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Citations de Matthieu Aron (37)


À l'heure où nous terminons ce livre, alors que la campagne présidentielle bat son plein, les consultants sont déjà à la manœuvre.

Frédéric Lemoine - huit ans chez Capgemini puis chez McKinsey - s’est vu charger par Valérie Pécresse de penser son programme.

Et c'est à une autre ancienne de McKinsey, Marguerite Cazeneuve, qu'Emmanuel Macron a confié le soin de réfléchir à sa future réforme des retraites.

Cela pose une question cruciale : qui décide de notre avenir et du périmètre d'action de notre État ? Les candidats qui sollicitent le suffrage populaire ou les consultants qui nourrissent leurs programmes et les mettent ensuite en musique dans les ministères ? Jusqu'ici, aucun responsable politique n'a osé aborder ce sujet et on comprend pourquoi.

Ce silence n'a que trop duré. Arrêtons de donner autant de pouvoir et d'argent aux grandes sociétés de consulting.
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La mode du « nudge »

Embourbé dans ses tentatives de délibération participative, le gouvernement se félicite en revanche de ses avancées dans le domaine du nudge. Une nouvelle philosophie de la communication issue des sciences comportementales.

Le nudge, littéralement « coup de coude » en anglais, est follement tendance dans la Macronie. Le principe est d'inciter sans contraindre. Tout un art. De manière plus triviale, on parle aussi de la « technique de l’urinoir », ou comment, en plaçant une petite marque - une mouche - en son milieu, les hommes sont incités à viser bien droit.

Cette science a été théorisée par un universitaire américain, Richard Thaler, Prix Nobel d'économie en 2017. D'abord utilisé dans le marketing, le nudge se caractérise par une série de messages envoyés au consommateur pour le pousser à consommer. La communication politique applique peu ou prou les mêmes recettes.
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En France, l'institut EVA est pionnier en la matière, avec un service dédié la BVA Nudge Unit. Son responsable, Eric Singler, a apporté son expertise au gouvernement pendant la crise sanitaire.

Ainsi, l'expression « masque grand public » a été forgée en pleine pénurie des masques chirurgicaux, pour persuader les Français, furieux de l'impéritie gouvernementale, de se procurer des protections anti-Covid en tissu, ou mieux, de les fabriquer eux-mêmes.

Il semble qu'au début de la crise, la BVA Nudge Unit ait travaillé pro bono, c'est-à-dire gratuitement. Ensuite, à partir de septembre 2020, un contrat a bien été passé mais sans appel d'offres. Interrogé sur ce point en juin 2021, le SIG nous avait précisé qu'un acheteur a droit en cas « d'expérimentation » de passer des « marchés négociés sans publicité, ni mise en concurrence préalable, pour tout achat innovant d'un montant inférieur à 100 000 euros HT ».

Certes. Mais comment peut-on qualifier le nudge « d'achat innovant » ? Un an et demi plus tôt, le 24 mai 2019, l'État, par l'intermédiaire de la DITP, sa Direction de la transformation publique, avait en effet déjà signé un contrat en bonne et due forme de 10,4 millions - avec, entre autres, la société britannique Behavioural Insights Team - pour se faire assister dans la mise en œuvre de démarches de « sciences comportementales appliquées aux politiques publiques ».

Dès 2017 aussi, la SNCF, Pôle Emploi, ou la région Grand Est ont acheté cette « innovation » à des consultants. Même la Caisse d'allocatîons familiales du Var s'y est mise, souhaitant « identifier via la méthodologie nudge des leviers visant à inciter ses usagers à adopter un comportement vertueux ». Bref, le nudge n'est plus une « experimentation ». Il est déjà presque une vieille lune. Mais, en quelque années, il est devenu le nouvel eldorado des consultants qui travaillent pour les services publics.
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Bercy a sélectionné deux grands cabinets américains pour tailler dans le budget de la fonction publique. Accenture et McKinsey ont pour mission de trouver 1 milliard d’économies dans les 24 milliards dépensés chaque année par les ministères et les opérateurs de l’État. Sont visés les loyers, les achats de fournitures, d’équipements informatiques et... de prestations intellectuelles. Accenture et McKinsey iront-ils jusqu’à proposer de rogner dans les dépenses de consultants ? Il est permis d’en douter. Mais il est quand même fascinant de voir un État déléguer au privé une mission par nature éminemment politique.
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Au printemps 2021, de façon totalement inédite, de très hauts fonctionnaires, magistrats de la Cour des comptes, sous-préfets ou inspecteurs des finances, se regroupent au sein de deux collectifs : « Nos services publics » et « Sens du service public » pour lancer un SOS et alerter sur « une externalisation galopante » des fonctions assurées autrefois par l'Administration. « Nos services publics » calcule même que, depuis une trentaine d'années, l'État a délégué à des sociétés privée l'équivalent d'un quart de son budget ! Sans que les déficits aient été pour autant maîtrisés.

Recourir à un consultant coûte en effet en moyenne quatre fois plus cher que de s'appuyer sur un agent administratif. Les experts en coupes budgétaires coûtent cher, et notre dépense publique, même avant la crise du Covid, continuait de grimper. Dans un mouvement de balancier mortifère, plus l'État externalise, plus les Français sont insatisfaits, plus les fonctionnaires se sentent evinces, et plus la dette se creuse.

