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Citations de Mazarine Pingeot (322)


Mon corps est un musée d’archives obstrué par le silence.
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Avec la solennité du serment, je lui certifie avoir été agressée par cet homme, dont je ne prononce jamais le nom; mais la violence qu'a libérée cette révélation a fini par me faire douter. Pas douter de ce qui a eu lieu, ou plutôt que ça ait bien eu lieu, mais de la nature de ce qui a eu lieu, ce qui est venu se briser ainsi en moi, pour découper mon existence en cet avant et cet après, et faire de moi une énigme.
Les traces du crime n'existent nulle part ailleurs qu'en moi, dessinées sur ma propre temporalité, à même ce corps qui ne répond plus, elles ont déserté la surface, ne s'y sont jamais imprimées, pour coloniser directement le fond, là où on ne va pas chercher, là où moi seule ai un accès, lui-même intermittent, ce lieu d'où naissent les maladies et la folie, ce lieu interdit où se cachent les secrets, ce lieu qui ressemble aux archives des préfectures, poussiéreuses, oubliées : collection des violences des hommes, mémoire des souffrances, grignotée par les rats.
Paul aurait peut-être eu besoin d'une attestation plus claire, moins intime, plus factuelle : que dire aux autres pour me défendre, comment accepter l'injustice avec aussi peu d'armes que ces mots confus ? « Ne me défends pas auprès des autres, crois-moi, c'est tout.»
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La justice? Ma pauvre Clémentine, la justice, même si elle finit par condamner le prince, aura traîné cinq, dix, quinze ans peut-être, quinze ans de campagnes de dénigrement de ta sœur, crois-tu que le jeu en vaille la chandelle ? Crois-tu qu'un verdict effacera ces quinze ans de lynchages, de chasse aux sorcières ?
Si encore nous gagnons, et rien n'est moins sûr, es-tu déjà allée dans un tribunal, voir comment ça s'y passe ? L'obligation pour Mathilde de venir répéter ce qu'il s'est passé exactement, en ayant l'air de souffrir, car l'apparence compte autant que les propos, face à son bourreau qui manie bien mieux la rhétorique, je peux te le garantir, et qui n'a contre lui aucune preuve, car va prouver qu'il l'a touchée !
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La justice est tout à fait secondaire, puisque le mal est fait.
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Il faut laisser du temps, comme lorsqu'elles arrivaient, le premier jour, laisser du temps au lieu pour qu'il s'immisce en vous, à sa convenance. Ne pas tout vivre d'un coup.
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Les mots servent le réel, et construisent des maisons et des cérémoniaux alors même que les murs tombent, les espaces se vident, la vie s'échappe, le sens disparaît. Mais les mots résistent. Résistent pour donner du sens.
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Comme le temps, la jeunesse n'existe pas ; c'est un abus de langage. La jeunesse est l'âge éternel, il n'y en a pas d'autres, les autres sont faits pour la recouvrir et la faire oublier, mais ce sont des illusions.
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J’avais sauvé mon fils, et en lui la pureté du lien qui nous unissait, et personne, personne jamais ne pourrait le briser, parce qu’il était scellé par notre pacte, qu’il n’aura jamais connu d’autre que moi-même.
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Mais Alice hurle : « Non, le monde ne commence pas à partir de soi ! On a une histoire, des grands-parents, une famille, une lignée, tu vois ? On vient de quelque part ! – C’est toi qui dis ça ? Toi qui a prôné l’anarchisme, la remise en question de toutes les institutions, y compris familiales ? – Mais je m’en fous de la société anarchiste, et tu sais pourquoi ? Parce que cette idée-là, elle vient de toi, justement de toi, de ma famille, de mon histoire. J’ai voulu m’engager, pour te prouver, justement, que c’étaient pas seulement des mots, pour que tu sois fière de moi.
