Michel Onfray

Cette raison fonctionne pendant des millions d’années, elle ne peut pas ne pas laisser de traces dans le cerveau qui s’en trouve enrichi. Chaque histoire individuelle reproduisant dans son développement celle de l’humanité, c’est la fameuse ontogénèse qui récapitule la phylogénèse, les cerveaux, telles des batteries vitalistes, se chargent de cette puissance rationnelle

Depuis, près de 180 tonnes d’ordures ont été laissées sur la Lune ! On y trouve, donc, quatre-vingt-seize poches d’urine, mais aussi des poches de vomi, deux balles de golf, un javelot, des caméras, une branche d’olivier doré, un coupe-ongles, une épingle à cravate, des sondes, des outils scientifiques, un télescope et un réflecteur lunaire, cinq drapeaux américains, douze paires de bottes, un disque de silicone avec les messages de 73 chefs d’État, les cendres d’un géologue de la NASA qui rêvait d’aller sur la Lune, une étiquette de nuits-saint-georges 1969 et jusqu’à une bible, le tout laissé par les douze hommes ayant foulé le sol lunaire entre 1969 et 1972. Soit 809 objets dont 70 engins spatiaux. Pisser et vomir sur la Lune, la transformer au plus vite en poubelle, en gros, voilà le bilan.
Elle refuse le maïs transgénique mais accepte la transgenèse humaine. Une plante fourragère semble avoir plus d’importance et de dignité qu’un être humain !

Le premier pas fut pour Armstrong, la première giclée de pisse d’un mammifère fut pour Aldrin. On doit également à ce même homme cette phrase consternante : « Armstrong a peut-être été le premier homme à marcher sur la Lune, mais j’ai été le premier à faire pipi sur la Lune. » Sans commentaire.

Montaigne règle son compte aux Pères de l’Église et aux docteurs de la scolastique en moquant leur fausse méthode bricolée avec la Logique d’Aristote à coups de syllogismes. Pour pulvériser tout cela d’un grand éclat de rire il écrit : « Le jambon fait boire, le boire désaltère, par quoi le jambon désaltère » (I.XXV). Chacun aura compris que cette prétendue méthode n’en est pas une et qu’il faut aller voir ailleurs

On s’en doute, ma préférence va à cette pensée qui garantit l’individu contre le souverain quand celui-ci ne souveraine plus si l’on me permet ce néologisme… Quand la souveraineté du souverain n’est plus souveraine, alors l’individu redevient souverain pour assurer sa défense. Les militants pour le droit au port d’armes, ceux qui assurent une police privée du genre « Voisins vigilants », ne le font que face à la défaillance du souverain qui sape l’État national dont il veut la fin au profit d’une Europe supranationale qui a besoin pour ce faire de diluer les nations dans l’acide des incivilités, de la délinquance encouragée, de la justice idéologique, du laxisme pénal, de la machine grippée des prétoires faute de moyens, sinon de son nihilisme volontairement actif.

On lit en effet dans le Léviathan : « L’obligation qu’ont les sujets envers le souverain est réputée durer aussi longtemps, et pas plus, que le pouvoir par lequel celui-ci est apte à les protéger. En effet, le droit qu’ont les hommes, par nature, de se protéger, lorsque personne d’autre ne peut le faire, est un droit qu’on ne peut abandonner par aucune convention.

Hobbes reprend la phrase célèbre de Térence extraite de L’Asinaire ou la Comédie des ânes : « L’homme est un loup pour l’homme. » On ne saurait être plus clair. L’état de nature est un état de violence et de sauvagerie perpétuel. C’est la « guerre de tous contre tous », écrit-il dans Du citoyen (I.14), la loi de la jungle où le plus fort a raison du plus faible, le plus rusé du moins malin, le plus vicieux du plus vertueux, le plus décidé à nuire du moins déterminé au mal.

C’est également celle des pauvres, des vagabonds ou des mendiants – les anciens clochards devenus sans domicile fixe, puis SDF, l’acronyme étant une bonne occasion de laisser croire qu’on a fait disparaître la chose en abolissant le mot…

Quel est l’idéal de Jonas ? Une « nouvelle ascèse » pour sauver la planète. Quelle est sa méthode ? Ce qu’il nomme « une heuristique de la peur ». Qu’est-ce à dire ? Non pas raisonner, instruire, éclairer, argumenter, débattre, penser, réfléchir, examiner, disputer, mais faire peur – c’est le sens de cette formule pour philosophe. Il ne souhaite pas convaincre, persuader, construire un raisonnement à même d’emporter l’avis d’autrui, non, surtout pas, il veut effrayer, effaroucher, émouvoir, inquiéter, terrifier, la gravité de la situation l’exige. L’émotion en lieu et place de la raison ? De Nicolas Hulot à Greta Thunberg en passant par Al Gore et Yann Arthus-Bertrand, chacun reconnaît la méthode des écologistes.

