Mikky Sophie

Je m'auto-congratule. L'étape deux est mise en route.

(EDIT : à imaginer avec un sourire machiavélique interne xD haha)

L’agressivité provoque la peur. La peur suscite le pouvoir. Le pouvoir amène à l’agressivité.

Excellente comédienne, elle attrape le premier mec qui passe pour le présenter. Il me salue. Je m'esclaffe en lui caressant le bras. Nous faisons semblant d'avoir une conversation plaisante. Le pauvre garçon ne capte rien mais reste en notre compagnie, absorbé par mon décolleté pigeonnant. Je m'enquiers de l'effet que je produis sur David auprès de mes amies.
- Il m'a vue ou pas ?

Je prévois toujours une marge de sécurité afin de ne jamais être en retard dans mes activités. Si je déteste les araignées, les sports nautiques, les chocolats à la liqueur et la musique électronique, ne pas être à l’heure à un rendez-vous est en pole position sur la liste de ce qui me rend dingue. Ce pépin blond sur ma route pourrait bien user de mes minutes de prévoyance.

Je chante faux avec délectation. C’est si bon d’être seule.

Je devrais m’abstenir de visionner des films d’horreur ou Faites entrer l’accusé, Crimes et Enquêtes criminelles tant que je suis seule dans la maison. Tous ces faits relatés et sordides ne réussissent qu’à me faire craindre qu’un tueur en série me saute à la gorge et m’enterre au fin fond de la forêt. Mon corps serait mangé par des coyotes affamés et des vautours charognards avant que la police ne me retrouve. Les preuves seraient effacées et le tueur resterait en liberté, à l’affût d’une future proie fragile et innocente.

Je ne me couche jamais tard, en temps normal. J’apprécie mes huit heures de sommeil obligatoires. Elles sont nécessaires à l’organisme pour se ressourcer efficacement et assurer une longue vie. Les revues médicales le préconisent régulièrement et je suis bien placée pour le savoir. Mes parents sont médecins tous les deux. Ma mère est pédiatre, mon père est radiologue. Loin de la dérive de mon frère, ergothérapeute, je fais la fierté de mes parents en poursuivant des études de médecine. Je suis en quatrième année et j’aimerais me spécialiser en cardiologie.

J’essaie de me convaincre que je n’ai pas tout le poids du monde à porter sur mes épaules et que je pourrais le laisser dans sa mouise mais cela impacterait ma petite sœur. Et dire que Mira m’attend et que je suis censé l’entendre gémir de plaisir en ce moment même !

Est-ce qu’une odeur peut être charnelle ? Je ne suis pas certain, mais ce dont je suis sûr, c’est qu’elle est enivrante et qu’elle m’entraîne avec elle dans un confort extatique.

Je ne suis pas là pour m’attendrir, mais si cette femme ne ment pas, je suis vraiment un enfoiré de première. J’essaie de me concentrer sur ma tâche, mais je n’arrête pas de penser à elle de l’autre côté du couloir. Qu’est-ce que je vais faire d’elle ? Femme de ménage innocente ou intime des frères Connor ? Elle me dénoncera, c’est certain. Je la séquestre, je l’ai violentée et j’ai failli abuser d’elle. N’importe qui de censé porterait plainte. Il faudrait être folle pour tirer un trait sur cette nuit et continuer sa vie comme si de rien n’était. Le manque de sommeil, l’adrénaline et le stress m’empêchent de prendre une décision. Pour l’instant, elle est hors d’état de nuire à mes projets. J’aviserais par la suite. Qu’est-ce que je fous là, déjà ? Ah oui, à cause de la prédiction d’une voyante. Comment ai-je pu en arriver à ce point ? Je suis le roi des coups de tête et des initiatives tordues. J’inspire profondément afin de me remettre les idées en place. J’ai de bonnes raisons d’être là. Je ne dois pas l’oublier. Et puis, il est trop tard pour faire machine arrière maintenant. Quitte à se prendre un mur, autant foncer à toute vitesse dedans. C’est plus fun.

Je regarde l'heure affichée au-dessus du réfrigérateur. Il est 8h10. Dans une cinquantaine de minutes, ma banque ouvrira ses portes.

Il est temps de régler mes comptes !

