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Critiques de Meyer Levin (38)
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Crime

Ce Roman Inimaginable Magistralement Ecrit





EBÉ, quelle lecture !



Si je devais résumer CRIME de Meyer Levin en trois mots, je qualifierai ce roman à la fois d’Exigent, de Bouleversant et d’Éblouissant.



Exigent…



Touffu, très détaillé, philosophique même dans lequel Nietzsche et Freud sont omniprésents. Ce livre, édité chez Phébus libretto, qui plus est avec une police de caractère spéciale, n’est vraiment pas un livre de plage !



J’ai démarré cet ouvrage par les notes de l’éditeur et l’avant-propos, fort intéressantes au demeurant mais que je conseille de lire après coup en même temps que la postface également remarquable. J’ai donc enchainé sur le début du roman saturé d’informations et j’ai eu du mal à rentrer dans le récit. J’ai craqué et j’ai repris cet ouvrage une vingtaine de jours plus tard frais et disponible pour tordre le coup à ce roman vraiment spécial. Malgré la kyrielle de prénoms ou noms à assimiler, j’ai réussi à franchir le cap qui permet de savourer pleinement l’œuvre étonnante de Meyer Levin.



Bouleversant…



Si certains ont lu « De sang-froid » de Truman Capote, « Crime » est de la même veine et raconte l’histoire d’un crime perpétré par deux adolescents Leopold et Loeb le 21 mai 1924 à Chicago. Tout est presque connu dès le début du récit, hormis le verdict final, et le roman va s’attacher à dérouler en détails l’assassinat, l’enquête et le procès des meurtriers. Différence notable avec le roman de Capote, l’auteur connaissait déjà les deux adolescents car ils étaient camarades de classe durant leur scolarité. En outre, Levin a décidé d’inscrire son propre personnage dans l’histoire en étant le journaliste d’un journal local, le Globe, pour survenir à ses besoins et participer activement à l’enquête.



Pour prendre des distances avec les faits réels, l’auteur a décidé de changer les noms des personnages ou d’en créer de nouveaux, imaginaires; les deux criminels juifs sont appelés Judd Steiner et Artie Straus tandis la victime, beaucoup plus jeune dans le roman, se nomme Paulie Kessler, fils de milliardaire. Ces deux étudiants, débarquant à l’école en limousine avec chauffeur, sont des fils de riches familles juives de la haute société américaine. Artie Strauss, adepte de romans policiers, indigne de son rang à l’époque (voir citation), était le plus jeune diplômé de l’histoire de l’université du Michigan. Judd Steiner, étudiant en droit, féru d’ornithologie et parlant quelques quatorze langues, s’apprête à être reçu à l' université d’Harvard. Bref, deux êtres extrêmement intelligents !

Comment ces deux individus ont-ils bien pu perpétrer un acte aussi horrible avec préméditation et avec une froideur aussi implacable ?



Eblouissant…



Contrairement à Capote, la liberté d’écriture de Levin a permis à l’auteur de romancer les nombreux dialogues entre les deux protagonistes et le reste des personnages qui les entourent, avant et même après le meurtre. Avec un brio incroyable…



Pour ma part, l’enquête située au deuxième tiers du roman est tout simplement extraordinaire. Peut-être la meilleure que je n’ai jamais lue. Les passionnés de Sherlock en auront pour leur argent.



Pour conclure, Meyer Lévin, a réussi à mêler, avec audace et talent dans une même œuvre, polar, philosophie, religion, psychologie et sociologie. Magistral et unique.



Il est des lectures qui vous marquent pour une vie.



« Crime » me marquera assurément.





PS : J'avais été épaté par le roman "De sang-froid" qui joue fortement sur l'émotion suscitée alors que "Crime" focalise l'attention sur une enquête grandiose qui rend le livre unique et incomparable. Deux ouvrages à lire absolument même si on n'aime pas traditionnement les polars.
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Crime

On a tous rêvé de tuer quelqu'un.



Du triste gland slalomant sur la route, un A vissé au cul et une dangereuse passion pour la queue de poisson, au flic venant vous coller une prune en vous souhaitant finalement une bonne journée en passant par l'incontournable client(e) de grande surface hurlant dans son portable pendant que ses articles s'amoncellent sans que cela semble lui poser le moindre problème, c'est pas le boulot qui manque !



Artie Straus et Judd Steiner l'ont fait.

La différence entre vous z'et moi ? La préméditation.

La volonté, pour ces deux génies en herbe issus de la très haute bourgeoisie, de réussir le crime parfait.



S'appuyant sur des faits authentiques et particulièrement marquants, l'auteur appartenant alors à la même université que les deux criminels en puissance à l'origine de l'enlèvement et de l'assassinat du tout jeune Bobby Franks le 21 mai 1924, Meyer Levin relate froidement ce que furent, possiblement, les psychologies perturbées de ces tout jeunes adultes tout en s'appuyant sur une enquête au cordeau que n'aurait pas renié Columbo.



Si le sujet est rude, il n'en reste pas moins fascinant d'intelligence et de subtilité.

Levin dépeindra ainsi une jeunesse dorée jusqu'au-boutiste, pleinement consciente de ses actes, beaucoup moins de la violence de ses conséquences dramatiques.

Un sentiment d'immunité légitimé par une intelligence nettement supérieure à la moyenne qui n'est pas sans rappeler Raskolnikov, personnage dont se réclame ouvertement l'auteur.



Crime est un roman brillant s'adressant au plus grand nombre, ce qui m'arrange franchement.

N'hésitant pas à verser dans la psychanalyse pour tenter d'appréhender les motivations réelles des deux tueurs, Levin, habité par le profil atypique de son duo d'anti-héros, délivre une partition riche en émotions tout en tentant d'interpréter sans jamais juger.



A vous de vous faire votre propre opinion.

