour qui n'ont pas survécu. Un fils tente de reproduire l'histoire paternelle. Il se sent conditionné, tout comme l'a été son frère.



Le lecteur n'est jamais laissé à l'abandon. Toujours un rebondissement pour continuer à lire, toujours des révélations. De toutes façons, malgré mes critiques précédentes, je n'aurais pas laissé, je serais allée au bout pour connaître la fin de l'histoire. Il y a malgré la violence, la volonté de libérer l'Islam dans un pays jugé oppressif, une opposition, beaucoup d'amour.



L'analyse politique des coups bas, des tractations en sous-main est poussée à son paroxysme avec une très bonne plume.



Ne vous laissez pas rebuter par ces critiques, qui n'engagent que moi, mon ressenti. Dawa trouve tout de même un écho avec ce qui se passe actuellement en politique. J'aimerais bien, en tous les cas, échanger avec d'autres points de vue ou pas sur ce roman.


Lien : http://wp.me/pqAN1-6G7
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Dawa

Verdict : bon... alors que dire ; que l'histoire me semblait pleine de promesses; que le livre sur fond d'élections ressemblait à notre actualité, puisque nous votions hier.



Mais je n'ai pas du tout mais pas du tout accroché à ce premier roman. Si les idées ne sont pas mauvaises, il y a trop de choses, trop de personnages, trop de tout en fait; et première chose que je reproche à ce roman, c'est cette impression que l'auteur se gargarise de mots, s'écoute parler, utilise un registre de vocabulaire relativement élevé...qui au fond m'a pour prendre le contre pied " gravement saoulée". Je me suis dit que c'était beaucoup de blabla pour pas grand chose. Je me suis sentie rebutée vraiment; le style est bien trop lourd pour moi. L'auteur avait de grandes ambitions, quel dommage de se laisser entrainer dans de grandes phrases. Je ne me suis pas ennuyée mais j'attendais la fin avec impatience et j'ai failli renoncer plusieurs fois et laisser tomber ce livre. Dommage car vraiment le sujet me plaisait et les personnages étant vraiment intéressants!



Un grand merci à Babelio et aux Editions Robert Laffont.
Lien : http://noryane.canalblog.com..
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Universalisme

La collection "Le mot est faible " des éditions Anamosa, entend "s'emparer d'un mot dévoyé par la langue au pouvoir, de l'arracher à l'idéologie qu'il sert et à la soumission qu'il commande pour le rendre à ce qu'il veut dire". Ambition plus que salvatrice dans un monde où le débat politique perd de son sens. Je rentre dans cette collection grâce à la masse critique de Babelio et avec un concept qui déchire la gauche actuellement, l’universalisme.

Le livre démarre en plaidant pour un universalisme antiraciste. Les auteurs montrent que l'antiracisme est désormais vu comme une menace pour l'universalisme. Pour eux, l'universalisme doit être pensé avec une vision post-colonial, à l'inverse de ce qu'ils qualifient de "pseudo-universalisme". Ils pointent la manière dont le terme a été falsifié, vidé de son sens originel pour des discours politiques eurocentrés. L'universalisme tel qu'il est défini par certaines élites politiques permet en réalité de garder la main sur le roman national. Les auteurs rappellent que les effets de la colonisation ne sont pas terminés. Les traitements des banlieues et des Dom-Tom portent encore la marque de ces années de domination. Le pseudo-universalisme permet également de se défausser des crimes, de nier que nos institutions sont les héritières d'atrocités faites à d'autres populations.

Après avoir défini le pseudo-universalisme et ses impostures, les auteurs proposent un universalisme " à la mesure du monde". Ils définissent le chemin vers une pensée postcoloniale qui serait l'affaire de tous. Cela passe par l’éveil des consciences historiques, la prise de position de tout ce qui le souhaite et le renoncement aux certitudes. C'est en acceptant un débat réellement ouvert à tous et où chacun peut s'exprimer malgré ses particularités que la voie d'un nouvel universalisme est possible. Les question du voile et du choix des statues sur les places de nos villes sont posées.

