« Courage, ça ira ». Comme tout le monde ou presque, on m’a dit cette phrase lorsque je n’allais pas bien. Et comme tout le monde ou presque, je sais que ça ne change rien. Mais faut bien faire semblant. Lorsqu’un homme qui veut réconforter un autre homme lui dit que « ça ira », je ne vois que deux hommes qui souffrent. L’un baigne dans sa tristesse. L’autre se noie dans son incapacité à parler à la douleur de l’autre.
À ce moment-là, comme prévu, mes amis mirent le plan à exécution : de la foule jaillit subitement un grand mannequin qui représentait un homme noir. Une main y déversa de l’essence, une autre y mit le feu. La grande effigie noire brûla sous les yeux de Sabrina, de ses amis, des gendarmes et des migrants restés dans les cars. Cela brûlait, brûlait, brûlait, comme une offrande faite à la Sicile… Et sur leurs visages, je vis la peur et l’impuissance. Nous avions gagné. Ils avaient perdu la parole devant les flammes et le symbole de leur destruction future.