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Critiques de Rachel Tanner (72)
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Le rêve du mammouth

Le cadre de cette fiction, c'est l'Europe d'il y a 35000 ans et c'est aussi l'histoire de la rencontre brutale de deux humanités .



Rachel Tanner pense en effet ce contact comme un reflux forcé de l'espèce néanderthalienne laminée par la guerre et par la compétition avec l’homme contemporain , sur des bases inégales .

C'est une vision noire et tragique des choses à laquelle je souscris moyennement , car des éléments posent et induisent clairement des dynamiques nettement différentes .



Cependant ce roman est superbe , l'environnement préhistorique est palpable dans ce texte et un chamanisme ( un choix arbitraire ) assez minimaliste ( heureusement ! ) oriente ici le récit pour ce qui est de de l’univers mental des populations préhistoriques .

Le style est vraiment bon et la caractérisation est solide et on est pas dans des grognements simiesques qui caractérisent malheureusement , la plupart des fictions préhistoriques françaises ( pas toutes mais presque toutes ) . Il y a dans ce texte de magnifiques descriptions , du rythme et de l'éloquence qui irriguent ce récit dépaysant et émouvant .

Lisez le ...Pas d'autres choses à dire ..



L'auteur choisit de nous parler d'un drame et d'une tragédie sur fond d'exode précipité .

Elle réfléchit de façon évocatrice à la rencontre avec l'autre extrême sans naïveté mais au contraire avec mesure et intensité .



Qu'en fut-il réellement ?

Les néandertaliens sont une espèce de souche européenne ayant évoluée en Europe et ayant survécu à des épisodes glaciaires redoutables grâce à l’usage d’une technologie adaptée et grâce à des migrations géographiques . Des déplacements de peuplements souvent en rapport avec la paléo faune et donc pas systématiquement en direction du sud pendant les pics glaciaires ainsi que pendant les épisodes interglaciaires .

Il y a une remarquable adaptation au milieu ambiant chez ces populations humaines néanderthaliennes qui n’avaient pas peur du froid et qui par exemple , furent capables d’élaborer des habitats complexes de plein air de dimensions respectables en défenses de mammouths par exemple ( un cas impressionnant est attesté dans le grand est européen ) .



Ce qui est certain : c'est que la partition s'est jouée sur 1o ooo ans et non sur un court laps de temps ..

Ce qui est certain : c'est que les techniques des uns et des autres étaient très différentes , aussi efficaces les unes que les autres ( même si moins économe en matière première ).

Dans une proportion non négligeable du territoire concerné par la cohabitation , différentes populations se sont rencontrées , ont échangé et partagé de l'information de façons directes ou indirectes . En Pologne ( sud du territoire de ce pays et Moravie , et rives du Danube ) et en Périgord aussi , où les populations néanderthaliennes élaborèrent des pièces variées en pierre et autres matériaux , y compris des parures ( culture du Châtelperronien ) .

La guerre n'a rien d'improbable mais rien n'atteste qu'elle fut un phénomène de grande ampleur où encore une tendance systématique .

Il y a des indices incontestables d'anthropophagie rituelle et d'autres très ponctuels d'anthrophagie alimentaire , mais il n’y a pas de traces d’anthrophagie inter-espèces attestée , même s’il n’est bien sûr pas inconcevable que cela se soit produit . Si cela s’était produit , ce ne serait pas nécessairement le reflet de comportements conflictuels d’ailleurs .



Les paysages mentaux des deux populations étaient peut-être très éloignés par contre à cause de provenances géographiques diamétralement opposées .

Nos ancêtres directs ne craignaient pas de s'approprier symboliquement le monde et de le soumettre symboliquement .

Les néanderthaliens avaient pour ce qui les concerne , des rapports à leur environnement qui semblent avoir étés moins conquérants du point de vue symbolique et il semble que dans ces cultures l'homme devait se penser comme une pièce soumise à une plus vision associative avec l'environnement ( au sens large de biotope comme cadre culturel ) , avec des tabous qui portaient par exemple sur la transformation de certains matériaux naturels comme le bois et sur le mélange de ces matériaux avec la pierre .

Cela dit , la cohabitation fut tellement longue que des échanges culturels , des dynamiques d’acculturations ou d’influences , plus ou moins ponctuels ou bien plus ou moins localisés ont pu survenir , malgré le caractère immensément clairsemé des populations en présence et malgré les faibles effectifs des groupes de peuplement .



Les deux espèces se sont croisées , elles ont cohabité, elles ont échangé des tas de choses dont pas mal de matériel de matériel génétique , ce qui ne peux se faire que dans le cadre de rapports sexuels dont chacun sait qu’ils ne peuvent avoir lieu de façons régulières que dans un cadre institutionnel très défini socialement . L’importance du patrimoine génétique néandertalien qui est en nous suggère que des liens de parenté croisés ont existés sur une assez longue période .



Les néanderthaliens et nos ancêtres directs ont vraisemblablement fait tout ce que font les hommes quand ils se croisent : des erreurs et de grandes choses , et puis ils n’ont pas hésité à copuler je le répète et j’insiste , ( ce doit être mon côté Woodstock néo-bourgeois qui s’exprime ( je blague ) ) . Les affrontements ne sont cependant pas à exclure aussi , évidement ...



Les cultures néanderthaliennes sont globalement trop minimisées quant à leurs potentialités dans ce roman qui affiche malgré cela , de superbes qualités évocatrices et une grande éloquence qui est infiniment agréable .

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Anthologie des Imaginales 2009 : Rois & Cap..

Je m’attaque enfin aux anthologies des Imaginales d’Épinal, régulières occasions de découvrir ou d’approfondir, par des nouvelles, les univers fantastiques imaginés par quelques-uns des meilleurs auteurs francophones en la matière. Stéphanie lance cette initiative pour les Imaginales 2009 avec le thème « Rois et capitaines », deux figures caractéristiques des récits de fantasy. Le but est ici de mettre en balance deux figures d’autorité et de commandement hiérarchique, les rois et les capitaines, et de considérer leurs interactions dans des univers de fantasy particulièrement divers au vu du sommaire proposé. La majorité des auteurs ont alors opté pour de la fantasy historique, soit comme grande inspiration soit comme véritable toile de fond pour leur nouvelle.



Jean-Philippe Jaworski, l’écrivain lorrain auréolé cette année-là du titre de « coup de cœur des Imaginales » et vainqueur du Prix Imaginales du roman francophone pour son premier roman Gagner la guerre, ouvre cette anthologie de bien belle façon en nous délivrant une nouvelle se déroulant dans le même univers que ce roman-ci et qui aurait pu également se situer dans son recueil Janua Vera. « Montefellòne » est la proie d’un siège dévastateur où se joue sûrement un moment important de la Guerre des Six-Duchés. L’issue vient amèrement conclure notre vision de la relation entre un jeune roi inconsidéré et son fidèle capitaine.

Rachel Tanner, quant à elle, tient à nous narrer l’histoire de « La Damoiselle et le roitelet », où elle s’inspire largement de la destinée de notre Pucelle nationale, Jeanne d’Arc, et de son cher roi, Charles VII, pour raconter une courte épopée guerrière pour son héroïne Catherine. C’est l’occasion pour elle de puiser dans sa connaissance historique du XVe siècle français tout en incorporant la difficile relation entre un roi faible et une capitaine courageuse.

Nous retrouvons ensuite le couple d’écrivains Claire et Robert Belmas, plus habitués à la science-fiction, misent fortement sur des inspirations celtiques pour nous plonger dans une Bretagne féérique mais violente, alors que le roi Artus est mort et que son royaume en proie aux pires tourments, tant guerriers que magiques. Par des chapitres très courts, nous suivons Florée qui, à la fleur de l’âge, fut violemment déflorée, et qui veut devenir capitanea sous l’enseignement du seigneur Bohor. Sa destinée semble alors la porter « Dans la main de l’orage ».