Ce court texte est d'une très grande densité. Ils décortique le terme et trace la voie d'un nouvel universalisme où chacun pourrait se retrouver. Un ouvrage passionnant qui permet de prendre du recul par rapport aux débats identitaires nauséabonds du moment. Passionnant et très accessible !
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Le Français

Ici, pas de nom pour un héros anonyme, français non musulman, perdu dans une ville sans lendemain et sans avenir : Évreux. Il a la vingtaine, vit chez sa mère avec Nono, son affreux beau-père violent et qui le bat dès que l'envie l'en prend. Il survit grâce à son job de livreur et rêve à une relation amoureuse avec Stéphanie, la fille de ses rêves. Un soir il accepte de monter en voiture avec Stéphanie et deux de ses amis, jusqu'à arriver sur une ancienne base militaire où un drame aura lieu. Ce drame marque un tournant dans la vie du héros.

Greg, un de ses collègues est une personne sur qui il peut compter, il y a également Ali, un vieil arabe qui le soigne un soir alors que Nono vient de lui arracher une oreille... et là tout s'enclenche. Ali lui parle de religion, lui dit qu'il connaît quelqu'un qui peut l'aider, un trafiquant bosniaque à qui le héros et Greg vont revendre du matériel informatique tombé du camion. Le bosniaque lui propose un travail dans un cybercafé de Bamako, la capitale malienne, il accepte et s'envole vers un horizon qu'il pense meilleur que celui d’Évreux... L'engrenage continue jusqu'à devenir le "boucher aux yeux bleus". Le héros donne l'impression de vivre tout cela malgré lui, et effectivement se naïveté l'emmènera beaucoup trop loin...



Le récit est court, prenant et incisif. Tout se déroule très vite, comme pour montrer à quel point un jeune peut vite se laisser emporter et manipuler, d'autant plus s'il vit dans une ville ou un quartier où aucun avenir n'est possible, où la réussite ne frappe jamais à la porte.

Ce livre est d'actualité, pour comprendre au moins un des chemins qui peut mener vers le djihad : celui d'une jeunesse en péril en quête de repère, d'avenir et prête à croire à tout ce qu'on lui promet pour réussir sa vie. Le héros ne se retrouve pas dans l'islam, et pourtant seule cette voie semble lui apporter une certaine réussite, un certain succès, donc il s'y engouffre sans même s'en rendre compte, comme si tout cela était un processus naturel.



L'écriture est belle, mais parfois il aurait été appréciable d'avoir plus de détails et un récit peut-être plus complet, plus développé et étoffé. Je pense toutefois que ce fut une volonté de Julien Suaudeau, d'adopter une écriture et un style plus percutant que ceux de son premier roman "Dawa". Un bon moment de lecture et de questionnement.

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Ni le feu ni la foudre

Ni le feu ni la foudre ne saurait se positionner dans la catégorie des livres qu’on chronique facilement. Véritable expérience de vie, il se vit justement et se transmet. Mettre des mots sur du « réel », des instants éphémères s’avère tâche difficile, pourtant je suis bien ici pour cela. Ni le feu ni la foudre rentre dans ce genre de livres, qui une fois refermé, vous laisse cette impression étrange de « je ne sais quoi en penser ». Suivent alors toutes sortes de réflexions et idées, sorte de relecture mentale de l’ouvrage. Preuve qu’il vous marque. Preuve qu’il est bon, d’ailleurs vous vous le dites « tellement bien écrit ». Mais alors pourquoi bloqué-je ? Pourquoi ne sais-je qu’en penser ? Parce qu’il ne me présente pas forcément ce que j’imaginais ? Non. Parce qu’il dérange ? Non, peut-être. Parce qu’il secoue. Oui, certainement. Parce qu’il est difficile de comprendre immédiatement où veut en venir l’auteur ? Assurément. Pourtant, vous ne pouvez que vous sentir heureux, privilégié d’avoir lu ces instants, les derniers de ces personnes avant de s’éteindre lors d’une soirée tragique qui aura ému la France entière. Parmi vous, mes lecteurs, je peux dire que certains connaissaient l’une des victimes ou des témoins de ce drame. Je peux affirmer que cette histoire vous a touché. Je sais que vous êtes intelligents et n’avez jamais cédé aux amalgames. Parmi vous beaucoup ont fait le choix de la vie, du respect des victimes, des hommages plutôt que propager la haine et montrer le sang qui coule. Vous avez pansé vos bleus à l’âme en promettant de ne jamais oublier, comment le pourrions-nous de toute façon ? 13 novembre 2015. Une date de notre histoire moderne. Une date à laquelle Ni le feu ni la foudre consacre ses lignes pleines d’une émotion sous-jacente brute.



