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Citations de Pacôme Thiellement (216)


Jusqu'à nos quarante ans environ, les équilibres ou les déséquilibres de l'instruction et de l'amitié ne sont jamais évidents: il y a des crapules qui nous ont beaucoup aidés, et des anges qui nous ont laissé gésir comme des morts. Il y a des amis qui sont adorables et qui nous laissent crever comme des porcs, et d'autres, coincés ou bizarres, qui transforment notre coeur, nous font grandir et aimer davantage. C'est à la façon dont nous nous sentons ensuite que nous devrions évaluer la qualité d'une amitié. Face à l'amitié, on ne doit jamais nous reprocher ou se reprocher quoique ce soit. Les chantages sont incessants; les procès sont si pénibles, les obligations si peu nécessaires; l'insistance est si courante qu'on en oublierait presque que l'amitié est et doit être de l'ordre de la décision la plus intime et la moins contraignante possible. On ne devrait jamais demander son amitié à quelqu'un. On ne devrait rien attendre et n'accepter de recevoir que le nécessaire. Mais pour cela, il faut avoir écumer beaucoup de demi-amis, de presque amis et de faux amis.
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Ça ne sert à rien de regarder le passé en se demandant ce que nous avons perdu. Ce qu'il faut, c'est lutter au présent pour défendre ce qui nous semble juste. Et pour ça, il faut également lutter contre l'arme suprême des Ténèbres: la capacité à nous faire minimiser nos victoires et surestimer nos pertes. Les Ténèbres sont toujours plus fortes quand elles réussissent à nous convaincre qu'elles gagnent toujours et nous perdons sans cesse. Mais ce n'est pas une vraie perte, ce n'est pas une perte essentielle: nous n'avons jamais perdu devant les Ténèbres tant que nous sommes restés fidèles à nos principes.
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La conscience ne sert que de réceptacle aux ordres extérieurs au corps : elle les informe ensuite de ce qu’on attend de lui et tente de le convaincre de s’y soumettre. Elle est un agent de conservation liée aux nécessités impérieuses d’une conduite civilisée et tente de prévenir le corps dans sa démarche d’intensification (pouvant basculer, par la parfaite conformation aux décisions des voix, jusqu’à la schizophrénie ou l’action violente). Mais son défaut, nous le connaissons, c’est qu’elle entrave immanquablement l’action et nous paralyse dans notre détermination. La conscience devenue obstacle à la résolution du sujet, et entraînant finalement une catastrophe collective, est la base de la tragédie d’Hamlet – dont Carl Schmitt a pu dire qu’il était le mythe politique moderne par excellence –, prince du Danemark contacté par le Spectre mais qui hésite trop longtemps à se conformer aux demandes de celui-ci, et qui finit par assassiner accidentellement Polonius et peut être considéré comme responsable du suicide d’Ophélie : « Que ce soit bestial oubli, ou quelque lâche scrupule qui me fait penser trop en détail aux conséquences – pensée qui, mise en quatre, n’a qu’une part de sagesse et trois de couardise –, je ne sais pas pourquoi je passe ma vie à dire “cette chose est à faire” alors que j’ai motif, vouloir et moyens de la faire » (Shakespeare).
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Ce serait beau si nos malheurs ne provenaient que de la malveillance des autres gens. Ce serait beau si nous n'avions à nous soucier que des actions mauvaises des ennemis extérieurs. En réalité, notre vie est, en permanence et avant tout, une guerre contre ce qui en nous est complice de ce qui nous nuit. Notre vie est une guerre contre cette âme infiltrée en nous qui ne cherche qu'à vampiriser notre puissance par le cynisme et vaporiser notre volonté par la dépression. Et si le bonheur est un art de la guerre, alors, comme tout authentique discipline artistique, cet art s'apprend.
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Si aimer ce qu'on aime est la première étape pour cesser d'être malheureux, vouloir ce qu'on veut est la deuxième, et celle-ci représente un saut qualitatif de grande ampleur. Ce n'est pas facile d'aimer ce qu'on aime ; c'est très difficile de vouloir ce qu'on veut.
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Mais nous n'aimons pas tellement aimer ce que nous aimons. La preuve, c'est que nous n'y passons pas beaucoup de temps. Nous passons infiniment moins de temps à aimer ce que nous aimons qu'à ne pas aimer ce que nous n'aimons pas. Et ce temps nous indique que nous sommes loin d'aimer ce que nous aimons autant que nous n'aimons pas ce que nous n'aimons pas.
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Dans ce monde, tout est signe. Tout est labyrinthe, chute et ascension de l'âme. Tout est obscur - les chemins, les parcours, les scintillements des destins possibles -, il y a des lumières partout, déclinantes et ascendantes, et il faut être incroyablement intuitif pour suivre les bons signes, les bonnes lumières. Tout est fait pour que nous suivions les mauvaises. Tout est construit pour que nous tombions dans des pièges.
