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Citations de Linda Lê (324)


Le moi recréé ne ressemble pas plus au moi réel qu'un homme accompli ne ressemble à l'adolescent qui se cherche.
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Je n'étais pas inflammable, et j'aurais été très surpris si l'on m'avait dit que mon cœur allait s'embraser.
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Le petit dragon ondoyant zigzaguait entre le zist du capital et un zeste de marxisme, comme un zombi, rendu zinzin par les années de zizanie communiste, qui se mettait à danser le swing de la simonie sous le soleil du capital à son zénith. De temps en temps, le Parti faisait gronder sa colère; le petit dragon s'aplatissait aussitôt, mimant la pause triste et résignée qu'il avait du temps où il n’était qu’une queue affamée devant les magasins d'État, toute tremblante de peur et longue comme le catalogue des péchés mortels contre la Révolution. Et si cela ne suffisait pas pour apaiser la fureur du Ciel, le petit dragon mettait un bémol à sa fougue affairiste, éteignait pour quelques jours sa flamme du négoce avec une petite larme nostalgique des années d'innocence, la décade vertueuse où les magasins, au passage du chaland, baissaient pudiquement les paupières, une petite larme en forme de clip, où une cloche et une tête à claques, glougloutant de candeur, chantaient au clair de lune un gloria in excelsis à l'oncle Hô, un exsudat sérieux à claquer d'ennui, dégoulinant de glaire vertueuse et qui s'en allait noyer son clapotis édifiant dans le cloaque du capital, le flot du clinquant qui charriait toute la clique des clones mercenaires, naguère cloués au pilori, désormais portés au pinacle, proliférant comme les kleenex, petits papillons multicolores subitement apparus sur les étalages, chassant les papillons noirs de la décade funeste, séchant les larmes nostalgiques du petit dragon qui, sorti des transes mortelles du communisme, se transportait, avec une ondulation de joie, vers le bazar du transitoire, ses enseignes changeantes et sa débauche d'émotions jetables.
(p. 227-228)
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Plus moyen d'arrêter le conjuré, qui se croyait de nouveau maître à bord, libre de se laisser aller à sa fureur hargneuse (comme dit la Manchote) et de piétiner les conditions stipulées dans le contrat d'association mis au point après un sondage express sur l'inconvénient d'être apparié (encore une pique de la sorcière), la vie à deux est-elle pour vous une expérience exaltante (à court terme) ? éprouvante (à la longue) ? absurde (de bout en bout) ? egophage (de jour en jour) ? dissolvante (nuit après nuit) ? une expérience de brève communion mutuelle suivie de longues humiliations réciproques (ou comment atteindre l'orgasme quand le désir n’y est plus) ? d'incompréhension sournoise changée en indifférence affichée (ou le plaisir de renoncer à une énigme quand on n’en a rien tiré) ? le souvenir de territoires concédés avec des trémolos et repris sans sommation, un pied de nez comme paraphe (ou le bonheur de se sentir enfin bien peinard après des années dans le lit de Procuste) ?
(p. 120-121)
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[…] en attendant le demi-dieu qui devait lui dédier son dard, la donzelle s'était démenée comme un beau diable, avait dompté un dada après l'autre, raclé toutes les cordes de son arc, appris la guitare en dix leçons, dansé la gigue, acheté une caisse à faire tchac-boum, commandé de la couleur, dressé un chevalet, acheté une boîte à faire clic-clac, dessiné des robes, acheté une machine à faire zig-zag, pouponné des arbres nains, acheté une fontaine miniature qui faisait flic-flac, potassé le japonais de cuisine, mimé l'art du thé, acheté un service rayé payé ric-rac, mais elle avait beau faire clicclactchacboumzigzag, les jours se suivaient flip-flop, les dépouilles des vocations manquées s'entassaient pêle-mêle, et c'était toujours le même bric-à-brac d'ennui qui attendait le fric-frac providentiel d'un sauveur tombé pile poil pour guérir ces quintes et débrouiller ce méli-mélo de lubies. […] la prisonnière mangeait, cuisinait puis mangeait, mangeait puis cuisinait, en tête à tête avec la petite boîte qui radiotait, quand elle ne crachait pas des tchac-boum près de la hotte ultraperformante qui aspirait les odeurs de friture mais ne sniffait pas les relents de spleen.
(p. 75-76 et 77-78)
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Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir, préférait dire ma cousine qui, ajustant le dogme de la métempsychose à sa candeur philosophante, croyait ferme en une autre vie, qu'elle considérait comme une séance de rattrapage, où les recalés de cette existence se verraient octroyer la grâce d'une possible place dans le peloton de tête.
(p. 26)
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Toute la littérature du monde pour une cuisse de jeune fille, avait encore dit Théo, qui tenait toujours en réserve une formule de derrière les fagots.
(p. 21)
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Le français, ça allait de soi. C'était l'idiome diplomatique dans la maison flambant neuve ; mais le père rêvait de semer, dans la graine de paradis, des germes de germanisme, que la mère, ne voulant pas être en reste, marierait à des gamètes insolites, poussières de vietnamien levées par le vent de la mémoire.