5 étoiles filant vers le drame d’une journée si particulière



Nous suivons 5 personnages au cours de ce 13 novembre 2015. 5 étoiles qui ignorent tout de ce qui les attend ce soir-là. 5 hommes et femmes totalement imparfaits, ce ne sont pas des héros. Certains sont rongés par la culpabilité, d’autres ressassent leurs échecs, certains sont égoïstes, criminels, menteurs, d’autres rêvent d’indépendance, d’amour de jeunesse, de plaisir coupable, reconnaissent leurs erreurs, leurs torts. L’atmosphère de cette journée, pour eux, sera propice au changement, à l’avancement. Tout au long de la journée, nous les suivons, apprenons à les connaître, les apprécions plus ou moins, à l’instar des gens que l’on croise dans notre vie. Des personnages humains, réalistes, actuels, auxquels il est aisé de s’identifier ou tout du moins facile de comprendre. Stella, Raphaël, Igor, Pauline, Ariane. Stella, notre jeune étoile de 13 ans, passionnée de David Bowie, différente, androgyne, unique. Raphaël qui s’écroule sous le poids de sa vie ratée, de sa paternité et ses nombreux regrets, sous l’alcool destiné à noyer les « Et si… « . Igor, ah Igor, ce vieux monsieur, le Vieux avec son chien qui sait que la fin est proche, mais qui pourrait si vite l’oublier, Ariane une comète qui n’aspire qu’au bonheur qu’elle couve patiemment et à son départ, Pauline qui a perdu sa moitié et n’a jamais cessé de chercher. Ces 5 étoiles vont se croiser, se connaissent déjà ou se rencontreront, se percuteront, se perdront. Ces cinq lumières que la vie, le destin, les occasions rapprochent ou au contraire éloignent du concert et de ce drame sous-jacent.



Choisir la vie et la lumière, plutôt et la mort et le sang



Mais, non, nous ne basculerons pas dans l’horreur. À la mort, Julien Suaudeau choisit la vie. À l’obscurité d’une salle où le début du concert est imminent, il préfère les lumières de Paris. Ah Paris, qu’elle est aimée cette ville, mais qu’elle est haïe par ceux qui veulent la tâcher de pourpre. Nous n’assisterons pas à l’horreur, nous n’en avons pas besoin. Nous suivons les étoiles qui se rendent à cette soirée qui devait être signe de fête et de rock’n’roll. De musique, de sueurs, de bières, d’instants partagés entre toutes les nationalités, les religions, les opinions, les couleurs de peau, les générations. Au moment où les portes se ferment, il en est de même pour le livre, ce n’est pas un secret, le choix de la vie se fait ici.



« Le concert commence.



C’est officiel, je vais être heureux. Je n’ai qu’à le vouloir. C’est ma vie, merde. Qui pourra m’en empêcher si je décide de ne plus me ruiner tout seul ? »



Le noir se fait, les lumières se rallument, la musique commence. Silence. Pour nous lecteurs, témoins silencieux et invisibles. Pour lui, auteur qui, tel un homme pudique, aurait omis de basculer du côté de la mort et du désespoir. Ou qui tout simplement a compris qu’il ne reste rien à dire de cette violence. Tout ça pour quoi ? Pour la vie. Oui, Ni le feu ni la foudre n’est pas un livre ordinaire. Vous pouvez aisément passer à côté. J’ai failli le faire. Ou vous pouvez choisir ces lumières de vie, ces espoirs, ces envies, ces décisions et résolutions. Regarder la lumière et l’avenir plutôt que l’ombre et la terreur. Écouter la musique ou le silence plutôt que l’enfer et la douleur. Julien Suaudeau, connu pour sa « drôle » de coïncidence avec le 13 novembre signe ici un livre qui rend parfaitement hommage aux victimes, dans un respect absolu, sans jamais nommer l’inévitable. Contourner le sujet pour mieux s’en approcher, y projeter ses personnages ou les éloigner. Laisser briller la lumière que ni le feu ni la foudre ne pourra atteindre.