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Je m'observe dans la foule, avec un rire mauvais, je me vois en âne stupide, sans faculté aucune de désobéir, et y trouvant peut être un certain plaisir. J'ai été bien dressée et je déteste ce que je vois de moi, je déteste encore plus me détester sans pouvoir rien faire. Je suis cette impuissance-là. Dedans et dehors à la fois, agissant au contraire de mes principes, au rebours de moi-même, avec une complaisance scandaleuse...
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Est-ce que la vie n'est pas un peu finie une fois qu’on a tout réussi ? (p.49)
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On ne connaît pas sa sexualité, parfois le désir nous guide, mais la culture, bon sang, l'a désorientée.
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Faire l’inventaire des différentes théories en physique quantique, dont la plupart concluent que le temps n’existe pas. Résumer les positions de ceux qui utilisent la relativité générale. Parler des astrophysiciens, de la physique classique de Newton et Galilée ? Faire une histoire du temps pour arriver aux « dernières nouvelles » ? Exposer de façon plus spéculative les théories adverses, fournir des anecdotes. C’est elle qui a voulu s’occuper du numéro spécial, pour mettre toutes les chances de son côté : si elle est partante pour prendre cette responsabilité et s’octroyer plus de travail que les autres, sans espérer de prime, elle assure sa place.
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Les logiques, ce sont elles qui règnent. Les logiques écrivent les nouvelles pièces, mais on ne sait pas où adresser son courrier à l’auteur pour lui dire que sa pièce est mauvaise, mal jouée, que sa pièce est pourrie. Il n’y a plus d’auteur. Il n’y a plus d’adresse. Peut-être une boîte postale offshore ou sur la planète Mars, dans une onde gravitationnelle ou une micro-puce implantée dans ton doigt de pied, mais qui pourrait être n’importe où ailleurs. »
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Elle ne sait plus trop quoi penser. Parfois, sa réflexion lui paraît sûre, mûre ; parfois, elle a l’impression que tout s’effiloche, le sens de ses pensées se coulant dans le courant général du grand flux des pensées du monde, s’évanouissant, n’étant plus que les pensées de tout le monde, les pensées fragiles et éphémères du bruissement du monde.
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Serrer les dents, elle connaît. Elle l’a pratiqué toute son enfance au point que son émail est attaqué. Elle ne peut manger ni trop froid ni trop acide. Le citron et l’ananas lui sont interdits. Du coup, elle n’aime pas ces fruits ; à mettre sur la liste des « Je n’aime pas ».
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Parce qu’elle aime tout, son travail, ses soirées, sa vie, la science, les polars, Paris, la campagne, la France, l’Italie, la mer, la montagne, la chaleur, le froid, le tiède. Il n’y a guère que le vent qu’elle n’apprécie pas. Heureusement, cette envie irrépressible d’acheter des chaussures clignote comme le signe d’un désir bien vaillant.
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Pourquoi toujours se restreindre, s’empêcher, économiser, rationaliser, adopter la logique des autres, se contenter de ce qu’on a, ne pas dévier de la trajectoire ? Rien ne lui interdit de dépenser l’argent qu’elle aura gagné dans une paire de chaussures inutile et audacieuse, après sa journée de labeur, avant de s’occuper des enfants : une heure pour elle, gratuite, bien que chère – c’est le paradoxe qui la réjouit. Cette perspective éclaircit la journée. Lucie peut s’engouffrer dans la station Richard-Lenoir, elle qui tournait autour depuis quelques minutes.
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La misère est plus exigeante qu’un contrat conjugal. Personne ne serait prêt à remettre en question cette évidence.
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Elle ne veut pas être dupe, elle sait tout ce qui peut arriver, elle voit le couteau se planter entre les omoplates, alors qu’il visite un camp de réfugiés dans un pays en guerre, sa peau couverte de plaies, se craqueler comme une terre trop sèche, elle reste sur ses gardes, le bonheur ne l’endormira pas, elle prévoit tout, comme dans une guerre tactique, ignorant néanmoins l’ennemi, sinon sous la forme de « tout ce qui peut arriver », son imagination est sans limites.
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