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Critiques de Lionel Davoust (397)
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Port d'âmes

Avant que vous ne vous posiez la question, je vais être clair : oui j'ai mis 4 étoiles à ce roman et oui, il m'a pourtant un peu déçu.



La note se veut intellectuelle : les qualités du roman et de la plume de Lionel Davoust sont évidentes, et l'histoire excellente. La déception est simplement liée au fait que j'ai tellement envie d'en apprendre plus sur l'Empire d'Asreth, que j'avais découvert dans La Volonté du Dragon et La Route de la Conquête !!



Ici nous sommes des millénaires après la chute de l'Empire, dans une civilisation qui est née après les Ages Sombres et qui oscille entre Ancien Régime et Lumières. L'Histoire se répète, un peu comme dans le fabuleux Un Cantique pour Leibowitz ou le cycle de Corlay. Nous sommes à Aniagrad, une ville franche dont le gouvernement et la crapulerie rappellent Wastburg. Rhuys, un brave jeune noble déshérité qui a payé la dette de sa famille par huit ans de service dans la Marine, va tenter de retrouver son rang et son honneur. Mais il va en fait plonger sans un sac de vipères et se faire coincer de tous côtés par les canailles et les autorités. Pourtant une lumière le maintiendra à flot dans la tempête : une femme étonnante qui vend ses souvenirs comme d'autres leur corps.



Les démêlées de Rhuys sont menées comme un thriller ; changez le décor pour les bas-fonds de Chicago et l'univers des trafiquants et ça passe aussi bien. Cela signifie aussi que la magie ne joue presque aucun rôle dans les péripéties. C'est plutôt une approche scientifique de la ressource énergétique si particulière d'Évanégyre qui est privilégiée, une tentative de redécouverte des légendaires connaissances de l'Empire d'Asreth (oui, on le mentionne quand même un peu). Une chose m'intrigue : j'étais intimement persuadé que l'Empire était mort en grande partie à cause de la raréfaction de la dranaclase, cette roche source de puissance exploitable par magie ou science, un peu comme le pétrole pour nous. Mais apparemment il y en a encore à foison à l'époque de Rhuys. Comment la ressource minière s'est-elle reconstituée ? Mystère.



Rhuys m'a fait penser à FitzChevalerie de l'Assassin Royal, et il m'a fait un peu réagir pareil. Sa candeur, son honnêteté m'agaçait à la longue. Et je ne comprends toujours pas pourquoi un gars qui a dû vivre à la dure pendant huit années de servitude n'a pas développé un minimum de cynisme et de noirceur. Ses huit ans n'ont-ils été qu'un camp de vacances un peu sportif ? En tout cas Davoust est parti de l'hypothèse qu'ils n'ont même pas égratigné le bloc de droiture qu'il représente. En fait cette hypothèse est absolument indispensable pour le développement. Il devait partir de cet état pour se prendre dans la tronche toutes les horreurs, les mensonges et les tromperies d'Aniagrad, y survivre et commencer, lentement, à réagir au diapason tout en faisant attention à ne pas se perdre dans le processus. C'est mené avec classe. Avec classe mais avec des longueurs, en tout cas c'est mon ressenti. L'essentiel de l'ouvrage est basée sur le point de vue de Rhuys (donc le plus pur et gentil de tous, dommage) et l'on passe énormément de temps à plonger dans ses introspections. C'était trop pour moi et j'avoue avoir lu certains passages en diagonale afin de retrouver l'action.

Et pourtant je comprends la aussi la nécessité de ces longues introspections, car la plus grande évolution qu'évoque le livre est intérieure. Ce roman, c'est avant tout une histoire d'amour absolu et paradoxale. C'est Rhuys qui est fou de sa Vendeuse d'âme, qui lui donnerait tout de son propre être et qui va en fait lui prendre tout. Et c'est la Vendeuse qui estime que l'originalité de sa personne nécessite de ne se lier avec personne… et qui donnera pourtant tout à Rhuys. Les Transferts de souvenirs impactent Rhuys bien plus profondément que les malveillances des canailles. Il doit les apprivoiser, les faire vivre en lui. C'est une deuxième personnalité à qui il ouvre la porte de son esprit. C'est un thème qu'on n'a pas l'habitude de voir en fantasy. Cela donne des personnages très ciselés. Michel-Ange n'aurait pas fait mieux.



Un beau roman avec plusieurs rythmes, auquel j'aurais pu enlever une bonne centaine de pages. Mais l'Empire d'Asreth, dont les mânes planent de façon si évanescente pour se solidifier vers la fin ? Qu'en-est-il de lui ? Comment est-il né ? de quoi est-il mort ? Qu'étaient les Dragons ? J'aimerais tellement que Lionel Davoust lui consacre sa prochaine trilogie attendue pour 2017!

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Les questions dangereuses

Foutrepanse !!



Qui aurait cru qu’au-delà de l’univers d’Évanégyre existait un monde davoustien uchroniquement truculent et indiciblement lovecraftien ?

Nous voilà touriste d’un 17ème siècle où la question tue mieux que le boulet, si bien que le bouquin a remplacé le poignard dans le fourreau du guerrier et qu’un philosophe est un aventurier de l’extrême. C’est que le cerveau de l’humain est ainsi fait qu’il ne supporte pas le vide provoqué par une question dont il ignore la réponse.



Nous assistons à l’enquête menée par le mancequetaire de la Meulière pour découvrir qui a assassiné le docteur Lacanne (nenni ! le Cluedo est hors de cause). Le soldat enchaine les duels dignes d’un logicien féru du magasine Jeux et Stratégie et qui auraient perturbé Cardan et Tartaglia. Et là… paf ! comme aurait déclamé De Funès, l’horreur qui sommeille derrière l’indicible chose tapie dans la cité affreusement dégoulinante débaroule dans le décor comme un raturage sur le télécran. Ma che cosa ? L’on soupçonne que l’auteur, épuisé par une terrible semaine d’ineffable traduction, a trop mélangé la Suze et la cigarette électronique et que son esprit inconscient a activé un mode « urgence » qui a abouti à cette novella (je suis sûr qu’en recouvrant ses esprits, l’auteur s’est demandé qui avait écrit ça).



Blague à part, c’est carrément poilant, bourré de références, animé et délirant. Môssieur Davoust, on en redemande (mais pas dans Évanégyre hein, ça c’est sérieux).



Et l’édition de poche associe le récit à un autre « duel » : une interview de l’auteur par le sieur Nicolas Barret. Et là, je ferais une remarque : l’interview passe la novella aux rayons X et en casse quand même un peu la magie, prive un peu le lecteur de cette partie de lui qu’il avait mis dans le texte (notion d’ailleurs abordée dans l’interview) pour imposer la vision de son auteur. Et c’est un poil dommage.



Mais on va faire comme si je n’avais rien dit car, voyez-vous, ça fait presque un an que je me suis fait dédicacer Le Verrou du Fleuve et je ne l’ai pas encore commencé, ce qui mériterait une Question assassine de la part de de la Meulière.

Mais ça ne va plus tarder maintenant.

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Comment écrire de la fiction ?

Lionel Davoust est spécialiste de l’initiation à l’art de l’écriture. Il anime régulièrement des ateliers. Il est l’un des membres du trio de la série Procrastination, avec Mélanie Fazi et Estelle Faye (cette dernière ayant remplacé Laurent Genefort. On peut trouver cette série sur le site Elbakin.net par exemple). Et à présent, il publie un livre sur le sujet.



Je dois avouer que le début me déstabilise. Je n’arrive pas à capter clairement des phrases plutôt abstraites, étayées par des références à des auteurs que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam (c’est sûr, Lionel Davoust lit de tout). Mais une certaine compréhension finit par en émerger. Par exemple si on a une idée, il faut l’attraper, la saucissonner sur une chaise, lui balancer l’intense lumière d’une lampe dans la face et lui tirer les vers du nez. Autre chose : il faut s’allonger sur son divan et se psychanalyser ; bien saisir ce que l’on aime, ce qui nous anime, en bref apprendre à se connaître.



Puis les choses s’améliorent. L’auteur utilise des petits dessins et fait acte d’humour rafraichissant (seule la première trilogie Star Wars fait partie de l’orthodoxie !). Surtout, il se met à mon niveau avec des exemples variés et éclairants. Je tiens d’ailleurs à remercier ses deux figurants Jean-Eudes et Ultrogothe (non, ce n’est pas le dernier ennemi en date de Goldorak) qui ont dû subir les diverses scénettes mises en scène par Davoust. Les techniques évoquées sont plus accessibles aussi, surtout celles concernant le point de vue et le temps de la narration (notions qui m’avaient déjà marquées dans les livres d’Orson Scott Card sur le même sujet).

J’apprécie la clarté de la définition d’une histoire : des gens intéressants, qui veulent quelque chose d’important, et c’est compliqué. L’auteur détaille mais c’est impressionnant de voir à quel point cette courte phrase résume bien. L’idée forte est que toute histoire se base sur des conflits, mettant en scène des volontés qui parfois se rentrent dedans de face et parfois vont dans des directions presque parallèles mais pas tout à fait, entrainant des frictions. Bref, un monde de Bisounours crée peu d’histoires (quoique).



Il m’est arrivé de faire des tentatives de gribouilles de nouvelles. Je retrouve dans ce livre tous les affres par lesquelles je suis passé, et bien pire. En particulier le fait que l’histoire finit par avoir sa propre volonté que l’auteur n’arrive pas à plier, sauf à pourrir son récit. Qu’il faut faire des concessions, se faire diplomate avec ses personnages. Une histoire, c’est un monstre de Frankenstein. « Je t’ai créé ! Tu me dois la vie ! Tu dois m’obéir ! » ben ça marche pas.

Tu as un début, mais tu ne sais pas quoi en faire. Argh ! Tu as un début, une fin, et un passage obligé, mais tu ne sais pas comment relier le tout. Re-argh ! Lionel Davoust dit « c’est normal. Ne vous inquiétez pas, on passe tous par là ».