Note explicative : Julien Suaudeau a écrit en 2014 Dawa, roman où, tel un visionnaire, il parlait d’attentats secouant Paris en un vendredi 13 novembre. Dans Ni le feu ni la foudre, il n’est plus utile d’explorer la violence et le fonctionnement des terroristes.



J’ai conscience que cette chronique n’a rien de traditionnel ou ordinaire, mais il ne pouvait en être autrement de ce livre. Lisez-le, prenez le temps de le digérer, comprenez la vie, choisissez là. Voyez comment il vous portera, mais je vous conseille, comme moi de le laisser décanter.



EN BREF :



Ni le feu ni la foudre tourne autour d’une journée unique qui a marqué les esprits, le 13 novembre 2015. En nous faisant suivre 5 personnages se croisant dans Paris, Julien Suaudeau nous montre l’avant et non l’après, la vie et non la mort. Difficile de ne pas angoisser pour nos personnages qui filent droit vers le drame, vers la lumière qui s’éteint. Une plume assurément brillante. Marquant, déconcertant.
Lien : https://bettierosebooks.com/..
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Dawa

Je n’ai pas réussi à aller jusqu’au bout du voyage. Je vais essayer de vous expliquer du mieux que je peux mon ressenti par rapport à ma lecture.



Le roman avait un bon sujet de fond, il évoque le terrorisme mais aussi la politique française avec ses personnages placés dans les hautes sphères. En allant plus loin, ce roman retrace une réalité en France : un melting pot culturel pas toujours accepté et pourtant bien présent dans notre pays. Des sujets qui auraient pu me plaire, car ils sont tous d’actualité, pourtant ce n’est pas passé.



L’auteur démarre trop doucement son roman, d’un côté ce n’est pas plus mal, on prend le temps de découvrir et de comprendre les personnages. Surtout qu'on découvre le point de vue de chacun de ses personnages, permettant ainsi une immersion auprès de chacun d'eux. Mais quand on arrive à une autre partie, avec de nouveaux personnages, et un auteur qui prend toujours autant le temps, j’ai eu l’impression de ne pas avancé. Le livre était trop lourd, trop dense et je ne retrouvais finalement pas ce que je recherche dans un policier : du suspens et de l'action.



Je n’ai même pas pu arriver à la moitié du roman, en fait je suis désolée pour l’auteur, mais je me suis ennuyée. Je mets donc ce roman de côté. Je le reprendrais peut-être à un moment plus propice, pour pouvoir l’apprécier, j’espère…
Lien : http://leslecturesdecristy.b..
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Dawa

Nouvelle aventure critique avec Babelio qui me fait confiance une fois encore. Dawa est un pavé qui aurait gagné à se "galetiser" d'au moins un tiers car tout de même 500 pages c'est lourd, surtout pour un roman pour le moins redondant et immodeste.Dawa est le nom d'une opération terroriste visant à cinq attentats dans les cinq grandes gares parisiennes. Tous les étages de la société française de 2014 sont explorés,mais comme ça m'a ennuyé. De la cité des 3 000 avec son habituel gisement de délinquants dont certains recrutés pour l'opération, jusqu'aux arcanes du pouvoir, très concrètement circonscrits car l'action se déroule en ce moment même d'élections 2014, en passant par la sempiternelle guerre des polices. Souvent dans ce genre de bouquins on n'aime pas tout. Là je n'aime presque rien.



A commencer par le présupposé que l'argot des banlieues n'avait pas de secrets pour moi. Nanti d'un zeste d'incompréhension, j'ai très vite fait la gueule à ma lecture mais suis allé jusqu'au bout, sans que jamais aucun personnage ne m'interpelle vraiment. Trop de figures traversent cette histoire, pessimiste quant à ce pays qui ne se comprend plus lui-même. Dans ces cas là on privilégie l'efficacité, genre cinéma carré, pourquoi pas. Mais voilà, des digressions, des considérations générales sur le microcosme politique, des personnages féminins stéréotypés, Julien Suaudeau a fait bien long pour m'emmener tout près. Sans intérêt pour moi. J'ai bien dit pour moi.





