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Citations de Marina Tsvetaieva (457)


chaque matin soulevé par la lumière
mon petit vêtement de jour et d’oiseau
j’ai le pas, le temps humain
de dos il fait si froid

et toujours les tombes quotidiennes
entrent ou sortent

en dessous ça sent le rêvé, l’acharné

j’entends un drôle de demain
qui avance, rejoint nos bouches et leur hiver
vieillir, pleine d’aïeules fascinées

une aile, la vie comme elle va
déposée, bégayante
végétation et vase
et immense pourquoi

je reste intensément debout
geste, geste jusque dans le regard
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DEMENAGEMENTS

Elle n’a pas perdu les eaux, enceinte sur le bateau, je suis née en Espagne plutôt qu’en Argentine. De Barcelone à Madrid, ils ont perdu des sous, un commerce, un café et quelques dettes de jeu. De Madrid à Buenos Aires, ils ont perdu le reste, les bijoux, les billets et la petite monnaie. De Buenos Aires à Mexico, elle a perdu mon père, les photos, les objets et tous les souvenirs. De Mexico à Neuilly, j’ai perdu mon enfance, mes amis, mon école, ma maîtresse, mes poupées, leur maison, mes nounours, mes Lego, mon idiome, mes jouets et toutes mes habitudes. De Neuilly à Melun, j’ai perdu mon temps, à aimer des enfants que je ne verrais plus. De Melun à Lyon, j’ai perdu la campagne, les prairies, les ruisseaux, l’aventure, les bouquets de primevères, les coquelicots sauvages, la Vogue en septembre, le lac où l’on patine, les chats que l’on poursuit, les ruelles voisines, les enfants dans la boue, les piles de magazines, les bonbons dérobés, les amours enfantines. De Lyon 9e à Lyon 3e, j’ai perdu mon appareil dentaire et mon adolescence, mes deux chats, ma mère et ses petits plats, l’argent de poche, les lessives et les grasses matinées. De Lyon 3e à Lyon 7e, j’ai perdu un cocker, un sofa, quelques bières, un petit rat. De Lyon 7e à Lyon 5e, j’ai perdu une pile d’assiettes, un bol et quelques tasses, un chaton, un autre canapé, un ami argentin, un matelas, un sommier et six boules de naphtaline. De Lyon 5e à Lyon 1er, j’ai perdu une mezzanine en bois, un ficus desséché, une paire de collants rouges et une boîte d’aspirine, une pointure, trois kilos, un centième à l’œil droit et deux tailles de pantalon. De Lyon 1er à Lyon 2e, j’ai perdu un chauffage, un matelas et même deux tatamis, une sacoche, des bouquins et deux cents grammes de riz. De Lyon 2e à Lyon 4e, j’ai perdu un canapé Louis XV, des pans de toile de Jouy, un miroir renaissance, un DVD de Sissi, des rideaux rose-fille, des coussins assortis, un lustre de princesse, quelques grains de folie. À Lyon 4e, j’ai perdu l’envie de déménager.
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à la mémoire du poète iranien Hashem Shaabani
pendu le 26 janvier 2014

Je ne sais pourquoi la vie est la vie
mais je te vois déplaçant le ciel

front tendu jusqu’au diamant

je te vois du côté des carcasses
des équilibres
répétant : suis-je libre ?

oui ?
non ?

et la vie qui est la vie
perd son nom
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LE TEMPS D’INFUSION

Dans une ville dézinguée
Des hommes amoindris
N’osent plus toucher leurs joues
Du fil de leur rasoir
Avant de sortir voir le monde
Pour payer leur écot
Des femmes à peine plus vieilles
Poussent et jettent leurs bicyclettes
Le long des fossés d’où
Elles tirent des orties de la
Menthe et du pissenlit
Dans le limon des jours crus
Tombent les heures de visite
C’est la recette instantanée
Des soupes et des pisse-mémé
Tout le monde tache ses dessous
En égrenant ses misères
Fait croire qu’il a connu la guerre
Chante en chœur et à la tierce
Une berceuse où se mêlent
Des vols noirs et des cerises
Et chacun est content
Quand le soleil sèche les os
D’avoir parlé si haut
Dans son sang et ses humeurs
Contre le jour la nuit s’adosse
Fermant leurs yeux d’une ombrée
Elle tend la main vers Azraël
Qui se penche et embrasse
Dans une envolée de mouches
Ces corps vêtus de flanelle
Avant de supprimer leur angoisse
En les baisant à pleine bouche.
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Sur le mur ___ des traits des boutures
hachées ______des coupures du sang
des effrois ____ton retour ___comme
une crainte _____ de si loin tu reviens
sans plus rien ________qui retient sur
mon cœur ___ __ une fatigue déposée
des gestes ____ à finir à recommencer
à refaire à réparer