Ce Crime était presque parfait...
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Crime

Artie Straus et Judd Steiner sont de brillants voire très brillants élèves. Agés de 18 et 19 ans, issus de familles millionnaires, ces gamins sont nés avec une cuillère d'argent dans la bouche. Tout les promettait à un avenir glorieux et à des études réussies haut la main. Mais, serait-ce le manque d'adrénaline dans ce monde si parfait et si lisse à leurs yeux qui les a poussés à commettre l'irréparable ? Une soif de vivre ? Un besoin de se prouver qu'ils sont des surhommes, ainsi qu'ils se qualifient eux-mêmes ? Leur seule envie : commettre le crime parfait. Pour cela, ils kidnappent un gamin de milliardaires, tant qu'à faire, autant que cela leur rapporte un peu d'argent en réclamant une rançon. Tout était étudié depuis des mois, le moindre détail fignolé : les lettres anonymes envoyées aux parents, l'endroit où le père devait remettre l'argent, la voiture de location pour passer inaperçu, l'usage de faux noms, déposer le corps de l'enfant dans un lieu peu fréquenté... Ils avaient tout prévu. Sauf que le corps a été retrouvé très vite, la remise de l'argent ne s'est pas faite étant donné que l'enfant a été très vite identifié grâce (ou à cause, c'est selon) à Sid, l'apprenti journaliste et accessoirement un camarade de classe de Judd et Artie. Malheureusement pour les deux jeunes hommes, la population, la police et les journalistes ont été chamboulés et horrifiés par ce meurtre gratuit et vont se lancer à corps perdu dans la recherche des assassins. Une paire de lunettes est retrouvée sur les lieux du crime et la machine s'enclenche irrémédiablement pour Judd et Artie...



Meyer Levin relate dans ce polar ce qu'il a vécu dans les années 20. Cette histoire défraya la chronique puisque ces deux jeunes hommes n'avaient qu'une envie: commettre le crime parfait. Tuer pour tuer, rien d'autre. L'auteur s'est beaucoup attardé sur la personnalité des meurtriers, l'enfance qu'ils ont eue, leur mode de vie, leur insouciance, leur façon de penser et le fait de croire qu'ils étaient au dessus des hommes et de la loi. L'auteur ayant vécu cela de très près, il a réussi à relater les faits d'une façon assez neutre et c'est bien là le point fort de ce polar. Avec son écriture terriblement efficace, Meyer Levin nous plonge réellement dans cette Amérique des années 20. Il décrit avec précision et avec une attention toute particulière pour les tueurs les faits en eux-mêmes et les conséquences qui en découlèrent. Avec une seconde partie accrocheuse, notamment les différentes plaidoiries, ce polar nous tient en haleine et nous montre une bien sombre image de la jeunesse dorée.



Un crime... presque parfait...
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Crime

Qu'est-ce qui nous pousse à lire des histoires abominables, tirées de surcroît de faits réels ? Car il faut le dire, ce roman est abominable et pourtant...tellement bien écrit, enivrant et si captivant que le lecteur ne peut que s'y accrocher avec qu'une seule envie : savoir l'issue de l'histoire. Sommes-nous tous un peu fous ? Je ne le pense pas car, pour mon cas, moi qui suis une fan inconditionnelle des ouvrages de Truman Capote, on aurait dû me délivrer un certificat depuis longtemps...



Ici, nous avons face à nous deux jeunes hommes, Artie Strauss et Judd Steiner, tous deux âgés de 19 et 18 ans. Cette histoire se déroule dans les années 1920 à Chicago et tous deux sont donc encore considérés comme mineurs car, à l'époque, la majorité était fixée à l'âge de 21 ans. Tous deux sont fils de parent milliardaires et sont doués d'une intelligence hors du commun. Pourquoi alors puisqu'ils sont à l'abri du besoin financier, vont-ils enlevé un jeune garçon afin d'en demander une rançon au père avant de l'assassiner de sang-froid (j'adore cette expression, même si elle est horrible à proprement parler, car elle ramène sans cesse à mon cher Truman Capote) ?

C'est ce que le lecteur va tenter de découvrir tout au long de cet ouvrage. L'histoire nous est contée par l'un de leurs amis, ou du moins, camarades de classe -ce serait plus exact -, reporter pour le journal "Le Globe". C'est d'ailleurs le narrateur qui identifiera le corps puisque les pistes ont été brouillées par nos deux assassins qui avaient défigurer ce dernier avec de l'acide et qu'une paire de lunettes avait été repêchée (eh oui, le corps a aussi été noyé) alors que l'enfant n'en portait pas. Si ce n'était pas celles du jeune garçon, c'étaient alors forcément celles de l'un des assassins...



Cet ouvrage emmène le lecteur vers un long voyage, au coeur de l'Illinois, sur les suites d'un meurtre et puis d'un procès qui paraît interminable tant le lecteur a envie de savoir la sentence qui leur sera imposée. Seront-ils pendus comme semble le réclamer le procureur de l'accusation Horn ou enfermés "ad vitam eternam" comme le demande leur avocat, Jonathan Wilk ?

Les noms ont bien entendu été changés pour les besoins de l'histoire mais il n'en reste pas moins que cette histoire fait plus vraie que nature (c'est logique puisqu'elle est tirée d'une histoire vraie), que ce genre de crime a toujours été monnaie courante, l'est encore de nos jours (malheureusement) et le sera encore. Attention, ne vous méprenez pas, je ne me fais pas l'avocat du diable car s'il y a bien une chose que j'exècre (tout comme chacun d'entre vous), ce sont bien les crimes de quelque nature qu'ils soient mais il n'empêche que je n'ai pas pu m'empêcher de m'attacher aux personnages et de tenter de les comprendre, si pareille chose est possible...). A découvrir !

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Crime

Comme dans un épisode de l’inspecteur Colombo, dès l’entame du livre, l’auteur nous révèle l’identité des tueurs et l’horrible crime (exécuter un enfant de sang-froid) dont il se sont rendus coupables. Son intérêt n’est pas de démasquer les criminels mais de comprendre leur mobile. Car leur profil a de quoi stupéfier les plus cyniques : des fils de milliardaires, surdoués et promis à un avenir radieux. Les deux complices ont même exigé une rançon de 10 000 dollars qui, pour eux, s’apparente à de l’argent de poche. Alors pourquoi ? À quels moments des individus sains d’esprit, délivrés du besoin, décident-ils de faire une chose aussi abjecte ?