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Dawa

Je dois dire que je suis plutôt partagée sur ce premier roman de Julien Suaudeau. L’histoire tout d’abord. Si elle débute dans les Aurès à la fin de la guerre d’Algérie, elle va se dérouler de nos jours. Un groupuscule terroriste menace de faire exploser 5 bombes dans Paris le 13 mars 2014, et à partir de là, nous allons suivre l’intrigue selon les différents protagonistes. On passe de la cité des 3000 aux ors de la République, des jeunes de banlieue sans espoir d’avenir aux hauts dignitaires avides de pouvoir. Julien Suaudeau dresse le portrait de ce qu’est sans doute notre société d’aujourd’hui : les dealers de banlieue, le jeune qui veut sortir de sa cité par la boxe, la jeune bourgeoise amoureuse du mauvais garçon, le flic désabusé qui veut se venger, les politiques en place qui ne pensent qu’au pouvoir… Peut-être ces personnages représentent-ils la réalité, mais je trouve qu’ils sont trop stéréotypés, et à trop mélanger les genres, l’intrigue s’étiole et passe au second plan. Moi qui aime les polars au style rapide et incisif, j’ai eu du mal à entrer dans le style très hermétique de Julien Suaudeau, il se perd en conjoncture et nous, nous perdons le fil. Et à travers toute cette histoire, il fait de la France un portrait très sombre, très pessimiste et j’espère qu’il a tort… Mais Julien Suaudeau a atteint son but : faire un livre qui interpelle, qui dérange aussi et qui ne laisse surtout pas indifférent.
Lien : http://leschroniquesdu911.bl..
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Dawa

Explosif,

Julien Suaudeau nous présente ici un livre sur le thème politique / terrorisme / policier. L'ouvrage a été sélectionné pour 2015 dans le prix du meilleur Polar des lecteurs de Points.

Le roman tourne autour de plusieurs groupes : 5 terroristes se filmant dans une vidéo et menaçant de se faire explosé, une cellule antiterroriste et des politiciens. Ce mélange de personnages n'est pas fluide.

Le roman reste toutefois d'actualité, même s'il est édité en 2014. Attention de bien découdre entre la fiction et entre la réalité.

Cependant je n'ai pas aimé, et j'ai eu beaucoup de difficulté à terminer, lassée par l'auteur. Le roman est ennuyeux, pessimiste, il manque d'action et traîne en longueur, pas assez de travail sur les personnages trop monocorde, et une évidence certaine il existe un problème entre l'auteur et les politiciens puis leur politique et les banlieues, (ici les faits se passe à la cité des 3000 à Aulnay).

J'ai testé un premier ouvrage sur le thème terrorisme, le sujet me plaisait, l'idée est là, mais je suis très déçue par cette enchaînement de mots. L'auteur doit se perfectionner pour que ses récits soit meilleurs.













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Universalisme

Petit opuscule d’à peine 100 pages, Universalisme, de Julien Suaudeau et Mame-Fatou Niang nous emmène sur l’histoire de ce concept, ses angles morts et ses limites.

en une dizaine de courts chapitres les auteurs démontent le concept d’universalisme tel que forgé pour les intellectuels et l’élite française pour évoquer cette pensée qui reste racisme et discriminatoire dans son fond, renforçant une colonialiste qui n’en fini jamais, en France, dans les banlieues mais aussi dans les relations avec les territoires d’outre mer. Iels montrent également la filiation entre le racisme français et américain et l’influence de la pensée républicaine française dans le racisme d’outre mer.

En déconstruisant les discours universaliste dévoyé et en décolonisant l’espace public

En invoquant les figures méconnues et invisibilisées de plusieurs auteurs racisés, Suaudeau et Niang invitent à accepter d’être un pays post colonial, seule manière pour eux de ne pas devenir un pays post-républicain.

Si ce petit ouvrage ne bouscule pas les montagnes il a néanmoins le mérite de remettre les choses à leur place et d’inviter à reconsidérer ce qu’on considère comme inamovible et inchangable dans notre façon de penser universalisme et antiracisme.
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Universalisme

Merci à Babelio et à l'Opération Masse Critique Non-Fiction pour l'attribution de ce documentaire.