La solution, finalement, c’est le travail. Écrire c’est bosser, le plus régulièrement possible. C’est ne pas se décourager. C’est aussi se faire plaisir, satisfaire son projet. L’auteur insiste beaucoup sur le fait que chaque personne a sa propre voix. Qu’il ne faut a priori rien s’interdire surtout si on le sent dans les tripes. Il apporte des techniques, mais laisse ouverte toutes les portes.



Je termine par une remarque à l’intention des auteurs : n’attendez pas la page 100 pour vous décider à décrire le physique des personnages. Je cherche toujours à me faire mon cinoche dans ma tête et je dois incarner immédiatement vos personnages. Si la description se fait désirer, je fais ma sauce. Si vous me dites tardivement que votre héroïne est blonde aux cheveux longs et que je me la suis imaginée brune coupe courte, votre portrait part directement à la poubelle de mon esprit.

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Imaginales 2016 : Anthologie Fées et Automates

L’anthologie 2016 du festival des Imaginales voulait audacieusement associer deux archétypes qui se croisent rarement. Les auteurs, essentiellement francophones, avaient pour cahier des charges d’écrire des nouvelles faisant intervenir des fées et des automates. En dehors de cela, c’était open bar.

Des fées et des automates, ben, voyons ! Comme si ces archétypes avaient l’habitude de se côtoyer tous les jours dans l’imaginaire. Sacré gageure !

Eh bien je l’avoue, je suis époustouflé par le talent mis en œuvre par les plumes qui ont participé à l’exercice. A des degrés divers, j’ai vraiment apprécié 90% de ce que j’ai lu. La variété des ambiances, des tons, des époques, l’imagination employée pour cuisiner les thèmes ont ajouté au sentiment de partir pour un long voyage débridé aux multiples escales. Je ne connaissais pas 70% des auteurs et je peux vous dire que ma PAL virtuelle est à l’agonie.



Mon top 3 (dans l’ordre ou le désordre) comprend :

* Fabien Cerutti (Le crépuscule et l’aube) qui nous fait assister, dans son univers uchronique médiéval du Bâtard de Kosigan, à la lutte de Faërie contre l’Humanité. Une interprétation fusionnelle fée/automate. C’est épique, rythmé en crescendo avec succession de plus en plus rapide des points de vue. Je n’ai pas encore lu les romans, mais là je n’ai plus le choix.

* Adrien Tomas (L’énergie du désespoir) Cette fois une relation déséquilibrée entre automates et fées, mais surtout une vision péjorative de l’humanité qui utilise à outrance toutes les ressources dont elle peut s’emparer pour favoriser son bien-être. L’inventivité de ce récit m’a emporté.

* Gabriel Katz (Magie de Noël) qui nous prouve qu’il sait décrire un monde dystopique dans lequel je n’aimerais pas vivre mais dont il n’est pas improbable qu’il advienne dans un futur proche. Les automates ressemblent plus à l’image traditionnelle. La fée… aaah non, je ne dirai rien. Ça fait partie du coup de théâtre de la fin.



Juste en dessous, dépassé à peine d’une courte tête, il y a un peloton de très bonnes nouvelles. Je citerai Pierre Gaulon (Le tour de Vanderville) qui, dans une foire du fin fond du limousin, met face à face deux numéros réussi d’imitations de comportement humain. Mécanique ou magique ? Pierre Bordage (AuTOMate) qui détourne un peu le cahier des charges pour nous parler, avec son talent habituel, de la médiocrité humaine dans notre quotidien. Et bien sûr Lionel Davoust (Le plateau des chimères) et sa nouvelle pierre de conquête de l’empire d’Asreth dans l’univers d’Evanégyre, où comme dans La Volonté du Dragon, c’est la ruse qui va être victorieuse.



J’avoue n’avoir été déçu que par Nabil Ouali (Al’ankabût) qui, malgré sa belle plume, oublie de parler du contexte de son récit, ce qui m’a empêché de comprendre ce qu’il se passait et pourquoi.



L’anthologie présente donc une grande variété d’ambiances et d’interprétations des fées et des automates : de la vision traditionnelle au détournement de concept, de la fusion/collaboration à l’affrontement/esclavage. La plupart du temps, l’humanité apporte ce qu’il y a de MAL dans le récit.



Je remercie boudicca dont la critique a attiré mon attention, et Lionel Davoust qui, en me twittant que le recueil contenait une nouvelle sur Asreth, a fini de me convaincre. Et c’était carrément une bonne idée.

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La route de la conquête

Évanégyre ? Stannir Korvosa ? Pas même l’expression de la « Volonté du Dragon » ne vous dit quoi que ce soit ? C’est donc qu’il est grand temps pour vous de vous plonger dans le monde fantasy créé par Lionel Davoust et dont tous les textes composant le recueil La Route de la Conquête font pleinement partie.





Grâce aux éditions Critic, Lionel Davoust propose, avec La Route de la Conquête, un recueil cohérent composé d’une novella inédite éponyme accompagnée de cinq nouvelles dont une totalement inédite. Nous pourrions d’ores et déjà noter que plusieurs nouvelles sont donc reprises d’anciennes anthologies ou revues, mais l’intérêt est ici de les retrouver dans un ensemble cohérent, d’autant que nous n’avons pas toujours l’occasion de lire toutes les anthologies ou revues publiées.

Cette Route de la Conquête est parcourue par Stannir Korvosa, généralissime de la VIIe Légion, et son aide de camp Méléanth Vascay. Comme dans La Volonté du Dragon (nous sommes une trentaine d’années plus tard et Stannir s’est bien assagie ; pour le détail, nous sommes désormais au cours de l’année 388), nous assistons à la conquête d’un nouveau territoire par l’Empire d’Asreth. À l’assaut de la grande steppe qui s’étend devant elle, l’Océan Vert, la Généralissime fait le lien entre ses multiples conquêtes précédentes, son expérience acquise en quelque sorte, et le défi déconcertant qui s’offre à elle, la rencontre avec un peuple soudé à l’environnement qui le nourrit, tribus qui n’ont aucunement besoin d’un gouvernement. Lionel Davoust reprend très rapidement les fondamentaux de cet univers : la « Volonté du Dragon » au sens propre, celle de Dame Mordranth, l’Oracle-Dragon, en premier lieu, mais aussi et surtout l’alchimie utilisée par l’Empire d’Asreth pour assimiler la magie des lieux en une technologie très avancée, l’artech. Il s’agit bien sûr de questionner l’intérêt de la guerre, de la conquête à tout prix, face à des populations heureuses de vivre entre elles, qui ne cherchent pas à s’organiser plus que nécessaire. Le face-à-face est d’autant plus intéressant que, du côté asreth, nous avons non seulement le point de vue de Stannir Korvosa, mais également celui de son aide de camp qui est également bien développé, dans un parallèle volontairement déformant. Pour le reste, nous sommes quand même dans un roman court, une novelle, donc l’histoire va droit au but, en instillant quelques faits d’armes, mais l’occasion de trouver deux héroïnes au centre de l’intrigue est évidemment un plus non négligeable, entre une vieille combattante, expérimentée, presque aigrie, et une jeune va-t-en-guerre très motivée.



Nous enchaînons notre parcours dans le monde d’Évanégyre avec Au-delà des murs, nouvelle déjà parue dans Victimes et bourreaux, anthologie des Imaginales d’Épinal dirigée par Stéphanie Nicot (Mnémos, 2011). En nous plongeant dans la bataille des Brisants (237), quand l’armée d’Asreth fit face aux guerriers-mémoire du Hiéral, Lionel Davoust fait non seulement référence à une autre nouvelle publiée plus tôt et republiée dans ce même recueil, mais évoque aussi et surtout les chocs post-traumatiques que n’importe quelle guerre d’envergure occasionne chez les combattants ayant la chance/le malheur de revenir avec quelques souvenirs qu’ils aimeraient pouvoir refouler. La construction tendancieuse de cette nouvelle l’a rend d’autant plus appréciable.

Avec La Fin de l’histoire, parue initialement dans Mythologica n°1 (2013), nous suivons à nouveau le fil d’une conquête de l’Empire d’Asreth dans un décor très « forêt vierge ». L’expédition dans la forêt d’Isendra datant de 132 dans la chronologie de cet univers, nous faisons légèrement machine arrière pour prendre un autre exemple d’une assimilation possible de populations par l’avancée militaire ; c’est l’occasion d’aborder une autre facette du rouleau compresseur d’Asreth, puisque nous suivons notamment un agent de la Conservation, chargé normalement de collecter les traditions des peuples conquis, à la tradition souvent orale, pour en assurer la pérennité par l’écrit. Bien sûr, quand les enjeux de ladite conservation des traditions divergent entre l’armée conquérante et le peuple à conquérir, on tranche souvent dans le vif pour régler la question.

Bataille pour un souvenir, nouvelle phare de l’auteur dans Identités, anthologie dirigée par Lucie Chenu (Glyphe, 2009), nous ramène à la bataille des Brisants entre Asreth et les guerriers-mémoire du Hiéral. Si cette histoire a valu à l’auteur d’être finaliste de plusieurs prix spécialisés, ce n’est pas pour rien. En effet, nous suivons pour une fois le point de vue des conquis jetant leurs dernières forces dans la bataille pour faire reculer ce damné Empire d’Asreth qui veut tout conquérir. Or, les guerriers-mémoire du Hiéral ont une particularité martiale d’envergure : ils peuvent, en quelque sorte, brûler leurs souvenirs personnels pour acquérir, momentanément, un regain de pouvoir. Cette magie personnalisée est mise en lumière par le court récit mémoriel de souvenirs touchants au moment où le guerrier l’invoque pour se défendre ou attaquer son adversaire. Lionel Davoust sert ici un récit puissant et révélant un twist surprenant, même s’il n’est que peu de choses dans l’histoire d’Évanégyre (d’autant plus surprenant que l’événement est repris tel quel dans Au-delà des murs, sans pour autant signaler cette révélation. Astucieux, donc, en plus d’être bien écrit.

