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Critiques de Kjell Westö (84)
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Nos souvenirs sont des fragments de rêves

« il existe dans chaque histoire des ténèbres abyssales – et ces ténèbres viennent du passé ».



Des amitiés et de l’amour, des ténèbres et de la lumière au Pays des Mille Lacs et en chacun de nous.



« La sensation de déjà-vu n’est qu’une sorte d’angoisse face à l’irréalité de la vie ».



Le narrateur, écrivain et professeur d’histoire, retrace les liens qu’il a tissés avec la famille Rabell quelques cinquante années plus tôt.



Lors des vacances du printemps 1969, ses parents, issus d’un milieu modeste, commencèrent à louer l’ancienne métairie de Skogstorpet bordée de roselières sur la presqu’île de Ramsnasudd, c’est au cours de cette période qu’il fit la connaissance du fils Rabell, Alex, et de sa sœur Stella.



Le clan Rabell, suédophone de la haute bourgeoisie finnoise, apparaît comme une dynastie d’entrepreneurs réussissant en affaires, avec quelques mystères opaques, et voulant afficher un certain respect des conventions anciennes. Les parents Jakob et Clara, les enfants Alex et Stella, la grand-mère Gerda, une famille réunie sous la coupe du patriarche, le grand-père Per-Olof, craint et respecté par tous.

Une vitrine d’apparences intrigantes sous un vernis qui tend à se craqueler.



Entre le manoir très cossu des Rabell, domaine de Ramsland entouré de forêts, avec la baie, le ponton, et leur maison des quartiers chics d’Helsinki, les années s’écoulent pour Alex, Stella et leurs amis, et chacun évolue au fil du temps, au gré des connivences et des divergences ; des amis, des amours...



Le narrateur – la voix de l’auteur – se remémore ses souvenirs d’enfance, d’adolescence, de Ramsvik à Helsinki.

Premiers émois, amours adolescentes, jeunesse pleine de fougue et d’insouciance, bohème et libérée.

Amitiés naissantes, discordes, déni, à la lumière du soleil du soir, scintillant sur les flots des îlots.

Vent et soleil sous latitudes finlandaises en bord de mer, saunas, plongeons dans l’eau froide, ciel aux nuances orangées, turquoises, crépuscules au ton jaune soufre, bleu des lacs et blanc de la neige.

L’ambiance d’alors reste gravée dans la mémoire du narrateur, pleine d’une atmosphère de quiétude qui l’accompagnera toute sa vie, comme l’amitié et l’amour révélés dès ces instants.



Les ambitions et les espérances font leur chemin et l’âge adulte arrive avec ses compromis, les parcours de vie se construisent et les personnalités s’affirment, c’est l’éveil au monde avec ses joies et ses tourments.



L’auteur s’attache à décrire une ambiance - décor naturel et cadre social des différents personnages ; ainsi que l’empreinte des années de jeunesse sur les adultes en devenir. Des portraits et des péripéties.



Il creuse la réflexion sur les sensations ressenties, les sentiments et la passion dévorante ; il attire le regard sur les tensions dans les interactions entre sexe et classe sociale.



Il y a une certaine langueur dans l’histoire qu’il nous raconte. Comme une nonchalance inquiète, une mélancolie douce-amère. Des confidences livrées avec franchise et fine analyse psychologique.

Une fresque portée par un brillant souffle romanesque de plusieurs destins mêlés, racontée avec sensibilité, nostalgie, et repères historiques.



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Un mirage finlandais

Kjell Westö, écrivain finlandais suédophone, reçoit le prestigieux prix de littérature du Conseil Nordique en 2014 pour son roman Un mirage finlandais, dans lequel il a su « dans une prose évocatrice, donner vie à un moment critique de l’histoire de la Finlande ». Le moment critique dont il est question ici, c’est la vingtaine d’années qui sépare la fin de la Guerre civile et le début de la Seconde Guerre mondiale. Dans l’édition française du roman, une postface de l’auteur vient éclairer avec profit cette histoire pourtant récente dont peu de Français mesurent l’importance pour les Finlandais.

Helsinki, 1938. Vingt ans après la fin de la Guerre civile, la société finlandaise est à nouveau tiraillée entre la pression communiste du voisin soviétique et l’influence de l’Allemagne dont l’assistance militaire permit aux Blancs de remporter la victoire contre les Rouges. La très professionnelle Matilda Wiik est la nouvelle secrétaire de l’avocat Claes Thune. Mais derrière sa rigueur et sa solitude se cache en fait un passé douloureux. En 1918, alors que la Guerre civile se termine, la jeune femme est enfermée dans un des camps dans lesquels les combattants rouges, ou ceux considérés comme tels, attendent un jugement. Mais les conditions de vie effroyables et la famine déciment les prisonniers. Claes Thune, son employeur, mène une vie bourgeoise dans les beaux quartiers de la capitale. Chaque mois, il se réunit, à l’occasion du Club du mercredi, avec quelques amis de longue date, tous hommes du monde et suédophones, pour discuter politique. Mais à l’image de la société finlandaise, le cénacle se fissure, et des désaccords apparaissent. Un soir, alors que le club se tient pour la première fois chez son nouvel employeur, Matilda Wiik reconnaît une voix parmi les membres du groupe. Cette voix, c’est celle du Capitaine, un homme dont elle a croisé la route, vingt ans plus tôt, dans un camp de prisonniers. L’homme ne la reconnaît pas, et elle-même fait le choix de ne rien dire. Le lecteur n’en sait guère plus et doit attendre la toute fin du roman pour connaitre avec certitude l’identité réelle du Capitaine.

