Patrick Marty

-Maitre, j'ai l'impression que ces gens sont comme le vol d'hirondelles qui sent l'orage gronder...
-Hum... Les oiseaux ou les hommes, quand ils se posent sur votre épaule, que leur chant soit triste et déchirant comme celui du corbeau ou gai comme ceui du rossignol, le devoir du magistrat est de les écouter.

Il y a quelques années, alors que je visitais à Kaifeng, l'ancienne capitale des Song du Nord, une reconstitution d'un Yamen où le juge Bao avait officié, je tombais sur une stèle où était gravé le nom d'un grand nombre de magistrats illustres. Alors que je parcourais les dizaines d'idéogrammes, mon œil dut attiré par un trou dans la pierre à la place de l'un d'eux. Ce trou, comme on me l'expliqua plus tard, était le résultat du passage de milliers de doigts sur le nom gravé, comme pour entrer en communion avec lui. Et ce nom était celui du juge Bao.

- Juge Bao : Tu comprends que je doive retenir sur ta paye les frais de nourriture de la petite sœur du jeune moine que tu as invitée à nous suivre sans me demander la permission.
- Bao Xing : Maître... Mais... Je...
- Juge Bao : Cela t'aidera meiux à comprendre l'importance de notre haute mission et... qu'on n'utilise pas l'argent de l'État pour assouvir ses propres désirs !

Je vois, je vois... Hum... Jeune homme, estimez-vous heureux. Dans bien des cas, le couple illégitime assassine purement et simplement le mari trompé.

Agissez au plus vite Zhan Zhao. D'autres beaucoup moins soucieux de l'intérêt général que nous travaillent déjà dans l'ombre pour tirer profit de la crise...

- Pan : C'est un homme froid et direct. Il m'a congédié comme un vulgaire serviteur.
- Duc Zhao : Mon cher gendre, vous n'êtes qu'un serviteur. De haut rang, mais un serviteur tout de même. N'en prenez pas ombrage.

Le juge Bao avait fait savoir autour de lui qu'il ne souhaitait recevoir aucun cadeau pour son départ, arguant qu'il n'avait fait que son travail et ne méritait rien d'autre que de simples adieux pour ceux qui le désiraient. Or, un petit groupe d'hommes, connaissant sa passion pour la calligraphie, s'avança vers le magistrat alors qu'il embarquait pour lui offrir une pierre d'encre. Le magistrat les remercia pour ce geste, puis se tourna vers le fleuve et y lâcha la pierre, avant de leur dire à peu près ceci : «Je veux que l'on sache que je suis parti de cette province sans même avoir emporté une seule pierre.»

- Juge Bai : Si tu es toujours sensible à la poésie mon cher Bao, aurais-tu la bonté de lire mes derniers poèmes ?
- Juge Bao : Mon bon ami Bai. Si ta poésie est aussi délicieuse que cette carpe, j'en serai ravi. Sais-tu que je lis chaque jour au moins une poésie ? Cela m'aide à comprendre le cœur des hommes dont la noirceur parfois me pèse, je te l'avoue.

Le juge Bao n'est pas seulement un héros chinois : l'esprit de justice et d'équité qui l'anime est universel et intemporel.
La Chine d'hier et d'aujourd'hui n'a pas le triste monopole de la corruption et de la criminalité, et si les enquêtes de cet homme intègre et incorruptible ont des résonances avec notre monde contemporain, c'est qu'elles correspondent malheureusement à un phénomène qui nous touche tous et toutes, de part et d'autre de la grande muraille.

- Gongsun Ce : Maître, j'ai le sentiment que le Juge Gu a une drôle de façon de rendre la justice.
- Juge Bao : J'ai échappé de justesse à une bastonnade pour avoir simplement effrayé le cheval de Zhan Zhao !
- Gongsun Ce : Maître, toutes les plaintes l'incriminent.
- Juge Bao : Gongsun Ce, le Juge Gu est un fieffé coquin ! Il rançonne les familles des gens qu'il condamne. Si elles ne payent pas, il fait exécuter les prisonniers.