Ces quatre premiers récits mettent vraiment en valeur le personnage du garde en armure, dont l’élite compose les Valedànay. Et c’est sûrement d’aborder la couverture, qui attire forcément l’œil. Penchant plutôt vers l’univers des jeux de rôle et des jeux vidéo, elle mêle astucieusement les indications présentes dans les récits du recueil et l’influence romaine constamment présente dans l’Empire d’Asreth. Elle est maquettée par Ronan Toulhoat (dessinateur des univers de Block 109 et de Chaos Team, également illustrateur sur Les aventures de Lasser) et illustrée par François Baranger (également auteur de Dominium Mundi). Certes, elle n’est peut-être pas d’une originalité folle, mais elle m’a marquée dès que je l’ai vue.



Parmi ces nouvelles republiées, Lionel Davoust nous a quand même sorti un récit inédit, Le Guerrier au bord de la glace. L’auteur va plus loin, ce coup-ci, puisque plusieurs siècles après les conquêtes déjà évoquées, il développe la technologie utilisée par les armures de l’Empire d’Asreth et leur adjoint quantité d’améliorations pour en faire de véritables armes de destruction massive. Ailes, puissance de feu, hachoir démesuré et appendices captateurs d’énergie, tout cela est sans compter l’ajout non négligeable d’une « Conscience » accompagnant le soldat en armure et s’adaptant à son esprit. C’est donc ici l’interaction entre l’homme et sa machine animée qui capte l’attention, davantage que le contexte général, la Seconde Guerre de l’Évangélyre, le début des Âges Sombres marquée par la rébellion au sein de l’Empire d’Asreth. On croise enfin un Dragon en action, on suit une nouvelle bataille d’envergure, mais c’est surtout le cheminement du simple soldat engoncé dans sa technologie qui le dépasse, mais qui est son seul abri, qui prime. La fin m’a franchement laissé de marbre, car j’attendais un dénouement plus actif ; un autre récit serait utile en guise de suite ou de complément d’information.

Enfin, Lionel Davoust clôt son recueil avec Quelques grammes d’oubli sur la neige, que vous aviez déjà pu lire dans Magiciennes et sorciers, anthologie des Imaginales d’Épinal dirigée par Stéphanie Nicot (Mnémos, 2010). Si la chronologie reste très vague sur ce récit, c’est parce que nous sommes désormais dans un monde bien plus reclus, bien plus engoncé dans des traditions minimalistes et également soumis à des irrégularités au sein même de son environnement. C’est l’occasion de remettre le monde d’Évanégyre à plat, de passer à un univers bien plus médiéval-fantastique, en tout cas dans mon imaginaire personnel. C’est une belle histoire, entre sorcellerie et redécouverte du passé, mais là encore la fin me gêne et m’interroge sur l’enjeu soulevé par l’intrigue. Les clés de compréhension sont tout de même suffisamment livrées pour replacer ce récit dans le bon ordre chronologique, mais on peut comprendre que la lecture de cette nouvelle seule puisse troubler.





Avec l’univers d’Évanégyre, voilà donc un monde de fantasy bien parti pour durer et qui maintient coûte que coûte sa cohérence en rassemblant des textes qu’il est bien plus simple de comprendre et d’appréhender sous cette forme. Même si l’agencement des récits au niveau chronologique peut être étonnant, il est indéniable que les lire ainsi les rend beaucoup plus intelligible entre eux, notamment le tout dernier. Inconsciemment, des ponts se créent entre les différents textes et les quelques indications de l’auteur en annexes sont forcément les bienvenues. Évidemment, un grand merci aux éditions Critic pour m’avoir fait parvenir ce recueil en avance, il est sorti le 21 août, alors n’hésitez pas à découvrir avec lui l’auteur très agréable qu’est Lionel Davoust. Et ce, d’autant plus qu’on nous annonce en fin de volume la sortie dans le même univers prévue pour le mois d’août 2015 d’un nouvel opus : Port d’âmes !



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Léviathan, tome 1 : La chute

Plongée difficile dans les eaux froides de l’antarctique, d’autant que pour y arriver, il faut passer par la laborieuse mise en place des personnages, les identifier dans leur contexte, et la chose est loin d’être facile tant ils sont passés maître dans l’art de « l’accommodat », une sorte de déguisement intégral incluant le mental.

Donc on fait connaissance avec les personnages, une poignée de chercheurs prêts à partir en expédition dans l’Antarctique, dont l’un est phobique de la mer. On pressent qu’il est un pivot du récit. Il est marié, il a un petit garçon et une soeur adoptive à problèmes. Tout ce petit monde semble ligué pour l’empêcher d’aller au devant de ses peurs.

En parallèle, des scènes dignes d’un film d’action tiré d’une bande dessinée, avec utilisation de super pouvoirs dont on devine qu’ils sont issus d’une formation qui n’a rien à voir avec la section sportive de l’association culturelle du quartier.

Et il faut parcourir un certain nombre de pages pour entrer dans la ronde. Et puis la magie opère, les personnages principaux sont bien identifiés et leurs forces et leurs faiblesses leur confèrent un pouvoir d’attraction certain.

Il existe suffisamment de non-dits, peu à peu révélés pour éveiller l’intérêt et l’envie d’en savoir plus sur le fonctionnement de cette société au sein duquel s’affrontent deux forces, la Main Droite et la Main Gauche, la Main Droite revendiquant des fondements religieux et fonctionnant sur le mode de la dictature et la Main Gauche, athée mais puisant dans les forces occultes l’essentiel de ses bases.

Le récit devient tout simplement passionnant quand Michael, notre phobique de la mer, (il a perdu ses parents dans les profondeurs de l’océan lors d’un naufrage de ferry) prend le départ pour l’expédition scientifique. Difficile à ce moment là de cerner les bons et les méchants, et quels enjeux se cachent derrière cette expédition : il faudra que des mystères se révèlent pour y voir plus clair et ça sera sans doute pour le deuxième tome de la trilogie.

L’épisode arctique est superbe : paysages, animaux, la nature est un personnage à part entière, d’une puissance immense, avec un pouvoir de vie et de mort sur les chétifs humains.



L’écriture est à la hauteur. J’ai tout de même croisé trois phrases incompréhensibles, sans réelle faute de grammaire ou d’orthographe, qui relèvent sans doute d’un problème de mise en page :



« Julius et elle avaient des relations de maître à apprentie, mais elles entretenaient toujours été conflictuelles » (p178)



« Car que Khépri, le gardien initiateur de l’alchimie de la Main Gauche auquel Julius était fidèle, lui vienne en aide s’il se retrouvait seul entre deux feux. » (p228)



et une troisième du même acabit. Arrêt immédiat de la magie et relecture pour essayer de comprendre, en vain!



La construction est habile : particulièrement sur les scènes finales, intenses, et faites de paragraphes alternés de plus en plus courts, ménageant un suspens soutenu.



En fin de premier tome, donc, les forces sont en place, les personnages ont su se faire aimer (ou détester : tout est là pour céder à l’attrait d’une suite. C’est exactement ce qui s’était passé pour Dominium mundi de François Baranger. J’avais bien cru ne pas venir à bout du premier tome et m’étais finalement précipité sur le deuxième.


Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Les Dieux sauvages, tome 1 : La messagère du ..

Aaah ! Je viens de prendre ma dose annuelle d’Évanégyre. Bon sang que ça fait du bien C’est de la bonne came, cette année encore.



Pourtant rentrer dans ce pavé que constitue le premier tome d’une grosse trilogie ne s’est pas fait si facilement. L’action se passe bien après que l’empire d’Asreth se soit effondré. Une civilisation de type médiévale réussit à bourgeonner dans ce paysage parcouru d’énergie « magique » incontrôlée. Le principe de l’éternel recommencement est à l’œuvre, selon la même idée qui guidait le cycle de Corlay de Richard Cowper ou Un Cantique pour Leibowitz de Walter M. Miller. Dans ce décor, le royaume de Rhovelle est soumis à des déchirements politiques internes au moment même où une menace monstrueuse et létale montre le bout de son nez au-delà des montagnes (pour comprendre les origines de ce bazar, il est utile d’avoir lu La Route de la Conquête, même si ce n’est pas indispensable).

Un royaume déchiré politiquement gouverné par un Conseil, une menace monstrueuse qui vient du nord derrière un mur de montagne, ça commence à ressembler à quelque chose de connu. Et alors ? Ce n’est pas une honte. C’est Robert Silverberg qui disait que l’être humain n’est pas fait pour inventer quelque chose ab initio (cf ; Bifrost n°49). Même inconsciemment, un auteur est obligé de s’inspirer de ce qu’il a vu, lu et entendu dans sa vie. L’important, c’est la variation qu’il va proposer par rapport au thème principal.



Et justement la partie construction du royaume n’apporte pas de note vraiment originale. Je me suis demandé pourquoi Rhovelle disposait d’un ost alors qu’elle n’a aucun ennemi extérieur à affronter. Les menaces « magiques » internes au royaume ne sont pas du genre à clamer leur défi sur un champ de bataille. L’Église est construite pour être détestée par le lecteur (cela s’explique au vu du contexte). Les conflits de la cour n’ont pas une origine digne d’une tragédie mais semblent plutôt naître de petites mesquineries, de petits riens. J’ai trouvé ces passages de la cour longs et manquant de fougue, surtout ceux consacrés à Juhel.

Par contraste, j’ai éprouvé beaucoup de plaisir sur les chapitres consacrés à notre Messagère du Ciel. Mériane établit une relation avec son Dieu très jouissive pour un lecteur qui n’est pas dévot. Il n’est pas question de soumission totale, de transe illuminée devant la Lumière du Créateur. Au contraire c’est comme si Savonarole venait hanter l’esprit de Descartes ; cela donne lieu à des débats à l’ironie prononcée extrêmement réjouissants. Mériane établit le même genre de rapports amour/haine avec Léopol le soldat de Dieu. Là aussi les échanges valent un bon match Borg-Mc Enroe. Autre duo explosif : Chunsène, la sœur en esprit d’Arya Stark, et la « parfaite » Néhyr. Lionel Davoust est un dialoguiste en or.