Maïa Mazaurette préfère tourner en ridicule la relation roi-capitaine dans « Sacre » où le très jeune roi Louis est continuellement accompagné de son capitaine Jones, alors qu’Avignon, défendue par sa mère Blanche de Castille, est assiégée par les Albigeois. Dans ce récit largement tendancieux, l’auteur nous narre la découverte du corps adolescent avec juste ce qu’il faut de pensées douteuses et de désirs inavoués. Elle maîtrise parfaitement son sujet et ses sous-entendus.

La glace qui chante, le froid qui prend aux tripes et le désespoir qui envahit esprits, Lionel Davoust opte pour un environnement hostile pour « L’impassible Armada ». Nous suivons une flotte en perdition face à des pirates tout aussi mal en point. L’amour de l’océan et de ses dangers conduit à des dérives meurtrières, mais belles avant tout, autant que le récit de Lionel Davoust.

Avec son décalage habituel, Catherine Dufour nous présente « Le Prince aux pucelles ». Atypique mais chevaleresque de temps en temps, celui-ci porte l’histoire à bout de bras, tout comme ses convictions. Que vaut la fadeur des plus belles entreprises devant la cruauté du quotidien ? C’est un petit peu le paradoxe de ce personnage censé être stéréotypé.

Thomas Day nous livre avec « La Reine sans nom » un récit mortifère, sombre et plutôt triste. L’écriture charismatique de l’auteur de L’Instinct de l’équarisseur et de Sept secondes pour devenir un aigle vaut toujours le détour évidemment, d’autant qu’il opte ici pour du concis, du « court mais probant ». C’est à la fois beau et pesant dès les premiers mots, rythmé et ciselé comme peu de novellistes savent le faire.

Armand Cabasson nous enjoint à suivre un chemin plus tortueux dans les steppes médiévales des peuples russes et ukrainiens. Devant l’assaut des Mongols, Mikhail se retrouve à battre la campagne pour rameuter des alliés, mais aussi pour se recentrer sur ses propres croyances, mises à mal par la situation dantesque et l’émergence d’un « Serpent-Bélier » bien mystérieux. Les religions locales et l’art de la guerre au Moyen Âge sont à l’honneur ici, dans cette longue nouvelle empreinte d’une violence sèche qui réduit la chute à un moment particulièrement rude mais tout aussi marquant.

Pierre Bordage, lui, nous emmène plutôt « Dans le cœur de l’Aaran » (ou plutôt Aaran, au vu de l’orthographe utilisée dans la nouvelle elle-même) au court du récit d’un vieux loup de mer au sujet d’une expédition à la recherche de « l’esgasse », créature fantastique aux pouvoirs bien étranges. Contre vents et marées, la ruée finale se veut à la fois mystérieuse et lançant la place à notre imagination.

Suivre les aventures rocambolesques de Cyrano et d’Artagnan sur la Lune, ça vous dit ? Tant mieux, car c’est du fameux Johan Héliot que nous trouvons perché « Au plus élevé Trône du monde ». Avec ses nombreuses références littéraires et historiques, il nous emmène dans un solide monde rabelaisien à tendance rostandienne. Dans ce contexte qui fleure bon le « cape et d’épée », les forts liens entre la Terre et la Lune renvoient à tellement d’idées romanesques qu’on se laisse facilement porter par cette petite histoire bien conclue. Les habitués de Johan Héliot seront servis à coup sûr.

Seul « petit nouveau » à participer à cette anthologie, Julien d’Hem s’en sort plutôt bien avec « Le Crépuscule de l’Ours ». Par un onirisme fou, nous revivons les souvenirs de ce capitaine-mercenaire, l’Ours, ayant vécu quantité de batailles ardues. Arrivé à la fin de sa carrière, il en revoit quelques-unes alors qu’il aborde un duel sanglant avec un jeune guerrier défendant sa cité.

Nous terminons cette anthologie avec une autre nouvelle pleine d’onirisme. Laurent Kloetzer parcourt pendant « L’Orage » les rêveries, rarement solitaires, de son héros fétiche, Jaël de Kherdan, déjà largement aperçu dans Mémoire vagabonde. On se perd dans son esprit tourmenté de toutes parts par ses anciennes et prochaines conquêtes, par ses précédentes et futures hantises.



La première anthologie des Imaginales comprend donc un « casting all-star » au sein de l’imaginaire français et c’est ce qui fait sa force, puisqu’en explorant des univers très variés, nous ne restons pas toujours sur la même idée de relations entre les figures du roi et du capitaine. Certains auteurs comme Pierre Bordage ou bien Armand Cabasson, et même Laurent Kloetzer, passent quand même à quelques encablures du thème « Rois et Capitaines », mais c’est finalement leur univers qui charme l’imaginaire du lecteur.



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Elfes et Assassins

Cinquième anthologie parue dans le cadre du festival des Imaginales d'Epinal, « Elfes et assassins » nous propose de découvrir les textes de treize auteurs français, tous très réputés dans le monde des littératures de l'imaginaire, de Pierre Bordage à Fabien Clavel en passant par Xavier Mauméjean ou Fabrice Colin, qui se sont penchés sur ces deux personnages extrêmement ambiguës que tout lecteur de fantasy est amené à rencontrer de façon récurrente. Tout comme le précédent opus, « Reines et dragons », on retrouve Sylvie Miller et Lionel Davoust en tant que directeurs de publication, un duo qui fonctionne décidément remarquablement bien. La qualité est en effet au rendez-vous, et si certains textes se révèlent évidement plus réussis et plus marquants que d'autres, nous n'en avons pas moins affaire à un ouvrage très divertissant et jamais monotone ou répétitif. On retrouve ainsi avec plaisir dans quelque uns de ces textes l'univers de certains auteurs comme le Vieux Royaume de Jean-Philippe Jaworski ou encore la ville enchantée de Panam de Raphaël Albert, tandis que d'autres optent pour un cadre plus contemporain, uchronique, historique, ou encore fantastique.



Sans grande surprise, la nouvelle la plus aboutie de l'anthologie reste en ce qui me concerne celle de Jean-Philippe Jaworski (« Le Sentiment du fer ») dont le talent n'est plus à prouver mais qui parvient encore et toujours à surprendre. On y retrouve la ville de Ciudalia, décor de son premier roman « Gagner la guerre », dans laquelle on suit les péripéties d'un Chuchoteur (célèbre guilde d'assassins) chargé d'une bien curieuse et périlleuse mission sur fond de complots politiques. Du rythme, un style percutant, des retournements de situation inattendus...., les ingrédients restent les mêmes et encore une fois cela fonctionne. Parmi les textes les plus mémorables figurent également ceux d'Anne Dugüel, également connue sous le pseudonyme Gudule, (« Le sourire de Louise »), histoire glaçante d'un amour fusionnel entre une mère et sa fille qui tourne à la tragédie, ou encore de Jeanne A. Debats (« Eschatologie d'un vampire ») qui possède décidément un style très direct, bourré d'humour et d'ironie, qu'elle met au service d'une histoire originale et d'un personnage haut-en-couleur. D'autres nouvelles méritent également le détour, que ce soit pour la poésie et la profonde mélancolie qu'ils dégagent (« Sans douleur » de Fabrice Colin et « Grise neige » de Johan Héliot), ou au contraire pour leur humour ravageur (« Du rififi entre les oreilles » d'Anne Fakhouri).



