Citations de Martine Pouchain (339)
Quand un mensonge tient la route, autant servir le même à tout le monde, ça évite les complications de recoupement. (p 306)
Le monde courait à sa perte si on ne faisait rien pour y remédier. Et on ne faisait rien, ou presque. Et même, on aggravait : réacteurs nucléaires de poche, satellites par milliers, mines de cadmium, cérium, samarium, prométhium, dysprosium, holmium, lutécium, gadolinium, europium, yttrium… pour alimenter nos portables, bétonnage, déforestation, pollution des eaux, de toutes les eaux, cultures intensives et chimiques, extinction des espèces, guerres…
C'est la fin du monde un peu. Et la fin du monde, vaut mieux pas y penser trop longtemps.
Pour continuer à vivre, on est obligés d'inventer qu'on va planter des arbres, des idées, qu'on va élever des ours blancs et emballer les déchets nucléaires dans des matières révolutionnaires.
On est obligés de rêver à des lendemains radieux.
Obligés, on est.
Le fils du vieil homme commence à dresser les chevaux sauvages. Mais il tombe de cheval et se brise les jambes.
- Tu avais encore raison, disent les gens. Voilà que ton fils a perdu l'usage de ses jambes, quel malheur !
- Vous êtes vraiment obsédés par le jugement, leur dit le vieux. Mon fils s'est brisé les jambes, c'est triste, mais qui connaît l'avenir ?
Quelques semaines plus tard, le pays entre en guerre contre le pays voisin. Tous les jeunes hommes sont réquisitionnés par l'armée, sauf bien sûr le fils du vieux qui est infirme.
- Tu avais raison une fois de plus ! Ton fils est infirme mais au moins il est vivant alors que les nôtres vont sans doute mourir sur le front.
- Vous jugez encore et toujours, vous ne savez rien ! Personne ne sait. Chaque fois que vous portez un jugement, vous cessez de grandir. La vérité, c'est que le voyage ne s'arrête jamais : un chemin se termine mais un autre commence, une porte se ferme mais une autre s'ouvre, vous atteignez un sommet et un sommet plus haut apparaît toujours. Seuls ceux qui sont capables de vivre l'instant et de croître à travers lui peuvent prétendre au bonheur.
C'est pour s'estimer heureux que l'on s'intéresse tant à la misère des autres. C'est la télé-irréalité.
"En rentrant, j’ai dit à Flora que je voulais être comme Sami plus tard : le genre capable de convaincre les gens qu’après la pluie viendra le beau temps, même quand tout a l’air foutu, le genre capable de faire croire au plus désespéré qu’il peut faire quelque chose de bien de sa vie. Ce genre-là."
Je mange dix crêpous d'affiliée en méditant sur les bourrelets de solitude des gens qui n'ont pas le minimum d'amour autour d'eux. Ça réconforte, le sucré, quand l'horizon est vide.
Mais certains jours font grise mine et on sait d'avance qu'on ne pourra pas les faire sourire .
Ça réconforte le sucré ,quand l'horizon est vide
Mon père connaissait chaque méandre de la route sur le bout de ses ongles rongés .Le problème, c'est que quand on connaît le chemin par coeur ,on finit souvent par s'imaginer qu'on pourrait le faire les yeux fermés.
Et la plupart du temps ,on a tort .
Ici , la religion la plus répandue, c'est la muflée du samedi soir dont les non-pratiquants sont illico excommuniés .
En rentrant, j'ai dit à Flora que je voulais être comme Sami plus tard : le genre capable de convaincre les gens qu'après la pluie viendra le beau temps, même quand tout a l'air foutu, le genre capable de faire croire au plus désespéré qu'il peut faire quelque chose de bien de sa vie. Ce genre-là.
Mais je ne jouerai jamais au loto.
J'aimerais bien pouvoir les convaincre que mourir n'est pas une punition, que c'est même souvent une libération pour des personnes lassées de traîner un corps meurtri.
Y a un truc incontournable avec l'humain, c'est le respect...
Est-ce que ça comptait comme sacrifice si on ressentait de l'allégresse en le faisant ? (p.142)
- L'éternité, ça doit être vraiment long, même au Paradis. Il arrive sûrement un moment où on a fait tout ce qu'il était intéressant de faire, et alors on s'ennuie, non ? Tu imagines : l'ennui éternel ? (p.83)
Chaque soir, avant de m'endormir en tenant mon ours désormais silencieux contre moi, je priais Dieu de m'épargner. "Je vous en supplie, faites que je ne sois jamais enceinte et que je ne devienne jamais une femme, ainsi soit-il".
D'après ce que j'avais cru comprendre, l'un ne pouvait pas advenir sans l'autre, mais je préférais mettre toutes les chances de mon côté en priant large. (p.81)
D'ailleurs, je n'étais pas tout à fait sûre de moi. Car comment "Dieu qui est amour" aurait-il pu tuer tant de gens et d'animaux, en plus de rendre la planète invivable ? (p.47)
Moi, hélas, je ressemblais à Papa, ce qui, pour une fille, n'est pas forcément une bonne chose. (p.23)
Je me demande à quel moment de ta vie tu as appris à raser les murs pour qu'on ne te remarque pas. C'est facile de ne pas se faire remarquer quand on est juste moche. Beaucoup moins quand on a été élu à l'unanimité souffre-douleur de la classe. Tu avais beau te concentrer de toutes tes forces pour être le plus insignifiant possible, insignifiant, c'est une chose que tu ne pouvais pas. Une fois qu'on a été identifié comme victime, on devient nécessaire à la communauté, on ne peut plus être inaperçu.