Les dieux qui mènent le jeu m’intriguent beaucoup ; je n’arrête pas de conjecturer à leur sujet. Il faut dire qu’ils représentent un violent changement de paradigme par rapport aux récits consacrés à l’empire d’Asreth. En ce temps-là, la vision dominante du monde était scientifique ; on analysait, reproduisait, modélisait, maîtrisait. Les dieux étaient confinés. Ils n’étaient pas nécessaires à la compréhension du monde par l’empire. Ici ce sont les principaux joueurs. Pas seulement par l’intermédiaire de leurs hérauts : ils s’expriment directement, prétendent avoir toujours existé, avoir décidé de la fin de l’empire.

Eh bien j’ai des doutes. Je me demande vraiment si ces « dieux » n’ont pas été en quelque sorte conçus par les déflagrations dignes d’une guerre atomique qui ont provoqué la fin d’Asreth, si ce ne sont pas eux les « dupes ». L’alternative m’obligerait à admettre que la créatrice « divine » de l’empire était une sorte d’ange déchu du panthéon d’Évanégyre. Et je digèrerais mal cette information, car une des forces de cet univers est, à mon avis, la vision très occidentale moderne que porte l’homme d’Asreth sur son monde.



Lorsqu’on approche de la fin, on se rend compte à quel point Lionel Davoust est un écrivain architecte ; c’est-à-dire qu’il maîtrise son récit de bout en bout, que la conséquence de chaque acte était prévue, qu’à aucun moment son histoire ne lui a échappé pour prendre son propre envol. Tellement d’éléments se mettent alors en place. De nombreux passages qui m’avaient semblé ennuyeux et sans réelle conséquence prennent du sens. C’est un gène qu’il partage avec Asimov.

Mais l’auteur est-il vraiment architecte ? Je l’imagine en fait plutôt comme possédant les conditions aux limites de son récit ‒ d’où il part et où il doit arriver ‒ mais sans avoir l’idée précise du chemin qu’il va lui falloir tailler à coup de serpe dans la jungle inconnue pour relier ses balises. Un peu comme un scientifique qui écrit un article : ceux-ci semblent toujours prétendre que l’auteur a suivi un chemin logique et déterministe, avançant pas à pas inéluctablement grâce à la raison, alors qu’en fait il a passé son temps à affronter la désillusion, à pleurnicher à genoux qu’il n’y arriverait jamais. La présentation n’est pas la vérité, mais elle fait de l’effet sur le lecteur.



Enfin, est-il nécessaire d’ajouter que Lionel Davoust est un maître de la description des batailles ? Son roman La Volonté du Dragon (toujours dans Évanégyre) suffisait à le prouver. On retrouve ici la même efficacité, la même maîtrise de la tactique qui n’oublie pas d’osciller entre défaite totale et victoire définitive en multipliant les points de vue.



Même si je continue à penser qu’on aurait gagné à faire un peu plus court, j’applaudis la qualité du récit que j’ai lu, digne de l’univers que Lionel Davoust ne cesse de développer par petite touche, comme un peintre impressionniste. La suite ne tardera pas et c’est tant mieux. J’espère que les prophéties seront mises en défaut et que l’on aura droit à une palanquée de surprises.

Car sur Évanégyre, même les dieux peuvent être surpris.

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Port d'âmes

Pourquoi je l’ai choisi:



J’ai trouvé la couverture magnifique, et quand on lit ce roman, on s’aperçoit qu’elle colle parfaitement à l’histoire. Bravo aux éditions Folio, pour cette très jolie représentation! Chaque fois que je la regardais, je partais dans un voyage brumeux…

Ce que j’ai ressenti:… un souffle enchanteur…



Aniagrad , ville marchande par excellence. Tout se négocie des plus infâmes talents aux plus retorses pouvoirs, de la plus grande douceur à la plus pure des intentions, cette ville portuaire a une vie propre et un fonctionnement qui étourdissent les curieux. Doté d’une philosophie et d’une Administration qui régissent son fonctionnement, elle exerce une forte attraction sur les voyageurs qui arpentent ses ruelles sombres. Sans compter que la ville cache des Anges. Une attraction de plus…En somme, une ville aux mille dangers pour qui, ne respecte ses règles…



« L’existence aurait probablement été plus simple avec des ailes. »



Du plus petit mensonge au plus audacieux stratagème, notre héros a de quoi trembler pour sa vie. Manipulations, jeux de pouvoirs, investissements et politique, ce jeune homme en quête d’identité et de justice, va devoir jouer très serré avec tous ses Prédateurs qui rôdent et tiennent la main mise sur sa bourse. J’ai beaucoup apprécié l’évolution de Ruys, de sa naïveté il en ressort grandit, grâce à son idéalisme. C’est un héros, plaisant à suivre, car au centre de toutes sortes d’attentions, mais aussi en proie à ces plus intimes épreuves personnelles. Entre ombres et lumière, désir et réalité, ce héros tient toute notre attention grâce à cette imbrication de faits et d’émotions.





« La liberté livrée à elle-même finit toujours par se dévorer toute seule. »



Port d’âmes, rien que le titre emmène de la poésie, une ouverture vers la beauté et une énigmatique quête de l’esprit…Et c’est bien là, ce que je retiens essentiellement de cette lecture: une enivrante plongée nébuleuse et vaporeuse que j’ai adoré emprunter avec la Vendeuse et Rhuys, dans cet échange très particulier. Tout le charme et le mystère du Transfert, m’ont laissé une forte impression, j’étais friande de tous ses fragments déposés dans ses lignes, voulant aussi les adopter, les faire miens, pour mieux vous convaincre de vous laisser guider par cette bien trop généreuse offre…Valeur inestimable et instant suspendu, on est presque du domaine de la méditation, comme une parenthèse de rêverie au milieu du chaos et de la corruption, c’est juste saisissant, ces petites touches de magie, cette douceur du souvenir, cette poétique vibration…



Peut-être était-ce là la première leçon du Transfert: chaque histoire était unique.



Entre l’effet dynamique de ses jeux de pouvoirs, et cette ouverture mystique sur une nouvelle méthode d’échanges, Port d’âmes possède beaucoup d’atouts pour porter durant ses 600 pages, toute notre âme d’enfant en soif d’aventures et de nouveaux horizons, grâce à la plume très inspirée de cet auteur…



« J’ai parlé à la nuit et la nuit m’a répondu. »



Ma note Plaisir de Lecture 8/10


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L'impassible Armada

J'ai eu un peu de mal à m'immerger dans l'univers créé par Lionel Davoust. J'ai trouvé cette novella déconcertante.



L'histoire est racontée par Davenport membre de l'équipage de l'Awesome Pride. Le navire a été envoyé dans le nord à la poursuite de pirates qui ont enlevé une lady.



Ce « nord » est hors des cartes maritimes de l'Empire et aucune expédition n'en est jamais revenue. Des dragons ? Non, les navires sont piégés dans une glace vivante qui chante et exerce une attirance fatale auprès des membres des équipages. Le capitaine de l'Awesome Pride ne fait pas exception, on suit en parallèle son journal de bord de plus en plus chaotique…



Davenport a une idée qui le titille. A-t-il une chance de faire taire la glace ? Quand tout lien avec la civilisation est perdu c'est la force qui fait l'union !











Challenge mauvais genres 2022

Challenge duo d'auteurs SFFF 2022
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L'impassible Armada

Sabre de sarment, sabord enrhumé et bitte en bois !

J’avais oublié que Lionel Davoust écrivait si bien.

Et ben tiens, prends ça dans tes dents jaunies et pleure de plaisir.



En quelques pages, l’auteur construit un monde structuré, peut-être plat, au bord de la folie, une tapisserie avec des fils de chaos dedans, un contrepoint de notre Âge Classique – dont les noms géographiques résonnent de ressemblance avec les nôtres – de pirates et corsaires égarés et empêtrés dans une « glace » aussi immobile qu’au zéro absolu et changeant pourtant de phase sous l’effet du rayonnement lunaire.

Empêtrés et appelés par les chants de sirènes de l’impassibilité finale, destin de l’univers en expansion, les chants d’une vérité clamant l’inutilité et l’incongruité de tout. Chaos disais-je auparavant ? Plutôt son antonyme, l’essence d’un ordre extrême et définitivement figé.



Et malgré cette agression de leur environnement, pirates et corsaires persistent dans leurs objectifs surannés de s’entredévorer, afin de satisfaire à l’honneur de la nation, à la force de la morale, à la violence de la liberté ou, plus prosaïquement, pour se changer les idées.

Mais les matelots Davenport, Blavious et Rupert ont compris que tout cela ne les mènerait autre part que dans les bras gelés de la glace. Et ils tentent d’imaginer des contre mesures.



De l’action hollywoodienne, de la tragi-comédie où l’humour et le sarcasme pointent leur nez derrière le vocabulaire inventif des marins de bas rang. Un texte entrecoupé d’extraits presque surréalistes du carnet de bord, à l’écriture manuscrite et tâchés d’encre et de ratures.

De la jouissance à lire, même si quelque le propos est peu désespéré ou désespérant.

J’embarque à nouveau avec Lionel Davoust quand il veut. Ô Capitaine, mon Capitaine !

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Les questions dangereuses

Il y a certains auteurs qu’on suit constamment et qu’on prend toujours plaisir à découvrir ou redécouvrir un nouveau texte. C’est le cas ici de Lionel Davoust qui, en plus de sa vaste saga d’Évanégyre chez les éditions Critic et de sa trilogie Léviathan chez les éditions Don Quichotte, a droit à la réédition régulière de certaines nouvelles ou novellas de son cru par les éditions ActuSF, et ce dans différents formats.



Sors ton libram et bats-toi !

