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Citations de Kate Braverman (87)


Le monde se divise en deux catégories : les guérissables et les incurables.
Mon père a un cancer de la gorge.
Il reçoit des traitements au cobalt.
Il est guérissable.

J'ai déjà développé une certaine capacité à déceler ce qui est disloqué
et irrécupérable.
Voilà pourquoi mon enfance est nourrie de tous ces exemples
de gens malades ou moribonds.

Peut-être y avait-il autre chose dans cet ensemble d'appartements,
un schéma vertueux en négatif.
Mais si c'était le cas, il parlait trop bas pour que je puisse l'entendre.

(Dire ce qui est)
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Elle a saisi tout à coup qu'il est des instants, des angles
à la limite du supportable.
Des voiliers blancs sont dans la baie.
L'eau paraît anémiée, hallucinée.
Les vagues se brisent doucement, sans malice.
Le Pacifique n'est pour elle qu'un simple fait,
un bleu au-delà de tout jugement,
un bleu qui tombe sous le sens.

A la périphérie de sa conscience s'affirme la sensation
que toute chose est bien définie.
Les nuances et les incréments du bleu viendront plus tard,
s'ils viennent.

(Lumière temporaire)
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Cette année, elle se prêtera au rite de Noël et de toutes ses horreurs tape-à-l’œil,
ce bizarre bric-à-brac, oui, elle pourra.
Ces rituels pitoyables nous définissent par accumulation,
dans l'agitation comme dans la résignation.

(Lumière temporaire)
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Au feu suivant, son regard se pose sur une vitrine tapissée à outrance
d'un motif géométrique rouge et vert.

Des miroirs amplifient la distorsion.
Des mannequins aux visages d'elfe esquissent des sourires de déments.

Ils ont l'air de s'être envoyé des doses astronomiques de mescaline.

(Lumière temporaire)
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C'est le deuxième Noël sobre de Suzanne Cooper.

Elle s'est familiarisée avec la voix de sa maladie,
le chœur démoniaque dont elle use et le génie de ses tentatives pour l'anéantir.

La voix en question sait se montrer tour à tour éloquente,
brillante et séduisante.
C'est le désastre toujours en éveil.

(Lumière temporaire)
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On dirait que la terre s'est délestée de l'ordinaire
pour révéler au grand jour son âme païenne.

Ou peut-être le monde a-t-il cédé à la folie sans crier gare,
décrète-t-elle, et, telle une forêt en sang au clair de lune,
cédé au rouge criard, au vert et au gris argent.

Un paysage salement esquinté, à la végétation corrompue.

(Lumière temporaire)
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C'est l'automne.
C'est toujours l'automne, se dit Laurel Sloan.
Et nous sommes sobres.

Nous avons même arrêté de fumer.
Peut-être pouvons-nous enfin dire ce que nous pensons tout bas depuis le début.
Jim Morrison est mort.
Les types avec leurs guitares et leurs vans ont disparu.
Les guitares sont parties, la musique aussi.
Des gens fous, brisés, dorment dans la rue.
En haillons.
Leurs pieds nus sont noirs.
Ils toussent.
Leurs os pointent sous la peau.
On dirait qu'ils se sont assemblés eux-mêmes.
Certains sont porteurs de la peste.

Nous ignorons ce qu'est ce pays, ce qu'il est devenu.
Nous avons quarante ans et nous sommes seules.

L'heure est à la résurrection du verre.
Et peut-être que chacun de nous renferme une touche d'automne,
un peu comme une radio des poumons entachée d'une touche d'ombre.

(Une touche d'automne)
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La nuit dernière, dans son bain, Laurel s'est soudain rendu compte
que la veine de son bras droit était assez large et propre pour accueillir un Boeing 747.

Elle avait soulevé son bras pour mieux l'observer à la lumière,
admirant la solidité apparente de sa veine,
saluant son parcours :
elle était parvenue à refaire surface après des années d'absence,
après s'être effondrée à force d'abus.

Sa veine disait : Je suis Lazare.
Embrasse-moi avec du métal.

(Une touche d'automne)
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Les jours sont illuminés par notre énergie,
nos incarnations.

Nous sommes cloués entre deux horizons,
à chaque instant.

Il y a le récit des vagues, des nuages,
il y a quelque part une pleine lune
et des étoiles agglutinées en confédérations lucides.

(Une touche d'automne)
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Entre elle et la pièce qui recèle de la vodka
se déploie un golfe où se logent les énormités, les accidents,
les atrocités aléatoires et d'où, a contrario,
surgissent des voies pavées d'une grâce inexplicable.

On est dépouillés jusqu'à l'os,
c'est dire à quel point nous sommes endurcis,
affûtés au-delà de la chair.

Nous ne sommes que colonne vertébrale et moelle épinière et finalité,
ce noyau qui perdure à travers les siècles,
scintillant, délavé par la lune, la nuit et un défilé d'automnes insolents.

Ici nous sommes hantés.
C'est une mer d'heures brisées.
Ici nous découvrons le feu.
Nous brûlons les uns les autres.

De loin en loin, sur les berges d'une rivière crépusculaire,
une prière est dite en notre nom,
une bougie est allumée
et la saison meurtrière prend fin.

(Une touche d'automne)
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On passe toujours son temps à dire "oui" à des inconnus
et voir sa destinée soudain s'entremêler avec les leurs,
parés à essuyer un coup de couteau comme à recevoir des roses.

