Un autre point aveugle est l'absence de reconnaissance de l'intentionnalité de l'agresseur. Sa volonté de nuire, de détruire, de faire souffrir le plus possible, d'opprimer, de réduire sa victime à une chose, de la déshumaniser pour son intérêt et son plaisir, et même, comble de la cruauté, d'en jouir, est escamotée. Seules ses rationalisations et la mise en scène mensongère montée pour s'absoudre de toute culpabilité sont relayées et prises pour argent comptant (Sironi, 1999). Penser que la violence est une atteinte aux droits de celui qui la subit, une atteinte à son intégrité physique et psychique, qu'en aucun cas elle n'est légitime (sauf dans le cadre étroit et bien défini de la légitime défense, et si aucun autre recours n'est possible) et que l'agresseur est coupable d'y avoir recours et qu'il a tout intérêt à essayer de se défausser, n'est malheureusement pas le réflexe immédiat de la plupart des gens, ni même des professionnels censés prendre en charge les victimes et faire respecter la loi.
Le point aveugle principal de ce système est l'absence de recours à la loi. Il fait l'impasse sur le fait qu'en tout état de cause l'agresseur n'a pas le droit de commettre ces violences et que, comme tout citoyen, il n'est pas censé ignorer la loi ! Alors que la victime n'a transgressé aucune loi. Une femme a tout à fait le droit de se promener seule la nuit, de porter une jupe fendue ou une robe décolletée, d'être très maquillée, de boire de l'alcool, de prendre un café chez un ami, en aucun cas cela ne signifie qu'elle est disponible sexuellement, et la violer est un crime.
Concernant les violences conjugales, 10 % des femmes en ont subi dans l’année écoulée ; pour les viols, les chiffres sont aussi effrayants : 75 000 femmes sont violées par an, et plus de 150 000 si l’on rajoute les mineures ! Une femme meurt tous les deux jours et demi sous les coups de son conjoint en France.