Thésard de la Meulière est un mancequetaire, un officier au service de son roi, Louis-Charles XXVI, en cette pluvieuse année 1637. En un monde où seuls les combats spirituels sont tolérables, il se bat à l’aide de son intellect et de son libram, recueil qui ne quitte jamais son côté. Or, à l’occasion d’une cérémonie officielle, Lacanne, médecin de la reine de France Léonie Lebensfreude de Légatine-Labarre, est assassiné, mais, diantre, non par une attaque cérébral, mais bien à l’aide d’un projectile mécanique ! Outrage à la cour de France ! Sans trop tenir compte des conseils du vieux comte Batz d’Arctangente, La Meulière s’échine à trouver le vil assassin qui a décidé de s’en prendre à la cour, et ce par des moyens si ignobles…



Un fond de Dumas…

Les Questions dangereuses est une novella de fantasy. Rappelons qu’une novella est une longue nouvelle (souvent est considérée comme nouvelle un récit de 150 à 15000 mots et une novella entre 15000 et 30000 mots ; ici, à vue de nez, nous sommes autour des 18000-20000 mots) et qu’elle met en valeur une courte histoire avec de fait peu de personnages. Ce récit fut d’abord commandé et publié à l’occasion de l’anthologie Dimensions de capes et d’esprit, volume 2, dirigée par Éric Boissau chez les éditions Rivière Blanche. Le thème central est ainsi de trouver de l’imaginaire (science-fiction, fantasy fantastique) dans les aventures classiques de capes et d’épée. Même si nous allons voir par la suite l’intérêt de ces Questions dangereuses, le lecteur peut se demander pourquoi les éditions ActuSF ont décidé de publier en poche une petite novella dans leur collection Hélios où les places semblent déjà chères pour caser un certain nombre de romans par an. C’est en tout cas l’occasion de plonger davantage dans le fonctionnement d’un auteur, déjà en (re)découvrant un récit un peu passé sous les radars et surtout en lisant une (longue) interview de celui-ci qui détaille l’histoire des Questions dangereuses, mais également l’ensemble de son œuvre déjà parue et sa façon d’aborder l’écriture, le métier d’écrivain.



Le détournement made in Lionel Davoust

Dans Les Questions dangereuses, l’auteur compte, dès le départ, jouer un jeu constant : détourner les références classiques du roman de cape et d’épée et celles des littératures de l’imaginaire en général. Ainsi, tout au long du récit, il nous gratifie d’incontestables jeux de mots bien trouvés et de montages littéraires, à commencer par les noms des personnages qui parodient plusieurs personnages historiques. Les scènes sont rehaussés d’un humour ravageur quand les duels à l’épée sont remplacés par des duels de devinettes, certes souvent très sérieuses, mais dont la gestuelle est amplifiée (le comique de geste ne fait jamais de mal). Évidemment, derrière cet habillage tout à fait charmant et très travaillé, c’est une magnifique métaphore du pouvoir des mots qui est mis en valeur. L’auteur va jusqu’au point qu’il croise à sa façon plusieurs mythologies au sein de cet hommage : des références à la culture classique moderne, à la philosophie ainsi qu’à la pop culture teintée d’esprit lovecraftien, notamment à la toute fin.



On ressort finalement de cette lecture avec deux sentiments distincts : celui de mieux comprendre et apprécier comment Lionel Davoust écrit et celui plus paradoxal qu’un texte peut être à la fois loufoque, déjanté et précis. Au point peut-être de donner envie d’écrire à son tour…



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Anthologie des Imaginales 2009 : Rois & Cap..

Je m’attaque enfin aux anthologies des Imaginales d’Épinal, régulières occasions de découvrir ou d’approfondir, par des nouvelles, les univers fantastiques imaginés par quelques-uns des meilleurs auteurs francophones en la matière. Stéphanie lance cette initiative pour les Imaginales 2009 avec le thème « Rois et capitaines », deux figures caractéristiques des récits de fantasy. Le but est ici de mettre en balance deux figures d’autorité et de commandement hiérarchique, les rois et les capitaines, et de considérer leurs interactions dans des univers de fantasy particulièrement divers au vu du sommaire proposé. La majorité des auteurs ont alors opté pour de la fantasy historique, soit comme grande inspiration soit comme véritable toile de fond pour leur nouvelle.



Jean-Philippe Jaworski, l’écrivain lorrain auréolé cette année-là du titre de « coup de cœur des Imaginales » et vainqueur du Prix Imaginales du roman francophone pour son premier roman Gagner la guerre, ouvre cette anthologie de bien belle façon en nous délivrant une nouvelle se déroulant dans le même univers que ce roman-ci et qui aurait pu également se situer dans son recueil Janua Vera. « Montefellòne » est la proie d’un siège dévastateur où se joue sûrement un moment important de la Guerre des Six-Duchés. L’issue vient amèrement conclure notre vision de la relation entre un jeune roi inconsidéré et son fidèle capitaine.

Rachel Tanner, quant à elle, tient à nous narrer l’histoire de « La Damoiselle et le roitelet », où elle s’inspire largement de la destinée de notre Pucelle nationale, Jeanne d’Arc, et de son cher roi, Charles VII, pour raconter une courte épopée guerrière pour son héroïne Catherine. C’est l’occasion pour elle de puiser dans sa connaissance historique du XVe siècle français tout en incorporant la difficile relation entre un roi faible et une capitaine courageuse.

Nous retrouvons ensuite le couple d’écrivains Claire et Robert Belmas, plus habitués à la science-fiction, misent fortement sur des inspirations celtiques pour nous plonger dans une Bretagne féérique mais violente, alors que le roi Artus est mort et que son royaume en proie aux pires tourments, tant guerriers que magiques. Par des chapitres très courts, nous suivons Florée qui, à la fleur de l’âge, fut violemment déflorée, et qui veut devenir capitanea sous l’enseignement du seigneur Bohor. Sa destinée semble alors la porter « Dans la main de l’orage ».

Maïa Mazaurette préfère tourner en ridicule la relation roi-capitaine dans « Sacre » où le très jeune roi Louis est continuellement accompagné de son capitaine Jones, alors qu’Avignon, défendue par sa mère Blanche de Castille, est assiégée par les Albigeois. Dans ce récit largement tendancieux, l’auteur nous narre la découverte du corps adolescent avec juste ce qu’il faut de pensées douteuses et de désirs inavoués. Elle maîtrise parfaitement son sujet et ses sous-entendus.

La glace qui chante, le froid qui prend aux tripes et le désespoir qui envahit esprits, Lionel Davoust opte pour un environnement hostile pour « L’impassible Armada ». Nous suivons une flotte en perdition face à des pirates tout aussi mal en point. L’amour de l’océan et de ses dangers conduit à des dérives meurtrières, mais belles avant tout, autant que le récit de Lionel Davoust.

Avec son décalage habituel, Catherine Dufour nous présente « Le Prince aux pucelles ». Atypique mais chevaleresque de temps en temps, celui-ci porte l’histoire à bout de bras, tout comme ses convictions. Que vaut la fadeur des plus belles entreprises devant la cruauté du quotidien ? C’est un petit peu le paradoxe de ce personnage censé être stéréotypé.

Thomas Day nous livre avec « La Reine sans nom » un récit mortifère, sombre et plutôt triste. L’écriture charismatique de l’auteur de L’Instinct de l’équarisseur et de Sept secondes pour devenir un aigle vaut toujours le détour évidemment, d’autant qu’il opte ici pour du concis, du « court mais probant ». C’est à la fois beau et pesant dès les premiers mots, rythmé et ciselé comme peu de novellistes savent le faire.

Armand Cabasson nous enjoint à suivre un chemin plus tortueux dans les steppes médiévales des peuples russes et ukrainiens. Devant l’assaut des Mongols, Mikhail se retrouve à battre la campagne pour rameuter des alliés, mais aussi pour se recentrer sur ses propres croyances, mises à mal par la situation dantesque et l’émergence d’un « Serpent-Bélier » bien mystérieux. Les religions locales et l’art de la guerre au Moyen Âge sont à l’honneur ici, dans cette longue nouvelle empreinte d’une violence sèche qui réduit la chute à un moment particulièrement rude mais tout aussi marquant.

Pierre Bordage, lui, nous emmène plutôt « Dans le cœur de l’Aaran » (ou plutôt Aaran, au vu de l’orthographe utilisée dans la nouvelle elle-même) au court du récit d’un vieux loup de mer au sujet d’une expédition à la recherche de « l’esgasse », créature fantastique aux pouvoirs bien étranges. Contre vents et marées, la ruée finale se veut à la fois mystérieuse et lançant la place à notre imagination.

Suivre les aventures rocambolesques de Cyrano et d’Artagnan sur la Lune, ça vous dit ? Tant mieux, car c’est du fameux Johan Héliot que nous trouvons perché « Au plus élevé Trône du monde ». Avec ses nombreuses références littéraires et historiques, il nous emmène dans un solide monde rabelaisien à tendance rostandienne. Dans ce contexte qui fleure bon le « cape et d’épée », les forts liens entre la Terre et la Lune renvoient à tellement d’idées romanesques qu’on se laisse facilement porter par cette petite histoire bien conclue. Les habitués de Johan Héliot seront servis à coup sûr.

Seul « petit nouveau » à participer à cette anthologie, Julien d’Hem s’en sort plutôt bien avec « Le Crépuscule de l’Ours ». Par un onirisme fou, nous revivons les souvenirs de ce capitaine-mercenaire, l’Ours, ayant vécu quantité de batailles ardues. Arrivé à la fin de sa carrière, il en revoit quelques-unes alors qu’il aborde un duel sanglant avec un jeune guerrier défendant sa cité.

Nous terminons cette anthologie avec une autre nouvelle pleine d’onirisme. Laurent Kloetzer parcourt pendant « L’Orage » les rêveries, rarement solitaires, de son héros fétiche, Jaël de Kherdan, déjà largement aperçu dans Mémoire vagabonde. On se perd dans son esprit tourmenté de toutes parts par ses anciennes et prochaines conquêtes, par ses précédentes et futures hantises.



La première anthologie des Imaginales comprend donc un « casting all-star » au sein de l’imaginaire français et c’est ce qui fait sa force, puisqu’en explorant des univers très variés, nous ne restons pas toujours sur la même idée de relations entre les figures du roi et du capitaine. Certains auteurs comme Pierre Bordage ou bien Armand Cabasson, et même Laurent Kloetzer, passent quand même à quelques encablures du thème « Rois et Capitaines », mais c’est finalement leur univers qui charme l’imaginaire du lecteur.



