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Critiques de Michel Boujut (34)
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Wim Wenders

"WIM WENDERS" est un livre-somme grand format magnifiquement illustré, qui nous permet de revisiter successivement — dans l'affectif pur, l'amour du détail éclairant et la cinéphilie partagée par le passionné de jazz qu'est Michel BOUJUT (1940-2011) — les images vibrantes, ambiances visuelles et musicales inoubliables des six courts puis onze flamboyants premiers longs métrages du cinéaste né à Düsseldorf le 14 août 1945 (3 mois après la fin de la guerre) : Wi(lhel)m WENDERS...



"Summer in the City" [1971], "Die Angst des Tormanns beim Elfmeter" ["L'angoisse du gardien de but au moment du penalty", 1972], "Der Scharlachrote Buchstabe" ["La lettre écarlate", 1973], "Alice in den Städten" ["Alice dans les villes", 1974], "Aus der Familie der Panzereschsen" ["La famille crocodile", 1974], "Falsche Bewegung" ["Faux Mouvement", 1975], "Im Lauf der Zeit" ["Au fil du temps", 1976], "Der Amerikanische Freund" ["L'ami américain", 1977], "Lightning over water" ["Nick's Movie", 1980], "Der Stand der Dinge" ["L'état des choses", 1981], "Paris, Texas" [1984], "Der Himmel über Berlin" ["Les ailes du désir", 1987]...



Retrouver intacts et deviner - derrière d'heureux choix de "casting", grisantes et usantes péripéties de tournage, problèmes récurrents de production (budgets étriqués puis enfin adaptés) - les visages désormais familiers de Senta Berger, Rüdiger Vogler, Lisa Kreuser, Yella Rotländer, Nastassia Kinski, Hanns Zischler, Hans Christian Blech, Hanna Schygulla, Bruno Ganz, Dennis Hopper, Gérard Blain, Lou Castel, Nicholas Ray, Samuel Fuller, ...



S'éblouir à nouveau des lumières magiques de son directeur de la photographie, Robbie Müller...



S'enivrer de la musique nostalgique de Jürgen Knieper, ses bandes originales inoubliables composées pour "L'angoisse du gardien...", "La lettre écarlate", "Faux Mouvement", "L'ami américain"...



Un bain de jeunesse, fait de pellicule granuleuse noir-et-blanc contrastée qui peu à peu se teint de couleurs franches sous influence Edward Hopper...



La grossesse de Senta Berger (jouant Hester Prynne) et son teint fleuri durant le tournage de la Lettre écarlate", le classique de Nathaniel HAWTHORNE révéré par le cinéaste...



Le métro aérien de Wuppertal, le petit gamin en vélo suivant la voiture d'Alice et du journaliste, le morceau entêtant du groupe Canned Heat ("On the Road again") dans la scène au juke-box d' "Alice dans les villes"...



L'échappée en bicyclette de Wilhelm Meister face au vent de la Mer du Nord, ces trains qui se croisent puis se perdent de vue, la montée lente par un étrange groupe humain d'une route en lacets parmi les vignobles surplombant la vallée du Rhin dans "Faux Mouvement" (écrit par son ami autrichien Peter HANDKE)...



L'immeuble face au port de Hamburg survolé par les mouettes hurlant dans le petit matin, la mort d'Henri Langlois annoncée à la Une du quotidien "Libération" lu par le mafieux du R.E.R. de "L'ami américain" qu'abattra l'insoupçonnable encadreur Jonathan Zimmermann, une scène de crime hasardeux dans un train "Inter City" lancé à toute allure, l'abandon de l'ami Ripley par le couple Zimmermann sur une plage de la Mer du Nord...



Tel un atelier de forge cinématographique où ont pu naître - riches de leurs mille détails formels - de nouvelles et puissantes mythologies...



W.W. ou le "Weisse Wand" (écran blanc) de tous nos rêves d'apprenti-écrivain...
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La vie de Marie-Thérèse qui bifurqua quand sa..