Par jeu - aussi cruel soit-il ? Par ennui ? Pour une quelconque perversion ? Par défi intellectuel, en planifiant minutieusement ce qui devait être un crime parfait ? Pour faire l’expérience du mal absolu, gratuit, inexplicable ? Pour se sentir totalement libres, affranchis de toutes contraintes, de toutes lois ? Sous l’influence d’une théorie contestable, en l’occurrence celle du surhomme popularisé par Nietzsche dont l’un des tueurs est un admirateur ? L’examen de ces hypothèses, sur fond d’une psychanalyse balbutiante, s’avère passionnante.

Le lieu (Chicago) et l’époque ont leur importance. On sort de la première guerre mondiale, on a versé trop de sang, Al Capone n’est pas encore au fait de sa gloire. Il y a réticence à garnir la potence.

Le procès, dans la grande tradition américaine, voient s’affronter deux cadors mais aussi, deux conceptions de la société. Leurs échanges (datés des années 20) laissent pantois sachant que cent ans plus tard, les droits les plus fondamentaux sont remis en question de l’autre côté de l’Atlantique.

Tiré d’un horrible fait divers qui a secoué l’Amérique, ce roman est un tour de force. Meyer Levin est parvenu à rentrer dans la tête de chaque protagoniste et c’est pourquoi cette histoire vraie, revisitée, vous hantera durablement.

Bilan : 🌹🌹🌹

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Crime

Tout d'abord, je tiens à remercier Jeranjou qui m'a mise sur la piste de ce livre,j'ignorais absolument tout de cet auteur et de cette sordide histoire.



Belle couverture, chez Libretto, Edward Hopper , qui nous plonge d'emblée avec Room in NewYork , aux Etats-Unis, mais à Chicago en 1924.



Qu'est-ce que ce roman? L'auteur précise dans son avant-propos avoir voulu suivre la " grande tradition littéraire de Stendhal, dans Le Rouge et le Noir, de Dostoïevski dans Crime et Châtiment, de Théodore Dreiser dans Une tragédie américaine..

Par opposition aux romans à clef, je pense que Compulsion pourrait être classé dans la catégorie des romans historiques contemporains, ou dans celle des romans documentaires.

Bien que l'action soit empruntée à la réalité, il va de soi que les pensées et les sentiments des personnages sont imaginés par l'auteur."



Il s'est aidé pour cela de tous les détails connus de cette affaire, des rapports psychiatriques, a recopié des extraits entiers des plaidoiries, et était donc particulièrement bien placé pour être bien documenté, car d'une part il était à l'époque " apprenti journaliste" pour son université et a participé activement à l'enquête, et d'autre part, il connaissait ces deux garçons.

Mais c'est un roman, pas dans les faits eux-mêmes, incontestables, mais plutôt dans l'interprétation des caractères des principaux protagonistes, qui lui est propre, et c'est pour cela qu'il n'a pas utilisé les véritables noms de ces protagonistes.

' Telles sont la vérité et la réalité à mes yeux. Car, dans le domaine de l'émotion, il n'y a pas de vérité absolue ni définie, la réalité passe toujours à travers un être, et ce qui va suivre est la réalité à travers moi."



L’histoire elle-même a déjà été racontée, deux très jeunes hommes enlèvent un enfant et demandent une rançon à la famille. Mais ils le tuent tout de suite. Aucun suspense, donc, mais le récit de l’enquête, et du procès.

Pourquoi ont-ils fait cela?



La deuxième partie, c’est le procès et là.. il faut lire attentivement la plaidoirie de leur avocat qui était donc en fait Maître Clarence Darrow, qui est une merveille dans la dénonciation de la peine de mort. Tous les arguments connus sont énoncés , mais nous sommes en 1924..



"Cette question du crime et du châtiment, aussi vieille que l’humanité, suivez-là à travers les âges , devant les bûchers, les croix, les roues, les pals, les gibets et les échafauds, aux temps où la populace assemblée venait se repaître des supplices! …

Est-ce à moi de rappeler à Votre Honneur que la cruauté n’engendre que la cruauté? ..

Votre Honneur, je suis obsédé par la tempête de haine et de fureur qui secoue ce pays! Je me bats contre la tempête jusqu’à en perdre la raison. Ce n’est pas tant pour ces garçons que je me bats et que je plaide devant vous. Je plaide pour eux qui viendront après eux, la foule des autres qui affronteront peut être sans secours l’orage et la tempête. C’est en leur nom que je supplie la Cour de renoncer aux barbaries et aux cruautés du passé! "



Très longue plaidoirie, très grand moment d’éloquence pleine d’une humanité qui réconforte.Mêlée de poèmes, dont celui, très touchant , d'Alfred Edward Housman, cité par Jeranjou:



Voilà comme le jeu finit

Qui n'aurait pas dû commencer

Mes pères et mère ont eu un fils

Sans y penser.



Je me suis demandée si Maître Badinter la connaissait? Je suppose..

Lisant cela, je me suis dit, naïvement, que l’Illinois, avec de tels avocats, avait dû être un des états américains qui avaient supprimé la peine de mort rapidement.. Pas du tout, elle n’a été abolie qu’ en 2011.



En tout cas, très bon moment de lecture!




Lien : http://fr.wikipedia.org/wiki..
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Crime

1924 – Chicago : Deux jeunes brillants étudiants, Artie Strauss et Judd Steiner, 19 et 18 ans, dotés d’une intelligence et de capacités intellectuelles très élevées en particulier pour Judd, vivant dans des familles aisées, décident de commettre un crime « gratuit », sans motif réel, simplement pour démontrer qu’eux deux en sont capables, qu’ils peuvent se jouer des enquêteurs (et du genre humain) avec un plan qu’ils pensent imparable. Entre eux un lien trouble et ambigu se tisse fait à la fois d’admiration, de jalousie et d’amour.