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La volonté du dragon

N’avez-vous jamais rêvé de jouer une partie d’échecs à l’ancienne mais avec de vraies pièces d’artillerie et des conséquences bien réelles ? C’est à cet exercice que se plie Lionel Davoust dans La Volonté du Dragon !



La Volonté du Dragon, c’est ici la volonté de l’Empire d’Asreth, l’Empire du Dragon, d’asservir un territoire de plus, en l’occurrence le Qhmarr, petite principauté dominée par un enfant-roi de pacotille et un ministre plus que sûr de lui. Face à eux se dresse le Volonté-du-Dragon (on s’y retrouve très bien dans le livre, si si !), fière navire de la flotte asrienne qui déverse une flopée de commandants et sous-fifres asriens qui composent les personnages principaux de cette histoire, car nous la voyons avant tout de leur œil de conquérant, entre convictions et doutes. Trois lieux principaux s’imposent à nous : la partie d’échecs du point de vue de D’eolus Vasteth dit le « généralissime », la passerelle de commandement du Volonté-du-Dragon, et enfin les salles des machines du même bâtiment. Ces trois points de stratégies sont autant d’échelons de la hiérarchie de l’Empire d’Asreth, mais également trois rapports différents à la réalité. Une réalité qui passe par l'affrontement inéluctable entre les deux parties : c'est tout l'enjeu de ce roman.

Pour le dire vite, je regrette surtout que cette édition recèle de quelques erreurs de rédaction et d’édition (quelques oublis de mot, petites fautes d’orthographe, etc.) ; j’en rajoute sûrement un peu en en parlant ainsi, mais sur environ cent cinquante pages, c’est franchement dommage. Ces petites erreurs, après lecture des annexes à la fin du livre, sont sûrement le fruit du fait que ce soit une des premières publications des éditions Critic, qui ont depuis acquis une forte expérience (après, ce sont des détails, peut-être bien que cela n’a « choqué » que moi). Après, les rares déceptions à relever sont relatives au développement des personnages : difficile de pousser leur personnalité très loin dans un tel format court ; malgré tout, ma préférence va, je pense, au capitaine Eod’an Anthear (avis personnel, encore une fois).

Passons au style si particulier de Lionel Davoust ! Son style est particulièrement bien alambiqué et c’est plaisant comme tout, car rien ne vaut une littérature légèrement complexe qui instruit tout en distrayant (même si j’avoue avoir eu du mal sur certains mots dont je n’ai même pas trouvé la définition depuis ! mais bon ça se comprend très bien au fond). L’ambiance de fantasy n’est pas forcément très présente ici, ce qui n’est pas désagréable, bien au contraire, mais par contre on rencontre une magie locale, une religion particulièrement prégnante, le « Lâh », qui donne sa spécificité à ce petit roman et qui semble être une marque de fabrique pour le monde d’Evanégyre, créé par l’auteur. En tout cas, j’aime beaucoup cette capacité dans certains récits de fantasy à se focaliser sur un petit événement et à en faire un récit conséquent et passionnant, cela permet, et Lionel Davoust le fait très bien, de ne pas se presser dans l’enchaînement des faits narrés, qui sont ici du même coup très resserrés dans leur localisation.



La Volonté du Dragon me confirme dans ma première impression : Lionel Davoust est franchement atypique, unique en son genre et ce deuxième texte que je lis de lui me convainc de poursuivre dans la lecture de ses œuvres.



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Contes hybrides

La fée Fifrildi et moi avons décidé de picorer en commun dans les Contes Hybrides, de Lionel Davoust. Je suis content de sa compagnie. C'est son premier je crois. Moi, je voyage avec l'auteur depuis un moment, toujours avec plaisir.



Mais pourquoi « hybrides » ? Les nouvelles balaieraient-elles des genres différents ? Ou est-ce plus subtil ? Ou est-ce que je veux voir un message caché là où il n'y a rien de plus qu'un choix esthétique ?

Voyons voir.



« le sang du large ». Ah ben pour le coup c'est effectivement hybride. Je trouve que ça franchit gentiment les frontières entre les genres. Pas un problème pour moi, je ne suis pas un maniaque de la catégorisation. J'ai un peu de mal au début. Un écrivain qui prend pour personnage principal un écrivain en mal d'inspiration, cela ne me fait pas voyager. J'ai vaguement en tête que l'émission La Grande Librairie – que j'apprécie hein – regorge d'invités qui ont fait ça. Mais quelle écriture ! Lionel Davoust sait comment faire sentir ces fameux affres chez son lecteur (en tout cas chez moi).

Le récit prend rapidement une direction fantastique, oscille entre dépression et joie immense du héros. Et surprise ! ce franchissement de frontières inattendu. le personnage de Féérie s'incarne dans la réalité, pas tant physiquement que par son discours, trop rationnel, trop cartésien. le personnage en perd son mystère. La Féérie perd son indicibilité. le fantastique se dissout dans ce discours. Je ne suis que moyennement convaincu.



« Point de sauvegarde ». Une hybridation de genres encore plus flagrante et qui prend son temps pour se dévoiler. Comment le fantastique pourrait-il s'insinuer dans cette histoire ancrée dans la SF militaire, protégée du mystique par une escadre de technologies futuristes. Les trois soldats-cyborgs chargés d'éliminer une menace terroriste qui semble disposer d'une dangereuse technologie n'ont aucun doute quant à leur succès. Mais Davoust leur réserve des surprises. L'auteur a décidé de prouver que le fantastique peut s'écrire dans n'importe quel contexte ; c'est d'ailleurs assez effrayant. La chute est à la mesure de ce à quoi il m'a habitué : percutante, surprenante.



« Bienvenue à Magicland ». Ah, lol ! J'adore quand l'auteur décide à faire dans l'humour. Des trolls et des licornes. Je vois, c'est un exercice imposé par l'une des anthologies du festival des Imaginales : écrire des récits mettant ces deux types de personnages en scène. Lionel Davoust a choisi de faire des trolls une civilisation moderne qui a éliminé ses rivaux Elfes, Nains et Humains à la Préhistoire. Le héros est un troll amoureux fou des êtres merveilleux que sont les Licornes. Il est soigneur dans une sorte de parc d'attraction. Qu'est-ce qu'il est ronchon, un vrai troll. Il suit une thérapie pour mieux accepter la bêtise du public. L'auteur fait du Michel Audiard ; les expressions du héros valent leur pesant de crottes arc-en-ciel de licorne. Un exemple : « la meilleure façon de faire taire quelqu'un qui vous fait mal, c'est de profiter de vos cinquante kilos de plus pour lui explorer la dentition avec un sandwich aux phalanges ». Mdr, elle va me rester en mémoire celle-là. Garam le troll, c'est Raoul / Bernard Blier des Tontons Flingueurs.

Mais là aussi la fin surprend, s'appuyant sur la douleur de Garam tapie derrière la comédie. Très bien vue. Il est fort, l'auteur.



Bon, voilà. Je me suis trouvé une signification au mot « hybrides ». Moins dans la diversité des genres abordée par les nouvelles que dans le flou que chacune d'entre elles entretient avec la notion de genre.

Après je me trompe peut-être complètement. Et puis en fait on s'en fiche. Il faut seulement apprécier les textes.

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Contes hybrides

Pour découvrir la plume de Lionel Davoust, j'ai porté mon choix sur ses ‘Contes hybrides' en LC avec BazaR. C'est toujours un plaisir !



« Le Sang du large » nous emmène du côté des mystérieuses îles d'Haida Gwaïï (ont porté le nom d'Iles de la Reine Charlotte entre 1787 et 2010) auprès d'un auteur de fantasy qui se pose beaucoup de questions. Il s'agit en fait



« Point de sauvegarde » est la nouvelle que j'ai le moins aimé. Il s'agit d'un récit de guerre se déroulant dans une ambiance mi-SF mi-fantastique et je ne m'y suis pas sentie à l'aise. En rédigeant ce billet, je me rends compte que j'ai lu la nouvelle avec l'idée que « point » était un adverbe de négation et pas un substantif. Cela m'a mise sur une fausse piste.



Pour ces deux premières nouvelles, on ne voit pas immédiatement où l'auteur veut en venir. C'est interloquant ou surprenant selon la chute.



« Bienvenue à Magicland » est la nouvelle que j'ai préférée. Une histoire déjantée d'un troll passionné par les licornes depuis sa tendre enfance et qui bosse dans un zoo de créatures magiques. Il suit une psychothérapie. Quelque chose manque à sa vie pour être heureux, finira-t-il par mettre le doigt dessus ?



Dans l'ensemble, j'ai beaucoup aimé l'écriture de Davoust qui semble avoir une palette assez large. La première nouvelle était empreinte d'une certaine poésie, la seconde était plus dans le suspense et la dernière contenait son lot de répliques savoureuses à la Michel Audiard (merci BazaR pour m'avoir fait réviser mes classiques).



Je pense lire ensuite ‘L'Impassible armada' avant de me lancer dans ‘La volonté du dragon'.









Challenge SFFF 2022

Challenge ABC 2021/2022

Challenge mauvais genres 2022

Challenge duo+ auteurs SFFF 2022
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Port d'âmes

Après une première Volonté du Dragon bien mystérieuse, puis en 2014 une Route de la Conquête très constructive, Lionel Davoust poursuit l’édification de son monde d’Évanégyre avec un Port d’Âmes franchement à part de ce qu’on a déjà pu voir de cet auteur, mais très bien maîtrisé.



Comme je ne l’ai jamais autant fait pour un roman, tentons l’aventure de la critique au plus près de la lecture (une fois n’est pas coutume, rassurez-vous), en tout cas au moins sur les tout premiers chapitres, car plus loin cela risquerait de trop spoiler votre propre progression.

