Mickaël Correia

Dans les années 1970, une théorie critique, plutôt issue des milieux libertaires, et portée par Jean-Marie Brohme, sociologue radical, expliquait avec condescendance que les ouvriers retrouvaient dans le foot la division du travail qui existe à l’usine. Eh bien non, les ouvriers jouent au football car ils y prennent du plaisir. Plus globalement, il y a aussi la figure du supporter un peu veule, chauvin, qui aime se battre, et du joueur abruti qui gagne des millions. Depuis plusieurs années, ces clichés s’épuisent avec les nombreux travaux universitaires, les débats sur la fonction sociale et politique du sport mais aussi des revues qui mettent en avant la culture football. Le foot, c’est une culture populaire et un fait social à part entière.

Entretien réalisé par Nicolas Guillermin - L'Humanité, Lundi 12 Mars 2018

Comme aimait à dire Sócrates, joueur brésilien célèbre pour son engagement politique : "La beauté vient en premier. La victoire en second. L'important, c'est la joie."

Introduction - p. 7

Pour mieux vilipender les footballeuses, certains n'hésitent pas à convoquer un ordre moral des plus réactionnaires. "Que les jeunes filles fassent du sport entre elles, dans un terrain rigoureusement clos, inaccessible au public: oui d'accord, écrit Henri Desgrange, rédacteur en chef de l'Auto, fin 1925. Mais qu'elles se donnent en spectacle à certains jours de fêtes, où sera convié le public, qu'elles osent même courir après un ballon dans une prairie qui n'est pas entourée de murs épais, voilà qui est intolérable !"

Réponse de Patrick Pouyanné : " Je connais et je respecte l'avis des scientifiques, le problème c'est qu'il y a la vie réelle. [...] Cette transition, je suis désolé, Jean, elle prendra du temps."
Durant cet été caniculaire, deux études scientifiques inédites ont pourtant rappelé la nécessité d'agir vite. L'Agence européenne pour l'environnement a établi que les événements climatiques extrêmes ont causé en Europe la mort de 195 000 personnes depuis 1980. Quand à l'agence d'État Santé publique France, elle a révélé qu'entre 2014 et 2022 près de 33 000 décès dans l'Hexagone étaient liés aux canicules. La "vie réelle", en somme.
[Chapitre I: Horizon vert, ciel noir
1) Mensonges climatiques p29]

D'origine fossile, et donc non renouvelables, ces trois combustibles libèrent lorsqu'ils sont brûlés de l'énergie et des gaz à effet de serre du fait de leur forte teneur en carbone - le pétrole et le gaz naturel sont deux hydrocarbures, c'est à dire constitués exclusivement de carbone et d'hydrogène.

Les vingt-deux chapitres qui le composent font circuler le récit, à la manière d’un ballon, sur cet immense terrain de lutte qu’est la « planète football », de Manchester à Buenos Aires, de Dakar à Istanbul, de São Paulo au Caire, de Turin à Gaza…

Forcément sinueuse et fragmentaire, cette histoire populaire du ballon rond s’attache aussi à donner la parole aux protagonistes de cette épopée, dans les tribunes du Barça sous le joug du franquisme comme sur les terrains sud-africains durant les heures sombres de l’apartheid, dans les clubs ouvriers français de l’entre-deux-guerres comme dans les communautés zapatistes du Chiapas dans les années 2000.

Premier exportateur international de pétrole, Saudi Aramco est la firme la plus émettrice de carbone de la planète. Le géant saoudien de l'or noir à éructé en 2019 1,93 milliard de tonnes équivalent CO2. C'est plus de quatre fois et demie que ce que la France a émis cette même année. En deuxième position apparaît China Energy avec 1,55 milliard de tonnes équivalent CO2 rejetés dans notre atmosphère, toujours en 2019. Ce gigantesque conglomérat chinois est la plus grande compagnie énergétique sur Terre mais surtout un leader du charbon. Enfin. talonnant le champion chinois de la houille : Gazprom. Premier producteur international de gaz, ce fleuron de l'économie russe émet chaque année 1,53 milliard de tonnes équivalent CO2.

[..], révélaient que cent entreprises étaient responsables à elles seules de 71% des gaz à effet de serre imputables à l'activité humaine, depuis 1988. Plus de la moitié des émissions mondiales industrielles sont attribuables à seulement vingt-cinq firmes.
Cette centaine de sociétés sont toutes productrices de pétrole, de gaz ou de charbon.

L'importance démesurée accordée aux comportements des individus permet avant tout d'invisibiliser la structure sociale de la crise climatique. De masquer les moteurs de l'embrasement de la planète. En somme, de détourner notre attention politique des véritables fossoyeurs du climat.

Le concept même d'empreinte carbone" a été conçu au début des années 2000 par l'agence de communication américaine Ogilvy @Mather, embauchée par la British Petroleum (BP) , une des plus grandes compagnies pétrolières au monde, afin de promouvoir l'idée que le chaos climatique n'est pas la faute des entreprises mais des consommateurs.

De Jacques Attali, à travers ses rapports prônant un capitalisme vert, à Pierre Rabhi, via sa fable du colibri qui "fait sa part" en jetant des gouttes d'eau sur l'incendie, tous clament que l'on pourra mettre fin à la catastrophe en cours en adoptant au quotidien des gestes écoresponsables. Il faut se changer soi pour changer le climat qui s'emballe. Une morale écologique s'est ainsi abattue sur chacun d'entre nous, nous persuadant que le tri de nos déchets, l'achat d'une gourde et le remplacement de nos ampoules par des LED incarnent le minimum syndical de la lutte contre le dérèglement climatique.

L'adage d'Henry Ford "Faites faire du sport aux ouvriers. Pendant ce temps, ils ne penseront pas à l'organisation syndicale".

Les matchs sont désormais appréhendés comme des divertissements marchands. Les supporters deviennent de simples consommateurs. Les clubs tentent d'attirer les clientèles les plus rémunératrices. Placés au coeur de la stratégie commerciale des clubs d'élite, les stades ressemblent désormais à des parcs d'attractions qui se veulent à la fois familiaux et hypersécurisés.