"Tuer pour moi n’est qu’un détail. (p243)"



Voilà ce qui pourrait résumer la pensée des deux acolytes : tuer non pas pour le plaisir, tuer n’est pas important, tuer non pas par vengeance ou pour l’argent (même si une rançon est réclamée), non pour démontrer leurs supériorités, que le crime parfait est possible et qu’ils en seront les maître d’œuvre. La victime : un jeune garçon de 11 ans, Billy Strauss, un voisin donc pas un inconnu mais un garçon que l’un d’entre eux a côtoyé car ami de son jeune frère du même âge. Ils vont froidement mettre au point leur crime, sans état d’âme autre que celui de réussir et de tout prévoir, implacablement, afin de se sentir plus « puissants » que la police et la justice.



Si vous avez aimé De sang-froid de Truman Capote qui mêlait déjà crime réel gratuit perpétré par de jeunes adultes et enquête, ce roman (récit) inspiré d’un « fait divers » authentique, a de fortes chances de vous plaire mais également de vous glacer d’effroi. Contrairement à De sang-froid, ici les meurtriers ont « planifié » leur crime afin de démontrer ce qu’ils pensent être : des Surhommes à la manière de Nietzsche, au-delà du genre humain, au-delà des sentiments. L’acte ultime et gratuit. L’originalité tient à ce que l’auteur, Meyer Levin, à l’époque stagiaire-journaliste au Globe parallèlement à ses études universitaires, a pris part aux événements à plusieurs titres : il connaissait les deux assassins car faisant partie de la même « Fraternité » universitaire à Chicago mais il participa à l’enquête et couvrit le procès ensuite.



La narration se décompose en deux parties : Le Crime du siècle, qui relate les faits, journalistiquement, avec ce que Sid a su et vécu mais aussi en imaginant ce qu’ont pu dire ou faire Artie et Judd puis Le procès du siècle avec la transcription du procès qui se tiendra pour décider de leurs sorts car il s’agit de juger deux mineurs (la majorité étant à 21 ans) coupables d’un crime odieux puni par la peine de mort. Vont-ils plaider coupables ou non coupables, sont-ils responsables ou doivent-ils être considérés comme psychologiquement irresponsables, comme fous ?



C’est une lecture glaçante, d’autant que les faits, je le rappelle, sont réels (seuls les noms ont été modifiés), par l’attitude des deux protagonistes, leurs esprits pervers, la distance qu’ils mettent entre eux et le crime, l’absence totale de sentiments, la recherche continuelle du mal allant jusqu’à envisager de faire endosser le crime par un innocent, une communauté, à l’augmenter de sévices, à se jouer de la police et de leurs familles. Nous découvrons peu à peu tous les détails qu’ils élaborent, la manière dont fonctionne le cerveau de chacun car finalement très différent l’un de l’autre que ce soit dans le caractère, l’influence de l’un sur l’autre et les raisons qui peuvent expliquer leur acte.



Il ne s’agit pas d’un roman policier car les faits sont établis dès le début mais plutôt une enquête psychologique pour relater et essayer (je dis bien essayer) de comprendre ce qui peut expliquer un acte criminel, prémédité, gratuit, mis en œuvre par deux adolescents qui n’étaient pas prédestinés à se retrouver un jour sur le banc des accusés, que ce soit par leurs milieux sociaux ou leurs éducations.



Meyer Levin traite le dossier avec le souci de nous faire part des interrogations qui ne seront jamais éclaircies, la complexité à définir la personnalité de chacun des assassins ceux-ci se jouant des spécialistes appelés à témoigner et à remettre leurs conclusions, à ne pas totalement révéler ce qui les unissait. Non ce n’est pas un roman policier mais cela se lit comme un roman policier, mais aussi c’est aussi une enquête pour tenter de comprendre ce qui peut animer deux êtres humains déclarés supérieurement intelligents et pourtant capables du pire des actes.



J’ai beaucoup aimé.
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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Crime

Un "roman" percutant; les guillemets sont là pour rappeler qu'on parle d'une histoire vraie. Meyer Levin parvient talentueusement à marier le récit journalistique et le roman car si le journaliste a évidemment eu accès à énormément d'éléments ne fut-ce que par sa proximité avec les protagonistes, il a cependant romancé certains dialogues et certaines scènes.

Le livre est en 2 parties: "Le crime du siècle" et "Le procès du siècle"; La 1ère s'attache à cerner les 2 meurtriers et leur motivation. J'ai adoré la seconde qui suit pas à pas le (devinez, devinez, devinez!) procès d'une manière un peu plus journalistique. C'est une histoire horrible en grande partie à cause du profil des tueurs, intelligents voire surdoués et promis à un avenir brillant dans leur domaine.

Ce roman est un document précieux qui laisse un goût rance dans la bouche mais on ne peut s'empêcher de se sentir honoré d'avoir pu poser les yeux sur des lettres aussi magistralement agencées.

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Crime

Années 1920, Chicago. Artie Straus et Judd Steiner sont deux jeunes surdoués à qui la vie sourit : ils sont issus de familles richissimes et bien en vue dans la ville, ils mènent des études brillantes à l’université. Un avenir prometteur leur tend les bras. Et pourtant… Grisés par leur réussite, se raccrochant à une pensée nietzschéenne mal comprise, ils décident de commettre le crime parfait, parfaitement gratuit qui plus est. Ils assassinent donc un petit garçon. Esprits supérieurs ? Pas tant que cela puisque la police va retrouver un premier indice, semé par inadvertance par l’un des meurtriers.



Le crime du siècle ! Tel est le titre de la première partie. L’auteur, Meyer Levin, indique dans un avant-propos, que « le thème de ce livre repose sur des faits authentiques, bien connus aux Etats-Unis : le 21 mai 1924, à Chicago, un jeune garçon de quatorze ans, Bobby Franks, était enlevé et assassiné par deux jeunes gens de dix-huit et dix-neuf ans, Richard Loeb et Nathan Leopold, tous deux étudiants à l’université de Chicago, considérés tous deux comme des prodiges d’intelligence, et tous deux fils de milliardaires. Les meurtriers n’avaient d’autre mobile que de réussir un « crime parfait ». » (p.13)

L’auteur explique qu’il avait le même âge, à l’époque, qu’il était étudiant dans la même université, et reporter au Chicago Daily News, où il a publié des articles lors du procès de ce crime du siècle.