(Une touche d'automne)
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Une de ses connexions vitales, de celles qui la reliaient à son existence,
s'est éteinte,
le lien avec tout ce qui est inviolé, spontané, ce qui ne doute pas.

Peut-être est-ce le fruit du hasard,
d'un accident de la circulation anormalement dense.
Peut-être s'agit-il de quelque chose que nous avons su puis oublié,
comme les pas sur un boulevard bloqué,
dans la chaleur d'un bel après-midi d'automne,
quelque part entre la mort et Mardi gras.

N'est-ce pas là que nous transitons avant l'exil puis l'autopsie ?
Après tout, il n'y a rien d'autre qu'une ligne,
la frontière entre une fête de quartier et une maladie en phase terminale.
Postés en permanence à nos fenêtres,
nous scrutons nos propres vies,
nos mensonges,
les ruines du soir et des saisons,
de celle-ci et de toutes les autres.

(Une touche d'automne)
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Elle se souvient du temps où elle aurait tout donné,
sa vie même,
pour une simple strophe,
entrapercevoir un instant disséqué, par la lune infecté.

Un instant aussi singulier exigeait la vodka,
elle qui semblait contenir l'impulsion céleste, manifeste et liquide,
sorte de corruption des éléments
dont Laurel était perversement avide.

(Une touche d'automne)
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Elle aimerait toiser le visage infini et dangereux de la nuit,
le regarder dans les yeux et dire
Tout ça je l'ai voulu, et alors ?

J'ai prêté un tout autre serment.

J'ai recherché la destruction, les océans, les narcotiques,
le côté obscur des tropiques fumant de vapeur,
saturé de créatures à la décadence inspirée.

L'intensité m'a purifiée.

J'ai réclamé une infinité de verts et,
de temps à autre,
on m'a exaucée.

(Une touche d'automne)
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La nuit bigarrée, ponctuée de lampes et de baisers,
dégageait de fascinants effluves de jasmin pourpre
qui se mêlaient à la fragrance ambivalente de l'ambre.

Les avenues abstraites étaient façonnées par l'agrégat cohérent
que formaient les jacarandas dressés de part et d'autre de la rue,
telles des colonnes jumelles,
oblitérant par leur simple présence toute notion de départ et d'arrivée.

C'est quatre ou cinq mois avant Tchernobyl
et la pluie bleue qui épandra ses étranges cristaux de glace sur son jardin,
le jour où les retombées radioactives
déclarées inoffensives par les autorités
ont survolé le comté de Sonoma.

Le jour où le ciel a eu mal.

(Blues d'hiver)
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Ma vie était un assemblage de mondes parallèles. Chaque monde avait ses règles et ses personnalités distinctes. Chimie, mathématiques et histoire différaient. Les éléments de base, évolution et développement, étaient tout aussi complexes et différents que la vie dans un monde de carbone diffère de celle dans un monde de méthane. Mes mondes parallèles étaient vastes, harmonieux, et clairement définis. Leurs atmosphères respectives étaient mortelles en cas de contact. Aucun point de rencontre possible.
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Travail de la ruine.
Pendant des années, la poussière a fait ce que bon lui semblait,
déposant ce que le vent portait,
ce qu'une main poussait.

Ici, sur cette terre d'étés permanents,
tout enfle, devient énorme, semble se moquer des proportions.
Les premières roses poussent devant les maisons sur Caroll Canal.
Le chèvrefeuille se répand sur les clôtures métalliques.
Les citronniers sont en fleurs, jaune vif.
Des murs rouges d'hibiscus cachent les fenêtres.
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Ici, dans le creux d'un océan au regard bleu aveugle,
Los Angeles voit sa course stoppée net par les falaises liquides de la mer.
Ici s'arrête la piste.
Après Death Valley et Donner Pass, il ne reste que cette ultime oasis de précarité.

Il faut traîner par ici, à quelques centimètres de la mer.
C'est une terre d'étranges mutations intimes.
On y ressent une attraction, une force inexplicable,
une sorte de loi de la pesanteur non répertoriée.
Les orteils changent,
se métamorphosent en griffes acérées invisibles
qui se plantent et luttent contre l'attraction de la pente
vers le bleu pâle des vagues indifférentes.
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Soudain, il a paru très petit et très vieux,
voûté, ratatiné.
Je me suis dit, tu ne peux pas mourir.
Et j'ai senti une douleur, quelque chose en moi se briser.
Si tu meurs, on me verra comme une femme,
plus comme une petite fille.
Et je ne suis pas encore prête, papa.
Je ne suis pas prête du tout.
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Je me suis assise sur le sol, dos contre la baignoire,
j'ai noué la ceinture du peignoir de ma mère autour de mon bras
et je me suis shootée.
J'ai rangé la seringue.
Je me suis levée et le nuage de morosité s'est déchiré.
La pièce n'était plus qu'étincelles d'or rayonnantes,
effervescence et vie.
Elle foisonnait tout entière de minuscules ampoules orangées
comme des cellules nerveuses.
Chacune distincte des autres,
chacune s'ouvrant et se fermant en vacillant.
A l'intérieur de mon corps, le gémissement d'un milliard de cellules,
oh, merci, merci.
J'ai brossé mes longs cheveux.
Ouvert le robinet d'eau froide et me suis tapoté les joues et le visage avec de l'eau.

"Tu as meilleure mine", m'a fait remarquer ma mère.
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