Que ce soit par le biais de la tragédie, de l'horreur, de l'épique ou de l'humour, les treize nouvelles proposées dans cette anthologie ne manqueront pas de ravir les amateurs de fantasy qui auront ainsi le plaisir de se plonger dans les textes inédits de ces grands auteurs qui auront été particulièrement inspirés par le thème de cette année 2013. Voilà un bien bel hommage rendu à ces deux figures particulièrement représentatives du genre que sont l'elfe et l'assassin.
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Les coups de coeur des Imaginales - 2013

En cette année 2013, outre son anthologie habituelle constituée de quelques-unes des plus belles plumes des littératures de l'imaginaire français (« Elfes et assassins »), le festival des Imaginales d'Epinal a également pris l'initiative de publier ces « Coups de cœurs des Imaginales ». Rappelons que depuis 2004, le festival a pris l'habitude d'accorder le label « coup de cœur » à un écrivain prometteur, ni véritablement débutant ni déjà « star » reconnue, label qui, comme l'explique Stéphanie Nicot dans sa préface, est censé assurer le rôle de panneau indicateur qui signalerait aux lecteurs « Attention, talent ! ». Né de la collaboration de trois maisons d'édition spécialisées dans ce type de littérature (Mnémos, ActuSF, Les Moutons Électriques) qui se sont d'ailleurs regroupées en 2012 sous le label « Les Indés de l'imaginaire », le projet est donc simple : proposer une nouvelle de chacun des auteurs s'étant vu octroyer cette récompense, de Thierry Di Rollo en 2004 à Samantha Bailly en 2013. Dix textes, donc, qui se succèdent de façon chronologique, et un thème assez général pour permettre une grande diversité de récit : la fantasy urbaine.



Si dans « Elfes et assassins », comme dans la plupart des anthologies précédentes, le très bon côtoyait le beaucoup moins bon, il faut reconnaître que la qualité est ici au rendez-vous, et ce pour chacun des textes. La postface suivant chaque nouvelle et dans laquelle les auteurs reviennent sur la façon dont ont germé leurs idées est également un bonus appréciable. Parmi les textes qui m'ont le plus marqué je citerai en premier lieu celui de Mélanie Fazi (« Trois renards ») qui, comme toujours, parvient à faire ressortir le mystère et la beauté de lieux ou d'actes du quotidien qui semblent, au premier abord, complètement anodins. Sans surprise Jean-Philippe Jaworski se hisse également parmi les meilleurs avec son « Profanation », texte qui nous plonge à nouveau dans l'univers du Vieux Royaume où on découvre cette fois l'envers des champs de bataille. « Séréna », nouvelle de Sire Cédric consacrée au mythe de la sirène, ou encore « Élixir », nouvelle de Samantha Bailly mettant en scène des empathes chargés de repérer les individus dangereux pour la société, sont également de belles réussites.



Cette anthologie des « Coups de cœur des Imaginales » se révèle au final de très bonne qualité, tant pour la diversité des thèmes abordés que pour la variété des styles proposés. Un moyen sur et efficace de découvrir ce dont les auteurs français de fantasy sont aujourd'hui capables.
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Le cycle de Mithra - Intégrale

Publié il y a près de vingt ans, le diptyque de Rachel Tanner consacré à un empire romain uchronique dans lequel le mithriacisme aurait supplanté le christianisme était, depuis plusieurs années maintenant, devenu presque introuvable (les éditeurs des versions grand format et poche ayant cessé leurs publications). Ce n’est désormais plus le cas grâce aux éditions Mnémos qui ont décidé de reprendre le flambeau en rééditant dans une magnifique intégrale les deux volumes originaux (« L’empreinte des dieux » et « Le glaive de Mithra »), ainsi que cinq nouvelles situées dans le même univers et parues dans le recueil « Les sortilèges de l‘ombre ». Déjà très imposant, l’ouvrage a également été enrichi d’un certain nombre de bonus permettant de mieux appréhender l’œuvre de l’auteur (carte, chronologie, présentation historique…), le tout enrobé dans un superbe écrin (chapeau notamment pour la couverture réalisée par l’artiste malaisienne Qistina Khalidah a qui on doit récemment plusieurs couvertures chez le même éditeur).



L’empreinte des dieux

L’initiative de Mnémos tombe bien. Il aurait en effet été dommage de se priver de la découverte de ce diptyque original et bien écrit qui fait la part belle à l’histoire antique et médiévale. Nous sommes au VIIIe siècle après J.-C. et, outre le fait que l'empire romain ait survécu au-delà de la mort de Romulus Augustule, le changement majeur consiste en la relégation du christianisme au rang de simple secte tandis que le culte à mystère du dieu Mithra occupe la place de religion officielle de l'empire. Divinité orientale importée au sein du panthéon romain suite à l'expansion vers l’est de l'empire, Mithra a effectivement connu un grand succès chez les Romains, à commencer par les soldats, avant d’être finalement supplanté par le christianisme (celui-ci a d’ailleurs joué un rôle important dans la disparition de ce culte à mystère avec lequel il présentait des similarités troublantes). L'univers élaboré par l'auteur est bien conçu et captive rapidement le lecteur qui se plonge avec plaisir dans ces régions sauvages de Gaule et de Germanie où les anciens dieux arpentent encore le monde et s’inquiètent de l’hégémonie grandissante de ce dieu unique. Si l’auteur prend évidemment des libertés avec l’histoire, l’ouvrage fourmille malgré tout de détails historiques qui renforcent la cohérence de l’univers et facilitent l’immersion du lecteur dans cette époque brutale qui connaît de multiples bouleversements. C’est dans ce contexte que l’on fait la connaissance de Judith de Braffort, jeune femme originaire d'Armorique au caractère bien trempé, à laquelle on s'attache aisément et dont on suit avec intérêt les aventures. Et celles-ci ne manquent pas ! De son opposition à sa redoutable cousine Frédérique, à son initiation au côté de la magicienne Ygrène, en passant par sa rencontre mouvementée avec les légions romaines ou avec un certain Carolus Magnus, on peut dire que notre héroïne n'a pas de quoi s'ennuyer, et nous non plus ! Les scènes d’affrontements sont notamment assez impressionnantes, et ne sont pas sans rappeler ce que pouvait faire David Gemmell dans le même registre : les combats sont dépeints de manière efficace, presque cinématographique, et donnent à voir aussi bien l’horreur vécue par les combattants que leur exhalation lorsqu’ils se laissent porter par la frénésie du moment, donnant alors lieu à de beaux passages épiques.



Le glaive de Mithra

Le tome suivant se déroule après une ellipse de quelques années et met à nouveau en scène la magicienne Judith que l’on retrouve plus mûre, plus puissante, mais aussi plus amère. Ce second volume se distingue avant tout par un changement de décor bienvenu : oubliées les rudes terres de Gaule et de Germanie, cette fois, l’essentiel de l’intrigue se déroule directement dans la capitale de l’empire, menacée par l'arrivée imminente de la peste ainsi que par les manigances d’un puissant sorcier procédant à d’étranges rituels dans les catacombes de la ville. L'aspect historique prend ici le pas sur l'uchronie sans que cela ne gâche la lecture tant les aperçus de la vie quotidienne des habitants de cette Rome en plein bouleversement sont appréciables. Car c’est bien à une véritable promenade dans la cité antique que nous invite ici Rachel Tanner qui nous entraîne dans les bouges les plus infâmes de la capitale, avec ses bordels, ses tavernes et ses insulae décrépites, mais aussi dans les plus beaux quartiers, avec leurs villas cossues et leurs grandes avenues. L’un des moments les plus jouissifs reste sans aucun doute celui du Colisée qui devrait ravir les amateurs de « Gladiator » ou « Spartacus ». Pour ce qui est du reste, difficile encore une fois de s’ennuyer entre les manigances de cour, les jeux du cirque, les sacrifices humains, les ravages de la peste et j’en passe. On peut cela dit regretter que, parmi toutes les histoires qui s’entremêlent ici, ce soit finalement celle qui concerne notre héroïne qui soit la plus bancale : tout ce qui tourne autour de l’artefact magique est clairement de trop car beaucoup trop cliché et résolu trop abruptement. C’est peut-être cette légère faiblesse de l’intrigue qui explique que la magicienne soit un peu plus en retrait dans ce second volume qui met heureusement en scène toute une galerie de personnages secondaires très réussis, qu’il s’agisse du jeune Damien, ou encore de l’empereur Julien et de son épouse.