Il a décidé, bien des années plus tard (« Compulsion », titre américain, sera publié en 1956 aux Etats-Unis), de relater ce crime, d’une manière romancée. Ainsi qu’il l’indique lui-même, « bien que l’action soit empruntée à la réalité, il va de soi que les pensées et les sentiments des personnages sont imaginés par l’auteur » (p. 14). Afin de marquer ce caractère fictionnel, il modifie les noms des meurtriers : Richard Loeb devient Artie Straus, Nathan Leopold, Judd Steiner.



Le texte est écrit dans une police minuscule, ce qui au départ m’a semblé déplaisant. Il m’a fallu un temps pour m’habituer à cette écriture assez peu engageante. Mais cette première impression concernant la forme a été dissipée assez vite par le contenu saisissant de la première partie. Meyer Levin me semble user d’un procédé habile, puisque lorsque la première partie commence, le méfait sordide a déjà été accompli, mais le lecteur en ignore encore les détails. En suivant Artie et Straus, dont on découvre progressivement la personnalité trouble, le lecteur va reconstituer, pièce par pièce, le puzzle d’événements qui compose le crime final, selon un procédé de flashbacks.



L’intelligence froide (déconnectée des affects ?) glace le lecteur. Judd se réfère avec complaisance à une pensée nietzschéenne, mal comprise, ainsi que le soulignera son avocat de la défense au cours du procès.

Dans une lettre à Artie, Judd écrit ainsi :

« Pour des êtres de notre espèce, tu le sais, l’erreur est pire que le crime. Je vais donc faire effort pour t’expliquer ma conception de la philosophie nietzschéenne en ce qui te concerne : le surhomme est exempté des lois ordinaires qui gouvernent le commun des hommes. Rien de ce qu’il peut faire ne l’engage, à l’exception cependant du seul crime qu’il puisse commettre : faire une erreur. » (p. 230-231.)



Wilk, avocat de la défense, va reprendre ces idées, ces théories, pour ramener Judd à la réalité de l’existence :

« Sa voix, durcie, se mettait au diapason de l’idée :

Le grand homme, l’homme de grand style, est plus froid, plus dur, moins prudent ; il est libéré de la crainte de l’opinion.

Là-dessus, il s’adressa directement à Judd, comme à un élève borné :

- Cela, c’était un rêve philosophique, nullement destiné à servir une règle de vie ! » (p. 352.)



A crime du siècle, procès du siècle. Ainsi s’ouvre la seconde partie. Si la première partie m’est apparu comme passionnante et haletante (j’avais hâte de découvrir la faille par laquelle allait s’engouffrer la police pour identifier les deux criminels), la seconde m’a semblé plus ennuyeuse et peut-être un peu vieillie. Les joutes oratoires entre la défense et l’accusation souffrent parfois de longueurs, même s’il convient de souligner l’excellent plaidoyer de Wilk contre la peine de mort. Les débats m’ont semblé assez souvent techniques, même si les prises de parole des « aliénistes », basées sur les connaissances en psychologie du début du XXème siècle, m’ont parus intéressants.



Un livre glaçant, à (re)découvrir, dont la postface livre une belle leçon d’humanité.
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Crime

Il y a tout juste cent ans, un procès retentissant a eu lieu à Chicago, à la suite d’un meurtre commis sur un adolescent de quatorze ans issu d’une des familles les plus aisées de la ville, par deux jeunes, âgés de respectivement dix-huit et dix-neuf ans, décrits tous les deux comme brillants et extrêmement intelligents, et également fils de citoyens les plus riches et en vue de celle qui était à  l’époque la deuxième ville américaine en termes de population. C’est l’histoire de ce meurtre et du procès qui a suivi qu’a décidé d’écrire, en 1956, Meyer Levin, qui avait côtoyé de près les protagonistes, étant étudiant à la même université qu’eux et ayant couvert l’enquête en tant que journaliste stagiaire. Dans son roman, « Crime », l’auteur modifie les noms des protagonistes car, s’il s’agit d’une restitution des faits, la réalité est, comme il l’explique dans son avant-propos, vue à travers lui.



C’est donc l’histoire de Judd et d’Artie, qui, après un long travail de préparation, décident de commettre le crime parfait, imbibés qu’ils sont des théories nietzschéennes dont celle du surhomme, Übermensch, dont ils revendiquent le statut. C’est celle, également, d’un jeune journaliste qui va se trouver mêlé à une enquête et un procès dans lesquels s’imbriquent inversion (au sens de la façon dont était considérée l’homosexualité à l’époque), prémices de la psychanalyse, définition de la folie, vétusté de la loi, statut social, circonstances atténuantes et débat relatif à la peine de mort.



Grâce à une construction alternant le point de vue des deux meurtriers et celui du jeune journaliste, puis le procès en tant que tel (j’ai trouvé la plaidoirie de l’avocat de la défense d’une grande modernité), Meyer Levin nous offre un portrait tout en nuances de personnages bien plus complexes qu’ils semblent l’être de prime abord. J’ai énormément apprécié son approche, vivante, sans parti pris tout en veillant à exposer de manière complète les tenants et aboutissants. Non, il ne s’agit clairement pas d’un crime parfait, puisque les auteurs ont été, assez rapidement, en fait, interpellés, mais d’un crime a priori inexplicable et atroce, qui va déchaîner les passions, dans le tribunal et au-delà. J’ai trouvé ce roman très bien écrit et captivant.



En résumé, une fort intéressante plongée cent ans en arrière à la rencontre d’un crime qui a secoué les Etats-Unis.



