Citations de Martine Delerm (70)
La vie de Luce est plus difficile que la mienne. L'absence a un visage pour elle. Ça, ce doit être très dur. (p.87)
Je suis née d'une vague,
un soir de tempête.
Mon père était marin
et ma mère était mouette.
Marie écrit ces mots sur le sable de ses cahiers, à marée basse et à cœur gros.
Comment reconstituer le puzzle de ta vie ?
Certains espaces peu à peu se remplissent, dessinent un motif, d'autres troués de manques se laissent deviner, mais, ici et là, trop de vide !
Rien ne se reconstitue vraiment.
Tant de pièces manquantes.
Je regarde Lucie danser, Clément peindre, je fais des bulles de savon, prison fragile de couleurs où mon image est si légère...
et je m'envole dans la douceur du soir...
Porter en soi ceux que l'on a perdus.
Ecouter se dissoudre les nouvelles du monde.
Quant à Jeanne, on l’a trouvée, il y a quatre ans, quatre ans et demi, dans une rue de Paris, inconsciente. Malaise ? Accident, Agression ? En tout cas, très long coma. Et quand elle est sortie… ne savait dire qu’un mot… Jeanne. Apparemment tout oublié. Amnésie quasi complète.
Les fantômes, ça fait des frissons partour, mais ce n'est pas désagréable du tout.
Un livre. Lequel ? N'importe. Au gré d'une étagère, une porte. Matières des jours ordinaires, alchimie d'encre et de papier. Essuyez vos doigts avant d'entrer. Être à la page. Lire.
Je suis une petite fille incomplète...
Mon drame a commencé juste avant ma naissance, quand j'étais encore dans le pinceau de mon illustratrice.
Oh ! presque rien : un incident insignifiant, trois petits coups frappés au carreau...
Elle s'est levé, a posé son crayon, est allée ouvrir au facteur. L'air , par la porte, est entré, les papiers sur la table se sont mis à tournoyer...
... je me suis envolée !
Alors que je rentrais chez moi, par les vieilles rues de Honfleur, un bruit de pas me poussa dans l'ombre d'une porte. Je m'en voulais de ces angoisse irraisonnées, mais je décidai quand même d'emprunter un autre chemin.
Soudain, je le vis... un corps sombre en travers de l'escalier... un homme : il ne bougeait pas, il était mort...
Accueillir sans hésiter l'hésitation.
Chercher en soi le printemps à venir.
Alors elle rêve de devenir plume, bulle de savon, poussière qui danse dans le ciel. Mais elle n'est qu'elle. Elle qui ne sait que marcher. Elle, avec ce petit vide entre les épaules.
Un grand puzzle prenait forme, quelques pièces s'emboîtaient déjà au milleu d'espaces béants. On restait seuls avec nos deux vies qui tentaient de n'en faire qu'une.
Un cahier raturé de cour d'école et de récréation, un cahier de rentrée avec des feuilles qui vont tomber ?
Courir. Courir derrière ses mots et ses idées. Courir après ses cris.Retenir ce qui s'échappe.
Ecrire pour ne pas oublier.
Mes mots à moi voulaient le faire parler, le ressusciter.... Et si mon père était pro quelques chose qui ne me plaise pas ....si...
L une après l autre, elle nous colle une étiquette et nous devenons bocaux à placer sur l étagère de l infirmerie. Gelée de tétanie, confiture de fugue, compote d impertinence, marmelade d incivilites....