Les sortilèges de l’ombre

La dernière partie de l’intégrale regroupe cinq nouvelles situées dans le même univers et mettant en scène un certain nombre de personnages plus ou moins importants croisés au détour des aventures de Judith. La première, « Histoire d’Hiram le malchanceux », est présentée avec humour par l’auteur comme un conte de Noël, et c’est le cas d’une certaine manière puisqu’elle relate la première apparition du dieu Mithra qui coïncide dans le calendrier chrétien avec la naissance de Jésus. Le clin d’oeil est amusant mais le texte trop bref pour véritablement parvenir à captiver le lecteur. La nouvelle suivante, intitulée « Dardanus philopater », est consacrée au personnage éponyme croisé dans le second tome du cycle de Mithra. On retrouve pour l’occasion la ville de Rome dans laquelle l’auteur nous donne à nouveau un aperçu contrasté et renoue avec les horreurs tapies dans les catacombes. Un texte bien construit mettant en scène un personnage attachant, même si la chute est un peu trop abrupte. La nouvelle suivante (« Une journée à la Mamertine ») se déroule dans une prison romaine dans laquelle une magicienne doit être interrogée pour confesser ses crimes à l’encontre de la religion officielle de Mithra. Seulement le bourreau et la victime ne sont pas forcément ceux que l’on croît... Court mais efficace. Le texte suivant peut difficilement être qualifié de nouvelle étant donné sa brièveté : il s’agit plutôt d’un petit clin d’oeil à un autre personnage de la série dont on découvre l’origine du fanatisme (« Une vocation »). La dernière nouvelle est sans doute la plus réussie et avait déjà fait l’objet d’une autre publication dans l’anthologie « Magiciennes et sorciers » en 2010 (« In cauda venenum »). On y retrouve Judith tout juste après les événements relatés dans « Le glaive de Mithra », et il est cette fois question d’enchantement et de vengeance familiale. Le texte est bien rythmé et, si la chute est peut-être encore un peu trop rapide, l’ensemble reste de bonne facture et parvient à maintenir le lecteur en haleine.



Amateurs de fantasy et d’histoire antique, cette intégrale du « Cycle de Mithra » est faite pour vous ! C’est un vrai plaisir de plonger dans cette Europe uchronique remarquablement détaillée et mettant en scène soldats et barbares, empereurs et magiciennes, sans oublier anciens et nouveaux dieux. Si l’intrigue peut parfois paraître un peu maladroite, la qualité des personnages ainsi que celle de la reconstitution historique et des scènes de combat suffisent à le faire oublier au lecteur qui ne risque pas de s’ennuyer tant les romans foisonnent de péripéties et de rebondissements. Une belle découverte à côté de laquelle il serait dommage de passer.
Lien : https://lebibliocosme.fr/201..
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Dimension Antiquité

Décidément, j'apprécie beaucoup les anthologies historiques proposées par Rivière Blanche ! Après « Dimension de cape et d'esprit » et « Dimension Préhistoire » voici donc un tout nouvel ouvrage consacré cette fois à la période antique. Treize auteurs se sont prêtés au jeu en s'inspirant aussi bien des civilisations grecque et romaine qu'égyptienne et mésopotamienne, et en adoptant un cadre allant de la fantasy à la science fiction en passant par l'uchronie ou le fantastique.



Ne soyez donc pas surpris de découvrir que César n'est en réalité pas mort aux ides de mars et a entrepris à la fin de son règne d'ériger une immense digue afin de faire baisser le niveau de la Méditerranée, menaçant ainsi toutes les créatures marines et réveillant la colère de Poséidon (Javier Negrete :« César et la Néréide »). Ne vous étonnez pas non plus d'apprendre qu'un professeur de la Sorbonne du XXe siècle ait permis à l'empereur Julien d'allonger son règne et de rétablir le paganisme dans tout l'empire (Fabien Clavel :« Comment le dieu vint à Julien »). Vous découvrirez aussi la disparition tragique du dernier scribe capable de déchiffrer les hiéroglyphes (Pierre Gévart : « Le dernier scribe »), assisterez à la spectaculaire représentation de l'ermite et acteur Géron devant les armées rassemblées de Sparte et Thèbes (Franck Ferric : « Les masques des hommes »), et en apprendrez davantage sur les rites funéraires pratiqués dans les grandes cités de Mésopotamie (Olivier May : « Le regard de Shamat »)



Si dans toute anthologie, la qualité et l'originalité fluctuent d'ordinaire en fonction des textes, la grande majorité des textes sont ici très bons et abordent des sujets à la fois variés et peu communs (même si, compte tenu de la grande richesse du thème, ce n'est finalement guère surprenant). Les grands amateurs d'histoire antique, dont je suis, ne manqueront ainsi pas d'apprécier découvrir des nouvelles consacrées pour une fois à d'autres personnages que les traditionnels César, Auguste ou Cléopâtre VII. Les généraux thébains Pélopidas et Epaminondas, les reines Cléopâtre II et III, le roi Mithridate VI Eupator... autant de grandes figures antiques moins connues aujourd'hui que l'on retrouve ici sur le devant de la scène. Certains textes sont également l'occasion d'en apprendre davantage sur quelques traditions antiques, des combats de gladiateurs aux lupanars romains en passant par les querelles opposants les érudits de la Bibliothèque d'Alexandrie ou encore les membres de la dynastie lagide.



Nombreux sont les textes que j'ai apprécié mais difficile de tous les présenter. Parmi les nouvelles consacrées aux civilisations égyptienne et mésopotamienne, celles de Pierre Grévart consacrée à la tragique disparition d'un savoir qui ne refera pas surface avant plusieurs siècles (« Le dernier scribe ») et d'Olivier May revenant sur une tradition sumérienne présentée sous un jour inattendu et poétique (« Le regard de Shamat »), sortent indéniablement du lot. Franck Ferric signe également avec « Les masques des hommes » un texte très réussi consacré à deux éléments centraux de la culture grecque antique : le théâtre et la guerre. Idem pour Ketty Steward et son « Sous le pont » qui nous fait découvrir que le sort qu'a connu le roi Mithridate VI n'est peut-être pas celui qu'on lui réservait, et pour Rachel Tanner qui se penche dans « Les reines meurent aussi à Alexandrie » sur une des nombreuses querelles dynastiques ayant opposées les membres de la famille lagide. Du côté de Rome se sont Frédérick Durand et Jean-Pierre Andrevon qui se distinguent. Le premier en relatant l'arrivée d'une ensorcelante prostituée dans un lupanar romain (« L'Insula des louves ardentes »). Le second en abordant le sujet des combats de gladiateurs avec un luxe de détails témoignant d'un minutieux travail de documentation qu'on ne peut qu'apprécier à sa juste valeur (« Gladiateur »).



Une anthologie de grande qualité consacrée aux plus grandes civilisations antiques qu'on découvre ou redécouvre sous un autre jour grâce à ces treize nouvelles très hétéroclites mais toutes très réussies. Cités légendaires, batailles mémorables, personnages historiques au destin exceptionnel... : tout est là et c'est un véritable bonheur de se plonger l'espace de quelques pages dans ces civilisations d'une incroyable richesse. A découvrir d'urgence !
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Le cycle de Mithra, tome 1 : L'empreinte de..

Insidieusement, je tente vainement de rattraper l’énorme retard que j’ai vis-à-vis de Boudicca sur quantité de séries, cycles et bibliographies de grands auteurs, notamment de fantasy. Rachel Tanner en fait partie et L’empreinte des dieux constitue le premier tome de son diptyque uchronique intitulé Le Cycle de Mithra.