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Crime

De ce livre, je n’ai aimé que la première partie sur l’histoire de 2 jeunes gens fortunés assassinant un petit garçon de 9 ans pour le plaisir de réaliser le crime parfait. Ensuite, vient la deuxième partie qui relate le procès de long en large. Et là, tout dégringole, des centaines pages écrites pour rien ; ennuyeuses. J’ai eu le courage de lire jusqu’à la page 377. Après, j’ai survolé aux alentours des 400 pages. Et au final, j’ai décidé d’abréger mes souffrances en stoppant ma lecture pour lire que la fin. Et celle-ci est encore plus décevante.
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Crime

"Le thème de ce livre repose sur des faits authentiques, bien connus aux Etats-Unis : le 21 mai 1924, à Chicago, un jeune garçon de quatorze ans, Bobby Franks, était enlevé et assassiné par deux jeunes gens de dix-huit et dix-neuf ans, Richard Loeb et Nathan Leopold, tous deux étudiants à l’université de Chicago, considérés tous deux comme des prodiges d’intelligence, et tous deux fils de milliardaires. Les meurtriers n’avaient d’autre mobile que de réussir un "crime parfait ". "



Cette histoire est vraie comme il l’est dit dans l’avant-propos et seuls les noms des personnages ont été changés. Artie Strauss et Judd Steiner sont tous deux génies nés avec une cuillère en argent dans la bouche. Après l'enlèvement de Paulie, Artie et Judd ont réclamé une rançon en faisant croire aux parents que leur fils est bel et bien vivant. Mais la découverte d’un corps d’un jeune garçon rapidement identifié étant comme celui de Paulie est la première fêlure dans leur plan machiavélique. A l’époque des faits, Meyer Levin était lui-même étudiant dans cette même université et écrivait des piges pour payer ses frais de scolarité. Il a donc été donc lui même mêlé à l’affaire et a côtoyé les deux meurtriers.



Dès le départ, on sait qui sont les coupables. Mevin Leyer relate les faits, les procès et surtout les personnalités complexes d’ Artie et Judd, leur relation ambiguë. Artie est celui qui décide, Judd a pour lui une fascination totale mêlée à une pulsion sexuelle Tous deux imprégnés de Nietzsche se figurent être des surhommes au-dessus des lois.

On suit l’enquête, les agissements de Judd et Artie qui cherchent à dissimuler les preuves de leurs actes. Ils se montent très coopératifs pour l’enquête en aiguillant la police et Cid (Meyer Levin) sur de fausses pistes.



Comment et pourquoi ces deux jeunes hommes promis à un brillant avenir en sont-ils arrivés à commettre l’horreur ? Quelle étaient leurs motivations ? Meyer Levin nous immerge dans l’enquête puis dans le procès. Et là, on assiste aux avis divergents de deux écoles de psychiatrie qui s’affrontent. Mais ce qui choque est l'attitude d'Artie et de Judd : impassibles et n'éprouvant aucun regret.

Avec précision, Meyer Levin creuse et relate au plus juste les faits pour tenter de cerner la psychologie de ces deux jeunes hommes.



Captivant, glaçant, hypnotique et dérangeant !


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Crime

Le 21 mai 1924, deux jeunes brillants étudiants de l'université de Chicago, issus chacun d'une famille richissime décident d'assassiner un jeune garçon. Une affaire qui a défrayé la chronique et sur laquelle Meyer Levin, revient trente ans plus tard en 1956.



A l'époque des faits il est jeune reporter au Chicago Daily News. Il suit alors l'affaire de très près. Il a eu l'occasion d'écrire plusieurs articles au cours du procès qui eu lieu par la suite.



Faire un roman de cette affaire est, comme il l'explique dans sa préface, l'occasion de rappeler l'importance des Aliénistes qui à l'époque ont joué un rôle capital lors du procès de part leur avis concernant la santé mentale des deux jeunes hommes de 17 ans à peine sortis de l'adolescence. Les témoignages des psychiatres ont été souvent remarquables et presque tous en avance sur leur époque.



A travers un drame vécu, Meyer Levin en fait un récit en extrapolant certains faits. Il se met en scène à travers le personnage de Sid qui va être un des premiers journalistes à révéler l'assassinat dans la presse.



Ce roman m'a captivé du début à la fin. Le roman débute assez rapidement sur le jour du crime avec de nombreux flash-back qui présentent la psychologie des deux meurtriers et leur environnement (leurs amis de la Fraternité de l'université et leur famille respective) et la préparation minutieuse de leur projet. S'en suit le déroulement de l'affaire et ses différents rebondissements dont les journaux s'empressent d'en faire l'affaire du siècle.



Ce qui m'a fasciné dans cette histoire c'est avant tout ce duo meurtrier. Meyer Levin a réussit à mettre en scène des personnages à la psychologie humaine complexe et troublante. Leur amitié en apparence sans faille s'avère être un vrai rapport de forces. Une relation ambiguë où l'amour et la découverte de la sexualité entrent en jeu.



Ils savent tous les deux qu'au yeux de la société, ils sont irréprochables et intouchables de part leur brillante réussite scolaire et leur statut social. Artie à l'évidence a l'ascendant sur Judd qui préfère lui obéir et ne pas le contester. Ce dernier semble davantage tourmenté après la meurtre. Artie lui, très sûr de lui, ira jusqu'à aider les journalistes à retrouver les coupables. Ces derniers titreront à la une de leurs journaux que ce crime ne peut être commis que par un inverti (la victime ayant été violée) ce qui ne manquera pas donner un caractère sensationnel à l'affiaire.
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Crime

Le 21 mai 1924, à Chicago, un jeune garçon de 14 ans est enlevé. Sa famille reçoit une demande de rançon. Son père s'emploie à rassembler la somme exigée et attend les instructions des ravisseurs, lorsque le corps de l'enfant est retrouvé dans le marais de Hegewisch ( Wolf Lake), à la lisière de la ville.

Très rapidement, les soupçons se portent sur deux adolescents de 18 et 19 ans, brillants rejetons de familles très fortunées, promis au plus bel avenir.

A l'indignation se mêle l'incompréhension lorsque les deux meurtriers admettent bien volontiers qu'ils n'ont eu d'autre mobile que de commettre un crime parfait, prémédité de longue date.

C'est l'affaire Leopold et Loeb, qui a secoué l'Amérique des années 20 comme l'affaire du bébé Lindbergh secouera celle des années 30.