Ce livre n'était pas un vrai choix de lecture. Mais comme il trônait dans la bibliothèque de la maison depuis des lustres et que j'avais besoin d'un titre qui remplisse un item compliqué du Multi-Défis 2021, j'ai décidé de m'y plonger. Et j'ai bien fait.

J'ai découvert, à travers la plume compétente, libre et descriptive de Michel Boujut, la vie romancée de Marie-Thérèse, jeune française passionnée de Billie Holiday, mêlée "malgré elle" à un fait divers tragique en 1959.

Autant vous dire que je ne connaissais rien de ce fait divers et de l'importance qu'il a pris à cette époque.

Cette lecture agréable ne me laissera pas un souvenir impérissable. Mais les défis ont cet avantage de me faire découvrir des textes, des histoires, des auteurs que je n'aurais jamais lu autrement.
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Conversation avec claude Sautet

Si Thierry Frémaux tendait tant lors du dernier Festival Lumière qui vient de s'achever, à réhabiliter son oeuvre et lui rendre hommage , c'est qu'il avait eu la chance de le connaitre un peu et de le rencontrer à l'occasion d'une biographie du si regretté l’écrivain et critique Michel Boujut (que Frémeaux avait un peu aidé en amont), "Conversations avec Claude Sautet". Une biographie que j'ai eu la chance de recevoir peu de temps avant que le Festival ne commence, puisqu'il a eté réédité le 8 octobre dernier, dans une édition définitive éditée par Actes Sud et l’Institut Lumière, il faut dire que sa dernière parution en 2001 était épuisée depuis pas mal de temps déjà.



Le livre sort augmenté d’un avant-propos de Thierry Frémaux (qui reprend dans les grandes lignes le texte qu'il avait dit au micro lors de cette conférence de presse de présentation), une préface de Daniel Auteuil, qui joua pour Claude Sautet dans Quelques jours avec moi (1987) et Un coeur en hiver (1992), et d’une postface de Bertrand Tavernier qui fut, avant de devenir cinéaste, l’attaché de presse de Claude Sautet puis son ami.



Tous parlent admirablement bien du travail de Claude Sautet, de son perfectionnisme constat, de son amour pour les comédiens et de la beauté totale de ses oeuvres qui restent toujours aussi fortes plusieurs décennies après avoir été tournées.



Quant au corps de l'ouvrage en lui même, on aime beaucoup le procédé, cette conversation mine de rien, sous un ton amical (les deux hommes se connaissaient bien et avaient pas mal de points communs) entre Claude sautet et michel Boujut.



Une discussion sur l'intégralité de la carrière du cinéaste qui acceptait pour la première fois de sa carrière de jeter un coup de rétro sur son oeuvre, lui qui réchignait à analayser ses films, préférant laisser cet exercice à d'autres.



Sur un ton objectif et toujours plein de distance, Sautet prend bien soin de ne jamais verser, à travers ses confessions intimes et inédites, dans le sentimentalisme ni à la nostalgie, mais y dévoile tout de même quantités d'anecdotes de tournages absolument passionnantes, pour qui a vu et adoré les films en question.



Sautet revient parfois avec pas mal d'humour et d'autodérision sur ses marotes, et notamment sa manie dont je viens de parler des sempiternelles scènes de café( « A chaque film, je me dis toujours : non, cette fois tu n'y tournes pas. Et puis, je ne peux pas m'en empêcher. Les cafés, c'est comme Paris, c'est vraiment mon univers").



On y apprend également que pour "Garçon" (certainement le film le plus mineur de sa filmographie, pourtant projeté aussi lors du Festival), Montand avait fait des caprices terribles, parasitant le tournage, en refusant notamment de partager la vedette avec Jacques Villeret… Bref, voici un ouvrage en tous points passionnant et indispensable pour qui apprécie autant que moi ce cinéaste inoubliable que fut Sautet.


Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Le Jour où Gary Cooper est mort

J'aimais beaucoup Michel Boujut comme critique cinéphile (il fut aussi le producteur avec Claude Ventura et Anne Andreu du cultissime magazine de ciné "Cinéma, cinémas" avec ces fameuses portes qui s'ouvrent sur des répliques de films) et bien ce magnifique récit confirme la qualité de sa plume.

Le 13 mai 1961 date de la mort de Gary Cooper, le jeune Boujut décide l'insoumission et va se cacher dans les salles obscures de la capitale. De là naitra sa passion du 7ème art. Il ne déserte pas par peur mais par conviction.

Boujut entre ces coups de coeurs cinéphiles et littéraires explique ce choix délibéré de montrer son désaccord avec une guerre qui ne dit pas encore son nom.

Passionnant, touchant, un récit qui va droit au coeur avec la sensibilité d'un homme ayant choisit d'aller au bout de son idéal.

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Souffler n'est pas jouer

Je n'aime pas rédiger des avis en forme de constat d'échec. Et pourtant.... J'ai lu ce livre d'une traite, entourée par Annunziata, Rossignol et Duchesse, trois de mes chats, et là, c'est un point très positif. En revanche, le fait que je n'ai pas apprécié ce livre n'en est pas un.

Oui, nous sommes en France, oui, nous nous promenons entre Le Havre et Bougival, et quelques villages aussi. Des noms, mais pas tant de ressenti que cela qui permettent de reconnaître véritablement les villes où se passe l'action. Un roman très court, mais beaucoup de meurtres "pour rien", gratuits comme l'on dit - mais la mort, la violence sont-elles aussi gratuites que certains veulent bien le laisser entendre ? Alors oui, l'on peut se concentrer sur le parcours des deux tueurs opportunistes, qui ne voient dans la mort qu'un moyen de se débarrasser d'un ou de plusieurs problèmes, après avoir cédé à leurs pulsions ou avoir dégagé la route pour leur étape suivante. On ne pense pas assez à ceux qu'ils laissent derrière eux. Un peu comme leur patron qui cède lui aussi, de son côté, à la tentation du meurtre - non, parce que Louis Armstrong, il suffisait simplement de l'intimider.

Nous verrons dans ce roman beaucoup de figurants célèbres, telle Joséphine Baker (celle que l'on verra le plus) ou Robert Desnos. Hélas, ce ne sont que des figurants, et même le jazz passe souvent à l'arrière-plan, a contrario de la vie sentimentale agitée d'Armstrong.

Bref, si vous souhaitez découvrir un roman qui parle de jazz, préférez plutôt un autre roman.

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Le Perroquet des Batignolles, tome 2 : La R..

Ce qui pouvait encore passer dans le premier tome, à savoir une BD assez bavarde, est apparu dans ce second opus comme un vrai poids, conduisant à un désintérêt croissant au fil de ma lecture en regard d'une intrigue qui n'avance pas, pire s'enlise...



Tout cela pour apprendre en outre que près de 8 ans plus tard, le troisième (et a priori dernier) tome se fait toujours attendre... il y a franchement de quoi être dépité !
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Le Jour où Gary Cooper est mort

Le jour où Gary Cooper est mort, le jour où le cinema perd une de ses stars, l'armée française perd l'un de ses soldats. Ce soldat qui déserte c'est Michel Boujut, futur écrivain et critique de cinéma qui ne veut pas se battre en Algérie, cette sale guerre, enfin cette guerre tout court à laquelle le jeune charentais ne veut pas participer en hommage à son grand père, mort en 1914, et à son père prisonnier dans un stalag près de 30 ans plus tard.



