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Citations de Michèle Gazier (162)


Je ne crois pas avoir saisi tout de suite combien derriere son apparente façade de tranquillité Saint-Julien pouvait être une terre hostile et indéchiffrable pour qui n'y avait pas quelques accointances.Les gens d'ici ne m'aiment pas .Et je leur rends bien.Mais je m'inscris dans leur histoire.Je suis celui qui est parti celui qui《 s'en croit》,comme on dit dans ce pays.Le fils de,petit-fils de,etc...Je ne partage rien de leurs centres d''intérêts mais ,d'une certaine manière, je parle leur langue.Cette langue intime des gestes,des manières de se comporter.Des silences.Une langue enrichie de connaissances géographiques anciennes-- les noms des boutiques aujourd'hui disparues, les vieux surnoms des rues--,des querelles ancestrales, des secrets de famille.Même si je sais très peu de leurs secrets qui,en outre,ne m'intéressent pas en dehors de leur interaction sur l'histoire qui m'occupe.Je tiens mon lointain et vague savoir villageois de mon grand-père. Cette mémoire-là de l'enfance,de nos promenades, m'accompagne fidèlement. Il m'arrive encore lorsque je parcours les rues à la nuit tombée d'entendre la voix de mon aïeul me racontant ses jeunes années de petit paysan.
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Au bistrot,les langues allaient bon train sur tout et sur n'importe quoi.Quand il n'y avait pas de sujet évident à commenter,comme un match de rugby,d'autres épreuves sportives, des passages à la télé du président de la république où l'apparition d'une nouvelle étoile de la télérealité on se retournait vers le village et,le 51 aidant on refaisait l'histoire.Surtout celle des absents,de ceux qui ne trinquaient pas volontiers, qui préféraient leur solitude à la communauté bavarde des buveurs.Quitte à l'inventer ,cette histoire ,à la réinventer en la chargeant en lui ajoutant toutes sortes d'anecdotes, des mensonges ,qui,pensaient-ils ,pimentaient le récit.Les soirs de beuverie le samedi surtout ,le bistrot bouillonnait de potins.Ça fonctionnait presque comme un concours de jeux floraux ,la poésie en moins.Chacun ajoutait le sien ,surenchérissant sur le précédent. Et ça riait,ça gueulait, ça jurait.Dans leur bouche saturée d'anis et d'alcool les femmes n'étaient plus que des gonzesses des pétasses, des putes. Des salopes. Toutes à baiser,déjà baisées ,ou,pire ,même pas baisables.
Après les femmes on passait au chapitre des étrangers : des bougnouls, des melons,des boches......
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Il est arrivé au milieu de l'hiver 2000, quelques semaines à peine après la tempête. Les gens du village se souviennent de ces choses -là. De la tempête, qui a déraciné les trois platanes de la place,mais épargné un acacia maigrichon qu'un des maires avait planté dans les années 1980, à la mémoire d'une paysanne retrouvée morte sur le trottoir.Une femme qui avait mérité, disait-on au village,même si plus personne ne se rappelait ses mérites.Et l'Acacia avait résisté, juste perdu quelques feuilles.
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J'avais quitté depuis trois ans le domicile parental, et j'envisageais mal de faire de longs séjours entre mon père et ma mère. Ils menaient leur vie et moi la mienne. Nos rythmes n'étaient plus très compatibles, et leur couple très soudé, très solidaire, me renvoyait à une solitude que j'avais trop bien connu avant d'être étudiante.
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Des ados – quatorze-quinze ans, l’âge bête –, excités par des pères, des oncles, des cousins, des frères passablement pâteux, avaient filé, bille en tête, emmerder le boche. Oh, rien de bien méchant. Ils n’avaient ni fusils ni couteaux, juste des bâtons pour faire du raffut et lui flanquer la trouille. C’est ça, juste lui flanquer la trouille, avaient-ils répété aux gendarmes venus les cueillir dans le champ, en face de la bâtisse d’où les regardait le peintre, qui n’avait pas bougé d’un pouce devant les menaces et les cris : « Le boche au poteau, le boche au poteau ! » Il avait juste dégainé son portable et appelé la gendarmerie. Et les gendarmes avaient débarqué fissa. Pas question de se mettre cette célébrité à dos. En plus il était protégé par le préfet et le président de région. À la caserne on ne rigolait pas avec les huiles.
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Chaque fois qu’il refait mentalement le chemin et qu’il arrive à ce moment crucial où il a décidé de laisser à d’autres les Platon, Kant, Hegel, Kierkegaard qui l’avaient nourri jusque-là, il éprouve un malaise semblable à celui de sa jeunesse lorsque, l’aïeul décédé, ses parents lui avaient annoncé son inscription au collège Saint-Joseph, où il était admis en pension. Il avait dix ans. Un an d’avance sur ses petits camarades. Contrairement à la pension, le choix de la sociologie lui appartenait en propre. Personne ne l’y avait poussé. Hormis ses lectures, sa maturation politique, et l’image tutélaire de son glorieux professeur et modèle Pierre Bourdieu.
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Il a quitté Paris sur un coup de tête. Quelque chose entre le ras-le-bol et le burn out. Le sentiment d’étouffer comme au temps du pensionnat, lorsqu’on lui faisait avaler ces platées de riz au lait dont il avait horreur. Trop ! Tout était trop.
Cela faisait longtemps déjà qu’il ne trouvait plus sa place. Universitaire ayant enfin atteint l’âge de la retraite – il se plaisait à retourner la formule consacrée qui voudrait qu’on fût atteint par l’âge de la retraite – il avait quitté ses thésards sans la moindre nostalgie. Il avait passé quarante ans de sa vie à enseigner la sociologie, une discipline si prometteuse après Mai 68. Il avait vite déchanté, et poursuivi son enseignement sans plaisir ni déplaisir, toujours plus seul alors que les amphis se remplissaient de jeunes gens chez qui il ne devinait pas l’ombre d’une passion.