Meyer Levin, qui appartient à la même génération que les assassins, qui fréquentait la même université et qui les connaissait bien, avait couvert l'affaire pour le Chicago Daily News à l'époque. Il revient sur ces faits plus de trente ans après, non par goût du sensationnel, "Mais plutôt [dans] l'espoir d'apporter – qui sait ? – quelques clartés sur les causes psychologiques et sociales de certains crimes inexplicables, et d'accéder, peut-être, à une compréhension plus large des défaillances de la nature humaine", dit-il dans l'avant-propos.

Il change les noms des protagonistes, Bobby Franks est appelé Paulie Kessler, Richard Loeb devient Artie Straus et Nathan Leopold, Judd Steiner.

Il raconte son travail de journaliste et sa propre enquête pour le Chicago Daily News au fil des jours, et romance ce à quoi il n'a pas assisté.



Crime est un roman à plusieurs voix, tantôt celle du narrateur, tantôt en suivant Judd et Artie, tantôt avec le regard des journalistes, tantôt avec celui des enquêteurs.

De la découverte du corps d'un enfant inconnu dans un marais au procès retentissant de ses meurtriers, c'est toute l'affaire qui nous est racontée, avec tous les préjugés courants dans les années 20 concernant les homosexuels ( appelés "invertis" avec des mines écoeurées), les femmes, les milliardaires, les juifs... Je sais bien que ça ne s'est pas tant amélioré qu'on veut bien le dire, mais je me suis sentie bien soulagée d'être née quarante ans plus tard et de n'avoir pas la tête farcie de ces horreurs haineuses !



Lorsqu'il écrit Crime en 1956, Meyer Levin a connu bien des expériences terribles, en particulier la découverte des camps de concentration entre novembre 1944 et mai 1945 lorsqu'il a suivi l'avancée des troupes alliées comme correspondant de guerre.

Il se retourne donc sur l'affaire Loeb et Leopold avec un regard distancié, il ne juge pas, il veut comprendre. Comprendre leurs pensées, leur parcours, ce qui pouvait les faire agir avec une telle indifférence à la souffrance d'autrui : milieu surprotégé et sûr de sa supériorité ou sentiment d'abandon ?



Autant dire que la lecture n'en est pas franchement agréable, et que ce n'est pas une promenade de santé.

Le fonctionnement de la justice, où la présomption d'innocence n'existait pas, où l'on exhibait les coupables désignés en conférence de presse et où leurs dépositions étaient transmises aux journalistes, m'a laissée pantoise.

Et certaines maladresses m'ont bien dérangée.

Un viol qui n'en est pas un tout en en étant un mais avec l'accord pour finir de la victime, m'est resté bien en travers de la gorge.

Le parcours criminel d'Artie, dans lequel il entraîne un Judd plus qu'enthousiaste, est présenté comme si imbriqué dans leur relation amoureuse qu'on frôle l'amalgame bien souvent.

En revanche, leur apparent détachement est bien montré et souvent insupportable.



Meyer Levin cherche avant tout à donner les éléments au lecteur, libre à ce dernier de se forger une conviction ou non. C'est pourquoi il détaille tout, des premiers jours d'enquête au procès et aux plaidoiries finales des avocats et du procureur.

Finalement, c'est cette démarche qui m'a le plus intéressée dans cet ouvrage.

La quête de sens de son auteur, et le sentiment qu'il doit témoigner sans relâche, qu'il est né pour ça, en sont les clés de voûte.

Même avec ses maladresses, cela m'a touchée.

On peut juger des assassins, en penser ce qu'on veut, on ne doit pas oublier pour autant qu'ils font partie du genre humain...

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Crime

Quel livre passionnant! De bout en bout, vraiment.

Il est d'autant plus fascinant qu'il relate une histoire tristement vraie dont l'auteur en a été l'un des principaux protagonistes.



La question centrale de "Crime" (outre celle -non moins cruciale- de la peine de mort) est la suivante : Un acte peut il exister sans cause ou sans motif?



Le style est fluide, les dialogues pertinents, les personnages crédibles (dans la mesure où Levin Meyer connaissait les 2 condamnés). L'époque de l'Amérique bouillonnante des années 20 est bien rendue. Un vrai moment de lecture passionnant.

En débutant ce livre, je ne connaissais pas ce terrible fait divers. J'ai attendu d'en connaitre la fin relatée par Levin Meyer avant de me ruer sur internet pour voir à quoi ressemblaient ces deux jeunes hommes de bonne famille au dessus de tout soupçons. Je vous conseille plus que vivement d'aller visionner ces 3 petits liens :



* Partie 1 *

http://www.dailymotion.com/mychannel/guil50cents/video/x6vdl1_les-grandes-affaires-criminelles-le_news



* Partie 2 *

http://www.dailymotion.com/1-TIB/video/x6veao_leopold-et-loeb-le-gang-de-chicago_news



* Partie 3 *

http://www.dailymotion.com/1-TIB/video/x6veek_leopold-et-loeb-le-gang-de-chicago_news



A lire sans attendre!



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Crime

Si vous avez apprécié "De sang froid" de Truman Capote alors il ne faut pas passer à côté de "Crime" de Meyer Levin. L'histoire basée sur des faits réels se situe à Chicago dans les années 1920, Judd Steiner et Artie Straus, deux étudiants surdoués issus de la grande bourgeoisie, assassinent un jeune garçon sans autre motif que la "beauté du geste" dépourvu de toute émotion, ils sont persuadés d'avoir commis le crime parfait.



Dès le début du roman on connaît les auteurs du crime pas de mystère de ce côté-là. Tout comme dans "De sang froid" c'est toute l'enquête et aussi le procès qui suit qui maintiennent l'attention du lecteur.

Le livre se découpe donc en deux parties : la première partie sur les deux jeunes assassins, la préparation du crime, le passage à l'acte, l'enquête policière et la médiatisation de l'affaire. La deuxième partie se concentre sur le procès, la psychanalyse des deux meurtriers grands admirateurs de Nietzsche et de sa théorie de surhommes au-dessus des lois. Je retiens le magnifique réquisitoire contre la peine de mort dans la plaidoirie de Wilk.