Il s'en suit un court récit où l'auteur se remémore les quelques semaines qui ont suivi cette décision qui changera à jamais sa vie. L'époque est encore aux idéaux. L'idée de résistance n'est pas encore une marque déposée. De vrais hommes révoltés sont encore là pour montrer le chemin. Et c'est ce chemin clandestin que va suivre le jeune Boujut où il croisera quelques figures intellectuelles. Un chemin qu'il faut arpenter à l'ombre. Et quoi de mieux qu'une salle de cinéma pour disparaître dans l'obscurité, ne pas éveiller les soupçons policiers et occuper son temps dans l'attente du laissez-passer vers l'Allemagne ou la Suisse, vers la liberté des idées. Paradoxe que cette salle de cinéma à la fois lieu de refuge mais aussi et surtout lieu d'évasion. Car en croyant hypothéquer son avenir au nom de ses idéaux, le jeune Boujut va, au contraire, trouver sa voie dans ces petites salles obscures sans (mega) complexes. Il faut dire que la période est fertile. Le bougre a de la chance, les chefs-d'œuvre sont légions : La soif du mal, Le bal des maudits, La Dolce vita, les débuts de Cassavetes etc. et des rencontres aussi comme avec cette femme affichant la nuit de chasseur au-dessus de son lit. Comment ne pas aimer le cinéma après ça et comment ne pas vouloir ne plus quitter les salles obscures où règne l'insouciance ?!



Il est tout de même regrettable que le récit de Boujut reste un peu trop en surface, ne nous plonge pas un peu plus dans cette époque, il y avait là de quoi faire tout un roman. Néanmoins on comprend que l'auteur voulait avant tout conter une fois pour toute son histoire. Dommage simplement qu'il l'ait fait un peu trop vite...
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Le Perroquet des Batignolles, tome 2 : La R..

Héritier d’une ligne claire rappelant évidemment celle d’Hergé, Stanislas et son graphisme léché achèvent de nous séduire. Michel Boujut, récemment décédé, accompagné de Tardi au scénario, ne pouvait donc rêver plus bel hommage.
Lien : http://www.bodoi.info/le-per..
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Le Perroquet des Batignolles, tome 2 : La R..

L'impeccable ligne claire de Stanislas est au service d'une aventure rocambolesque à souhait menée par le héros, Oscar Moulinet, preneur de son à la Maison de la radio. Le récit au goût des Spirou d'enfance est infiniment savoureux.
Lien : http://rss.feedsportal.com/c..
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Le Perroquet des Batignolles, tome 2 : La R..

Cet album ravira ceux qui croyaient évanoui le charme de la bande dessinée franco-belge classique [...]. Dans Le Perroquet des Batignolles, Stanislas renoue avec un plaisir de lecture que l’on croyait perdu, ou au moins élimé par le temps.
Lien : http://www.chronicart.com/ba..
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La vie de Marie-Thérèse qui bifurqua quand sa..

J'ai beaucoup aimé ce "roman-vérité" car dès les premières lignes, j'avais le sentiment d'écouter une émission de Faites entrer l'accusé. Fait divers sanglant et sordide c'est un véritable scénario de film noir. Ce roman fait la part belle au jazz, style musical que j'apprécie grandement et dont je ne me lasse jamais. Ecouter du jazz c'est s'enivrer d'émotions; de joie, de tristesse; de mélancolie. C'est vivre tout simplement. Cette musique se passe de commentaires car elle se vit plus qu'elle ne s'écoute. D'ailleurs durant ma lecture, j'entendais quelques bribes de mélodies qui venaient bercer ce moment plaisant...

Le lecteur est plongé dans une ambiance noire puisqu'il s'agit d'un fait divers mais à aucun moment on ne glisse dans le pathos. Un roman noir, certes mais dur car il narre la vie tourmentée de Marie-Thérèse Désormeaux, jeune femme bourgeoise, dont le coeur s'est enflammé pour un bandit. Naïve et amoureuse, elle se laissera mener par le bout du nez (et pas que cette jolie partie de son corps d'ailleurs) et deviendra malgré elle une paria.