En Chine, sous la dynastie des Song du Nord (960 - 1126), l'Empire vit un formidable essor, tant d'un point de vue matériel qu'intellectuel. Une puissante économie de marché voit le jour. Mais si le pouvoir central extrêmement fort favorise une grande stabilité dans le pays, il doit en revanche sans cesse lutter contre une corruption endémique et galopante. Le pays est riche et les tentations des hommes qui le dirigent sont grandes. Notables de provinces reculées, administrateurs, militaires, fonctionnaires, gouverneurs abusent de leur prérogatives pour s'enrichir personnellement, bandits de tout poil œuvrent sans vergogne.

Gongsun :L'officier Zhan Zhao est un militaire. Mourir pour vous protéger est son devoir. Votre rang de haut magistrat vous place au-dessus...

Le Juge Bao : Combien de fois m'a-t-il sauvé la vie, au péril de la sienne ? Ce n'est pas une question de rang, mais d'honneur.
Si je ne suis pas de retour dans trois jours, rejoignez la capitale et dites à l'Empereur et à mon épouse que... je suis mort en mission.

[...] je veux rendre hommage à mon coauteur, Nie Chongrui. Quel magicien que ce camarade espiègle et génial qui a donné vie par son trait précis et vibrant, à cette kyrielle de personnages qui virevoltent dans le sillage du juge Bao.
Voilà qui prouve que l'on peut-être de deux cultures et de deux générations différentes, ne pas parler la même langue et créer malgré tout cela une œuvre cohérente et apprécié d'un grand nombre de lecteurs de tous pays.

Patrick Marty

L'on entend souvent parler de remettre l'homme au centre de toutes les préoccupations. La bonne blague. Comme si l'homme n'y était pas déjà au centre de tout. Il l'est tellement qu'il en oublie sa périphérie immédiate, jusqu'à la planète qui le porte, en myope, il piaffe de sa propre impatience à dévorer tout ce qui passe à sa porté.

Patrick Marty

Nous apprenons ce que nous savons déjà, comme s'il était nécessaire que la fiction de temps à autre nous rappelle ce que nous sommes, d'où nous venons, et ce qu'il est urgent de trouver, aujourd'hui plus que jamais : une direction, bardée d'éthique et de valeurs.

Patrick Marty

Ces quatre années d'aventure en compagnie du juge ont été un vrai enrichissement, un comble pour un auteur qui écrit sur la corruption. Certes cette richesse est d'une autre nature qu'un bien mal acquis, elle est de ces trésors qu'on ne peut voler à un homme : son savoir.

Patrick Marty

Rhen Zong fut bouleversé de voir que Bao et sa famille vivaient de façon plus que modeste alors que tous les hauts fonctionnaires du même rang habitaient des palais fastueux et d'avaient de cesse de quémander des titres pour leur famille

Rhen Zong fut bouleversé de voir que Bao et sa famille vivaient de façon plus que modeste alors que tous les hauts fonctionnaires du même rang habitaient des palais fastueux et d'avaient de cesse de quémander des titres pour leur famille

Patrick Marty : " j'ai rencontré beaucoup de magistrats, au fil des signatures et des salons, depuis que je scénarise les aventures de ce juge chinois. Au cours de mes conversations, j'ai pu mesurer combien leur travail était plus difficile, plus ingrat et souvent extrêmement plus complexe que je ne me l'étais imaginé"

Auparavant j'exerçais la médecine dans la recherche scientifique auprès du Ministère de la Guerre. A Kaifeng, il y a quelques années, j'ai fait partie des scientifiques qui ont perfectionné l'utilisation de la poudre à canon. Je me suis rendu compte ensuite pour avoir soigné les blessés sur les champs de bataille que je préférais préserver la vie que de travailler à répandre la mort.