L’intrigue du roman de Kjell Westö est bornée par deux guerres, les deux événements les plus dramatiques du XXème siècle finlandais. Et ce cadre temporel donne le ton. Dès les premières pages, le lecteur pressent que l’histoire – celle du livre, mais aussi celle du continent – se dirige droit vers une catastrophe ; de fait, la marche vers un dénouement tragique est inéluctable. Au fur et à mesure que l’atmosphère devient irrespirable en Europe, que le champ des possibles se restreint, le destin de Matilda est scellé.

Les personnages, leurs actions, leurs univers sont eux aussi étroitement enfermés. Matilda, prisonnière du camp, ou Joachim, l’un des membres du club interné en hôpital psychiatrique subissent un enfermement bien réel. Mais l’enfermement peut prendre d’autres voies, il devient silence qu’on impose à soi ou aux autres : Matilda se mure dans un silence qu’elle croit être salvateur en ne divulguant rien de son passé à son employeur, pas plus qu’elle ne révèle au Capitaine qui elle est réellement. L’enfermement, enfin, peut être aveuglement, comme celui qui frappe certains membres du Club du mercredi, abusés par les sirènes de l’Allemagne hitlérienne, bercés par leurs illusions.

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Nos souvenirs sont des fragments de rêves

Membre de la minorité svécophone de Finlande, Kjell Westö a reçu en 2014 le Prix littéraire du Conseil Nordique pour son roman Un mirage finlandais consacré à la guerre civile de 1918. L’histoire de la Finlande imprègne fortement ses romans. Helsinki, dans les années 70. Le narrateur, dont on ignore le nom, est un adolescent solitaire, peu sûr de lui, d’origine modeste. Ses amis Alex et Stella sont eux issus d’une riche famille aristocratique. Tout ou presque les sépare, et pourtant cette amitié va influencer leurs existences en profondeur. Sur près de 600 pages, Kjell Westö déploie 4 décennies de vies qui se construisent et se croisent au gré d’une relation toujours mouvante. Un texte puissant empreint de nostalgie.
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Casa Triton



C’est un roman qui parle de la vie, de la solitude et de la musique. Et une question se pose tout le long du récit : la musique est-elle le meilleur remède contre la solitude? Ou l’inverse: un fou de musique s’enferme-t-il progressivement dans une solitude absolue? C’est aussi un roman sur le conflit des générations.





On fait la connaissance de deux hommes solitaires, deux musiciens cinquantenaires, l’un est un célèbre chef d’orchestre sur le déclin, l’autre est un guitariste médiocre qui joue au sein d’un groupe amateur de la country, du blues et du jazz, dans les cafés de la région. Ils sont devenus voisins, chacun dans sa villa au bord de la mer Baltique, sur une île de l’archipel d’Helsinki. Ils se rencontrent. Brander, le chef d’orchestre aime toujours Krista, violoniste, qui l’a quitté pour un chef d’orchestre plus jeune. Lindell, le guitariste pense sans cesse à Madeleine, sa femme bien aimée, qui est décédée il y a quelques années. Ces souvenirs des jours heureux les obsèdent l’un et l’autre.





Au fur et à mesure de ses engagements, Brander voit les critiques devenir de plus en plus mauvaises, que ce soit concernant ses interprétations de Mozart, de Sibelius, de Britten ou de Brahms. Brander broie du noir. Et le désespoir le guette quand il se retrouve tout seul, dans son immense demeure, la Casa Triton, dont la construction vient tout juste d’être achevée. De son côté, le groupe de musiciens dans lequel se produit Lindell, joue de malchance : les uns après les autres, les membres ont des problèmes de santé qui affectent leur prestation musicale.





C’est un beau texte où la musique est omniprésente. Car ces deux musiciens écoutent de la musique, jouent leurs morceaux favoris, donnent des concerts, et de plus associent des situations de la vie courante à des oeuvres musicales qu’ils vont fredonner ou garder en tête. C’est aussi un texte qui nous interroge. Peut-on vivre seul, en conflit avec ses enfants - qui se sont éloignés - et sans amour, juste avec ses souvenirs et la musique comme compagnons?
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Un mirage finlandais

Pour lire Un mirage finlandais, il faut accepter de prendre son temps, de se plonger dans une histoire méconnue. Il faut déployer à ses côtés un plan de Helsinki (un smartphone fera aussi l'affaire) pour comprendre ce décor où s'entremêlent les eaux et les rochers d'une ville à la périphérie de l'Europe, mais tremblante de peur, à peine sortie d'une guerre civile épouvantable en 1918, et sur le point de devoir reprendre les armes contre son immense voisin soviétique. La narration s'étale sans aspérités, comme la Baltique, et comme la vie routinière de ses protagonistes. Ce quotidien inexpressif est en réalité un "mirage", car il cache évidemment de terribles tourments qui s'enracinent dans l'histoire nationale de la Finlande, qui s'exacerbent sous l'effet de la propagation du nazisme et de l'antisémitisme, et viennent coexister avec les tracas vaudevillesques d'adultes mûrs. Kjell Westö aborde en réalité de nombreux sujets de société, et place au centre de son récit une réflexion sur la santé mentale, en particulier la dissociation de l'identité que l'on va retrouver chez de nombreux protagonistes, mais aussi dans une société à double culture suédoise et finlandaise, mal remise de sa fracture entre "blancs" et "rouges".