C'est un roman magistral, un excellent polar journalistique, glaçant mais prenant dès la première page jusqu'à la dernière !
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Crime

Une bonne chronique judiciaire sur la base de faits réels, étoffée pour en faire un roman. Le sujet est intéressant par lui même, le livre est bien écrit, mais j'ai eu du mal à y voir autre chose qu'un compte-rendu d'une enquête de police puis d'un procès, où la réalité dépasse parfois la littérature. Une histoire marquante, certes, mais un roman qui m'est plutôt apparu comme un documentaire sur le fonctionnement de la justice américaine en 1924, à la façon de "De sang froid" de Truman Capote, le souffle de l'auteur en moins. Je m'étonne en outre que le procès se termine par le réquisitoire du ministère public et non par la plaidoirie de la défense.
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Frankie & Johnnie

On sait peu de choses de Johnnie et Frankie. Ils sont presque hors du temps. Le récit se limite - en grossissant à peine le trait - au regard qu'ils portent l'un sur l'autre, et au regard qu'ils portent sur ceux qui les regardent. Car la bienséance les rattrape. Frankie ne veut pas mettre à mal sa respectabilité, alors Johnnie commence à voir loin, à penser mariage, à réfléchir au coût d'un foyer, à imaginer Frankie portant un tablier dans un pavillon de banlieue - tout ça avec son regard teinté d'idiotie amoureuse et de réalisme amer.



Voilà pour l'histoire au sens strict. C'est tout ? Mais c'est ça le plus fou ! Moi qui ai longtemps pensé qu'une histoire sans intrigue truculente ne vaut pas le coup d'être lue (j'ai mis de l'eau dans mon vin depuis - enfin, un peu), j'ai été littéralement bluffée, conquise, aspirée. Comment ?



L'écriture de Meyer Levin y est certainement pour beaucoup. Fraîche et moderne, elle alterne les petits mots délicieux et le retour à la réalité vulgaire, paragraphe après paragraphe. Dès que la pente de la tendre idylle s'engage, l'auteur vient secouer le lecteur. D'où cette ambiance pertinemment sur le fil, qui oscille entre volupté et pincement, laissant évidemment présager que cette histoire n'est peut-être qu'une parenthèse dorée qui va dans le mur.
Lien : http://lemondeselonpickwick...
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Crime

En s’appuyant sur un tragique fait divers dont il fut partie prenante, Meyer Levin nous livre un texte passionnant et protéiforme, à la fois récit, polar, et roman initiatique.

Bien qu’en ayant rebaptisé les protagonistes (lui-même adoptant pour l’occasion le prénom Sid), il retrace avec une précision quasi journalistique les différents épisodes d'une sombre affaire qui au début des années 20 suscita effervescence médiatique et réactions populaires disproportionnées. Et pour cause : au moment des faits, Meyer Levin/Sid, étudiant à l’université de Chicago, est stagiaire au Chicago Daily News. Le hasard fait qu’il est le premier à identifier le cadavre d’un jeune garçon comme étant celui de Paulie Kessler, kidnappé quelques jours auparavant en échange d’une rançon que n’a pas eu le temps de verser sa richissime famille. Mais dans ce drame la victime, rapidement reléguée dans les limbes de l’insignifiance et de l’oubli, importe peu.



"Le meurtre du petit Kessler fut le premier à nous montrer que le hasard peut aussi choisir ses victimes."



Car ce qui intéresse Meyer Levin, mais aussi l’ensemble des acteurs ou spectateurs de ce drame, ce sont les coupables. Et quelle stupeur lorsque, passés les premiers soupçons s’orientant forcément vers un "inverti" -l’homosexualité étant alors synonyme de perversion et de pédophilie-, il s’avère que le crime a été commis par deux fils de bonne famille, étudiants brillants et accessoirement camarades de Sid.



En intercalant entre les étapes de l’enquête celles de leur dément projet, de sa conception à son exécution, le récit se focalise sur la personnalité complexe de ces jeunes hommes qu’a priori rien ne prédestinait à devenir des criminels.



Issus d’un milieu aisé et cultivé, Judd Steiner et Artie Strauss ont par ailleurs toujours montré des aptitudes intellectuelles au-dessus de la moyenne. Le premier fut un enfant timide, que sa petite taille et sa précocité ont souvent exclu, plus intéressé par les oiseaux que par le base-ball. A la fois surdoué mais pouvant faire preuve d'immaturité face aux problèmes les plus simples, il est considéré par ses pairs comme un génie sinistre et solitaire. Artie est à l’inverse un étudiant aussi populaire que fascinant, chéri des étudiantes, qui affiche en toutes circonstances aisance, chic et insouciance. Très proches, les deux garçons entretiennent une relation trouble, oscillant entre une complicité née d’une vision commune et d’inspiration nietzschéenne du monde, et des rapports dominé-dominant, Artie se sentant supérieur à Judd, sur lequel il exerce une emprise à la fois morale et physique.



Dans un second temps consacré au procès -qui attire les foules, mais aussi pléthore de juristes, de journalistes, de célébrités et autres personnages officiels-, les différentes parties tentent de cerner les motivations du crime, d’établir la culpabilité de ses auteurs, de comprendre quel rouage s'est détraqué dans le mécanisme qui fait l'homme. Le lecteur aura déjà, au contact des coupables, été affranchi quant à leur mobile, alimenté par un esthétisme macabre et leur conviction d’être des surhommes, insoumis à la morale et aux conventions : commettre le crime parfait. Cette partie judiciaire est tout aussi passionnante que l’enquête, l’occasion d’observer les débuts des débats sur la notion de responsabilité pénale, d’assister à un formidable plaidoyer contre la peine de mort, et de s’interroger sur la relativité de la déontologie journalistique.


Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Frankie & Johnnie

C’est évidemment la couverture de ce livre qui m’a attirée.

Et c’est une bonne chose car j’y ai découvert un auteur qui réussit à replonger dans la psyché amoureuse d’adolescents américains.

Johnnie et Frankie sont jeunes, ils s’attirent et sont timides dans leurs sentiments. Ici, le jeu amoureux joue avec le regard des autres, l’idée qu’on s’en fait et surtout la découverte de soi .



C’était un beau moment de lecture, dépaysant .

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