Par où commencer? Petit livre mais grand sujet. J'avoue ne pas être spécialiste de l'histoire coloniale et je me suis rendue compte de mes nombreuses lacunes à ce sujet. Comprendre l'histoire coloniale française c'est aussi comprendre les difficultés actuelles de notre société et pourquoi l'universalisme que l'on prône régulièrement n'est pas total. C'est à nous citoyens de prendre en compte notre passé colonial pour penser un universalisme plus large et ainsi comprendre les enjeux de demain. Un texte très intéressant qui nous donne à réfléchir pour agir.
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Le sang noir des hommes

« Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance »

Quel étrange roman ! Inclassable, il ne rentre dans aucune case, aucun genre précis. Je ne saurais même pas vous dire si j’ai apprécié ma lecture ou non. Je pense que oui, au fond quand j’y réfléchis, car elle m’a marquée, m’a bousculée et m’a parfois bien chagrinée. Il ressort de ce roman quelque chose de très noir, très glauque et déprimant. Il est question de vengeance, de passé, de liens familiaux biscornus, parfois difficiles à vivre, il est question de haine, de rancœur, de colères et de dégâts que peut causer un passé bien lourd et envahissant. Aucun rayon de soleil dans cette lecture, aucun espoir, le froid de la montagne, son climat rude et instable ajoutent encore un peu de morosité et accentuent ce sentiment de mélancolie qui transpire des pages.



Le style d’écriture est vraiment particulier et il faut s’accrocher pour avancer dans sa lecture. Le sang noir des hommes est un roman court, 300 pages à peine, et pourtant il vous demandera une concentration de chaque instant. L’auteur nous perd dans un labyrinthe de dates et d’événements, de lieux aussi, alternant une période différente à chaque chapitre, nous ballottant du passé au présent dans d’incessants allers-retours qui ont manqué de me faire cramer les neurones par moment. Et pourtant il se dégage une certaine poésie de ces lignes, pas une poésie faite pour apaiser l’âme humaine, mais pour en montrer toutes ses abjections.





Un ouvrage qui pourrait être lu aussi bien par les amateurs de littérature noire que par ceux de littérature blanche. Un roman singulier, une première rencontre plutôt réussie entre l’auteur et moi, et une furieuse envie de boire un verre de rhum histoire de me remonter le moral après avoir tourné la dernière page de ce roman.
Lien : https://anaisseriallectrice...
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Dawa

C'est avec un plaisir non feint que je m'apprête à publier ma quatre-vingt-neuvième chronique en souhaitant qu'elle soit assez constructive, objective et intéressante pour vous aider dans vos futurs choix littéraires.

Mon ressenti porte, cette fois-ci, sur « Dawa », premier roman de Julien Suaudeau paru en 2014 chez Robert Laffont.

Pourquoi avoir choisi celui-là plutôt qu'un autre, me diriez-vous ? Tout simplement, parce que le synopsis était intéressant, attirant et que comme le dit une célèbre expression « Quand on n'aime, on ne compte pas », je ne pouvais me dérober à la proposition de lecture commune faite par ma fidèle comparse nathalou93 de Babelio.

Un bouquin de cet auteur. Une première pour moi, tout comme ma camarade. Nous poursuivons donc notre exploration d'écrivains inconnus avec d'autant plus de joie et d'espoir de se régaler que ce texte utilise les codes du genre policier.

Le livre définitivement rangé, j'avoue que cette lecture a été simultanément passionnante et instructive, férocement ancrée dans la réalité et atrocement prophétique.

Magnifique ouvrage qui ne demande qu'à être dévoré !

A la veille des élections municipales de 2014, en pleine campagne électorale, dans une France en proie aux manigances politiques, qui s'égare sur des questions identitaires et de diversité, en plein marasme économique, nous faisons la connaissance de deux hommes autant éloignés par leur éducation, culture, parcours de vie que proches par la fatalité primitive qui les lie et le sentiment de vengeance qui les obsède.

Nous avons d'abord Assan Bakiri, professeur agrégé d'arabe, modèle d'intégration et de réussite, qui piégé par ses racines familiales et rongé par un vécu douloureux est habité par la haine de son pays d'adoption. A la tête d'un groupuscule terroriste baptisé Dawa al-Islamiya, il diffuse une vidéo promettant de détruire Paris par l'explosion simultanée de cinq bombes dans la ville.

