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Citations de Philippe Grandcoing (77)


Mais, un jour de 1902, Hippolyte avait reçu la visite d’un jeune homme se disant intéressé par l’art nègre, tout particulièrement par les statuettes de fétiches. Il n’en avait pas. Néanmoins, il avait engagé la conversation avec cet insolite client. C’était un jeune peintre qui avait eu une véritable révélation esthétique en découvrant les objets sacrés africains lors de l’Exposition universelle de 1900. De fil en aiguille, il s’était renseigné et avait acheté quelques pièces venues du Congo belge via un collègue de Bruxelles. Il avait depuis trouvé son propre fournisseur, Maximilien Vanderhodl, un négociant anversois, basé au Congo belge mais dont les activités s’étendaient sur tout le continent noir, qui l’approvisionnait régulièrement.
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Certains de ses clients lui semblaient même un peu étranges, fascinés qu’ils étaient par la dimension morbide de ce qu’ils voulaient acquérir : des ossements de soi-disant saints, des christs sanguinolents, des scènes de martyre… Tout le répertoire doloriste de l’Église catholique y passait. Ce n’était pas très difficile d’approvisionner la boutique. Beaucoup de prêtres cherchaient à se débarrasser d’objets ne correspondant plus à la sensibilité religieuse du moment. Les fidèles réclamaient désormais des immaculées conceptions, des saints curés d’Ars, des angelots et des sacrés-cœurs. Tout un attirail de statues de plâtre aux couleurs criardes que les boutiques de la place Saint-Sulpice vendaient par catalogue dans la France entière. Il suffisait d’écumer les sacristies poussiéreuses de province pour dénicher de véritables petits chefs-d’œuvre délaissés. Et cela, son réseau de fournisseurs le faisait très bien.
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À ses débuts dans le métier, Salvignac ne faisait commerce que d’objets religieux venus de couvents et d’églises : statues de saints, tableaux, panneaux sculptés, reliquaires et autres objets liturgiques. Il y avait pour cette marchandise une clientèle de collectionneurs se passionnant pour l’art médiéval ou les productions des xvie et xviie siècles. Mais il s’était rendu compte qu’il y avait aussi des amateurs de curiosités, plus intéressés par le caractère sacré des objets qu’ils achetaient que par leur esthétique.
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Le fétiche bakongo était effectivement une belle pièce. Haut d’une cinquantaine de centimètres, avec ses grands yeux blancs disproportionnés qui contrastaient avec le bois sombre et patiné, il plairait à coup sûr à quelque amateur d’exotisme. Restait à lui trouver une place dans la boutique. Hippolyte Salvignac hésita. Il avait bien envie de le mettre en vitrine, mais il craignait qu’il n’effraie le chaland.
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De larges gouttes de pluie crépitaient sur les verrières du passage du Grand-Cerf, au cœur du quartier Bonne-Nouvelle. Dans sa boutique de curiosités et d’antiquités à l’enseigne des Arts sacrés du monde entier, Hippolyte Salvignac examinait un fétiche à clous qu’il venait d’acquérir dans un lot en provenance du Congo. Son correspondant à Léopoldville avait joint à l’envoi une courte lettre lui détaillant les caractéristiques de l’objet.
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Il commençait à regretter l'univers qu'il avait côtoyé un temps : le bureau du chef du gouvernement, la loge officielle à l'Opéra, les couloirs de la Sûreté. Il en voulait à Clemenceau et à Lerouet qui lui avaient entrebâillé une porte pour la refermer presque aussitôt. Il hésita à ouvrir une seconde bouteille. Il avait atteint cet état cotonneux où les sens s'émoussent, mais où l'esprit semble avoir repoussé ses propres limites. Finalement, il se laissa tomber dans un fauteuil face à la carte zébrée de rouge et piquetée d'épingles. Plus il la fixait, plus il lui semblait qu'elle cachait une vérité à laquelle jamais Lerouet, avec ses méthodes de policier, n'accéderait.
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Lorsque Hippolyte se présenta le lendemain matin à la préfecture de police, Ernest Favre, l'homme qui l'avait ramené de Meudon la veille, lui expliqua qu'ils devaient aller chercher Lerouet au ministère avant d'aller fouiller la villa. Tandis que la voiture s'insérait dans le trafic matinal des quais, le policier lui expliqua que son collègue avait été convoqué par Clemenceau suite au rapport qu'il avait fait au préfet de police.
Ça doit être un gros lièvre que vous avez levé tous les deux, pour que le père Clemenceau s'en mêle…
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ctoires, la rue des Petits-Champs, la place Vendôme, la rue Saint-Honoré. C'était le Paris qu'Hippolyte Salvignac aimait le plus, celui de la rive droite, modelé par l'urbanisme royal des XVIIe et XVIIIe siècles, celui que les grandes percées haussmanniennes avaient épargné. Il se dit que, s'il avait davantage d'argent, il chercherait à se loger par là. Non que son appartement de la rue Vieille-du-Temple lui déplaise, mais il avait envie de quitter ce quartier du Marais trop industrieux à son goût.
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De larges gouttes de pluie crépitaient sur les verrières du passage du Grand-Cerf, au cœur du quartier Bonne-Nouvelle. Dans sa boutique de curiosités et d'antiquités à l'enseigne des Arts sacrés du monde entier, Hippolyte Salvignac examinait un fétiche à clous qu'il venait d'acquérir dans un lot en provenance du Congo. Son correspondant à Léopoldville avait joint à l'envoi une courte lettre lui détaillant les caractéristiques de l'objet.
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Le chauffeur de Lerouet tourna à gauche, coupant la route à un fiacre dont le cocher se répandit en injures, aussi sonores que variées. Le taxi crut nécessaire de répondre, même si son "Ta gueule, pov' collignon ! Va bouffer ta rosse " ne risquait pas d'être entendu dans le brouhaha de la rue.
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C'est quoi le style 1900 ? Des courbes, des volutes, des sinuosités, des spirales. On veut masquer la technique sous l'apparence de la nature qui n'est que rondeur, souplesse, irrégularités apparentes. Or la science, l'industrie sont basées sur le calcul, la matière dure, cassante, coupante. Tout n'est qu'assemblage. A priori, qu'est-ce qu'un atome ? Une structure géométrique. Notre XXème siècle sera marqué par la confrontation de l'homme avec la matière. Un choc dur, violent, terrible. Il faut nous y préparer. Arrêtons de nous bercer d'illusions avec nos courbes molles et notre style nouille. C'est nous mettre la tête sous un gros oreiller pour ne pas regarder la réalité en face. L'homme doit se penser comme matière dure, brute, comme ingénieur, comme chimiste, qui comprend et maîtrise cette matière...
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_ Du courrier ?
_ Non... Enfin , pas du facteur. Mais y a ça pour vous. C'est un type tout galonné qui l'a déposé c'tantôt.
Elle tendit à Salvignac une enveloppe au papier épais. Au-dessus de son nom, à droite, était imprimé République française _ Sénat dans une typographie élégante.
Sans attendre d'être chez lui, Hippolyte décacheta l'enveloppe. Une carte de visite au nom de Georges Clemenceau l'invitait à se rendre au domicile du Tigre le jour même à 6 heures du soir.
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Il s’attendait à voir un vieux professeur de dessin, un maniaque du détail et de la perspective, un de ces pisse-vinaigre que Léon Bourdaix abhorrait. Il se retrouva face à une élégante jeune femme âgée d’une trentaine d’années, grande, brune, élancée. Il en fut tout intimidé. Elle lui expliqua qu’elle avait fait partie de la première promotion de femmes autorisées à suivre certains cours à l’école des Beaux-Arts en 1896, mais qu’il était presque impossible de percer dans le métier si l’on était pas un homme.
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- Je ne comprends pas, Bertillon devrait être content que Clémenceau veuille moderniser la police.
Lerouet repoussa sa chaise et déboutonna son gilet.(...)
- Bertillon, tu disais ? Il rêve de mettre le monde en fiches. C’est pas un policier, ce bougre, c’est un rond-de-cuir, un bureaucrate. Si on le laissait faire, la France deviendrait un vaste panoptique.
- Un quoi ? l’interrompit Madeleine qui desservait la table.
- Un panoptique. Ça nous vient d’Angleterre. Y a un siècle de ça, un certain Bentham a imaginé une prison idéale, aménagée de telle sorte qu’un seul gardien puisse surveiller en permanence tous les détenus. Bertillon, il se verrait bien en surveillant général de tous les individus mis en fiche.
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— Ça fera du boulot en moins pour les gendarmes.