Rachel Tanner est passionnée d’histoire antique (et son métier d’historienne-archéologue n’étonnera personne vu ses références) et narre le voyage de la jeune Judith qui doit fuir à travers la Gaule, 1533 ans après la fondation de Rome (en 780 de notre ère si vous préférez). Pour transcrire ce haut Moyen Âge aux forts accents d’Antiquité tardive, le style de Rachel Tanner se fait très caractéristique de sa formation et de son métier d’historienne : elle pose parfaitement le cadre, ça ne va pas par quatre chemins, c’est à la fois clair et carré. Elle sait ce qu’elle dit, alors elle ne va pas nous embobiner avec des détails anecdotiques. Bien sûr, cela passe souvent par de la narration classique, mais mine de rien, cela se fait de moins en moins et c’est regrettable, tant trop d’auteurs misent sur des dialogues à rallonge. Le tout est agrémenté de références historiques jouissives, teintées de mythes arthuriens, d’administration carolingienne et de révoltes barbares.

Sur ses solides connaissances, Rachel Tanner bâtit une uchronie passionnante qui naît de la non-conversion de masse de l’Empire romain au christianisme. À la place, c’est le mithraïsme qui prend le pas sur lui et devient religion officielle. Toutefois, malgré leurs vastes points communs, le mithraïsme est un culte à mystères bien plus élitiste certes (par le fait surtout qu’il conserve ses mystères malgré son expansion venue de l’est grâce à des officiers militaires), mais aussi un culte qui peut avoir une relative capacité à englober d’autres cultes tant il peut être protéiforme. À travers le pas de côté voulu par l’uchronie, l’autrice se lance allègrement dans des réflexions politiques et religieuses, démontrant combien la fantasy a à apporter à nos conditionnements sociaux. Gentiment, elle élabore une critique furieuse et magnifique de la religion dans tout ce qu’elle comporte de fanatisme et de contrainte sociale. Et cela va même plus loin dans l’analyse rigoureuse (mais agréable pour le lecteur) de l’évolution des empires et des civilisations en général : à trop vouloir s’uniformiser, ils se condamnent eux-mêmes.

Mais tout cela est en plus agrémenté d’une bonne dose de fantasy, et cela prend tout son sens quand on se replace dans le contexte de publication du roman. En effet, se lancer dans la fantasy du XXIe siècle semble aller de soi aujourd'hui avec l’énorme panel d’auteurs francophones, anglophones et autres à notre disposition, mais sorti d’abord en 2000, ce roman s’inscrit d’abord dans un renouveau complet de l’imaginaire français par l’influence de grands auteurs anglo-saxons et l’usage érudit de l’Histoire davantage francisée. L’héroïne est ici entraînée classiquement dans l’aventure par un élément déclencheur que je vous laisse découvrir, mais toujours est-il qu’elle préfère défendre la religion de ses ancêtres face au mithraïsme qui cherche à dominer sans plus aucune discussion. Cette quête personnelle passe par l’apprentissage d’une magie païenne par l’intermédiaire d’une Ygrene, magicienne diabolique, qui s’oppose à la montée en puissance d’une prêtresse de Mithra.



Rachel Tanner nous propose ainsi un premier tome truffé de références historiques cachées mais surtout dominé par la tentation magique, les prophéties divines et l’attrait de batailles dévastatrices. L’Empreinte des dieux fut mon premier coup de cœur de l’année 2016 et j’ai mis onze mois pour en écrire une critique à peu près potable ! C’est un roman à lire, ne serait-ce que pour savourer une narration « à la Tanner », autrice qui se fait trop rare à mon goût (mais publie heureusement des nouvelles).



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Fragments d'une Fantasy antique

Anthologie élaborée à l'occasion du colloque « Antiquité gréco-romaine, source de l'imaginaire contemporain », « Fragments d'une fantasy antique » regroupe les nouvelles de huit grands auteurs de fantasy français. Le sujet ne pourra évidemment que ravir les amateurs du genre et les amoureux d'Histoire et de Lettres classiques qui prendront beaucoup de plaisir à la lecture de cette anthologie. Il faut dire que la période antique, de part la richesse de ses civilisations (grecques, romaines, égyptiennes...) et la multitude de mythes auxquels elles ont donné le jour, à de quoi faire naître l'inspiration. Certains optent ainsi pour la réécriture de mythes anciens comme J-A. Debats et son « Miroir d'Electre » qui adapte dans un milieu contemporain la tragique histoire des Atrides ; d'autres se consacrent pour leur part aux créatures mythologiques qui peuplent les récits de la Grèce antique comme le Minotaure ou le Sphinx ; d'autres encore s'inspirent des écrits d'auteurs anciens comme Pétrone et son Satyricon, ici revisité par F. Clavel...



Comme dans toute anthologie certains textes sortent évidemment du lot. L. Davoust nous offre ainsi une nouvelle très courte mais au combien jouissive, tant par l'originalité de son sujet que l'ironie de son ton (« Faisabilité et intérêts zootechniques de la métamorphose de masse », rien que le titre en dit long). N. Dau réussit également son coup avec « A couteau », un texte tout aussi bref mais très intense mettant en scène le dieu (pas si solaire que ça) Apollon et l'un de ses nombreux amants. Saluons également N. Aspe qui reprend avec talent dans « Le Labyrinthe » l'histoire du célèbre duo Dédale et Icare ou encore S. Miller et P. Ward qui signent avec « Voir Pompéï et mourir » une nouvelle inventive impliquant le détective privé du XXe siècle favori des dieux. De l'Histoire, du fantastique, du mystère, de l'humour, du tragique... il y en a donc pour tout les goûts dans cette très bonne anthologie. A découvrir.
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Dimension Moyen Âge

Après « Dimension Préhistoire » et « Dimension Antiquité », voici « Dimension Moyen Age », anthologie publiée chez Rivière blanche et toujours dirigée par Meddy Ligner. C'est cette fois à la période médiévale, comprise entre la chute de l'Empire roman d'Occident en 476 et la « découverte » de l'Amérique par Christophe Colomb en 1492, que se sont penchés les treize auteurs francophones au sommaire de ce nouveau recueil. Classées par ordre chronologique, les différentes nouvelles nous entraînent tour à tour au temps des Mérovingiens et des Carolingiens, à celui des Croisades ou encore de la Guerre de Cent Ans. A cette variété d'époques s'ajoute une diversité bienvenue des décors qui évite au recueil de tomber dans l'européocentrisme. Les déserts de Terre Sainte, les froides terres de Scandinavie, l'Europe de l'Est... : le dépaysement est souvent au rendez-vous. Les amateurs d'histoire apprécieront également de croiser ici ou là quelques figures historiques célèbres comme Charles Martel, l'Empereur Frédéric II ou encore le grand Saladin. En dépit de tous les atouts précédemment cités, je ressors de la lecture de ce « Dimension Moyen Age » avec un sentiment mitigé. Les textes sont en effet loin d'être mauvais mais peu parviennent à suffisamment aller au bout de leur idée pour véritablement accrocher le lecteur ou même développer son empathie pour les protagonistes. Il en résulte des nouvelles la plupart du temps divertissantes sur le moment mais oubliées sitôt la dernière page tournée.



Il y a cela dit quelques textes qui méritent le détour, à commencer sans surprise par celui de Fabien Clavel, « Chamane », déjà publié il y a cinq ans dans « Magiciennes et sorciers » et faisant office de prélude au roman « Le châtiment des flèches ». Le lecteur se retrouve transporté dans une Hongrie du XIe siècle où les traditions païennes commencent lentement mais sûrement à disparaître au profit d'un christianisme évidement très hostile à la magie. L'auteur nous livre ici le récit du combat opposant un chamane et sorcière, tous deux maîtres dans l'art de la métamorphose et tous deux figurant parmi les derniers représentants des traditions chamaniques. Un très beau texte porté par une plume toujours aussi immersive. On peut également saluer la nouvelle d'Agnès Marot, « Les amants du temps perdu », dans laquelle l'auteur propose une réécriture de l'histoire d'amour de Tristan et Iseult inspirée par une récente étude américaine selon laquelle nous disposerions tous du même nombre de battement de cœur et que notre durée de vie ne dépendrait que de la vitesse de pulsation. Original et bien écrit. La (courte) contribution de Meddy Ligner à l'anthologie (« La Geste du Joker par l'Archange Gabriel ») est également de qualité, d'abord parce qu'elle est versifiée, ensuite parce que la chute est plutôt bien amenée. Parmi les nouvelles qui valent le détour on peut également citer celle de Rachel Tanner mettant en scène le tout jeune empereur Frédéric II (« Vivre et mourir à Palerme ») ou encore celle de Jean-Pierre Andrevon consacrée à l'ordre des Templiers (« La dernière croisade »).