Une belle et impressionnante histoire que je conseille à tous les amateurs de jazz et de faits divers.
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Le Jour où Gary Cooper est mort

Mai 1961. Trois ans après le retour au pouvoir du Général de Gaulle. Sept ans avant des évènements de 68 qui allaient précipiter sa chute. Un jeune homme, issu d’une famille socialiste des Charentes, effectue sa préparation militaire. Il doit être envoyé en Algérie. 72 heures de permission avant le départ. Une décision : il n’ira pas. Une nouvelle à la Une de tous les journaux : Gary Cooper est mort. Le destin d’un jeune homme, l’héritage de plusieurs époques et les cinémas du Quartier Latin. Surtout. Aujourd’hui, Michel Boujut est critique de cinéma depuis quatre décennies. Peut-être aurait-il pu s’éteindre en Kabylie il y a un demi-siècle ? L’histoire d’une (re)naissance, voilà ce qui nous est conté. Et bien conté.



Roman d’éducation, roman de cinéma, roman historique, roman politique aux contours familiaux et intimes, roman d’une époque où la Bohème surréaliste égrenait ses derniers moments de gloire dans le 6ème arrondissement, roman d’une époque où jeunes citoyens engagés et intellectuels pouvaient encore se croiser sans le prisme d’un écran de télévision, Le jour où Gary Cooper est mort part, a priori, avec de nombreux handicaps : c’est une autobiographie, avec tous les risques que cela comporte d’autant plus lorsque l’on touche à des sujets « politiques » (manque de décentration, tentation de refaire son Histoire à la sauce “chevalier blanc”), ainsi que le roman d’une époque, d’un refus, d’un antimilitarisme franc, assumé et jusqu’au-boutiste. Par-dessus le marché, conter l’éveil et l’émerveillement face à l’art, sa découverte et les chemins de traverse qu’il fait prendre à notre esprit pouvait être le prétexte à toutes les nostalgies, toutes les emphases, toutes les niaiseries que l’on aurait été en droit d’attendre si Michel Boujut avait été un vieux barbon persuadé d’entreprendre un projet littéraire par le pire des conseillers : l’âge.



Vous l’aurez compris, à quelques rares exceptions près, le critique devenu auteur évite bien des embûches, malgré un dommageable fléchissement dans les derniers chapitres du livre, où la plume délaisse le récit au profit de la nostalgie et de l’admiration de quelques autres courageux déserteurs ou encore pour le rappel absolument inutile de la poursuite de l’engagement antimilitariste et de son refus de l’ignominie algérienne aujourd’hui encore. Qui en douterait ? A quoi bon rompre la dynamique de l’ouvrage pour conter cet ultime fait d’armes ? Heureusement, à l’exception des chapitres 36 et 38 donc, ainsi que de quelques facilités d’écritures et/ou artifices littéraires un peu trop voyants qui empêchent la saine cohabitation de l’histoire et de l’Histoire, Michel Boujut trouve un touchant et brillant équilibre construit sur trois vertus. Deux vertus jumelles de l’éclatement, une vertu de la cohérence :



1) Une narration éclatée. Le roman prend parfois des allures de récit de voyage tant l’enchaînement des chapitres, des rencontres, des films visionnés ne semble répondre qu’à une logique propre à l’auteur et dans laquelle le lecteur reste ballotté, mais avec plaisir. Ne sachant jamais si le chapitre suivant va être à dominante politique, familiale, cinématographique, culturelle, romantique (à une seule occasion, mais quelle occasion !), où tout simplement chronologique face à l’action, navigant dans un nouveau monde dont il explore de nouvelles contrées à chaque page, le lecteur se retrouve à la confluence d’un patchwork dont toutes les morceaux de tissus s’agrègent sur une toile de fond que, par le truchement d’un jeu de mots facile, on appellera toile de cinéma : tous figurants dans cette grande aventure où seule l’enfance de l’art sort véritablement grandie… On pourrait conseiller Le Jour où Gary Cooper est Mort à un ami féru de cinéma, mais aussi à un autre féru de politique, à un autre féru de drames, etc.