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Éviter le regard de l’autre, plonger en lui, se perdre. Puis elle s’était rhabillée très vite, sans un mot, tandis qu’il allumait une cigarette. Et elle était repartie, presque en courant, à peine rassasiée de tout ce désir qui la rongeait depuis sa rupture.
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Elle n’était plus la timide violette d’antan, celle qui attendait si ce n’est le prince charmant, du moins que l’autre se déclare. Elle avait aimé, souffert, et s’était promis de ne plus se laisser piéger, de prendre plutôt que de donner. Et ce type-là, il fallait juste le cueillir comme un fruit trop mûr sur sa branche morte. Au mieux, il l’aiderait à surmonter sa solitude. Tristesse contre tristesse, cela ferait peut-être de la joie, du plaisir. À la manière de cette règle de grammaire qu’on inculquait en classe, selon laquelle deux négations égalent une affirmation.
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« C’est moi qui devais lui décrire ce qu’elle ne voyait pas. J’étais son messager. Je lui racontais la ville et le lycée (…) je regardais pour deux, je ne devais rien oublier, j’allais chercher les livres qu’elle commandait chez Saliba, je lui faisais essayer trois paires de mules que voulait bien me prêter Fiorentino : c’est pour ma mère vous savez elle ne peut pas sortir en ce moment mais je vous les rapporterai demain c’est promis, elle a les pieds déformés, tous les modèles ne lui vont pas mais je pense qu’avec ce choix, ça ira. Je souriais, mais mes lèvres, sur les côtés, avaient envie de dégringoler, je disais que j’étais pressée, je fuyais avant de finir mes phrases, on pensait que j’étais timide alors que j’avais mal à ma mère. » Aujourd’hui, Colette Fellous (2005)
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« Les images d’intimité qu’il garde de son enfance sont aussi rares que précieuses. Par exemple, à cinq, six ans, Jeanne-Marie prend son café. Il est chargé de déposer le sucre dans sa tasse. Si les petites bulles restent concentrées au milieu, c’est qu’il fera beau ; si elles s’en vont sur les côtés, c’est qu’il va pleuvoir. Ou bien, il a dans l’œil une poussière dont il n’arrive pas à se débarrasser. Elle retire son alliance et s’en sert pour soulever la paupière et nettoyer délicatement l’œil douloureux. Ou encore, avant de sortir pour une soirée, elle apparaît à la porte de la chambre dans une longue robe orange et dit bonsoir à tour de rôle à ses deux garçons qui sont déjà au lit. » L’Horloge de verre, Bernard Pingaud (2011)
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« Après sa mort, je dormis pendant quelques mois dans le lit de mon père. Il eût été dangereux de laisser ma mère toute seule. Je ne sais pas comment j’en vins à jouer le rôle d’ange gardien. Elle pleurait beaucoup et je l’écoutais pleurer. Je n’arrivais pas à la consoler, elle était inconsolable. Mais quand elle se levait et allait se poster à la fenêtre, je sautais de mon lit et me postais à côté d’elle. Je la ceinturais de mes bras et ne la lâchais plus. Nous ne parlions pas, ces scènes étaient parfaitement muettes. Je la serrais fort, et si elle avait voulu sauter par la fenêtre, elle n’aurait pu le faire qu’en m’entraînant avec elle. C’était au-dessus de ses forces. Je sentais son corps se relâcher, la tension s’évanouissait et c’est moi qu’elle retrouvait en se détournant de sa résolution désespérée. » Histoire d’une jeunesse, Elias Canetti (1978)
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Tout créateur s’exprime dans son œuvre, le reste n’est que bavardage.
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Il existe en espagnol un joli verbe pour fêtards, intraduisible en français : le verbe 'alternar'. Mot à mot : 'alterner', ce qui ne dit rien à personne. 'Alternar', c'est aller de bar en bar pour y vider des verres de vin et des ramequins de tapas, jusqu'à plus soif. Jusqu'à plus faim. On commence en général vers vingt et une heures et on s'arrête si tard qu'on en oublie sa montre et parfois même son adresse.
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Je sens que je perds pied à nouveau. Est-ce moi qui suis folle ou le monde ? Pour la première fois, il me semble que la folie du monde est bien supérieure à la mienne.
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Léonard pense que c’est ce que j’écris qui est le meilleur de moi-même.
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A Londres, Vanessa, Thoby et moi tenons un journal. Nous y racontons notre vie et des tas d’autres choses que nous imaginons. C’est amusant, j’aime les mots, la plume sur le papier, l’odeur de l’encre.
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Vous aimez les récits bien bouclés, avec un début, un milieu et une fin. Moi, la fin des histoires, des romans, ne m'a jamais intéressée. J'ai toujours préféré l'imaginer. J'aime penser que les choses peuvent finir autrement. Ou ne pas finir. J'aime bien les livres qui commencent par la fin. Après, cap à l'aventure. La fin, on s'en fout. On la connaît la fin, la vraie fin. Elle est programmée dès la conception. Quiconque a un début court vers sa fin. Vous connaissez la vôtre, la mienne... Tout est question de temps et de calendrier.
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Moi, je n'avais pas les connaissances littéraires d'Hugo, son aisance... Question d'héritage : les enfants de bonne famille n'ont qu'un bras à lever pour se fournir dans la bibliothèque parentale. Je n'avais pas, comme eux, caressé des dos de "Pléïade" dès l'enfance, ni senti sous la pulpe tendre de mes doigts la soie ivoire du papier bible.
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"La gloire est le deuil éclatant du bonheur". (page 74)
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