C'est un grand roman nordique, c'est une mine d'informations sur cette époque et ce lieu de notre histoire, c'est enfin une intrigue certes simple, mais sérieusement menée.
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Nos souvenirs sont des fragments de rêves

C'est un roman qui nous démontre que l'écriture est un exercice de funambule. Chaque personnage est sur une ligne de crête. Les souvenirs dialoguent en permanence avec le présent, l'amour et l'amitié se mélent sans cesse. Ce roman est un voyage est donne très envie de sortir de chez soi et allez à la quête de la lumière
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Casa Triton

Sur une petite île de l’archipel d’Helsinki, le célèbre chef d’orchestre Thomas Brander se fait construire une somptueuse villa qu’il nomme « Casa Triton ».



Triton, cette harmonie de notes dissonante, quarte augmentée, « l’accord diabolique ».

Un intervalle musical qui diffuse un sentiment de malaise, une mélancolie troublante et tourmentée.



Brander est très exigeant dans l’exercice de son métier, tant envers ses musiciens qu’envers lui-même. De multiples bonnes raisons l’encouragent à « se rendre froid et insensible ». «Pour ne pas y laisser sa peau, se disait-il ». Quitte à passer pour égocentrique.

« Si on laissait trop de place à ses émotions, on ne pouvait pas déchiffrer l’empreinte subtile de ce qui avait traversé l’âme du compositeur. Et l’empathie mal placée était dangereuse, l’indulgence pour la faiblesse humaine un obstacle à l’art ».



Arrivé sur les lieux, Thomas fera la connaissance de son voisin Reidar Lindell, peu loquace, humble guitariste dans un groupe de musiciens amateurs, meurtri par la disparition de sa femme chérie.



L’originale rencontre de deux musiciens de milieux différents, leurs deux solitudes les rapprocheront et favoriseront les prémices d’une amitié.

Musique classique, musique populaire, Brander et Lindell, des personnalités très disparates, soumis aux mêmes failles et faiblesses du genre humain, sur fond de tragédies personnelles et drames d’actualité mondiale, à l’écart des foules sur une île finlandaise.

Devant certaines situations, Brander est plutôt désarmé, recentré sur lui-même il préfère fuir et se perdre dans sa musique, quant à Lindell il est de ceux qui agissent, avec bonté et détermination.

Mais tous les personnages sur cet archipel ont leur part d’ombres.



Vulnérabilité des hommes, fragilité des sentiments et réflexion sur le temps qui passe, musique et mélancolie, chaleur et sollicitude dissimulées derrière une apparente froideur, façade protectrice.



« Il se rappela que Sibelius voyait dans la grue un instrument à vent et que la tonalité de la majeur lui évoquait la couleur bleue, alors que ré majeur était jaune. Il se demande pourquoi la grue n’avait pas encore migré, avait-elle perdu ses compagnons de route, son orchestre ? »



Dans cette nature, j’ai totalement adhéré à la sensation de conjuguer une œuvre choisie avec les éléments qui nous entourent. Il est très clair que ressenti et nature environnante évoquent au musicien une œuvre en particulier.

Notre état d’esprit peut y voir une inspiration ou comme Brander une « prison sonore ».

« La musique recommença dans la tête de Brander, à présent c’était « le Chœur des vents de la Tempête ».

« A chacun sa prison, pensa-t-il : lui était prisonnier des sons et de sa propre imagination, ce jeune homme assis devant lui était prisonnier de son statut de réfugié».



Une première belle rencontre pour moi avec l’auteur, grâce à Babelio et à la critique de Bookycooky.



« Les passereaux et les oiseaux de la forêt avaient démarré au même moment, et les piverts donnaient le rythme avec leurs roulements de tambour boisés. Les chants de l’aube et les trilles d’avertissement résonnaient dans toutes les tonalités à la fois, comme une partition dodécaphonique pour jardin et forêt ».



Un roman qui explore les émotions et leurs nuances, les déclinaisons de la Nature, humaine et environnante.

Symphonie (dé)concertante.



Clin d’œil au concerto pour clarinette de Mozart et son adagio qui résonne en moi tel un diapason d’apaisement.

Limpide, cristallin.

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Casa Triton

Thomas est un chef d'orchestre reconnu en Finlande. Il décide de construire une immense maison à Ravais , village finlandais au sud du pays, les pieds dans l'eau. Il fait connaissance avec son voisin , psychologue scolaire, lui aussi dans la musique , mais à un niveau bien plus humble.



Très beau roman , de la même qualité que Nos souvenirs sont des fragments de rêves.

L'auteur fouille ses personnages au scalpel et nous fait partager leurs doutes, leur joies, leurs fautes, leurs travers, leur générosité.