2) Un personnage éclaté. Il est remarquable, qu’à part aux rares exceptions susmentionnées, que l’auteur/personnage principal ait réussi à donner au lecteur l’impression que rien n’est prémédité dans son comportement. Histoire de vrais/faux hasards où la cuisine – la préparation des évènements, fuites, décisions – nous est toujours soigneusement cachée, le personnage principal semble errer dans un décor aussi réel qu’évanescent dans lequel il évolue non pas par lui-même, mais par l’Autre, qu’il soit humain ou écran. S’en suit une curieuse impression de picaresque dans une œuvre dont la sincérité n’exclut jamais (ou presque) la légèreté. On pourrait conseiller Le Jour où Gary Cooper est Mort à un ami partant en villégiature à la plage.



3) Un amour fou du cinéma. Le plus grand tour de force du roman reste, finalement, de déclarer dans un roman l’amour pour un art sans tomber dans le piège du catalogue, de l’emphase, etc. ; distillant avec sagacité des réflexions que tout cinéphile –ne serait-ce qu’occasionnel – ne peut que s’être faites (ou du moins posées), l’auteur reste néanmoins dans la posture du découvreur, du complice, et jamais du professeur. On en oublie qu’il s’agit d’un livre écrit par un éminent critique tant ce dernier pourrait être notre voisin de salle obscure… On ne pourrait que conseiller Le Jour où Gary Cooper est Mort à un ami cinéphile, bien évidemment (vous aurez compris que cela est le cas de l’auteur de ces quelques lignes)



En effet – et pour conclure – tous les éléments symboliques de l’acte cinématographique du point de vue du spectateur écument les pages de ce livre aussi sérieux qu’en apesanteur : la place accordée à l’obscurité, ce moment magique où la lumière se tamise jusqu’à être engloutie par les premières lueurs du projecteur et images de la pellicule ; la corrélation cinéma/clandestinité qui fait de la salle et du film le plaisir le plus secret, intime et personnel qui soit ; mais surtout, ces quelques lignes, distillées ça et là qui décrivent parfaitement cet état extatique dans lequel vous laisse un « grand » film – non pas par sa réputation, mais par l’émotion qu’il vous transmet ; cet état végétatif, de vide, de rêve éveillé dans lequel vous déambulez dans un Paris désert même en heure de pointe ; cet état et ce monde extérieur dans lequel les automobiles glissent et les piétons se figent, dans lequel les arbres se penchent sur votre passage et les gouttes s’arrêtent devant votre visage : cet état dans lequel tout, mais alors tout est possible lorsque la communion emmène le spectateur comme le film vers des réflexions et des ressentis dont l’un, comme l’autre, sortiront grandis. Rien que pour cela : bravo. Et bonne lecture à vous.



T.M.
Lien : http://madamedub.com/WordPre..
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Le Jour où Gary Cooper est mort

Le jour où Gary Cooper est mort de Michel Boujut (Rivages)

Noir et blanc, un homme chapeauté ouvre des portes, une à une. Clin d’œil à Alphaville et au Lemmy Caution de Godard. Derrière chaque porte, une histoire, un portrait, un morceau de cinéma, une proposition à suivre. Ou non. Une porte, ça se claque aussi. Une bande-son. « Cinéma, cinémas », images volées des années 80, Madeleine de Boujut, Andreu et Ventura pour les quadragénaires d’aujourd’hui.