Chagrins du froid ____pousses ___de
glace ____ yeux meurtris faim inutile
puisque bataille __ perdue __mais se
battre encore ________on dit qu’il le
faut ___ les jardins finiront par fleurir
encore __________je ne lâcherai pas
mes robes ___ velours
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je compte avec mes yeux
les bras des éoliennes
dans les champs
du retour
et les maisons aussi

je te parle

le ciel en bleu de travail
interdit le cafard
je m’applique à sourire
mes petits crocs
d’humain
ne sont pas bien assis
c’est de ta faute je crois

les maisons se ressemblent
comme sœurs et cousines
j’aime les volets criards
comme des bouches d’enfants
les pas si belles
les toits bizarres
et les fleurs mêlées
aux légumes en couleur

j’ai sur la peau encore
quelques baisers collés
mais ne le dirai pas

l’enfant est une femme
et parfois ses cheveux
fleurissent sur ses joues
et cachent son regard

je vieillis les dentellières
tissent chaque jour
des traces sur mon corps
qui ressemble au tien

j’ai des amis vivants
et nous buvons du vin
nous buvons trop c’est sûr
mais comme il faut être fort
pour entrer dans le jour
chaque et chaque matin

le chat n’est plus le même
j’ai du mal à l’aimer
mais je sens que ça vient
je fume toujours un peu
des tabacs étrangers
et fais des jeux de mots
qui te laissaient
de marbre

et voilà que j’arrive
l’avenue comme hier
toute droite
déjà

tu vois la vie
ça va
surtout
ne t’inquiète pas
pour moi
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MON MONDE

Le monde comme il va pousse derrière creuse devant
Le monde ses bras ses bouche ses yeux
Le monde comme il va comment ?
Dans mes bras le monde
Dans ma bouche le monde
Dans mes yeux le monde
Ma bouche mange mes bras cachent mes yeux ça va
La vie par ma bouche mes yeux mes bras
J’embrasse vois avale ma vie salive
Par-dessus ses hauts murs au cœur aussi
Comment le monde dans mes bras il va comme dans mes yeux
Je le prends à pleine bouche bras yeux
Dans quelle vie je monde ?
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COMME ELLE ME VA

Tu as toujours cru à la vaisselle, lessive,
aux enfants, au mari,
à la fête de famille,
au potager poussé jusque dans le salon,
à la distance qui rapproche,
au « petit café » bu ensemble qui sépare.

Mais il y a toujours eu le vers
flèche de lumière
te guettant à chaque pas.

Alors tu écris, couturière de mots,
pour vêtir ses brûlures.
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De mes vers, écrits si tôt
Que je ne me savais pas poète,
jaillis comme l’eau des fontaines,
Comme le feu des fusées,

S’engouffrant comme des diablotins
Dans le sanctuaire plein de rêves et d’encens,
De mes vers de jeunesse et de mort
– De mes vers jamais lus ! –

Jetés dans la poussière des librairies
(Où personne n’en veut ni n’en a voulu),
De mes vers, comme des vins précieux
Viendra le tour.

(mai 1913)
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A Boris Pasternak

Dis-tance : des verstes, des milliers…
On nous a dis-persés, dé-liés,
Pour qu’on se tienne bien : trans-plantés
Sur la terre à deux extrémités.

past
Dis-tance : des verstes, des espaces…
On nous a dessoudés, déplacés,
Disjoint les bras — deux crucifixions,
Ne sachant que c’était la fusion

De talents et de tendons noués…
Non désaccordés : déshonorés,
Désordonnés…
Mur et trou de glaise.
Écartés on nous a, tels deux aigles —

Conjurés : des verstes, des espaces…
Non décomposés : dépaysés.
Aux gîtes perdus de la planète
Déposés — deux orphelins qu’on jette !

Quel mois de mars, non mais quelle date ?!
Nous a défaits, tel un jeu de cartes !

24 mars 1925.
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Il est une heure légère
comme un sac jeté à terre,
orgueil dompté en soi !
L’heure du disciple,
dans la vie de tous elle sonne,
retentit et puis s’en va.

Heure solennelle :
rendant les armes
devant celui que Sa main désigne,
nous échangeons la pourpre du guerrier,
contre la peau d’une bête fidèle.

O heure bénie qui nous appelle
et nous enlève au jeu des jours,
ô heure oû le fruit mûr et lourd,
gonflé de sève, fait ployer la branche.

L’épi grossit.
Sonne l’heure joyeuse,
les graines appellent le moissonneur.
La loi
– joug espéré, destin –
a retenti dès le sein de la mère !

Heure du disciple !
Déjà visible et pressentie
– vient à sa suite, bénie sois-tu –
l’heure sublime,
de solitude lumineuse.
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CLOUÉE


Clouée au pilori de la honte
D’une conscience ancestrale,
Serpent au cœur et marque rouge au front,
Je dois crier mon innocence.