Il y a beaucoup de complexité chez cet auteur malgré des apparences simples. Rien n'est binaire , rien n'est jamais perdu ou gagné . Chaque jour est une remise en cause .

Comme pour le livre précédent, les thèmes contemporains sont abordés : Les migrants, le réchauffement climatique et ses conséquences dans ces contrées septentrionales, la résurgence d'idéologies que l'on pouvait espérer enfouies dans un bunker...

Il est surtout question d'êtres humains qui vieillissent, qui se cherchent, qui doutent et scrutent les autres pour se confronter, se rassurer ou s'inquiéter dans un monde en mouvement qui semble leur échapper .

Beaucoup de musique aussi , la confrontation de la "grande musique" et de l'autre qui renforce encore plus la rencontre de deux hommes que tout sépare.

Un livre formidable où le style l'auteur et sa faculté à aborder les faits sous différents angles ajoute encore un peu plus de plaisir .

On a beaucoup, parlé de la littérature scandinave à travers ses policiers.

Il est vrai que Mankell ou Nesbo m'ont emballé mais Kjell Westö est clairement un auteur à découvrir !

Enfin , dans ce roman , le Covid semble faire partie du passé. Une autre raison d'y accorder un intérêt !
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Casa Triton

Finlande en musique. Un chef d’orchestre, mondialement connu, vient séjourner dans la maison hors-norme qu’il a fait construire en bord de mer. Son voisin a aussi une cinquantaine d’années, psychologue, veuf, pratique la pêche et fait de la musique de variété localement. Deux vies aux antipodes et pourtant une profonde amitié va naître.



Comme tout grand musicien, Lindell pratique une forme d’autisme et est imperméable aux soucis des autres. Et pourtant son voisin va lui demander d’intervenir auprès d’un jeune en difficulté.



Des pages qui semblent être une partition tant la musique y est présente. Une analyse fine sur de nombreux sujets actuels. Il y est même question de l’après Covid.

(Critique postée pour remercier Bookycooky de m’avoir conseillé ce livre.)
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Un mirage finlandais

J’ai choisi ce livre attirée par le fait que ce soit un roman écrit par un finlandais et non un polar nordique. De plus , j’avais envie de savoir pourquoi on parlait de mirage. J’ai plongé dans la vie d’une femme trentenaire en 1938 à Helsinki mais pas seulement. J’ai surtout lu toute l’histoire et les tragédies méconnues qu’a connu ce jeune pays au début du XX ième siècle. Dans ce livre il y a une ambiance très particulière, le cadre de cette ville mais aussi cette amitié au sein de ce club ( 7 hommes qui se retrouvent mensuellement) qui inévitablement fera les frais des engagements politiques des uns et des autres face à la question allemande.

Les personnages sont fouillés et on s’attache à eux. Un très beau et bon livre qu’on referme à regret.
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Casa Triton

Je ne sais pas réellement ce qui est à la source du plaisir de lire Kjell Westö mais ses romans sonnent toujours juste à mes oreilles. Et Casa Triton n'échappe pas à ce constat, bien qu'il y règne une atmosphère d'anxiété diffuse, une mélancolie inquiète, un sentiment de défaite dans cette histoire d'une étoile qui ne sait pas qu'elle ne brille plus. Un chef d'orchestre décrit comme «un métronome grisonnant» en quête d'une sérénité à laquelle il espère accéder en bâtissant une villa écrasante de béton plus haut édifice après l'église dans un village insulaire où il compte se réfugier entre deux tournées mondiales.

Mais kjell Westö ne laisse pas son personnage réorganiser son monde comme il l'entend. L'histoire se révèle pleine de dissonances furtives, de relations conflictuelles, de confrontations, alors que le monde extérieur grinçant, planant comme un nuage assombrissant l'horizon, invite au repli sur soi ou à l'effacement. Et que dire de ce voisin au profil fort dissemblable de bon samaritain qui, en portant toute la communauté insulaire sur ses épaules, menace la tranquillité de notre vieil homme...



On retrouve dans Casa Triton, ce qui a fait le succès de l'auteur : une certaine facilité à semer le trouble, à capturer dans l'air du temps les traces et les résonances qui suggèrent un sentiment de réticence ou d'insécurité. Il dessine à merveille les ambiances et univers inquiétants de manière à faire vibrer les cordes de la fragilité humaine. Car bien que l'orgueil de notre chef d'orchestre empêche la vérité de circuler, on s'aperçoit qu'il n'y a pas dans ce roman de gens à mépriser. L'auteur se garde de juger, il se contente de décrire une époque, notre époque, et certainement sa génération qui doit composer avec le monde tel qu'il est.

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Casa Triton

Chef d'orchestre de renommée internationale, Thomas Brander a sacrifié sa vie privée sur l'autel de la musique. Toujours entre deux tournées, il n'a jamais pris le temps de trouver son port d'attache, un chez-lui où il pourrait se resourcer entre deux concerts. Aussi voit-il les choses en grand quand il se décide enfin à faire construire une maison. En trop grand même pourrait dire son voisin Reinar Lindell quand il observe l'avancée des travaux de la Casa Triton, une villa, voire un château, en tout cas une construction incongrue sur cette petite île de l'archipel d'Helsinki. A priori Brander et Lindell n'ont rien en commun. le premier est froid, distant, égoïste, il collectionne les femmes, le second est psychologue scolaire, aime aider son prochain et pleure sa femme trop tôt décédée. Brander est chef d'orchestre et aussi un clarinettiste de talent, Lindell joue de la guitare -mal- dans un groupe amateur, principalement du rock et de la pop. Et pourtant, une amitié va naître entre ces deux hommes si différents. Car si dissemblables soient-ils, ils ont en commun leur solitude et leur recherche désespérée d'un bonheur qui semble vouloir leur échapper.