Une lecture en demi-teinte, donc, la plupart des textes ne parvenant pas vraiment à convaincre malgré d'indéniables bonnes idées et la louable variété de thèmes, d'époques et de lieux abordés. A noter que l'ouvrage comprend également un article signé Lucie Chenu (« Le Merveilleux médiéval : Entre Histoire et Imaginaire ») qui vous donnera certainement une ou deux idées de lecture.
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Le cycle de Mithra, tome 1 : L'empreinte de..

R. Tanner signe avec « Le cycle de Mithra » une uchronie très originale basée contrairement à beaucoup d'autres non pas sur un bouleversement d'ordre politique mais religieux. Nous sommes au VIIIe siècle après JC et, outre le fait que l'empire romain soit encore debout, le changement majeur consiste en la relégation du christianisme au rang de simple secte tandis que le culte à mystère du dieu Mithra occupe la place de religion officielle de l'empire. L'univers élaboré par l'auteur est extrêmement bien conçu et captive rapidement le lecteur qui se plonge avec plaisir dans ces régions sauvages de Gaule et de Germanie où règne encore la magie et où les dieux arpentent toujours le monde. C'est également l'occasion d'en apprendre davantage sur ce fameux culte de Mithra, divinité orientale importée suite à l'expansion de l'empire au sein du panthéon romain, vénérée essentiellement par les soldats et présentant de fortes similitudes avec le christianisme (même si l'auteur prend bien évidemment ici quelques distances avec la réalité historique).



Au delà de ce contexte particulièrement fascinant et dépeint avec talent par R. Tanner, le lecteur découvre le personnage de Judith de Braffort, jeune femme originaire d'Armorique au caractère bien trempé, à laquelle on s'attache aisément et dont on suit avec intérêt les aventures. Et celles-ci ne manquent pas ! De son opposition à sa redoutable cousine Frédérique, à son initiation au côté de la magicienne Ygrène, en passant par sa rencontre mouvementée avec les légions romaines ou avec un certain Carolus Magnus, on peut dire que notre héroïne n'a pas de quoi s'ennuyer... Et nous aussi par la même occasion. L'auteur dispose également d'une plume agréable et particulièrement inspirée lorsqu'il est question de scènes de batailles où l'influence de David Gemmell se fait alors nettement ressentir. « L'empreinte des dieux » se révèle finalement une excellente découverte, que l'on ne peut qu'être ravi de poursuivre sur un tome supplémentaire.
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Dimension Préhistoire

Comme toutes les périodes historiques, la Préhistoire n'est pas sans éveiller chez nous un certain nombre de fantasmes, plus ou moins proches de la réalité. Vastes étendues recouvertes de végétation et vierges de toute présence, tribus composées d'hommes et de femmes dont le mode de vie et de pensée nous échappe, peintures rupestres décorant les murs des grottes, animaux exotiques aujourd'hui disparus..., autant de représentations qui font de cette époque comprise entre l'apparition de l'homme et l'invention de l'écriture un terreau fertile pour les auteurs de littérature de l'imaginaire. L'anthologie « Dimension Préhistoire » regroupe ainsi pas moins de quatorze textes de onze auteurs différents qui se sont, chacun à leur manière, penchés sur cette période obscure de notre histoire. Et les approches sont effectivement plutôt variées, certains optant pour un décor directement inspiré de la Préhistoire tandis que d'autres choisissent de seulement s'en inspirer dans un cadre beaucoup plus contemporain. Cette diversité se retrouve également au niveau chronologique et géographique puisqu'on voyage de l'Afrique à l'Europe, du Carbonifère au Néolithique. Et pourtant... Pourtant malgré l'originalité du thème et la pluralité des approches proposées, le niveau de cette anthologie ne vole malheureusement pas très haut. La faute, d'abord, à un travail de relecture absent ou complètement bâclé qui aboutit à son tour à un nombre de coquilles battant tous les records. Quelques unes par-ci par-là passent encore, mais à ce point c'est vraiment honteux ! Autre problème : la faiblesse de l'intrigue de la plupart des nouvelles qui se contentent de poser un décor sans vraiment se soucier de nous raconter une histoire bien ficelée.



Sans être transcendants, certains textes valent cela dit le coup d’œil, à commencer par celui de Rachel Tanner qui nous entraîne avec « Le frisson de la savane » à la découverte des premiers hominidés africains. Un texte simple mais dépaysant et curieusement assez touchant. On passe également un bon moment à la lecture de « Pour que s'anime le ciel factice » de Frédérick Durand qui choisit pour sa part de se focaliser sur les représentations picturales de la Préhistoire en mettant en scène un antihéros piégé par la magie émanant de ses dessins. Idem pour les nouvelles de Jean-Louis Trudel (« L'homme qui fit couler une mer ») et Antoine Lencou (« D'un versant à l'autre ») qui mettent respectivement en scène une famille d'Amérindiens fuyant la colère de leur tribu et un certain Otzi, référence à un être humain naturellement momifié découvert il y près de trente ans dans un glacier et dont l'auteur imagine les raisons et les circonstances de la mort. Dans un tout autre registre j'ai également été particulièrement sensible à la nouvelle « Chute libre, sans temps imposé » de Jean-Michel Calvel qui clôt élégamment ce recueil grâce à un texte aussi originale que prenant. A noter la présence à la fin de l'ouvrage d'un intéressant article de Marc Guillaumie qui revient l'espace d'une dizaine de pages sur le thème « Fiction préhistorique et science-fiction ». Le chercheur y résume notamment les liens existants entre les deux genres et parvient à mettre le doigt sur ce qui m'a finalement le plus gêné dans cette anthologie : le fait que la grande majorité des nouvelles soient consacrées (de manière parfois bien peu subtile) à des thèmes particulièrement représentatifs de notre XXIe siècle : les changements climatiques, le féminisme, les nouvelles spiritualités... Peu de surprises donc et beaucoup de bons sentiments.



Une anthologie consacrée à une période rarement exploitée de notre histoire mais dont la plupart des nouvelles ne parviennent pas à convaincre. On préférera à ce « Dimension Préhistoire » un autre ouvrage de bien meilleure facture dirigé lui aussi par Meddy Ligner et consacré cette fois à la période antique (« Dimension Antiquité »).
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De Brocéliande en Avalon

Parue en 2008 aux éditions Terre de brume, « De Brocéliande en Avalon » est une anthologie qui, comme son nom l'indique, regroupe une succession de textes consacrés aux légendes arthuriennes. Arthur, Merlin, Lancelot, Guenièvre, la Dame du lac, Excalibur... autant de noms prompts à enflammer notre imagination et à raviver de vieux souvenirs de contes ou récits dont ils sont les héros et que nous connaissons tous aujourd'hui. Sous la direction de Lucie Chenu, neuf auteurs de l'imaginaire se sont essayés au difficile exercice d'exploiter à leur tour la matière des mythes celtiques tournant autour de ce roi légendaire et d'en proposer une nouvelle interprétation. Une contrainte, toutefois, celle de confronter d'une façon ou d'une autre ces dames et chevaliers d'un autre temps avec notre monde et notre époque. Rien de plus efficace pour dépoussiérer les vieux mythes que de se figurer la fée Morgane astrologue à Paris, Merlin écrivain en pleine crise existentielle ou Galahad chanteur rebelle et cynique.