On ouvre le livre et c’est la fin des années 50 en France. Une nouvelle guerre qui commence et des jeunes gens qui ne veulent pas partir, pas mourir. Pas là-bas, pas comme ça, pas pour cette guerre-là, cette guerre sans nom. Michel B. choisit l’insoumission, il déserte. Avec les encouragements paternels, forts d’une histoire familiale tragique. La décision n’est pas simple même si elle est évidente : c’est une révolte pure et simple dont il s’agit. Le refuge, la désertion est reconnue comme un crime grave, sera les salles de cinéma. Cocons obscurs, sûrs, propices aux rencontres réelles ou imaginaires et où l’auteur apprend à chérir les films. Le cinéma qui enseigne l’usage du monde… On ne saurait donner définition plus juste. Je me souviens du jour où Patrick Dewaere est mort. Le cinéma nous donne aussi des héros à aimer. The end.








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Le jeune homme en colère

Ce portrait qui illustre la couverture du livre a fait le tour du monde, du monde des photographes, professionnels ou amateurs, en tout cas. "Young Man, Gondeville, 1951". Il faut être né dans le département 16, ou y avoir vécu quelques années, pour savoir que Gondeville est un bourg situé au bord du fleuve Charente, au pied des molles ondulations portant le vignoble cognaçais. C'est le cas de Michel Boujut, qui a grandi à Jarnac, tout à côté, et qui aurait pu connaître le "jeune homme en colère" de la photo, à peine plus âgé que lui. À la fin des années 1990, l'envie lui prend de savoir ce qu'est devenu le jeune homme, pourquoi il arborait ce visage farouche devant l'objectif du photographe. Celui-ci est aussi connu que la photo : c'est l'Américain Paul Strand, homme de gauche qui a quitté les États-Unis aux débuts de la chasse aux sorcières initiée par le sénateur McCarthy. En France, Strand, poursuivant son projet de capter l'essence de la vie rurale, est invité par l'écrivain Claude Roy, dont la mère possède une propriété viticole à Gondeville, sur laquelle travaille la famille du jeune homme : qui mieux que ces métayers, communistes à l'instar de Claude Roy à l'époque, peuvent symboliser le prolétariat – travailleurs de la terre, petits artisans, commerçants de village – que Strand vénère ? Claude Roy était également un ami d'enfance du poète Pierre Boujut, le père de Michel. Toutes ces coïncidences, s'ajoutant au goût de l'auteur pour les images, composent comme une impérieuse exhortation à rechercher le jeune homme, devenu homme d'âge mûr, voire retraité.

Au terme de cette "enquête buissonnière" uniquement faite de rencontres et de conversations (hormis une recherche sur le Minitel, infructueuse...), Michel Boujut a pu apprendre de la bouche même de Claude Grijalvas pourquoi il avait l'air si courroucé quarante-cinq ans plus tôt.

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Stars. Les incontournables

L'originalité de ce livre sous la direction de Michel Boujut est d'avoir confié à un écrivain le soin de nous parler d'une star. Une page texte donc, et une pleine page photo noir et blanc.

Et ainsi Michel Grisolia nous dit ce que BB représentait pour lui enfant. Denis Tillinac nous dit que lorsque Bébel balance son poing sur un museau cela swingue comme un vers de Rimbaud ! François Nourissier qualifie Ingrid Bergman de vestale scandinave, Patrick Brion en grand amateur de comédie musicale qu'il est, pleure Judy Garland, Tardi admirateur de Céline ne pouvait pas rater son comparse Robert le Vigan...

Ainsi plus d'une centaine de stars sont évoquées par l'admiration que leur portent tout autant d'écrivains français.

Un double régal que j'ai grand plaisir à retrouver de temps en temps.
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Le Jour où Gary Cooper est mort

Le 13 mai 1961, Michel Boujut arrive à Paris par la gare d'Austerliz. A la une des journaux, il découvre la mort de Gary Cooper, survenue la veille à Hollywood.

Michel Boujut, déjà fan de cinéma, n'oubliera jamais ce jour qui marque le début de sa désertion de l'armée, où il effectuait son service militaire, à la veille de son départ vers l'Algérie. Avant de rallier l'Allemagne puis la Suisse, il profite de son séjour dans la capitale pour se réfugier dans les salles obscures du Quartier Latin, afin d'échapper aux contrôles et de passer le temps. Il découvre des chefs-d'oeuvre et des nanars, des films américains, suédois, italiens, français. Il rencontre des intellectuels et des militants qui le soutiennent dans sa décision de ne pas participer à la guerre d'Algérie et qui l'aident dans sa fuite vers l'étranger.