Deux hommes, une maison, la musique et une multitude de thèmes. Certains universels comme la solitude, l'amour, le deuil, la paternité, le pardon, le racisme, le succès, la vie et d'autres actuels comme l'écologie, les migrants, #MeToo ou le Covid.

En fond sonore, la musique, Ravel ou Brahms, les Beatles ou ABBA, sans oublier la mélodie de Kjell Westö, sensible, mélancolique, tourmentée, parfois discordante comme le triton, cette note du diable qui donne son nom à la maison de Thomas Brander. Un séjour cathédrale pour que la musique s'y épanouisse, un ascenseur pour rejoindre l'étage, une modernité aseptisée devaient faire de cette maison le lieu de rendez-vous à la fois cosy et impressionnant des amis du chef d'orchestre. Mais cette maison de vacances pourrait bien devenir son lieu de vie. Sa carrière périclite en même temps que de plus jeunes chefs d'orchestre prennent leur envol, son nom est éclaboussé par des accusations à caractère sexuel, sa dernière maîtresse le quitte et Brander refuse de voir qu'il n'a plus la flamme. Contrairement à son voisin qui se plie en quatre pour faire durer son groupe amateur. Il n'a pas le talent mais il a le feu de la passion. Même si la musique n'est pas toute sa vie. Il est impliqué dans la vie du village, s'intéresse à l'écologie, au sort des migrants et fait son possible pour aider ses amis.

Ces deux hommes vont se lier d'une amitié qui hésite, se cherche mais finit par être sincère et profonde. Chacun à leur manière, ils sont touchants. Brander qui tente de renouer avec son fils après l'avoir délaissé au profit d'une carrière où chaque jour est un combat pour rester sur le devant de la scène et Lindell qui entretient le souvenir de la femme aimée en niant tout ce qui n'allait pas dans son couple.

Après Nos souvenirs sont des fragments de rêve, roman auquel il fait une petite référence d'ailleurs, Kjell Westö signe avec Casa Triton le roman de la musique qui estompe les frontières. Une exploration touchante du coeur des hommes dans leurs fragilités, leurs doutes, leurs espoirs.

Et petit clin d'oeil à la pandémie mondiale. Dans le roman, la vie a repris son cours et masques, gel hydroalcoolique et gestes barrières ne sont plus en vigueur que lors des déplacements en avion. Puisse l'auteur avoir vu juste…



Merci à Babelio et aux éditions Autrement.
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Casa Triton

Loin du monde, sur une île d’un archipel finlandais, deux voisins font connaissance. Tous deux ont dépassé la cinquantaine, tous deux sont seuls, tous deux ont un unique enfant parti vivre au loin, tous deux sont musiciens… Thomas Brander, chef d’orchestre à la renommée internationale mais dans la phase descendante de sa carrière, s’est fait construire une magnifique demeure, la Casa Triton, de la taille d’une église pour l'emplir de musique. Divorcé, il supporte mal sa rupture avec une jeune musicienne, Krista, qui s’affiche ouvertement avec un concurrent plus jeune…Son fils, Vincent, lui rend de rares visites. Sa fortune et sa célébrité rendent sa solitude encore plus amère…



A quelques distances de chez lui, vit Reinar Lindell, psychologue de métier, veuf inconsolable. Sa femme Madeleine est morte d’un cancer, sa fille Maja voyage à travers le monde. Il anime un groupe de musiciens amateurs qui joue le samedi soir dans le café du village des reprises de groupes populaires, blues, rock, soul…De condition beaucoup plus modeste, il se lie malgré tout une amitié entre ces deux hommes qui vont évoluer au contact l’un de l’autre. Face à la beauté de cette nature touchée elle aussi par les changements climatiques, se jouent également les drames de notre société. Les attentats du terrorisme islamique, le problème des migrants, la radicalisation des jeunes, la récession économique, le rôle des réseaux sociaux, la crise sanitaire due au Covid, tous problèmes qui les atteignent dans ce petit coin de paradis, lieu géopolitique stratégique.



Bref un roman à la fois dépaysant et actuel, un peu technique parfois mais c’est ce qui fait aussi son charme…Car si Thomas est obsédé par la perfection de la performance musicale, Reinar recherche surtout le plaisir d’être ensemble et d’offrir quelques heures de délassement à ses auditeurs. Deux publics apparemment différents voir opposés mais la passion de la musique qui a réuni les deux hommes va finalement permettre de vaincre ces frontières. Merci à Babelio et aux éditions Autrement pour ce très beau livre.