Je pose l’hypothèse que l’écologie politique est le cheval de Troie des tenants d’un projet de civilisation qui passe par l’instauration d’un gouvernement planétaire qui aurait la forme d’un État total dans lequel les individus seraient des quantités négligeables transformées en marchandises.

Dans son Discours de la méthode, Descartes, qui entend fonder une philosophie sans Dieu, raconte comment il part de lui, doute, puis affirme qu’il ne peut douter de son doute, conclut qu’il pense et que, donc, il est.

d’Ipad pour les enfants de Steve Jobs, le fondateur d’Apple ; pas de Facebook chez Chamath Palihapitiya, l’ancien vice-président chargé de la croissance de l’audience de Facebook, car il estime que les réseaux sociaux sont « de la merde » ; pas d’écrans dans la chambre des enfants de Chris Anderson, le PDG de 3D Robotics ; pas d’écrans dans une école chic de la Silicon Valley où sont scolarisés les enfants d’employés d’eBay, de Google, d’Apple, de Yahoo, en revanche on y trouve du papier, des livres et des crayons.

C’est pourtant la seule interrogation qui vaille : quelle positivité souhaitait donc Mai 68 ? À part vouloir que le dortoir des étudiants soit mixte, ou jeter dans la piscine un ministre du général de Gaulle venu inaugurer à Nanterre des infrastructures pour les étudiants, quel était le projet de société de Cohn-Bendit ? Chacun sait qu’il n’y en eut jamais… Voilà pourquoi Malraux parle clairement de « nihilisme » : quand on ne sait pas ce qu’on veut mais qu’on le veut avec tant de hargne et de violence, il ne saurait y avoir autre chose que du nihilisme. L’indignation pure ne suffit pas à constituer une politique.

Dans le même esprit, le grand Élie Faure disserte dans Découverte de l’archipel (1932) sur « L’âme juive ou la fureur d’être », « L’âme française ou la mesure de l’espace », « L’âme allemande ou l’annexion du temps », « L’âme italienne ou l’affût de l’objet », ou bien encore, de nouveau horresco referens, il entretient dans D’autres terres en vue (1932) de « L’âme noire ou la vertu du rythme », de « L’âme islamique ou de l’érotisme à l’abstraction », de « L’âme américaine ou “conditions” de la vie future ».

Pester contre les publicités wokistes ne suffit pas : décider, par exemple, de ne plus acheter ces voitures électriques, puis, et surtout, le faire savoir par de véritables campagnes de boycott, voilà ce que craint le capital : que nous ne consommions plus ses produits. Ne plus acheter de véhicules hybrides vendus par les écologistes parce qu’ils fonctionnent in fine au nucléaire qu’ils refusent est une action qu’entendrait bien le capitalisme.

La logique du cheval de Troie permet aux acteurs de la décadence d’avancer sous couvert de bons sentiments. L’écologie urbaine, qui ignore tout de la nature et de ses liens avec le cosmos, s’avère le bras armé du capitalisme vert qui, à coups de promotion de l’hybridité en tout, y compris sexuelle, d’économie durable et responsable, de métissage et de cosmopolitisme, dissout dans son acide ce qui restait de communauté républicaine au profit d’une juxtaposition d’individualités narcissiques, égotistes, incultes mais, c’est ce qui importe, consuméristes à mort.

L’écologie est un mot récent, on connaît sa date de naissance, 1866, et son créateur, Ernst Haeckel, un biologiste philosophe qui définissait ainsi une « science qui étudie les milieux où vivent et se reproduisent les êtres vivants, ainsi que les rapports de ces êtres avec le milieu ».

Hommes aux milles mains, ce que vous nous faites croire est plus réel que le réel.

 Je te survivrai un temps, mais l’éternité du néant nous réunira. 

On respire plus fort parce qu’on sent son cœur se serrer mais, parce qu’on respire plus fort, son cœur se serre.