— Ils étaient là-bas ? demanda l’inspecteur.

— Ils ont dû arriver dans la nuit. Le temps de les prévenir, qu’ils viennent… Les gendarmes, c’est comme la pluie pour les récoltes : toujours là ou trop tôt ou trop tard.
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Jules avait commencé par déverser son tombereau de mauvaise humeur.

— Le secret ! Il y en a marre du secret ! Je rentre dans une banque. Je pose une question. Qu’est-ce qu’on me répond ? Secret des affaires ! Je vais au tribunal. Je pose une autre question, et qu’est-ce qu’on me répond ? Secret de la procédure. Franchement, comment veux-tu mener une enquête dans ces conditions ? Et je suis sûr que, si j’ai le malheur de demander au maître d’hôtel ce qu’il y a dans cette sauce Périgueux qui accompagne ma viande, il me répondra : secret professionnel ! On parie ?
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Tout viendrait en temps et en heure. Il suffisait d'attendre qu'un évènement, une information, une idée l'amène à se confier, à partager ses hypothèses ou à claironner quelque avancée sur l'enquête.
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Les deux amis s'étaient installés sur la terrasse de l'hôtel, le plus loin possible des oreilles indiscrètes de la clientèle et du personnel, sous une pergola encore vierge de tout feuillage. Jules fumait cigarette sur cigarette tout en griffonnant quelques notes sur un petit carnet à couverture noire. Hippolyte avait remarqué qu'il était neuf, ce qui lui parut de bon augure : l'inspecteur semblait accorder de l'importance à l'affaire.
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Vous êtes celui qui a contribué à l'éclatement de la vérité. Je vous félicite. Mais cette fois-ci il n'y aura ni de Zola ni de "j'accuse"!. Tout cela restera enfoui à jamais dans nos mémoires.
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- Tu sais que tu te débrouilles bien, mieux que moi, je pense.
- C'est parce que vous avez un regard trop scientifique sur les objets que vous vendez, patron. Vous pensez qu'on vous les achète pour leur fiche signalétique. C'est peut-être vrai dans le cas de quelques collectionneurs érudits. Mais moi j'ai un regard esthétique, c'est ça qui plait. La plupart des gens qui rentrent dans votre boutique veulent un objet qui fera bien chez eux. Peut importe que ce soit un saint irlandais ou un lion empaillé d'Abyssinie. Et moi je les conseille, j'essaye de comprendre leurs goûts et de trouver l'objet qui va leur parler ou flatter leur ego.
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