J’affirme que règne dans mon cœur
La paix sereine d’une communiante.
Et que, main tendue, sans pudeur
J’ai mendié sur les places le bonheur.

Fouillez vous-mêmes tous mes coffres
Suis-je devenue aveugle ? Dites,
Où est l’argent, où l’or ? Car dans ma main
Je tiens — quoi ? Une poignée de poussière.

C’est tout ce que j’ai su, mendiante flatteuse,
Reprendre à ceux qui tiennent le bonheur
Et que j’emporterai dans le creux de ma main,
Au pays des amours silencieuses.


//Traduit par Véronique Lossky
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Oui, jeunes filles, avouez - les premières, et puis écoutez les sermons, puis épousez des médaillés couverts de gloire, puis écoutez les confessions, et puis refusez-les - vous serez mille fois plus heureuses que l'autre héroïnes, celle qui, ses désirs exaucés, n'a d'autre solution que se coucher sur les rails.
Entre la plénitude du désir et l'exaucement de ses désirs, entre la plénitude de la souffrance et le vide du bonheur, mon choix était fait - à l'origine. Mon origine fut - ce choix.
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Marina Tsvetaieva
« L'amour vit d'exceptions, d'isolations, d'exclusions. L'amour vit des mots et meurt des faits. » Lettre à Rainer Maria Rilke
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L’histoire est toute simple : il y avait une maison, il y avait une vie, il y avait un grand couloir à soi où l’on pouvait mettre tout, et maintenant il n’y a RIEN et TOUT se révèle de trop.
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"Prête serment, glapissent-ils, au Grand Coup de Sifflet !"
"Hou la honte ! Hou l'infamie !"
"Pas tout à fait des rats, d'après leur tête..."
"Vraiment ? Des rats ?"

"Calvities !"
"Mèches folles !"
"Inouï !
Tout en rouge !"

"Bizarroïde, cette espèce !
Tu leur dis : Dieu, répondent : diable !

Hop – sur la flèche du clocher !
Tu leur dis : Негz , répondent : chut !

Tu leur dis : grade, répondent: rage !
Tu dis : en garde ! répondent : en cage !

Tu leur dis : halte ! répondent : marche !
Tu leur dis : deux ! répondent :
– feu !
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Qui dort chaque nuit ? Personne ne dort !
L’enfant crie dans son berceau,
le vieillard est face à sa mort,
le jeune homme parle avec son amie,
le souffle, à ses lèvres, les yeux dans ses yeux.

On s’endort – s’éveillera-t-on ici encore ?
On a le temps, le temps, on a le temps de dormir !

Un gardien vigilant, de maison en maison
passe, un fanal rose à la main,
et, grondements saccadés par-dessus l’oreiller,
sa crécelle violente va gronder :
– Ne dors pas ! Résiste ! Je dis vrai !
sinon, c’est le sommeil éternel !
sinon, c’est la maison éternelle !

("Insomnie", Partie 9)
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Tu rejettes la tête en arrière —
Et puis que tu es fier et hâbleur.
Quel joyeux compagnon jusqu’à moi
A conduit ce mois de février !

Cliquetant de pièces de monnaie
Et lentement soulevant la poussière,
Comme des étrangers triomphants
Nous allons par la ville natale.

De qui sont les mains délicates
Qui ont, beauté, touché tes cils,
Quand, comment, par qui et combien
Tes lèvres ont-elles été baisées —

Je m’en moque. Mon esprit avide
A surmonté ce rêve-ci.
En toi c’est le garçon divin,
Petit de dix ans, que j’estime.

Nous resterons au bord du fleuve,
Où trempent les perles des réverbères,
Je te mènerai jusqu’à la place —
Témoin des tsars-adolescents…

Siffle ton mal de jeune garçon,
Serre ton cœur au creux de ta main…
— Toi, flegmatique et frénétique,
Toi, mon émancipé, — pardon !
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Personne ne nous a rien ôté —
Elle m’est douce, notre séparation !
Je vous embrasse, sans compter
les kilomètres qui nous espacent.

Je sais : notre art est différent.
Comme jamais ma voix rend un son doux.
Jeune Derjavine *, que peut vous faire
Mon vers brutal et ses à-coups !

Pour un terrible vol je vous
Baptise : envole-toi donc, jeune aigle.
Tu fixes le soleil, l’œil ouvert, —
Est-ce mon regard trop jeune qui t’aveugle ?

Plus tendrement et sans retour
Nul regard n’a suivi votre trace.
Je vous embrasse, — sans compter
Les kilomètres qui nous espacent
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Je suis pour l'enfance, c'est-à-dire aussi pour la joie : le loisir !
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