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Casa Triton

Quand vous connaissez « Black Sabbath » des Black Sabbat, ou « Within You Without You » des Beatles, et quand vous savez qu'en jouant dès les premières notes le triton - cet intervalle dit « du diable » tellement il crée une tension à l'oreille - le musicien veut intriguer l'auditeur et capter immédiatement son attention… Vous comprenez qu'en intitulant son roman Casa Triton, l'auteur ne veut pas simplement vous parler d'une idyllique villa de bord de mer, une « maison de riche » que le grand chef d'orchestre, Brander, s'est pris le caprice de faire construire sur la côte. « Casa Triton, c'est ainsi qu'il appelait sa nouvelle résidence. le sens un peu lugubre de ce mot, pour un musicien, l'amusait ; et, de fait, la vie rendait parfois un son dissonant ». « Ça fait un peu le même effet que dans l'Exorciste, quand Linda Blair dévale l'escalier en faisant le pont ».





De fait, la casa T. cristallisera les sentiments des personnages et accueillera, comme une mère, leurs espoirs autant que leurs frustrations. Ce nom, plus qu'une provocation ou qu'une autodérision, est en réalité un mot posé sur ce qu'est sa vie au moment T : Celui où tout semble vouloir basculer du mauvais côté, mais où tout est encore sous tension, possiblement sauvable ; ce moment avant la chute, que l'on sent, que l'on attend ; que l'on redoute comme un couperet autant qu'on l'espère, comme une libération. Habiter ici ne fera-t-il qu'exacerber les tensions, ou au contraire cela libèrera-t-il Brander et résoudra ses problèmes ? Lui-même, en appelant sa maison ainsi, est dans l'expectative. Comme le lecteur qui le suit dans cette nouvelle aventure.





On s'interroge : cette maison ne serait-elle, à l'image de la vie de Brander, qu'une coquille vide ? La réponse de Brander est de la remplir de musique. Comme il l'a fait avec sa propre vie. Au détriment de ses proches, et de chaleur humaine. Mais la musique ne remplit plus son vide, et il reste de la place pour les questions : Est-ce uniquement l'intransigeance envers lui-même qui prenait toute la place ? Ou son égo ? Seul, dans cette grande cathédrale musicale de bord de mer, Brander aura tout le temps de chercher les réponses… Et surtout d'éventuelles solutions. Car autant que l'âge, la solitude commence à lui peser. Il espère un nouveau départ, loin des rivalités médiatiques qu'il ne peut techniquement plus assumer, et qu'il est fatigué de craindre. Il va tenter de mettre son orgueil et son égoïsme de côté, pour remplir sa maison d'une vie nouvelle.





C'est là que Brander, le musicien de la perfection, qui a sacrifié son couple à sa gloire et se retrouve seul au moment de son déclin, rencontrera son voisin Lindell. Son miroir inverse, tout ce que Brander ne veut pas être… mais qui finalement les rapproche : un mari abandonné par sa femme, un musicien amateur qui s'amuse avec la musique dans un groupe… de rock ! On entend presque Brander penser, avec David Bowie : « le rock a toujours été la musique du diable. Je crois que le rock n'roll est dangereux. Je sens que nous nous dirigeons vers quelque chose d'encore plus ténébreux que nous-mêmes »… Ah mais justement, on s'y dirige et même tout droit, avec ces deux acolytes ! Alternant le point de vue de chacun au gré des circonstances, l'auteur nous fait pénétrer leurs âmes qui ont, comme celles de tout un chacun, leur part d'ombre - que l'on soit un chef célèbre, ou un psychologue de lycée altruiste et prônant l'entraide dans la communauté, comme Lindell. Tout ce que croyait vouloir fuir Brander en venant ici, en somme. A moins que ce ne soit tout ce à quoi il aspirait, secrètement, inconsciemment ?





Deux univers que tout oppose, sauf ce sentiment de solitude, d'abandon, et cette envie de vouloir de nouveau exister pour quelqu'un. Remplir sa vie avec des choses qui comptent, des choses qui resteront un peu plus. Une certaine stabilité… Une amitié ? de cette confrontation naîtra des doutes des deux côtés, des questionnements sur leurs chemins de vie respectifs. Des prises de bec mais de consciences aussi. L'auteur joue sa partition sur fond de terrorisme, d'écologie, de problèmes d'immigration, du pardon, du vivre ensemble, des ME TOO et compagnie. Mais loin de s'en servir de fourre-tout pour faire-valoir son livre, toutes ces notions demeurent en fond de l'histoire, d'importance inégale pour chaque personnage tout comme pour chaque lecteur, en fonction de ses propres vécus, convictions…





****



La musique n'est pas spécialement un univers qui m'attire en littérature ; Mais Bookycooky, a trouvé les mots pour me convaincre. Elle m'a dit : « Onee tu vas détester Brander, aimer Lindell, adorer les paysages, et la musique toujours présente, en tout cas tu t'ennuieras pas. Tu peux aussi envoyer des SMS à Brander, il adore ça et il parle bien l'anglais. ». Et en effet, très vite, je me suis sentie à l'aise, portée par un genre d'écriture que j'affectionne : fluide et simple, mais qui décrit les gestes et pensées au plus près des personnages. J'ai vécu leur histoire, même si je me sentais loin de leur vie de musiciens. Je n'ai pas détesté Brander, et certains côtés de Lindell m'ont même irritée. Mais c'est précisément ce qui a rendu ce livre, et ses personnages, profondément humains. de la confrontation de deux univers, qui se complètent malgré quelques fausses notes, nait une amitié qui sonne juste. Pas lisse, non, mais harmonieuse ; exactement fidèle au principe musical de tension-résolution. Et après tout, n'est-ce pas cela, l'amitié : un perpétuel accord à trouver ? Tout comme la musique rock ou populaire utilise la musique classique pour se faire valoir, et celle-ci revit aussi à travers celle-là.