Lorsqu’une vision se termine, j’oublie rapidement les détails de la même façon que lorsque je me réveille en sursaut d’un cauchemar. La peur et les angoisses sont encore fraîches mais les petites spécificités et la cohérence ne sont plus accessibles. Comme si mon subconscient m’empêchait de connaître la vérité, trop douloureuse à supporter.  

Je suis chippewa. Je suis guerrier comme mes ancêtres. Et je me battrai avec fierté et courage contre ceux qui se mettront sur ma route ou qui tenteront de détruire ma famille. Mira est de ma famille maintenant. Elle est ma mère, mon amie, ma sœur et ma femme. Elle représente tout ce qui éveille mes sentiments. Tout ce qui compte dans ma vie. Elle est en moi. Elle est à moi. Elle est moi. Je l’aime. Rien ne pourra lui arriver. Les anges ne meurent pas. Et elle est mon ange. Celle qui a su me rendre meilleur. Celle qui m’a guidé dans le droit chemin.

Face à Ethan Connor, je la ressens. Et je suis tétanisée. Je vais mourir. Pour de bon, cette fois. Je le vois dans ses yeux. Il me regarde comme une petite chose insignifiante. Je ne suis rien pour lui. Vivante ou pas, cela ne l’affecte aucunement. Au contraire de son frère qui aurait tout fait pour me garder en vie afin de profiter de mes faveurs, me torturer pour le plaisir, me violer pour le désir, Ethan ne s’encombre pas de pulsions ou de travers incontrôlables. Il est froid et implacable. Il est un homme d’affaires et il obtient toujours ce qu’il veut. Et là, c’est Ahmik qu’il souhaite par-dessus tout. Je ne suis qu’un appât.

Une soif qui ne sera jamais tarie. J’étais comme lui quand il a tué mon petit frère. Rien ne m’aurait arrêté. Pas même les larmes de détresse d’une femme innocente. Aujourd’hui, j’ai délibérément inversé les rôles mais dans tous les cas, je resterai celui qui en paiera le prix le fort. J’essaie de contrôler les tremblements dans mes mains. Bob me fixe avec inquiétude.

Rien ne pourra être à la hauteur de la souffrance qu’il m’infligera s’il cause du mal à la femme que j’aime. Rien ne pourra être aussi douloureux. Mes yeux s’embuent de larmes sèches. La colère et l’angoisse les empêchent de couler.

Les jeux de hasard ne sont pas des faiblesses réservées aux natifs américains, les blancs en sont aussi les tristes victimes. Je ne savais pas que Bob était affecté par cette gangrène avant de le découvrir dans la paperasse. Avec la revente de mon larcin, j’en ai profité pour combler les trous. Je lui devais bien ça pour m’avoir ouvert les bras mais aussi pour qu’il me soit redevable d’un service. Bob est un homme loyal et en payant ses dettes, je comptais aussi sur son aide en retour pour engager ma sœur et lui apprendre un métier.

Tu vois cette bosse à la base de mon pouce. Il s’appelle le mont de Vénus. Le mien est proéminent et signifie que j’ai un fort don d’intuition et d’empathie. C’est écrit même dans les lignes de ma main, regretté-je.
– Le mont de Vénus ? J’en connais un autre dans lequel je sais mieux lire que toi. Et je suis persuadé qu’il ne raconte pas les mêmes conneries.

Au fond, j’avais continuellement peur qu’un désastre me tombe dessus. J’avais peur tout le temps. Parce qu’un malheur n’arrive jamais seul mais aussi, d’être heureux, car ça ne pouvait pas durer éternellement et que tôt ou tard, je paierai le prix du bonheur.

Et je suis libre. Libre de fermer les yeux sans me sentir menacée. Libre de respirer à pleins poumons. Libre d’être moi-même. Libre d’aimer. J’ai la sensation de nager dans un espace-temps où rien ne peut m’atteindre. C’est donc ça être heureux ? Je n’ai aucune idée de si je mourais demain, dans un an ou au fond de mon lit quand je serais vieille mais ça m’est égal maintenant. Je veux juste vivre chaque minute du reste de ma vie auprès de lui. Il m’apaise, me réconforte et m’électrise. J’étais un zombie qui errait sans rien attendre, dorénavant, je sais où je vais… là où il est.