Bienvenue dans le trou du cul de l’Utah ! Duncan’s Creek, petite ville peuplée de mormons avec des idées rétrogrades, de Gossip Woman pourvues de sacrées langues du vipère, d’un shérif antipathique et de toute une population assez haute en couleur.
Les seuls vautours que vous verrez dans ce roman font partie de cette espèce de charognards que je haïs : ceux qui se rassemblent devant une catastrophe et qui y vont de leurs petits commentaires fallacieux, fielleux et médisant. On les nommeras des « voyeurs morbides » car ils se repaissent d’événements dramatiques.
Malgré tout, l’ombre du grand rapace charognard plane et planera sur tout le récit : une petite fille de 5 ans a disparu et ce n’est pas le premier enfant qui disparaît.
Mais qu’est-ce qui se passe à Duncan’s Creek, doudou dis-donc ? Y aurait-il un croquemitaine ? J’ai l’air de prendre ça à la rigolade, mais je vous rassure de suite, l’affaire est grave.
Que voilà donc un roman magistral qui m’a entrainé sur les pentes escarpées du Devil Trail à la recherche de la petite Shawna, gamine innocente née dans une famille dont le père est un fainéant de première, protégé par sa famille qui voyait en lui un saint et qui a disparu il y trois mois. Bien fait, tiens !
Il y a une telle tension dans le récit, parfois, que j’étais contente de me changer les idées avec les aventures des autres personnages qui gravitent dans le récit.
Malheureusement, cette baisse de tension n’était que temporaire, tout le monde a des squelettes dans ses placards et le récit est digne d’un excellent roman noir tant la condition sociale y est décrite d’une manière féroce. C’est tout un pan de la société qui s’offre à nous dans ce microcosme et vous reconnaitrez des gens de votre entourage dans les habitants.
Les personnages ont des histoires qui se croisent et des destins qui s’entrecroisent, le tout étant raconté avec une maestria qui me laissera sans voix. On a l’impression qu’on gravite avec eux dans leur quotidien, suivant leurs pas dans cette petite ville des années 80, cette époque non polluée par le Net ou les GSM (et ça a toute son importance).
Toute cette petite galerie qu’on apprendra à connaître, à aimer, à détester (pour certains, je préconise le lance-flamme, directement), tous ces gens parfaitement décrits qui nous apprendront leurs histoires, leurs désirs, leurs pensées, leurs blessures secrètes… Le tout avec une bonne dose d’ironie et de cynisme.
Les descriptions, les récits des autres personnages, l’ambiance – tantôt sombre, tantôt plus douce ou romantique, le suspense, l’avancée du récit – tout est maitrisé et diffusé selon une prescription médicale des plus étudiée. Ni trop, ni trop peu. Juste assez pour nous rendre addict et faire que l’on en veuille plus ! Les 475 pages passant juste un peu trop vite à mon goût.
Accrochée dès le départ, mon cœur a eu peur pour la petite, mais, entraîné dans le récit des autres, j’en suis même arrivée à l’oublier, et de ça, je ne suis pas fière, mais l’auteur, lui, peut l’être !
C’est un tourbillon d’émotions que je viens de vivre ! Bluffée, menée par le bout du nez, plongée dans les misères des gens, ayant des envies de meurtres, dégoûtée par les ragots des langues de vipères qui font plus de mal que de bien, tenant fermement ma lampe de poche lorsque je cherchais la petite avec eux, me donnant l’impression que je vivais avec eux, étreignant plus mon livre lors des moments « suspense » et le refermant avec un sourire mêlant à la fois le plaisir et la tristesse.
Du plaisir à lire cet auteur français qui a réussi à me faire oublier sa nationalité française, tant j’avais l’impression de lire un bon auteur « yankee » et de la tristesse à l’idée de devoir refermer ce livre une fois arrivée au mot « fin ».
Merci Nicolas (Tu permets que je t’appelles par ton prénom après toutes les émotions que tu m’as donné ?), pour ce roman qui avait des airs de ressemblances avec les ambiances des petites villes reculées des romans du King. Oui, merci pour ce putain de magnifique roman que j’ai lu sous les bons conseils de l’ami Yvan.
PS : J’adore la couverture !
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