Au total, une mélodie aussi attachante qu'intéressante qui, si elle n'est pas celle du bonheur, semble pouvoir et vouloir être celle de la résilience. Un roman polyphonique doux et plaisant, divertissant et réfléchissant. Deux « moi » en miroir, qui se scrutent et apprennent l'un de l'autre. Une réussite !





Allez, du ballet, mes p'tits rats de bibliothèque : je vous laisse avec la jolie Valse des flocon de neige, c'est de saison !

https://www.youtube.com/watch?v=zzThswTVExw
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Casa Triton

Vous le savez probablement, ou peut-être pas d'ailleurs, mais je suis une grande fan de fantasy, sauf que je ne supporte pas ne pas m'ouvrir aux autres genres littéraires, donc me voici à choisir un livre pour la Masse Critique de Babelio (D'ailleurs merci pour l'envoi) et je tombe sur la Casa Triton. Déjà la couverture est canon (c'est d'ailleurs elle qui m'a fait arrêter de scroller !) ensuite vient le résumé qui m'a accrochée ! C'est une histoire à couper le souffle, très actuel, pleins de sujets sont merveilleusement bien abordés tel que le racisme, l'écologie, la solitude et j'en passe ! La plume de l'auteur est impactante, ça permet d'éveiller les esprits, de nous poser pas mal de questions sur l'humain dans son intégralité. C'est également une histoire d'amitié, de passion et d'accepter ; un super cocktail pour passer un agréable moment de lecture ! Je m'égare car à la base c'est un livre qui parle musique ! Nous y suivons deux protagonistes en particulier ; le célèbre chef d'orchestre Brander et Lindell qui fait partie d'un groupe amateur de musique, il m'a d'ailleurs énormément touché avec son parcours. J'ai trouvé les personnages décrits à merveille, ils sont touchants et par fois agaçants mais humains, entier, je trouve c'est traits de caractères très importants et essentiels pour s'immerger dans l'histoire. En bref, vous l'aurez compris, j'ai été enchantée de lire un tel livre, c'était intense, je vais suivre Kjell Westö de très très près.
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Casa Triton

//QUAND LA MUSIQUE DONNE 🎻🎸//



Qu'est ce qui peut réunir deux hommes de classe sociale différente, l'un chef d'orchestre parcourant le monde et assez fortuné pour se faire construire une villa avec un ascenseur, l'autre psychologue scolaire et voisin de cette "Casa Triton" ?



L'amour de la musique, qu'elle soit classique ou populaire !



Dans ce nouveau roman de Kjell Westo (dont on avait sans doute encore plus aimé en 2018 le sublime "Nos souvenirs sont des fragments de rêve"), il y a la lumière de la Finlande, les ferries sur lesquels il faut embarquer pour arriver loin au large d'Helsinki. ces îles qu'on aimerait coupées de tout mais où les échos du monde parviennent quand même (menace terroriste, montée des nationalismes, #metoo et nature qui souffre de plus en plus).



Ce que on a aussi beaucoup aimé dans ce "Casa Triton" , c'est l'alternance de points de vue.



L'intrigue avance une fois à travers les yeux de Brander, chef d'orchestre qui s'interroge face à son succès déclinant, une fois à travers ceux de Lindell, particulièrement touchant face au deuil de sa femme.



On a très peu vu passer ce roman sur les réseaux sociaux (et d'autres beaucoup beaucoup )) alors si vous aimez les ambiances scandinaves, les îles et les romans baignés de musique, foncez sans hésitez !
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Un mirage finlandais

Claes Thune, avocat, est perdu depuis que sa femme l'a quitté pour un de ses amis, psychiatre. Il se laisse aller, ne parvient pas à faire le deuil, est jaloux.



Son cabinet d'avocat lui apporte un peu de calme et de paix, dans la mesure où il a recruté une excellente et très discrète secrétaire, Matilda. Cette dernière est très secrète sur son passé, et vit seule. Il ne lui connaît que sa passion pour le cinéma, et son frère musicien, ombrageux et excessif. Le temps d'un été, entre les pérégrinations de Claes Thune et les réunions de son cénacle d'amis, qui périclite en raison de leurs opinions politiques très différentes, Claes et Matilda vont sympathiser et approcher de ce qui peut s'apparenter à une amitié.



Mais Matilda cache un secret douloureux sur son propre passé : elle a été emprisonnée dans un camp de détention en Finlande, et reconnaît lors d'une réunion du club d'amis un de ses gardiens, qui lui fait à la fois horreur et la fascine, et elle se livre à un jeu dangereux en acceptant de le rencontrer seule.



