Table ronde, carte blanche aux Presses universitaires François-Rabelais
Modération : Samuel LETURCQ, directeur des Presses universitaires François-Rabelais
Avec Pascal BRIOIST, professeur à l'Université de Tours, Laurent VISSIÈRE, professeur à l'Université d'Angers
Il y a vingt ans sortait au cinéma "Il mestiere delle armi" d'Ermanno Olmi. Les spectateurs y découvraient pour la première fois souvent, l'histoire peu connue en France du condottiere Giovanni de' Medici, double italien du chevalier Bayard. Tous deux étaient parvenus à se tailler une solide réputation à la faveur des guerres qui ravageaient la péninsule italienne depuis 1494. Tous deux y trouvèrent la mort à la fleur de l'âge, fauchés par un coup d'arquebuse. Ces armes démoniaques abolissaient toutes les formes de distinction traditionnelles fondées sur le statut social et la valeur martiale, et l'exercice de la guerre pouvait apparaître désormais comme un métier plutôt que comme une fonction sociale. Si l'expression de « métier des armes » est attestée dans les sources et si son existence a pu sembler évidente au réalisateur italien, elle est loin de l'être au tournant du Moyen Âge et de la Modernité. La pratique de la guerre peut-elle être considérée comme un métier ? Qui sont réellement ces hommes qui, pour avoir choisi la voie des armes, hantent les routes poussiéreuses de l'Italie ? Comment ont-ils fait ce choix de vie ? À quoi les engage-t-il ? Quelles contraintes leur impose ce choix et quels bénéfices en retirent-ils, au contraire ? Au-delà du plaisir et de la gloire, qu'espèrent-ils en fait de privilèges, de carrière, d'enrichissement ou d'élévation sociale ? À l'occasion de la sortie du livre L'énigme Bayard. Une figure européenne de l'humanisme guerrier, Pascal Brioist, Benjamin Deruelle et Laurent Vissière proposent de revenir sur tout le problème de la professionnalisation du métier des armes au crépuscule du Moyen Âge et à l'aube de l'époque moderne.
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[Jacques Le Goff s'adressant à Jules Michelet et Jacob Burkhardt dans une fin de dialogue imaginaire]
[J.LG] - Oh, vous m'agacez tous les deux...
Je n'y crois pas à votre Renaissance. Le niveau de production économique est resté très bas, et les famines sont toujours là ; il n'y a pas vraiment eu non plus de mondialisation.
La Réforme n'est pas si importante, le christianisme a gardé son emprise sur l'Europe.
Quant à la méthode scientifique moderne, elle n'est pas née au XVIè siècle !
[J.B] - Ça mon cher, il faudra en reparler...
Il paraît qu'au royaume de Louis le Juste chacun faisait "assaut de réputation" les armes à la main. C'est ainsi que, dans la même journée, un cadet du Béarn défia trois mousquetaires puis s'associa à eux dans une fraternité d'armes appelée à devenir légendaire. Il paraît aussi que le roi et son principal ministre se livraient eux-mêmes une véritable guerre par duellistes interposés. Alexandre Dumas n'a pas tout inventé. Il a emprunté le mythe d'une France mousquetaire à Courtilz de Sandras.
Le septième axe suggère en guise d'épilogue de réfléchir aux éléments contradictoires qui prouvent que la RENAISSANCE fut aussi faite de tensions dynamiques : tensions entre l'idéal d'universalité et les nationalismes émergents, entre la volonté d'affirmer la dignité de l'homme et celle de nier la dignité humaine de l'Autre, entre la tolérance et l'intolérance, ou entre l'optimisme et la mélancolie.
O le bon temps de ce siècle de fer ! Le superflu, chose nécessaire, a reuni l'un et l'autre hémisphère. Voyez-vous pas ces agiles vaisseaux qui, du Texel, de Londres, de Bordeau, s'en vont chercher, par un heureux échange, de nouveaux biens, nés aus sources du Gange, tandis qu'au loin, vainqueurs de musulmans, nos vins de France enivrent les sultans ?", ainsi Voltaire, dans une pièce intitulée Le Mondain, parue en 1736, résumé-t-il brillamment la révolution maritime du XVIIIe siècle en associant excellence navale, domination commerciale française et éloge de la société de consommation naissante. C'est dire que les contemporains du XVIIIe siècle sont conscients du fait que leur destin est plus que jamais lié à la mer.
Les Anciens ont appelé l'homme un microcosme, et en vérité cette épithète s'applique bien à lui, car l'homme est composé d'eau, d'air et de feu, il en va de même pour le corps de la terre; et si l'homme a en lui une armature d'os pour sa chair, le monde a ses rochers, supports de la terre; si l'homme recèle un lac de sang où les poumons, quand il respire, se dilatent et se contractent, le corps terrestre a son océan qui croît et décroît toutes les six heures, avec la respiration de l'univers; si de ce lac de sang partent les veines qui se ramifient à travers le corps humain, l'Océan emplit le corps de la terre par une infinité de veines aqueuses [...].
Gutenberg n'aurait sans doute pas eu l'idée de se lancer dans ses études s'il n'avait pas pu utiliser une innovation permettant de multiplier les supports à un coût raisonnable : le papier.
Il n'est pas légitime de parler d'une Science de la Renaissance car les contemporains de Vinci, Copernic ou Vésale n'employaient pas ce concept.
Il serait erroné de faire des oeuvres de Pic de la Mirandole et de Ficin un couronnement de l'humanisme car, bien souvent, elles ont plutôt été l'occasion d'un commencement.