Face à lui, se trouve Daniel Paoli, grand patron de la DGSI – Direction Générale de la Sécurité Intérieure – qui, avec l'ensemble de l'antiterrorisme, est à pied d'oeuvre pour identifier les membres du réseau ainsi que les cibles visées. Ce haut responsable, aux méthodes quelquefois peu conventionnelles, ne cesse de pourchasser depuis un demi-siècle le meurtrier de ses parents qu'il a vu se faire massacrer dans les Aurès, berceau de l'insurrection indépendantiste Algérienne. Seuls ces deux individus connaissent le trait d'union entre passé et présent. Quel est-il ? Si le mauvais sang ne veut pas sécher, comment une nation peut-elle vivre en paix ?

Autour d'eux, du sommet de l'état aux pavés de la banlieue parisienne, gravite une multitude de personnages disparates qui ne manquera pas d'être renversée par la violence aveugle issue de leur idée fixe.

La Dawa, au sens religieux du terme, est une invitation aux non-musulmans à écouter le message de l'islam. Dans la langue française, c'est un synonyme de bazar, désordre, capharnaüm, chaos.

Sachant cela, vous aurez certainement compris que l'objectif avoué de ces attentats est bel et bien de mettre le foutoir, de provoquer le grand chaos sur le territoire national.

A partir de cette trame, nous accompagnons les différents protagoniques (force de l'ordre, politiques, terroristes, citoyens des cités…) tout au long de l'intrigue. Nous assistons à la préparation de ces actes barbares, nous suivons l'enquête visant à déjouer le complot, et surtout nous sommes au coeur des deux revanches personnelles. Les « fous de Dieu » réussissent-ils ou sont-ils mis en échec par les autorités compétentes ? La vendetta du directeur a-t-elle lieu ? Avons-nous affaire à un vieux contentieux, à une résurgence des dernières blessures, des dernières braises de la guerre d'Algérie ou à l'avènement d'un djihadisme mondial ?

Les réponses à ces interrogations sont à portée de mains ou plutôt de lecture… A vous de jouer !

Ce récit est axé sur trois thématiques principales : La vengeance, la place de l'islam sur le sol français et le chaos.

Pour J.S. les vengeances de Bakiri et Paoli sont maladives. Ils sont tellement possédés par ce mal, ce besoin de « faire payer » l'autre, qu'ils en sont devenus des menteurs, des manipulateurs.

L'islam fondamentaliste est vu, par les terroristes, comme le moyen de discorde pour mettre les rues à feu et à sang, pour provoquer, à plus ou moins longues échéances, une guerre civile. Cette radicalisation est également le motif utilisé par le Ministre de L'Intérieur pour asseoir son pouvoir sécuritaire et par là même, s'ouvrir les portes de Matignon. Cette islamisation des jeunes prend sa source, selon l'écrivain, dans l'effondrement de l'économie, du chômage, de la pauvreté, du désoeuvrement des banlieues, du désintérêt étatique et non dans le virus de l'immigration.

Le tohu-bohu, la pagaille, le désordre se trouve, quant à lui, dans la corruption des élites, des décideurs publics, dans la mainmise de puissances pétromonarchiques sur des entreprises nationales, des financements électoraux, des capitaux privés.

L'auteur nous offre un roman mi polar mi sociopolitique. Il dépeint toute notre société avec ses défauts, ses difficultés économiques, religieuses, sociétales, son attentisme, sa diversité, sa diplomatie, ses coups bas politiques… Il dresse un portrait factuel, sans concessions de la France. Une juste représentation synonyme, pour moi, de frissons.

Style maîtrisé avec des descriptions assez détaillées, des dialogues efficaces. Les chapitres courts se lisent aisément malgré quelques longueurs et des passages complexes mais non rébarbatifs, non rédhibitoires à la compréhension.

Plume haletante, claire, prenante, acerbe et bienveillante en même temps.

Les protagonistes sont profonds, tout en épaisseur. La psychologie de chacun ressort parfaitement. Nous nous immisçons dans leurs « têtes ». Au fil des pages, nous avons la sensation de les avoir toujours côtoyés. Nous vivons, nous subissons, nous nous inquiétons avec eux.

Daniel Paoli est un être expérimenté, dur dans la vie comme dans le métier. Il est sans concession. Cette particularité lui sert auprès de son équipe mais le désavantage face à ses détracteurs. C'est un monsieur en souffrance depuis sa tendre enfance qui ne sera apaisé que par l'accomplissement de sa mission. Sous une carapace, se cache un être fragile qui vit avec une part d'ombre.