Pendant ce temps, la Finlande traverse l'année 1938, Helsinki se prépare aux Jeux Olympiques (qui n'auront finalement pas lieu), et un jeune Juif, Abraham Tokazier, gagne lors d'une course officielle le 100 mètres, mais se voit retirer la victoire, en raison de la présence d'Allemands invités dans le stade, pour ne pas déplaire... Jogui Jary, ami de Thune et oncle du jeune coureur, est choqué, et se débat lui-même contre un "étrange" sentiment de persécution en tant que Juif, qui le fait rechuter dans sa dépression et être à nouveau hospitalisé... Il est clair que les années de paix sont comptées.



J'ai apprécié ce roman toutefois long à lire, balisé de détails historiques, qui suit d'une manière un peu molle le parcours de Claes Thune après son divorce ; j'ai toutefois plus apprécié le personnage de Matilda, qui lutte contre ses souvenirs traumatisants, et se laisse parfois envahir par son alter ego, la demoiselle Milja.



L'aspect historique est intéressant, et j'ai appris beaucoup de choses que j'ignorais sur la Finlande : ses rapports avec l'Union Soviétique, l'existence de camps de détention pour les "Rouges" finlandais, l'antagonisme entre les Suédophones et les finnophones...



J'ai eu malgré tout du mal à le terminer, bien qu'il soit relativement facile à lire.
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Casa Triton

Ah là là les bouquins ! Heureusement qu’ils sont là ! En plein confinement me voici projetée de la Cisjordanie à un village sur la côte sud-ouest de la Finlande.



C’est l’histoire d’une amitié d’emblée improbable entre un chef d’orchestre de renommée mondiale et un psychologue veuf, musicien amateur de musique tout genre , son voisin, à Ravais, un bled en bord de mer. Le premier vient de s'y faire construire une maison estivale, "La Casa Triton". Le chef s'appelle Thomas Brander, le psy Reider Lindell, deux mondes apparemment aux antipodes et pourtant.....ils vont apprendre à se faire confiance, et essayer de partager leurs musiques, leurs passés et leurs solitudes.



Westö , écrivain finlandais sudophone que je viens de découvrir avec ce premier roman m'a fascinée. Ce livre dont le troisième personnage est la musique, vibre comme une partition, tellement l'émotion présente y est forte avec ou sans musique.

Lindell est un homme engagé pour son prochain, la musique et la pêche sont ses distractions. Brander, un homme égoïste, ne vit la vie qu'à travers la musique, "Le paysage résonnait différemment à présent. C’était une musique brute, écho d’un monde ancien qui se serait brisé –comme du Bartók ou du Janáček". Même le nom de sa nouvelle maison "Triton " s'y réfère, un intervalle interdit en musique. Un intervalle qui a été prohibé pendant des siècles car on considérait qu’il pouvait invoquer le diable une fois joué. Malgré son nom de mauvaise augure qui semble être une plaisanterie, va-t-il lui être un havre idyllique comme il en rêve depuis son enfance ou au contraire maléfique vu les difficultés qui s'amoncellent côté vie privée, professionnelle et autres ? "—Tu t’es construit une maison fantastique, mais tu fais une tête d’enterrement,...."lui en fera la remarque un de ses amis.



Une histoire passionnante agrémentée de sujets d'actualité brûlante, surtout chers aux pays nordiques "à tolérance zéro" : les problèmes écologiques, le problème des réfugiés, le terrorisme, le racisme et le mouvement MeToo devenu une arme de vengeance à toute sauce, même si sur le fond il n'y a peut-être rien eu de bénin . Westö y sonde les tréfonds de l'âme des deux protagonistes. Une psychologie fouillée qui démontre habilement que quel que ce soit nos origines, notre éducation, notre renommé, notre statut sociale, nos moyens économiques.....nous sommes identiques, dans le fond, ayant les mêmes peurs, les mêmes angoisses, les mêmes frustrations, ainsi que les mêmes besoins de bases , l'amitié, l'amour, la reconnaissance, l'empathie, la gentillesse......denrées devenues rares dans notre monde actuel....et nous terminons tous notre chemin au même endroit. Écrit en plein pandémie, il en parle aussi assez curieusement, même prémonitoire, dirais-je.......



Westö fin psychologue a concocté un superbe roman chargé de questions sur la fragilité humaine , qui parle très simplement du complexe avec une apothéose formidable sur le pardon . Un livre qu'on lit d'une traite que j'ai beaucoup beaucoup aimé.

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Casa Triton

Hommage à toutes les musiques, ce nouveau roman de Kjell Westö aborde aussi les drames individuels et collectifs auxquels est confrontée l'humanité – catastrophes écologiques, #MeToo, terrorisme, deuil, rupture amoureuse, solitude. Tout en subtilité et sans jamais tomber dans le fourre-tout, l'auteur écrit une nouvelle fois la fragilité humaine avec la lumière finlandaise pour toile de fond (plus d'infos : https://pamolico.wordpress.com/2021/01/15/casa-triton-kjell-westo/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Un mirage finlandais

Cette fresque historique étonnante est également un roman psychologique brillamment mené. Les perspectives se relayent – du juriste taciturne à la jolie secrétaire ayant un bien sombre passé –, l'ambiance pesante de la ville pénètre les os. Kjell Westö saisit l'atmosphère poudreuse, surannée de l'entre-deux-guerres et l'entrelace aux tensions ambiantes... (plus d'infos : https://pamolico.wordpress.com/2020/12/07/un-mirage-finlandais-kjell-westo/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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