Les responsables de la santé publique parlent entre eux du « paradoxe du serpent ». Ou comment l'État paie deux fois. La première pour que des cabinets l'incitent à rogner les budgets, la seconde pour que ces mêmes cabinets l'aident à suppléer les carences qu'ils ont eux-mêmes contribué à organiser.
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Dans un monde qui parait de plus en plus hors de contrôle, le procès semble le dernier lieu où l'humanité peut devenir lisible. Les avocats s'en font chaque jour les interprètes et leurs plaidoiries sont autant de modes d'emploi pour qui veut comprendre les multiples facettes de l'âme. Même les criminels ont à nous apprendre sur nous-mêmes. Les avocats le savent depuis longtemps. Quand je leur demandais quel était en définitive, pour eux, le sens profond de la plaidoirie, ils m'ont souvent fait des réponses presque identiques : " Ramener l'accusé dans la communauté des hommes, même si c'est un"monstre", même si c'est le pire des "salauds. "
Les plaidoiries sont toujours un pari sur l'humanité et donc l'une des formes les plus achevées d'humanisme.
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[Pierre-Marie Vidal:] "J'ai réfléchi à un concept de magazine qui pouvait séduire des décideurs publics. La modernisation de l'Etat, c'est un cheval de Troie !"
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Le procès de Bobigny, qui se tint en octobre et novembre 1972, est un procès politique par excellence. Au sens noble du terme puisqu'il a largement contribué à la depénalisation de l'interruption de grossesse, la loi Veil, votée trois ans plus tard. L'accusée n'était pourtant ni une féministe ni une militante. Juste une jeune fille de 16 ans, victime de viol.
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Page 171

Entre le 5 mars et le 28 mai 2020, le gouvernement a commandé, pour plus 1 millions d'euros, trente trois études qualitatives et douze questions hebdomadaires pour mesurer la popularité de l'exécutif soit un sondage toutes les quarante-quatre heure !
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Page 96

Le nombre de fonctionnaires qui travaillent dans les directions de l'informatiques des minsitères est dérisoire.
Conséquence, les consultants y ont littéralement pris le pourvoir.
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Page 36

" Pour le covid, nous détaille la député Louwagie , 7 cabinets ont été sollicités 47 fois pour un montant de 24,6 millions d'euros." Une goutte d'eau comparée au milliard déboursés par pourvoir publics face à nouvelle pandémie mondiale ?
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Ceux qui ont fait le voyage jusqu'à Auschwitz savent qu'en dépit du temps en dépit de ces cinquante-sept ans passés, le ciel polonais, où s'échappaient naguère les fumées des crematoires, conserve en mémoire le cri d'un peuple qu'on assassiné.
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" Que sont les mots pour dire ce que les mots n'avaient jamais imaginé."
Me Gilbert Collard pour le Procès Barbie.
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Page 82

C'est ainsi que se forgerait l'impitoyable culture du consulting.
" Dans cette arène, résume le sociologue, les compétences techniques et la performance objective ne suffisent pas. En revanche, la capacité à réseauter et à manipuler les relations sont primordiales pour avancer dans sa carrière."
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Page 15

On peut juste donner une fourchette: les sommes versées aux cabinets de conseils oscillent entre 1,5 et 3 millards d'euros par an.Soit au plus haut de cette moyenne , l'équivalent du budget du ministère de la culture.
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Il n'est pas le seul à avoir avoué un crime qu'il n'a pas commis. Sachez, Mesdames et Messieurs les jurés que les précédents sont nombreux, hélas...il s'agit de jeunes gens, comme Ranucci, abandonnés, seuls, incapables de résister à la pression psychologique exercée par des policiers expérimentés et convaincus de leur culpabilité. Mais l'aveu n'est pas une preuve en droit français. L'aveu, c'est au contraire le fil d'Ariane de l'erreur judiciaire, c'est sa fusée porteuse !
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plaider c'est rechercher la fraternité... Les mots doivent rendre à l'accusé sa dimension humaine
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La montée en puissance du consulting est en effet concomitante de la déresponsabilisation progressive du personnel politique, paniqué à l'idée de devoir rendre des comptes jusque devant un tribunal.
Page 164
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Mais, si Dante, avec son Enfer, a montré le destin de l homme, qui est de mourir, un un autre génie, Shakespeare, avec son Hamlet, a montré la nature de l'homme, qui est d'être libre. Doute de tout dit Hamlet à Ophelie, Doute de la lumière, doute du soleil et du jour, doute des Cieux et de la Terre... Voulez-vous être des pourvoyeurs de l'enfer ou des porteurs de liberté ? Cet éternel rappel au doute de T'homme qui pense doit aussi guider l'homme qui agit. Et l'homme qui juge est un homme qui pense et qui agit. Le doute n'est pas une chose passive. C'est une activité. Il faut qu'on s'en occupe. Cest la certitude qui est paresseuse. Le doute est insomniaque et fiévreux. Et ce doute qui doit guider l'honnête homme, T'homme qui pense, l'homme qui agit, l'homme qui Juge finit par en avoir peur. Frustré dans son envie de vérité, il peut être gagné par l'envie de condamner; et c'est la pire des choses. Si on ne sait pas, il ne faut pas en faire le reproche à l'accusé, mais à l'enquête. Vous n'êtes pas là pour sauver l'enquête, pour aider les enquêteurs, pour les remplacer, pour combler leurs vides. Mais, précisément, la justice a horreur du vide, Elle ne supporte pas les questions sans reponse, et les crimes sans condamnation; elle ne le supporte pas jusqu'à la névrose, jusqu'à en perdre son controle et sa raison.
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Alors, oui, ie m'étonne et je m'indigne: allez-vous oser condamner sur la foi d'un dossier de plätre ? Je ne suis pas du côté des assassins, mais je ne suis pas non plus du coté de l'erreur judiciaire. Acquittez Christian Ranucci! Le sang se lave avec les larmes, non avec le sang. Tant que la peine de mort exIstera, la nuit régnera dans la cour d'assises. »
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