Je connaissais Michel Boujut grâce à ses émissions sur le cinéma mais j'ignorais tout de cette période de sa vie et de son statut d'insoumis. J'ai trouvé beaucoup d'intérêt dans ce témoignage.

Michel Boujut évoque son grand-père, mort aux combats pendant la Grande Guerre et son père, fait prisonnier en 1940 et qui ne rentra chez lui que quatre ans plus tard. Il raconte sa prise de conscience, l'évolution de sa réflexion, son plan bâti minutieusement : profiter de ses quelques jours de permission pour prendre le large.

Le sujet est grave mais jamais pesant car l'auteur alterne les courts chapitres, passant des expériences de ses parents et grand-parents à ses souvenirs cinématographiques et aux étapes de sa cavale. Il nous livre ses impressions à propos des films qu'il voit ou qu'il a vus, fait partager les instants d'une passion pour le cinéma qui l'habite toujours.
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Le Perroquet des Batignolles, tome 2 : La R..



Un certain apaisement, un rythme plus maîtrisé ouvrent le tome deux de ce mystère emplumé. La bataille qui faisait rage entre les bulles et les cadrages dans le tome un trouve des issues. En page, 30 ils vont même jusqu'à glisser chacun dans leur case. Un Paris d'un gris tendre en profite pour se prolonger dans les angles. Sculptures et architecture, vieilles boutiques et rues pavées, la culture est à l'honneur. La peinture, la littérature et le cinéma glissent dans les rigoles. Moins trépidant, plus agréable à suivre que l'entrée en scène, ce tome deux n'est malheureusement pas le dernier et le troisième n'a pas encore été publié. Aaarggh !

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Jean-Luc Godard

Une petite lecture de vacances, en profitant d'un livre apporté par l'un de mes fils.

Deux des quatre entretiens de ce recueil sont consacrés à « Je vous salue Marie » et c’est ceux que j’ai trouvés les plus intéressants. Cela m’a rappelé du reste que j’avais vu ce film à sa sortie en 1985, qui avait été accompagnée de nombreuses polémiques. J'ai aussi été étonné que Godard tiennent des discussion d’ordre théologique avec Philippe Sollers.
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Souffler n'est pas jouer

es amateurs de Jazz apprécierons toutes les références, les autres beaucoup moins. Peut-être le point de vue extérieur aux personnages y est-il pour quelque chose. Le narrateur nous conte la vie de Louis Armstrong pendant sa tournée européenne en parallèle des mésaventures de deux malfrats américains envoyés par l’imprésario du musicien pour le ramener de force aux États-Unis. Il arrive plein de petites choses aux uns et aux autres mais rien qui m’ait accroché.
Lien : http://livres.gloubik.info/s..
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Souffler n'est pas jouer

Du regretté Michel Boujut, j’appréciais particulièrement ses critiques cinématographiques que j’écoutais régulièrement sur France culture. J’ai découvert, avec "Souffler n’est pas jouer", qu’il s’était essayé au polar. J’avoue qu’après mes précédentes lectures d’auteurs prestigieux comme Proust, Cendrars ou Gracq, j’ai trouvé que le récit, à l’inverse d’Armstrong, manquait de coffre.

Ce polar est une sorte d’hommage à un grand artiste, à une musique et à une littérature. C’est la rencontre entre une Europe vieillissante fascinée par les nouveautés et la modernité de l’Amérique. Michel Boujut compose un récit à l’américaine, s’inspirant de Dashiell Hammett et de Boris Vian. Une autre façon d’en connaître un peu plus sur l’esprit d’une musique et d’une époque.
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