(p. 13)
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[...] il fallait porter dans une main un fusil, dans l'autre un livre : celui qui n'avait que le fusil finissait par se rendre coupable de tueries aveugles, et celui qui n'avait que le livre en venait toujours à se perdre dans les brumes de l'idéalisme.
(p. 138)
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Sa lucidité l'obligeait à reconnaître que, s'il était facile et séduisant de se dire de nulle part, il l'était beaucoup moins de vivre en ce fichant de définir les contours d'une appartenance, même de pure convention. S'il était facile et séduisant aussi de croire qu'il suffit d'ériger des barrières entre soi et autrui pour défendre sa singularité, il l'était moins de vivre chaque jour son splendide isolement.
(p. 82)
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[...] l'amour est une distraction coûteuse puisque les amants payent par une violence exercée contre eux-mêmes les efforts faits pour transformer l'égoïsme en abnégation, l'indifférence en dévouement.
(p. 61)
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Elle ressemblait à un porc-épic qui se hérissait en boule et se tenait à distance des autres de peur de les blesser et d’être soi-même meurtri. Page 168
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Il y a des écrivains qui réunissent cent mille personnes à leur enterrement et il y a ceux qui n'ont jamais suscité la ferveur que d'une poignée de passeurs, confrérie clandestine dont les membres se transmettent le flambeau d'une génération à l'autre.
(p. 143)
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La vie d'un livre en librairie a peut-être de nos jours tendance à n'être guère plus longue que celle des insectes nommés éphémères. L'auteur court un danger plus grand que celui de s'exposer : le risque d'être submergé par la vague d'in-folio fraîchement sortis de l'imprimerie est pour lui considérable et, quelque passion qu'il ait mis dans la réalisation de son modeste opus, il n'est pas du tout certain de n'être pas balayé par le vent d'automne qui, chaque année, apporte son lot d'ouvrages tous patiemment ourdis avec, comme dit un personnage Mon Faust [de Paul Valéry], la folle ambition de faire oublier tous les autres…
(p. 40)
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Il avait commencé par rejeter avec une violence, surprenante même à ses propres yeux, tout ce qui lui rappelait que ses parents étaient nés très loin du Léman. Les connaissances qu'en ces années d'adolescence il acquérait sans pouvoir se dire qu'elles étaient le socle contre lequel sa personnalité allait s'appuyer se signalaient par ce qu'elles avaient de brouillon, d'éclectique, mais surtout il n'y avait rien qui pût rappeler qu'une partie de lui-même n'était pas si éloignée de l'Asie. Quand il s'en avisa, il ne trouva d'abord rien d'anormal à cela. Il faut tendre à l'universel, se répéta-t-il en feuilletant La Nouvelle Héloïse ou Voyage autour de mon crâne. Que sa culture fût essentiellement européenne n'était pas pour le gêner. Il ne lui venait même pas l'idée de s'interroger sur cette bizarrerie. Puis, comme un enfant mal à l'aise dans des vêtements d'emprunt, il s'aperçut un jour que quelque chose clochait. Le voyage vers l'Est se fit très lentement, car il prit des chemins détournés pour arriver jusqu'au Vietnam.
(p. 49-50)
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Car dans toute création il y a, à l'origine, un défi lancé à soi-même : sans rien laisser au hasard, il convient de s'aventurer hors des limites circonscrites pour donner asile à cet "hôte plus ou moins indésirable" qui invite à "se réinventer" en sachant que, dans cette bataille, fureur et patience se trouvent mêlées. Le danger est moins de se perdre au milieu des ombres que de refuser toute connivence avec l'inquiétante part enfantée par la nuit.
(p. 45)
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[...] il n'est pas défendu de préférer, au confort qu'on éprouve à se dire qu'on est assurément un trouveur, le malaise qu'on ressent à chercher indéfiniment. [...] Hommages à ceux qui ont été dévorés par l'ombre, ces brefs essais font retour sur ce qui a favorisé les réflexions d'une lectrice, nourri les passions d'une « glaneuse » pour employer un mot auquel Agnès Varda a rendu toute sa beauté.
(p. 12)
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Pourtant, insiste-t-il [Joseph Roth], il faut persister et écrire, justement quand on croit que le mot imprimé ne peut plus rien contre la barbarie.
(p. 13)
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Parmi les premiers textes que Cioran avait écrits en français figurent quelques pages, d'une implacable précision, sur le mot "dor" qui, en roumain, signifie "nostalgie". Encore que ce mot, employé avec lyrisme par celui qui s'évertue à trouver la formule de "mal du lointain", soit, tout comme "Sehnsucht", "yearning", "saudade" ou "cam hoai" en vietnamien, intraduisible.
(p. 102)
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Ni mère ni épouse, je m'échinais à être une trouveuse de la littérature sans adhérer à aucune chapelle. Ermite, je déjantais à force de faire le vide autour de moi.
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