Après un prologue classique, voire poussif, avec des noms qui peuvent rebuter de but en blanc, Lionel Davoust se rattrape de suite avec un premier chapitre particulièrement immersif, qui pose une ambiance glauque, façon « crapule fantasy » je dirais, et déjà de l’imaginaire en action. Pas d’inquiétude, le plus dur est déjà fait et le voyage ne fait que commencer ! Le chapitre 2 nous lance sur deux intrigues, sûrement les principales car indiquées sur la quatrième de couverture : d’un côté, la relance des aventures de Rhuys dans les arcanes de sa ville de naissance ; de l’autre, l’approfondissement de la compréhension de la magie locale appliquée aux Transferts de portions d’âmes. C’est déjà (ou enfin, selon vos attentes) l’occasion de faire une passerelle avec le monde d’Évanégyre tel que Lionel Davoust nous l’a bâti dans ses précédentes productions, notamment dans la fabuleuse nouvelle « Bataille pour un souvenir » présente dans La Route de la Conquête et dans l’anthologie de Lucie Chenu, Identités, nouvelle qui s’applique à narrer l’histoire et les techniques des guerriers-souvenirs du Hiéral. Le chapitre 3 poursuit cette mise en place des mystères et nous gâte au niveau des références concernant Évanégyre, ce qui me rassure désormais totalement sur la cohérence de ce monde : ce qui est « historicisme » entretient des légendes partiellement transcrites sur un Empire du Dragon qui aurait dominé toute terre, l’Empire d’Asreth qui aurait commandé aux Anges et à des humains cuirassés ; les aficionados auront notamment reconnu l’un des événements explorés dans la nouvelle « Le Guerrier au bord de la glace » présente (et inédite) dans La Route de la Conquête. La technologie de l’artech qui sera vraisemblablement un enjeu de l’histoire au sens de sa réinvention.

Dans ce Port d’Âmes, nous suivons ainsi le retour rocambolesque de Rhuys, un noble déchu qui ne possède plus que son nom, ayant perdu en cours de route reconnaissance, liquidités et carnet d’adresses. Après être devenu marin relativement aguerri, il arrive à une vingtaine d’années dans une ville franche, Aniagrad, où le commerce et l’Administration règne en maîtres. Par d’heureux hasards, de drôles de rencontres et des mésaventures douloureuses, il va reprendre en main son destin, ainsi bien personnel qu’amoureux et financier. Rhuys se révèle un héros intéressant à suivre, qui rencontre suffisamment de problèmes et de personnages contrariants pour nous tenir longtemps en haleine ; peut-être quand même est-il parfois trop mélancolique et trop centré sur lui-même pour être inoubliable. Ses relations avec son mentor ou avec son amour à sens unique sont souvent naïves, mais il faut essayer de se remettre dans la tête d’un jeune d’une vingtaine d’années qui a eu un début de vie dichotomique entre une éducation très noble et une formation très à la dure.

Au fil des intrigues qui se tissent autour de Rhuys, non seulement nous retrouvons un univers que les fans de La Volonté du Dragon et de La Route de la Conquête apprécieront encore, mais en plus nous plongeons dans une ambiance qui n’est pas sans rappeler des enchevêtrements de sournoiseries telles celles rencontrées dans Gagner la guerre, de Jean-Philippe Jaworski, ou Les Mensonges de Locke Lamora, de Scott Lynch, deux œuvres majeures et récentes de cette « crapule fantasy » si attractive. Bien sûr, les descriptions n’y sont pas toutes aussi parfaites que dans le premier et les dialogues n’y sont pas tous aussi cultes que dans le deuxième, pourtant Lionel Davoust a son petit truc à lui qui fait passer un très bon moment de lecture.



Au fur et à mesure, Lionel Davoust distille tant de petits points sur l’expérience, sur l’avancée dans la vie, sur le propre de l’Homme, que le lecteur ne peut s’empêcher de lire à travers eux la propre expérience de l’auteur. L’apport des livres, l’intérêt de toujours se porter vers l’avenir, de toujours voir plus loin que son petit système personnel, voilà bien des thèmes qui parleront aux habitués du site internet de l’auteur. Bref, il appuie constamment sur l’essentiel grâce à un seul terme : s’adapter.

D’ailleurs, on peut voir plus loin dans le sous-texte : le personnage auquel est censé s’identifier le lecteur, ce Rhuys à l’accent naïf et mélancolique, est constamment attiré par la tragédie au sens noble du terme : la relation qu’il entretient avec une Vendeuse d’âmes ne peut que faire penser à la relation qu’entretient le lecteur avec l’auteur qui lui fournit encore et encore des aventures dignes d’intérêt et qu ’il choisit, le plus souvent résolument tragiques. Bizarrement, Lionel Davoust semble se retenir quelque peu au niveau des tragédies : on les sent poindre et finalement elles sont repoussées… jusqu’à un certain point seulement (quand même, faudrait pas exagérer non plus !). Ainsi, n’étant pas dans sa tête, je ne sais pas si c’est uniquement parce que ce Port d’Âmes nous arrive après qu’il ait écrit sa trilogie du Léviathan, mais il insère bien davantage ici, format du roman oblige également, des notions et des artifices propres au thriller. Un coup d’œil avisé surprend quand même ces indications sur certains personnages ou certains lieux qui seront utiles parfois quelques lignes plus loin, et donc qui ne se glissent pas là par hasard, comme on pourrait facilement le croire au sein d’une quelconque description. Et c’est avec un certain plaisir que l’auteur surprend son lecteur assidu même quelques chapitres avant la fin.

Dans tous les cas, cela fait déjà pas mal de publications de Lionel Davoust que je consomme allègrement, et j’avoue qu’en total accord avec les préceptes qu’il dispense sur l’écriture en général via son site internet personnel, l’usage de la ponctuation, notamment du point-virgule et des guillemets dévolus au dialogue, convient à ma façon de penser, et donc de lire. Mis à part quelques usages particuliers du point (usages cependant réguliers chez énormément d’auteurs qui consiste à avoir des phrases sans verbe…), cette façon de faire est rationnelle, sensée et efficace. Pour finir, les ayant comptées et relevées pour une fois, seulement trois coquilles à notifier, ce n’est rien sur 500 pages, ainsi qu’un clin d’œil rigolo… une histoire de fromage, français ou suisse, voilà tout, mais une question me taraude : le gruyère a-t-il des trous dans l’univers d’Evanégyre ?



Je signerais donc tous les ans pour un ouvrage de Lionel Davoust dans l’univers d’Evanégyre tant il réussit à varier son style et sa chronologie pour se renouveler considérablement. Malheureusement, un tel rythme n’est évidemment pas tenable sur une telle œuvre, surtout quand on sait le temps nécessaire – six ans apparemment – à Port d’Âmes pour mûrir en un tel roman bien équilibré.



[Davantage de contenus (éléments connexes, images, critique plus longue) sur https://bibliocosme.wordpress.com/2015/08/18/port-dames/ ]
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La volonté du dragon

J’ai pénétré dans l’histoire lentement, mais dès que la bataille a commencé, je n’ai plus pu lâcher le bouquin.



Pourquoi cette bataille ? L’Empire d’Asreth a pour vocation de mettre la planète Evanégyre sous sa domination mais avec l’idée qu’ainsi aucune guerre ne sera plus possible (c’est la même idée qui est attribuée à l’empereur Qin dans le film Heroes). Loin de se comporter en empire colonial type français, il attribue immédiatement la citoyenneté Asreth entière au vaincu et prépare la sauvegarde de la culture intégrée (cela semble facilité par une absence de « racisme » à l’intérieur de l’Empire, du moins le thème n’a pas encore été abordé par l’auteur). Le petit pays de Qhmarr refuse l’allégeance, malgré les tentatives diplomatiques répétées de la part d’Asreth. La bataille entre ses forces navales et celles de la septième Légion de l’Empire aura donc lieu.



Il faut imaginer un conflit asymétrique mettant face à face les forces marines US de Midway pendant la 2ème guerre mondiale (sans l’aviation) et une partie de l’invincible armada espagnole du 16ème siècle. Evidemment l’Empire est sûr de la victoire et sous-estime carrément son adversaire. Mais plus curieusement, les maîtres de Qhmarr sont également sûrs de leur coup, et eux aussi sous-estiment l’Empire. Car Qhmarr a gardé un atout dans sa manche. Il est d’ailleurs curieux d’un point de vue diplomatique qu’il n’ait pas essayé d’avertir même indirectement son adversaire de sa puissance. La carte de la dissuasion aurait certainement porté la discussion plus loin et retardé l’emploi de la force.



L’essentiel du récit nous emporte au milieu de la bataille, à travers les points de vue de plusieurs membres des forces d’Asreth, de l’amiral au simple canonnier. La morgue, la surprise, la peur, le courage, l’esprit de sacrifice, toutes ces sensations colorent la guerre vue de l’intérieur. Malgré la faible longueur du roman (c’est moi qui dit ça, alors que je regrette la tendance au pavé dans laquelle on est tombé de nos jours ?) on arrive à s’attacher énormément aux personnages ; dans la fureur ambiante leur humanité n’en paraît que plus vibrante. J’ai été également ravi de retrouver la générale Korvosa de « la Route de la Conquête », qui n’est encore ici que lieutenant. On comprend mieux comment le personnage a pu évoluer entre les deux récits vers plus de désir de comprendre l’autre et moins de l’anéantir. Elle a beaucoup pris au généralissime Vasteth qu’elle accompagne.



D’ailleurs en parallèle de la bataille géographique, c’est à un affrontement d’ordre idéologique que l’on est convié, qui est mené par Vasteth et le premier ministre de Qhmarr. Asreth veut conquérir pour apporter la paix, la connaissance, une grande liberté sociale ; dans l’Empire la liberté de l’individu est importante. Qhmarr ne veut régner sur personne ; il veut seulement suivre l’Ordre imposé par le divin. Mais l’individu n’existe pas vraiment à Qhmarr ; il lui faut accepter sa place même si c’est celle d’un intouchable, vision révoltante pour un citoyen d’Asreth.

