Citations de Margaret Atwood (1844)
La tête légèrement inclinée, elle m'a regardée d'un air désinvolte, comme pour flirter. Je la soupçonnais pour ma part de flirter avec son chien, son miroir, son peigne et sa colonne de lit. Histoire de ne pas perdre la main.
Plus ça allait, moins il se sentait bien dans sa peau. Même le sexe n’était plus ce qu’il avait été, alors qu’il s’y sentait toujours aussi accro. Il avait l’impression que sa bite se baladait, comme si le reste de sa personne ne représentait qu’un pénis insignifiant qui s’y serait trouvé attaché. Peut-être que cette affaire aurait été plus épanouie s’il l’avait laissée vagabonder à sa guise.
Les soirs où pas une seule de ses maîtresses n’avait réussi à mentir suffisamment bien à son mari ou tout comme pour pouvoir passer du temps avec lui, il allait voir un film au centre commercial, juste pour se convaincre qu’il faisait partie d’un groupe. Ou bien, il regardait les nouvelles : toujours plus de fléaux, de famines, d’inondations, d’insectes, de microbes ou de petits mammifères, de sécheresse, de guerres minables menées par des enfants-soldats dans des pays lointains. Pourquoi tout se ressemblait-il tant ?
Il est neuf heures du matin, au soleil, quand Snowman quitte le chemin du Poisson pour s’enfoncer dans l’intérieur des terres. Dès l’instant que la brise marine n’arrive plus jusqu’à lui, l’humidité monte en flèche et elle attire un cercle de minuscules mouches vertes, très voraces. Il est pieds nus – voilà un moment que ses chaussures se sont désagrégées et, de toute façon elles étaient trop chaudes et trop humides – mais il n’en a plus besoin, il a la plante des pieds aussi dure que du vieux caoutchouc. Pourtant, il avance prudemment : il pourrait y avoir du verre brisé, du métal coupant. Ou encore des serpents ou tout autre saleté susceptible de lui infliger une méchante morsure et il ne possède aucune arme, à part son bâton.
Enveloppé dans son drap en lambeaux, Snowman est assis, le dos voûté, à la lisière des arbres, là où les herbes, les vesces et les sargasses se fondent dans le sable. Maintenant, qu’il fait plus frais, il se sent moins abattu. Et puis il a faim. C’est un truc qui a du bon : ça permet au moins de savoir qu’on est encore vivant.
Quelques mois avant l’apparition de la disparition de la mère de Jimmy, Crake fit son apparition. Les deux événements se produisirent la même année. Quel était le rapport ? Il n’y en avait aucun, sinon que Crake et sa mère donnaient l’impression de bien s’entendre. Crake faisait partie des rares amis de Jimmy qui plaisaient à sa mère. Dans l’ensemble, elle trouvait que les copains de Jimmy étaient des gamins et ses copines des nunuche ou des salopes. Elle n’utilisait jamais ces termes-là, mais on devinait ce qu’elle pensait.
Crake, lui, était différent. Selon elle, il ressemblait plus à un adulte ; en fait, il était plus adulte que des tas d’adultes.
Garde ton cap, me suis-je dit. Ne partage pas trop de choses sur ta vie, ça se retournerait contre toi. Écoute attentivement. Note tous les indices. Ne montre jamais ta peur.
Je me rappelle une émission de télévision que j’ai regardé un jour ; une rediffusion, d'un film tourné des années auparavant. Je devais avoir sept ou huit ans, et j’étais trop jeune pour y comprendre quoi que ce soit. C’était le genre de sujet qui plaisait à ma mère :historique, éducatif. Après, elle a essayé de me l’expliquer, de me dire que les événements présentés avaient bel et bien eu lieu, il n'empéche que, pour moi, ce n’était qu'une histoire. Je la croyais née de l'imagination de quelqu'un. Je présume que tous les enfants ont cette conviction face à un événement antérieur à leur naissance. Si ce n'est qu'une histoire, du coup, c’est moins effrayant.
Mais à quoi doit ressembler un album de souvenirs? Faut-il qu’il ne renferme que les bonnes choses de votre vie, ou faut-il qu’il renferme tout ce qui s’est passé ?
Le passé est beaucoup plus sûr : tout ce qu'il englobe a déjà eu lieu. On ne peut rien y changer, donc d'une certaine façon il n'y a rien à redouter.
Les petits détails de la vie ont souvent un grand sens caché.
Tu pourrais peut-être même leur offrir un Paradis. Pour ça, on a besoin de Toi. L’enfer, on se le construit, ça, on sait faire.
Extrait du discours de Margaret Atwood d’Octobre 2017 à Francfort suite à la remise du prix des libraires allemands - préface de l’édition Laffont 2021 : « Lire un lvre est certainemen Texpérience la plus intime que nous puissicns avcir de ce qui se passe dans l'espit d'un autre etre bumain L'écrivain, le livre et le lecteut -dans ce triangle. le livre est le messager. Et tous tros participent à un sel acte de création, comme le compositeur, lexécutant de la symphonie et l'auditeur participent tous à la même chose. Le lecteur est le musicien du livre. »
La nuit m’appartient, c’est mon temps à moi, je suis libre d’en faire ce que je veux, pourvu que je ne fasse pas de bruit.
Le désir et l'orgasme ne sont plus considérés
nécessaires; ils ne seraient qu'un symptôme de frivolité, comme des jarretelles tape-à-l'oeil, ou des grains de beauté : distractions superflues pour des écervelés. Démodées.
Nous vivions, comme d'habitude, en ignorant. Ignorer n'est pas la même chose que l'ignorance, il faut se donner de la peine pour y arriver.
J'ai faim de toucher quelque chose d'autre que du tissu ou du bois. J'ai faim de commettre l'acte de toucher.
Alors, Luke, la question que je veux te poser maintenant, ce que j'ai besoin de savoir, c'est ceci : avais-je raison ? parce que nous n'en avons jamais parlé. Quand j'aurais pu le faire, je n'ai pas osé. Je ne pouvais pas me permettre de te perdre.
« Des jambes,les jambes des dames; des jambes parquées dedans pour ne pas qu’elles s’échappent et aillent se frotter contre les pantalons des messieurs. »
Nous sommes des utérus à deux pattes, un point c'est tout: vases sacrés, calices ambulants.
C’était après la catastrophe, quand ils ont abattu le Président, mitraillé le Congrès et que les militaires ont déclaré l’état d’urgence. Ils ont rejeté la faute sur les fanatiques islamistes, à l’époque. (…) C’est à ce moment-là qu’ils ont suspendu la Constitution. Ils disaient que ce serait temporaire. Il n’y a même pas eu d’émeutes dans la rue.