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... la présence de l'homme, dont on prétend tirer de lui-même le miroir, le transforme en coquille vide. C'est en son nom que la télévision parle, mais en un nom où il est considéré comme un support creux dans lequel la parole doit résonner. Ce déséquilibre entraîne le spectateur à ne plus se sentir que comme un fantôme de l'information. En tant que spectateurs, nous sommes "ceux qui ne sont pas vus". C'est que l'âge d'or de la télévision était un accident. La télévision n'avait pas vocation à ouvrir sur la connaissance ; en tant qu'elle devait être une fenêtre sur la "spiritualité" de son époque, elle n'avait vocation qu'à être source d'empoisonnement. Et "Droit de réponse" était la première pièce jouée sur ce mauvais théâtre, la porte d'entrée de ce khalifat de malheur : notre époque.
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[…] Twin Peaks déploie une authentique Voie de la Main Gauche, et se présente avec la radicalité du geste exigé par Krishna à Arjuna pour s’arracher aux déterminations et atteindre la délivrance. Et cette voie passe par la présentation d’une Geste à dimension initiatique renversée. C’est la Geste, triste à mourir, d’un homme bon mais guidé par des signes équivoques dans un chemin de perdition, et finalement abandonné aux forces mauvaises : Dale Cooper.
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Le capitalisme surplombe si parfaitement son époque que les figures les plus influentes de la modernité sont, malgré elles, complices de son triomphe : Nietzsche, dans la création du Surhomme (« premier homme qui commence à réaliser la religion capitaliste de manière consciente » [Walter Benjamin, Le capitalisme comme religion]), parce qu’il remplace la conversion et l’expiation par une intensification continue ; Freud, pour l’invention du refoulé : « capital sur lequel l’enfer de l’inconscient paie ses intérêts » ; enfin Marx, chez qui le capitalisme qui ne se convertit pas devient le socialisme « par l’intérêt et l’intérêt composé qui sont fonction de la faute ».
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La confrontation à une œuvre d’art authentique modifie notre manière de penser, de vivre, de mouvoir notre corps dans l’espace, de percevoir l’action de nos semblables dans la vaste composition du monde. C’est ce qui sépare un modeste divertissement d’une aventure artistique (initiatique ou non). Mais la part de divertissement, de jeu, de plaisir, est évidemment partie intégrante de l’opération décrite : l’une n’est rien sans l’autre. C’est pourquoi une œuvre d’art qui ne procure pas également un plaisir au premier degré n’est pas non plus d’une très haute valeur.
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Twin Peaks est une accumulation volontaire de polarités et d’antinomies, comme si la connaissance unitive, gnostique, ne pouvait jamais avoir lieu sans passer d’abord par la découverte progressive d’opposés dans toute situation vécue, et leur annulation, propice à l’ascension du sujet à un deuxième niveau de lecture, celui-ci directement symbolique.
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Shakespeare ne déteste personne, pas même lui-même, et pense que les justifications propres à son interlocuteur ne sont pas des sornettes, mais le reflet d’une vérité intérieure plus vaste qu’il s’efforce de comprendre.
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Notre vie est incomplète tant que nous n'en avons pas fait l'exégèse.
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Toute une vie ne suffirait pas à apprendre à chérir le malheur [...] en tant que matière indispensable à l'édification de notre bonheur.
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Parler d'illusion au sujet du pressentiment de la Beauté était absurde, car il n'y a rien de plus illusoire que les ambitions profanes qu'on lui oppose : le fric ; la gloire ; la bouffe ; la baise sans amour.
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Nous ne sommes pas malheureux par notre propre faute. C'est le fonctionnement de ce monde qui nous démoralise. Mais nous nous rendons doublement malheureux en pensant que c'est notre faute.
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Toute une vie ne suffirait pas à apprendre à vivre.
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Sur le fond, je pense que le logement, les transports, la nourriture et les soins médicaux devraient être gratuits (ou, à la limite, à bas coût) et qu'on devrait permettre à n'importe qui de vivre, tout simplement vivre... Mais un livre ou un DVD devraient coûter un certain prix. On ne devrait pas travailler pour se payer à bouffer mais pour se payer un DVD de Bertrand Mandico, un disque d'Eyvind Kang ou un livre de Chloé Delaume. C'est ça qui serait logique. Des oeuvres que les artistes mettent un an minimum à réaliser ne devraient pas être des trucs qu'on puisse obtenir avec l'indolence d'un gadget. Ça ne sert pas à ça, l'art. Nous ne faisons pas un art pour les boulimiques.
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Ce serait beau si nos malheurs ne provenaient que de la malveillance des autres gens. Ce serait beau si nous n'avions à nous soucier que des actions mauvaises des ennemis extérieurs. En réalité, notre vie, en permanence et avant tout, une guerre contre ce qui en nous est complice de ce qui nous nuit. Notre vie est une guerre contre cette âme infiltrée en nous qui ne cherche qu'à vampiriser notre puissance par le cynisme et vaporiser notre volonté par la dépression.
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