Traiter le problème en noir et blanc est impossible ; on se plaît à reprocher des comportements aux deux camps et à en applaudir d’autres. Cette complexité relative ajoute de l’intérêt au récit.



Pour l’instant je trouve que l’univers d’Evanégyre est un sans-faute. Mais il reste tellement à découvrir. J’attends avec impatience le roman « Port d’âmes » qui nous dévoilera un autre pan de cette magnifique fresque.

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Lancelot

Lancelot du Lac est un de ces personnages de légende dont on connaît tous aujourd'hui et le nom et l'histoire. Fils du roi Ban élevé par la Dame du lac et appelé à devenir le meilleur chevalier de la Table ronde, proche compagnon d'Arthur qui échouera à s'emparer du Graal et s'éprendra de la reine, participant ainsi à la chute de Camelot, Lancelot est un personnage atypique, bourré de contradictions, sur lequel la littérature ne se lasse pas depuis des siècles de s'interroger. C'est à l'occasion du festival Zone Franche qui se déroule à Bagneux depuis maintenant cinq ans que les éditions ActuSF ont décidé de rendre hommage à ce personnage phare de la légende arthurienne par le biais d'une anthologie réunissant les textes d'auteurs français réputés dans le domaine des littératures de l'imaginaire, qu'il s'agisse de Fabien Clavel, Anne Fakhouri, Lionel Davoust ou encore Jeanne A. Debats. Des valeurs sûres, donc, qui nous font sans surprise don de nouvelles toutes plutôt sympathiques et qui feront passer aux lecteurs amateurs des littératures de l'imaginaire (et aux fans de la légende arthurienne en particulier) un bon moment de lecture.



Avant de m’attarder plus en détail sur quelques unes des nouvelles présentes au sommaire, je me permettais cela dit de soulever un léger bémol, notamment en ce qui concerne le contexte choisi par les différents auteurs qui, pour la plupart, situent l'action dans un royaume sur le déclin, pourrissant, voire déjà au-delà de toute salvation. Un choix compréhensible, même s'il aurait, à mon humble avis, pu être intéressant d'également découvrir le personnage à l'apogée de sa gloire, et non pas seulement au plus bas, rejeté et haï de tous. De même, j'ai souvent eu l'impression de toujours avoir plus ou moins à faire au même Lancelot : droit, voire parfois un peu trop rigide, preux, pieux, désespéré d'avoir échoué et trahi... Même si ce portrait est bien évidemment le reflet des nombreux écrits consacrés à la légende des chevaliers de la Table ronde de part les siècles, il aurait cela dit une fois encore été intéressant que certains des auteurs se détachent un peu plus du mythe d'origine pour donner vie à un Lancelot plus original, plus surprenant (je pense à titre d'exemple au Lancelot de « La saga du roi Arthur » de Bernard Cornwell qui dépeint le chevalier comme un véritable lâche, habile à tromper son monde et bien éloigné de la légende).



Parmi les nouvelles les plus réussies, quatre se distinguent particulièrement à mon goût : les deux premières mettent en scène Lancelot aux prises avec la légende et l'inéluctabilité de son destin, les deux suivantes prennent place dans un cadre plus contemporain et sont écrites dans un style beaucoup plus incisif et sur un ton volontiers humoristique. Avec « Le meilleur d'entre eux », Lionel Davoust amorce avec succès une véritable réflexion sur l'importance du personnage de Lancelot dans la légende. Légende dont il questionnait déjà l'essence même dans une autre nouvelle, « L'île close », dans laquelle les personnages du mythe ne cessaient de reproduire encore et encore les mêmes actes, sans pouvoir échapper au rôle que leur avait attribuée l'histoire. La nouvelle nous offre également un bel aperçu de l'amour unissant Lancelot et Guenièvre, tout en réussissant à ne pas laisser Arthur de côté. Pari tout aussi réussi pour Armand Cabasson et sa nouvelle « Le vœu d'oubli » dans laquelle on découvre un Lancelot amnésique car ayant fait le choix d'effacer sa mémoire afin de ne pas commettre l'irréparable et trahir son roi. L'auteur insiste là encore sur l'impossibilité pour le chevalier, et au-delà de tous les autres figures de la légende, d'échapper à son destin.



Les deux textes qui clôturent l'anthologie baignent dans une ambiance radicalement différente du reste de l'ouvrage et figurent à mon sens parmi les plus abouties. C'est notamment le cas du « Lance » de Jeanne A. Debats qui reprend ici le héros de son précédent roman « Métaphysique du vampire ». On retrouve donc Navarre, vampire au service du Vatican dans les années 1930, à qui on confie cette fois la mission d'aller tirer Lancelot de son sommeil éternel sur l'île d'Avalon afin de lui faire affronter une menace redoutable réveillée par un certain Hitler. Un texte bourré d'humour qui déconstruit le mythe du chevalier parfait et met en scène un protagoniste particulièrement attachant (je vous conseille d'ailleurs les autres nouvelles de l'auteur consacrée à Navarre et parue dans diverses autres anthologies, le personnage vaut le détours...). Toute aussi déjantée, la nouvelle de Karim Berrouka (« Pourquoi dans les grands bois, aimé-je à m'égarer ? ») met cette fois en cette une équipe de quatre policiers à qui l'on confie une enquête pour meurtre et qui vont finalement se retrouver en pleine forêt à assister à la lutte sans merci que se livrent depuis des siècles les chevaliers Lancelot et Gauvain.



Une anthologie divertissante rendant un bel hommage à ce personnage ambiguë de la légende arthurienne par le biais de certains des auteurs les plus en vogue au sein des littératures de l'imaginaire. A ceux qui seraient passionnés par le sujet je conseillerais également les excellents « De Brocéliande en Avalon » et d'« Avalon à Camelot », deux autres anthologies dirigées par Lucie Chenu a qui on doit d'ailleurs la postface de ce sympathique « Lancelot ».
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Elfes et Assassins

Cinquième anthologie parue dans le cadre du festival des Imaginales d'Epinal, « Elfes et assassins » nous propose de découvrir les textes de treize auteurs français, tous très réputés dans le monde des littératures de l'imaginaire, de Pierre Bordage à Fabien Clavel en passant par Xavier Mauméjean ou Fabrice Colin, qui se sont penchés sur ces deux personnages extrêmement ambiguës que tout lecteur de fantasy est amené à rencontrer de façon récurrente. Tout comme le précédent opus, « Reines et dragons », on retrouve Sylvie Miller et Lionel Davoust en tant que directeurs de publication, un duo qui fonctionne décidément remarquablement bien. La qualité est en effet au rendez-vous, et si certains textes se révèlent évidement plus réussis et plus marquants que d'autres, nous n'en avons pas moins affaire à un ouvrage très divertissant et jamais monotone ou répétitif. On retrouve ainsi avec plaisir dans quelque uns de ces textes l'univers de certains auteurs comme le Vieux Royaume de Jean-Philippe Jaworski ou encore la ville enchantée de Panam de Raphaël Albert, tandis que d'autres optent pour un cadre plus contemporain, uchronique, historique, ou encore fantastique.



Sans grande surprise, la nouvelle la plus aboutie de l'anthologie reste en ce qui me concerne celle de Jean-Philippe Jaworski (« Le Sentiment du fer ») dont le talent n'est plus à prouver mais qui parvient encore et toujours à surprendre. On y retrouve la ville de Ciudalia, décor de son premier roman « Gagner la guerre », dans laquelle on suit les péripéties d'un Chuchoteur (célèbre guilde d'assassins) chargé d'une bien curieuse et périlleuse mission sur fond de complots politiques. Du rythme, un style percutant, des retournements de situation inattendus...., les ingrédients restent les mêmes et encore une fois cela fonctionne. Parmi les textes les plus mémorables figurent également ceux d'Anne Dugüel, également connue sous le pseudonyme Gudule, (« Le sourire de Louise »), histoire glaçante d'un amour fusionnel entre une mère et sa fille qui tourne à la tragédie, ou encore de Jeanne A. Debats (« Eschatologie d'un vampire ») qui possède décidément un style très direct, bourré d'humour et d'ironie, qu'elle met au service d'une histoire originale et d'un personnage haut-en-couleur. D'autres nouvelles méritent également le détour, que ce soit pour la poésie et la profonde mélancolie qu'ils dégagent (« Sans douleur » de Fabrice Colin et « Grise neige » de Johan Héliot), ou au contraire pour leur humour ravageur (« Du rififi entre les oreilles » d'Anne Fakhouri).



Que ce soit par le biais de la tragédie, de l'horreur, de l'épique ou de l'humour, les treize nouvelles proposées dans cette anthologie ne manqueront pas de ravir les amateurs de fantasy qui auront ainsi le plaisir de se plonger dans les textes inédits de ces grands auteurs qui auront été particulièrement inspirés par le thème de cette année 2013. Voilà un bien bel hommage rendu à ces deux figures particulièrement représentatives du genre que sont l'elfe et l'assassin.
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La route de la conquête

En Résumé : J’ai passé un bon moment de lecture avec ce recueil de nouvelles qui nous propose de découvrir six textes, dont deux inédits, dans l’univers d’Évanégyre. L’ensemble se révèle clairement efficace entre tension, action, adrénaline et réflexion, où l’auteur n’oublie pas pour autant le côté humain proposant régulièrement des personnages complexes avec leurs forces et leurs faiblesses qui se retrouvent à devoir faire des choix. L’univers que développe l’auteur au fil des textes se révèle de plus en plus captivant, dense et j’avoue que la bataille de mécha très stylisé manga m’a passionné, même s’il ne s’agit que d’un petit élément de l’ensemble. Tous les textes ne sont pas tout à fait au même niveau, mais dans l’ensemble ils sont vraiment cohérents et réussis. Ce livre nous offre aussi la première chronologie de cet empire qui court sur près de 1000 ans et qui annonce clairement que tout n’a pas encore été raconté, ce qui est une excellente chose, car j’ai encore envie de découvrir et d’en apprendre plus sur l’Empire d’Asreth.





Retrouvez ma chronique complète sur mon blog.
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