Que ce soit par le biais de l'humour, de la tragédie ou d'un souffle épique, chaque auteur possède une façon très particulière de revisiter ces légendes arthuriennes. Si, dans l'ensemble, les textes se révèlent tous plutôt divertissants, je dois toutefois avouer que peu d'entre eux sortent véritablement du lot et me laisseront un souvenir impérissable. La meilleure nouvelle reste à mon sens « Près du mur » de Deirdre Laurin, une universitaire relativement peu connue parmi les auteurs de l'imaginaire francophone et qui nous livre ici un texte remarquable et bouleversant consacré à l'histoire d'amour d'Arthur et Morgane. « Owein » de N. Dau m'a également beaucoup séduite, que ce soit par son style ou par le choix plus audacieux des protagonistes. R. Hobb, enfin, présente dans cette anthologie sous le pseudonyme Megan Lindholm, nous offre avec « Le Quadragénaire et la Dame d'argent » une nouvelle plaisante et bourrée de cet humour qui lui est propre.



Un mot, pour finir, sur les petits plus de cette anthologie qui, outre une très bonne préface signée Lucie Chenu et une présentation sobre mais néanmoins complète et concise des auteurs, comprend surtout une excellente bibliographie recensant la plupart des romans écrits ces dernières années, avec des précisions quant aux points de vue adoptés et aux thématiques privilégiées par chaque auteur (de M. Zimmer Bradley à J-L. Fetjaine en passant par B. Cornwell, S. Lawhead...). Si la qualité des nouvelles reste assez variable, il n'empêche que l'initiative est louable et que le charme ne manque jamais d'opérer, du moins en ce qui me concerne, dès qu'il est fait mention d'Arthur et de ses chevaliers. A noter qu'une seconde anthologie consacrée au même sujet et toujours sous la direction de Lucie Chenu a également vu le jour en 2012 (« Et d'Avalon à Camelot »).
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Fragments d'une Fantasy antique

Fragments d’une Fantasy antique, c’est l’assemblage anthologique de huit nouvelles d’inégale importance écrites dans le cadre du colloque « L’Antiquité gréco-latine aux sources de l’imaginaire contemporain » du 7 au 9 juin 2012, afin de démontrer la « vivacité de l’héritage gréco-latin dans les fictions contemporaines de Fantastique, Fantasy et Science-fiction » (sic).



Et en effet, il est évident que notre imaginaire est grandement emprunté à celui gréco-latin. Ces huit nouvelles, œuvres de neuf auteurs contemporains, en sont la preuve. Faisons un détail rapide de celles-ci.

Avec "Sur un fragment perdu du Satyricon", Fabien Clavel met en profit son immense connaissance de la langue et de la civilisation latine (professeur de lettres classiques oblige !) pour nous procurer un texte véritablement innovant tout en conservant les caractéristiques relevant de l’œuvre originale. Avec "Le Miroir d'Electre", Jeanne-A Debats emploie son humour et son franc parler habituel pour peindre une héroïne et une situation plus que cocasses. Romain Aspe émerveille son monde avec "Le Labyrinthe", quand Rachel Tanner ne se foule pas trop, mais livre malgré tout un texte percutant avec "Le Sphinx". Lionel Davoust prend des risques, mais signe un des textes les plus réussis : "Faisabilité et intérêt zootechniques de la métamorphose de masse" fourmille de références antiques, mais démontre surtout de l'immense érudition de son auteur et de son incroyable sens de l’humour. Nicolas Delong, un des rares à le faire, nous renvoie directement au temps de l'Antiquité avec "Les Dieux veulent, les dieux prennent" quand Sylvie Miller et Philippe Ward font l'inverse : avec "Voir Pompéi et mourir", ils amènent les complexités antiques directement dans le quotidien d'une enquête saugrenue. Enfin, Nathalie Dau conclut cette anthologie par "À couteau", un court récit aussi sanglant que dérangeant.



Finalement, chaque contributeur a bien suivi la trame voulue par David Nouvel : réutiliser un ou plusieurs mythes gréco-latins pour imprégner notre imaginaire contemporain en constant renouvellement. Je retiens surtout en tant que simple lecteur qui découvre tous ces fameux auteurs : l’ingéniosité de Lionel Davoust, qui m’apparaît comme un auteur très particulier et enrichissant à découvrir, la précision de Jeanne-A Debats, Rachel Tanner et Romain Aspe pour retranscrire fidèlement (quoique pour certains trop rapidement) les mythes antiques dans toute leur complexité, et enfin la vision de Fabien Clavel qui me semble être un auteur qui me correspond tout à fait tant dans son intérêt pour l’Histoire et les Lettres classiques que dans son style et son humour.

Une très belle anthologie en somme avec les défauts de sa nature (une grande variété de textes, mais aussi des hauts et des bas), mais qui symbolisent parfaitement, je crois, le colloque duquel il est issu. Une réussite à mon goût !

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De Brocéliande en Avalon

Superbe anthologie en 9 nouvelles. Plusieurs auteurs font revivre les héros arthuriens dans notre époque. 9 nouvelles différentes tantôt héroïque, tantôt tragique, tantôt comique. Une anthologie qui rappelle qu'en chacun de nous à peu de légende subsiste. A lire absolument pour tout ceux qui s'intéresse à la matière de Bretagne. quant à moi, je cours me procurer le 2e tome ^^.
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Elfes et Assassins

En Résumé : J’ai passé un moment de lecture sympathique avec cette anthologie des Imaginales, mais, j’avoue, je l’ai tout de même trouver un ton en dessous que celle de l’année dernière, ce qui m’a un peu frustré. Ça n’empêche pas cette anthologie d’avoir de très bons textes mais certains se révèlent anecdotiques voir ne m’ont pas accrochés. Dommage. Peut être cela vient du sujet aussi. Je lirai quand même avec plaisir celle de l’année prochaine.



Retrouvez ma chronique complète sur mon blog.
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Le cycle de Mithra, Tome 2 : Le Glaive de M..

Si vous aviez déjà été enthousiasmé par le premier tome du cycle de R. Tanner, vous ne serez pas déçu par ce « Glaive de Mithra » qui se révèle meilleur encore. On retrouve bien le même principe uchronique que dans « L'empreinte des dieux », à savoir la survie de l'empire romain d'occident au delà du Ve siècle et la substitution du culte de Mithra au christianisme en tant que principale religion de l'empire, mais la ressemblance s'arrête là. Loin des rudes terres gauloises ou germaniques du tome précédent, le lecteur découvre ainsi une Rome décadente, menacée par l'arrivée de la peste et par les dangereux et mystérieux rituels qui semblent se multiplier dans les catacombes de la ville. L'aspect historique prend ici le pas sur l'uchronie sans que cela ne gâche la lecture tant les aperçus de la vie quotidienne des habitants de cette Rome en plein bouleversement sont appréciables.



Complots et intrigues de cour, jeux du cirque, sacrifices humains, magie noire... encore une fois il est difficile de s'ennuyer, d'autant plus que ce second volume se fait beaucoup plus rythmé que le premier. R. Tanner nous propose une nouvelle intrigue captivante, maîtrisée de bout en bout, à tel point que le roman adopte parfois des allures de polar. Les scènes de combats, domaine pour lequel l'auteur possède un talent certain, sont également toujours aussi réussies et raviront les amateurs de gladiature et les fans de D. Gemmell. Du côté des personnages on retrouve évidemment avec plaisir la magicienne Judith de Braffort dont le chemin croisera, entre-autre, celui de Damien, jeune homme issu de la paysannerie qui entrera à son service, et surtout de l'empereur Julien avec lequel elle noue peu à peu une relation complexe. Pari réussi pour R. Tanner qui signe avec « Le cycle de Mithra » une très bonne uchronie.
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Anthologie des Imaginales 2009 : Rois & Cap..