Franck, sous ses aspects de « gros dur », m'a touchée par sa sensiblerie, l'amour immodéré qu'il porte à son ex-femme. J'ai apprécié son sens du devoir, son abnégation au travail et son envie d'aider son prochain.

Assan est un individu complexe. Sans son passé familial pesant, il n'éprouverait certainement aucun ressentiment contre sa terre d'adoption, terre où son cheminement est exemplaire. Oui, mais voilà…

Frustré par des années de non-dit, anéanti par un vieil amour retrouvé, puis perdu à nouveau, il ne trouvera la sérénité que dans la mort et la propagation de l'horreur. C'est un être ambivalent : à la fois haineux et tendre, confiant et ombrageux, prévenant et indifférent. Je ne sais pas trop quoi penser de lui. Je l'ai détesté tout en le plaignant.

Momo et soul, enfants de la cité, m'ont émue. Leur histoire est marquée par une amitié qui les unit plus étroitement que jamais. J'ai été sensible au fait que le premier nommé abandonne (momentanément ?) le rêve de sa vie pour aller remettre son pote sur le droit chemin. Preuve d'une bonne intelligence et d'un immense attachement.

Soul, malgré un parcours brillant, ne croit pas en l'avenir. D'après lui, tout est écrit d'avance. Né au mauvais endroit sans atout majeur en main, il ne peut réussir. Ce jeune homme, fragile émotionnellement, influençable à souhait, aurait mérité mieux.

Ces deux copains ont essayé de sortir de leur vie de misère pourtant…

Alexandre Marion, le haut-fonctionnaire, apparaît comme ambitieux, avide. Il est suffisant, mesquin. Néanmoins, il est, à mon humble avis, l'archétype de la majorité des gens exerçant dans la haute administration.

J'ai admiré l'honnêteté et le charisme d'Hélène Faure qui préfère abandonner une carrière politique, pourtant prometteuse, plutôt que de se fourvoyer dans la corruption. Cette femme intransigeante, qui cache un lourd secret, a des principes que rien ne semble altérer.

En bref, nous sommes en présence d'un opus sombre, inquiétant, palpitant, indubitablement travaillé qui met en exergue les maux de notre beau pays ainsi que les responsables de cet état de fait. Tout le monde en prend pour son grade, si j'ose dire, que ce soit les politiques, les forces de sécurité, les dealers ou autres délinquants, les arrivistes, sans oublier les victimes de cette déliquescence.

A acquérir ? Sans l'ombre d'un doute, oui. Il vous accrochera et vous fascinera rapidement au point de ne plus pouvoir le lâcher. Ce livre redoutable par son efficacité est à lire nécessairement.

Je m’attellerai, dans un futur proche, à la lecture de ses deux autres publications que sont « le Français » et « Ni le feu ni la foudre » car ce romancier est incontestablement bourré de talent. Comme le dit si bien, @lireencore93420 d'Instagram, cet écrit est une « tuerie » dans tous les sens du terme.

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Dawa

La misère au service de la vengeance, en habit religieux de circonstance, tandis que les pouvoirs s’empiffrent de leur mieux.



Sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2016/03/07/note-de-lecture-dawa-julien-suaudeau/


Lien : http://charybde2.wordpress.c..
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Le Français

Le héros, qui parle à la 1ère personne, est mou presque d'un bout à l'autre du roman.

Il est toujours victime des autres et des circonstances. A 20 ans il se laisse encore roué de coups de ceinturon par son beau-père. Et ça continue jusqu'au bout. Il est violé, se retrouve djihadiste, puis bourreau, toujours poussé par les circonstances. C'est "Justine" au XXIème siècle.

Le djihad est évidemment de la faute des Occidentaux qui n'ont pas fait leur place aux jeunes.

C'est une idée très contestable. La vie des jeunes d’Évreux n'est pas pire que celle de milliards d'autres depuis des millénaires et aujourd'hui.

Mais le héros attend tout le temps que les autres lui trouvent une place.
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Tolède. Ce peintre né en Grèce l'a quittée à vingt-cinq ans puis a travaillé près du Titien à Venise pour ensuite gagner l'Espagne et rejoindre Tolède où il réalise cette extraordinaire "Vue de Tolède" une des première représentation urbaine se réclamant comme telle (1597/99) :

B. E. Murillo
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