Citations de Maurice Zundel (106)
Le Père Pio, selon le témoignage de l’un de ses biographes, offrit un jour à un visiteur qui lui avouait humblement ne pas croire en Dieu cette réponse d’une miraculeuse grandeur : « Mais Dieu croit en vous »
Eh bien, la Création, c'est le sourire, le sourire de Dieu, qui suscite l'être et la vie, qui fait naître l'harmonie et la beauté, qui fait circuler la joie et le bonheur, à condition que nous répondions à ce sourire par le nôtre, car un sourire s'éteint dès qu'il ne trouve pas la réponse qui le fait circuler (JPC, p. 113).
Dieu est pauvre, Dieu est radicalement désapproprié de soi, Dieu n'a rien et ne peut rien posséder, Dieu est l'antipossession et l'antiNarcisse, comme il est la Virginité en sa source dans cette distance infinie de soi à soi qui fonde la transcendance de l'Amour.
En Dieu le "moi" est pur altruisme, la personnalité jaillit éternellement comme un pur regard vers l'autre ou comme un pur rapport à l'autre : le Père en effet, n'est qu'un regard vers le Fils, le Fils n'est qu'un regard vers le Père, et l'Esprit Saint n'est qu'une respiration d'amour vers le Père et le Fils.
C'est-à-dire qu'en Dieu la personnalité se révèle comme une puissance infinie d'évacuation et de libération de soi.
Nous nous appliquerons avec d'autant plus d'ardeur à extirper le paupérisme, la famine, les taudis, la prostitution, la guerre et toutes les formes de violation de l'homme, que nous serons plus sensibles, à travers tous ces maux, aux blessures de Dieu.
Il y a donc en toute âme humaine une sorte de maternité divine à accomplir, qui correspond à la mystérieuse fragilité de Dieu.
Mais lorsque la perversité triomphe, lorsque l'homme se déshonore ou déshonore les autres, en méprisant en soi ou en eux cette dignité incommensurable que lui communique la Présence infinie, alors le mal atteint son sommet parce que la plus haute Valeur est trahie, qui est Dieu en nous.
Là où il y a refus d'amour, l'Amour qui est Dieu ne peut qu'échouer, sans évidemment cesser, pour autant, d'être l'Amour éternellement présent, éternellement offert.
C'est pourquoi, finalement, la seule réponse adéquate au problème du mal, c'est l'agonie et la crucifixion de Jésus-Christ.
C'est en lui en effet que s'exprime, comme un sacrement visible, cette mystérieuse fragilité de Dieu, qui est certes tout puissant dans l'ordre de l'amour, qui peut tout ce que peut l'amour, mais qui ne peut rien de ce que ne peut pas l'amour. (...)
Il ne peut être, encore une fois, qu'un don éternellement offert.
Nous pouvons d'ailleurs ajouter que "la belle ordonnance" de l'univers a pour contrepartie, sur notre planète, la destruction des vivants les uns par les autres. (...) Que ferons-nous de notre lyrisme et de toutes nos émotions esthétiques en découvrant ses soubassements comme un immense charnier ?
(le mal absolu) c'est la dégradation volontaire de l'homme en soi et en autrui.
Ou bien il n'y a pas d'homme dans un univers sans Dieu : et il n'y a rien que l'absence, l'absurde, le non-sens partout. Mais cela n'est pas vivable, et au fond personne n'y croit qui consent à vivre.
(...)
Ou bien l'homme est possible : à condition qu'il consente à se faire tel.
Que pouvons-nous aimer dans les autres, que pouvons-nous respecter, à quoi pouvons-nous, en eux, nous consacrer, éventuellement, nous sacrifier ? Ce n'est pas bien sûr à leur "moi" complice, biologique, animal, passionnel, qui fait d'eux les esclaves d'eux-mêmes, comme nous le sommes si souvent de nous-mêmes.
Ce que nous pouvons aimer dans les autres, c'est leur libération et leur grandeur possibles, c'est leur dignité virtuelle, c'est leur vocation d'être source et origine, leur capacité de devenir une valeur, un bien universel, irremplaçable.
L'émerveillement c'est précisément le moment où émerge en nous une nouvelle dimension, c'est le moment privilégié où nous sommes soudain guéris pour un instant de nous-mêmes et jetés dans une Présence que nous n'avons pas besoin de nommer, qui nous comble en même temps qu'elle nous délivre de nous-mêmes.
Le vivant est une sorte de contradiction dialectique, c'est-à-dire que le vivant est un "pour soi" - il entend exister pour son compte, je veux dire qu'en lui toutes les fonctions sont ordonnées à sa subsistance et à sa survivance - et qu'en même temps il dépend de tout l'univers.
Il est, en effet, impossible de parler de liberté si cette liberté ne signifie pas la libération radicale de nous-mêmes, dans une dimension créatrice d’où résulte une existence autonome et irremplaçable.
Il y a en chacun de nous une vocation mystique qui s'ignore le plus souvent.
L'humanité n'a jamais éprouvé plus tragiquement le besoin de Dieu.
La relation au divin ne peut être qu'intime. Dieu est une présence intérieure. Une force de vie nichée au plus profond de nous-mêmes, et la prière permet le contact intime avec cette présence. Chacun doit chercher au fond de lui la relation qui lui convient.
L’essentiel est de se recueillir,
L’essentiel est d’écouter,
L’essentiel est de s’émerveiller,
Car lorsqu’on s’émerveille, lorsqu’on admire, nécessairement, on se quitte soi-même on demeure suspendu à la Beauté de Dieu, on se réjouit de sa Présence, on se perd dans son Amour.
L’essentiel pour chacun de nous c’est, chaque jour, de nous donner la possibilité de nous émerveiller.
Alors Dieu n’aura jamais pour nous ce visage déjà vu, qui nous lasse et nous ennuie.
Nous voulons écouter,
Nous voulons nous cacher au cœur du silence.
Nous voulons entrer dans cette grande procession de la Beauté. Alors nous découvrirons en effet un Dieu qui nous sera neuf chaque matin.
Ne l’oublions pas : Dieu, c’est quand on s’émerveille !
Le paradoxe de la pauvreté évangélique, c'est qu'elle nous commande d'extirper la misère autant qu'elle nous presse de supprimer la richesse, pour qu'il n'y ait plus deux humanités, séparées par la frontière infranchissable qui oppose la pénurie à l'abondance.