Première anthologie ayant vu le jour suite au festival des Imaginales d'Épinal, « Rois et capitaines » est, à ce jour, sans aucun doute l'une des meilleures qu'il m'a été donné de lire. Qu'il s'agisse d'auteurs confirmés tels Thomas Day, Lionel Davoust ou encore Pierre Bordage, ou bien amateurs comme Julien d'Hem, le moins que l'on puisse dire c'est que la qualité est bel et bien au rendez-vous. Et il y en a pour tous les goûts ! On y trouve ainsi le récit de batailles sanglantes et de sièges héroïques comme dans « Montefellone » de Jean-Philippe Jaworski qui nous met face à l'absurdité de la guerre et à l'ingratitude des puissants, ou encore « Serpent-Bélier » d'Alain Cabasson qui nous entraîne dans la Russie médiévale et ses dieux, menacées par les armées mongoles et l'intolérance du christianisme. D'autres auteurs nous embarquent cette fois pour des expéditions en terre inconnue comme Lionel Davoust et son « Impassible Armada » où l'on découvre deux flottes embourbées dans un conflit tant militaire que psychologique, ou encore Pierre Bordage qui nous propose un voyage à bord de l'un de ses impressionnants vaisseaux du désert (« Dans le cœur de l'Aaran »).



Les femmes sont également à l'honneur, Rachel Tanner réinventant pour nous l'histoire de Jeanne d'Arc dans « La Demoiselle et le roitelet » tandis que Catherine Dufour s'attarde sur le sort réservé aux jeunes filles bien nées violentées et chassées de leur château par l'ambition des baronnies et duchés voisins avec son « Prince aux pucelles »). L'humour, enfin, est loin d'être absent avec notamment le savoureux texte de Johan Héliot (« Au plus élevé trône du monde »), nouvelle pleine d'inventivité et de dérision nous emmenant à la découverte de la face cachée de la Lune aux côtés de personnages historiques de renom. Le combat en apesanteur du célèbre d'Artagnan vaut à lui seul le détour! Mention spéciale également à Julien d'Hem qui signe avec « Le crépuscule de l'Ours » un premier texte d'une très grande qualité et qui compte, à mon sens, parmi les plus réussis de cette anthologie.



Une très bonne initiative et un excellent moment de lecture, à prolonger avec les autres anthologies parues dans le cadre du festival des Imaginales qui, depuis 2009, ont pris l'initiative de publier un ouvrage de ce type chaque année.
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Le cycle de Mithra - Intégrale

Merci à Babelio et aux éditions Mnémos qui m'ont permis de découvrir ce livre.



Nous sommes dans une uchronie où le mithraïsme devient religion d'état de l'empire romain - et étouffe le christianisme. L'empire ne tombe pas en 476 mais se perpétue malgré les difficultés. Un certain Carlus Magnus se taille un royaume entre la Belgique et la Germanie. Le mithraïsme de son côté connaît des évolutions surprenantes (acceptation des femmes) et, dans son monothéisme, s'oppose à toutes les autres religions et hérésies qu'il persécute.



L'empreinte des dieux nous fait suivre Judith de Braffort dans ses pérégrinations d'Armorique à l'Helvétie en passant par Cologne. Elle et sa cousine Frédérique viennent incarner les forces en présence et la lutte qui s'annonce. L'une se fait initier aux mystères de Mithra et gagne son pouvoir à Rome, l'autre au contraire reste fidèle aux anciens dieux et part étudier la magie auprès d'Ygrene la sorcière. Leur affrontement mettra en mouvement jusqu'aux dieux.



Le glaive de Mithra nous amène à Rome avec ses jeux, ses gladiateurs, ses persécutions - et la peste. Là Judith devra affronter et vaincre un artefact maléfique qui donne une puissance surhumaine à son possesseur. La peinture de la ville de Rome et de ses habitants est superbe.



Je suis personnellement moins attirée par les nouvelles. Celles qui sont présentées ici ne font sens que par rapport aux romans. Elles précisent le parcours de tel ou tel personnages.



J'ai trouvé que l'institution du culte mithraïste ressemblait un peu trop au christianisme, avec son inquisition avant l'heure et sa lutte contre les hérésies. En revanche, j'ai beaucoup apprécié l'ambiance Antiquité tardive/Moyen Age que l'auteur rend bien avec le rétrécissement des villes, la fuite devant l'impôt, le retrait de l'alphabétisation, la présence des Barbares à l'intérieur de l'Empire et jusque et surtout dans son armée. La magie et les dieux s'intègrent sans rupture à cette évocation "réaliste" du monde romain finissant.
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Les coups de coeur des Imaginales - 2013

En Résumé : J’avoue avoir passé un agréable moment de lecture avec cette anthologie qui nous permet de découvrir, ou redécouvrir, les coups de cœur des Imaginales depuis leur création. Alors, certes, tous les textes ne sont pas au même niveau, certains se révélant excellents là où d’autres n’ont pas réussi à m’accrocher, mais dans l’ensemble un recueil de nouvelles qui s’est révélé très sympathique à lire. J’ai retrouvé avec plaisir des auteurs que j’apprécie j’ai aussi découvert certains auteurs sous un jour nouveau. Dommage par contre qu’aucun véritable thème n’ait été défini, ce qui donne l’impression de passer d’un style à l’autre selon les nouvelles et le tout sans aucune véritable ligne conductrice.



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Le cycle de Mithra - Intégrale

Le cycle de Mithra avait attiré mon attention lors de l'écriture de mon article sur l'uchronie. Son contexte original, la magnifique réédition des éditions Mnémos et une proposition de lecture commune, les arguments étaient réunis pour que je me lance dans ce petit pavé. L'intégrale contient donc les deux romans du Diptyque ainsi que les nouvelles se situant dans le même univers. Qu'en ai-je pensé ?



Le premier tome fut une très bonne surprise ! Le contexte choisi est d'une grande originalité, et la mise en bouche dans une Armorique attachée à ses traditions bien qu'elle appartienne à l'Empire Romain est une réussite. L'autrice montre rapidement qu'elle a effectué des recherches approfondis pour construire une histoire cohérente et immersive, car les descriptions sont riches, précises et évocatrices. De même pour la suite du roman, dont certaines parties évoquent la situation à Rome, qui dévoile des enjeux politiques et religieux vastes et complexes.



J'ai beaucoup apprécié le fait que le Mithraïsme rythme une bonne partie de l'existence de cet Empire Romain qui aura survécu aux invasions barbares. Ici, le culte présente de nombreux points communs avec le Christianisme, relégué au rôle d'une secte mineure et pourchassée. On se retrouve avec une religion ancrée dans le mystère et dont les dirigeants supportent de moins en moins la tolérance romaine en matière de cultes. Il y a donc les ingrédients pour aboutir à une histoire explosive !



La fantasy prend une place assez discrète, notamment au début du récit, et ne prend pas le pas sur le scénario ou les personnages. Ceux-ci sont d'ailleurs bien croqués. J'ai globalement apprécié le personnage de Judith, jeune fille un peu rebelle mais attachante, qui n'hésite pas à prendre des décisions difficiles pour le bien de sa famille et de son peuple. Je l'ai trouvée tout de même un peu lisse, car elle a finalement assez peu de défauts, hormis son obstination dont elle fait aussi une force. Même sensation avec Ygrène et Laran, aussi beaux que talentueux mais sans grande saveur.



Le reste de la galerie est bien mise avant. J'ai apprécié l'antagoniste, Frédérique, femme endeuillée qui se laisse consumée par la colère. Même si elle est un peu archétypale et souvent manichéenne, elle a le mérite d'offrir un contrepoids intéressant au côté celte, et son histoire offre un point de vue éclairant sur les événements. J'ai également beaucoup aimé le personnage de Julius, ce soldat talentueux et haut gradé, mais condamné à des postes subalternes et ingrats à cause de son lien familial avec le paranoïaque empereur romain.



Quant à l'histoire, elle est claire et menée avec efficacité, malgré des choix narratifs surprenants (changement de points de focalisation...). Le style de Rachel Tanner est direct et efficace, avec un vrai talent pour les descriptions des conflits et des batailles. Ces dernières sont particulièrement immersives, et offrent des tableaux qui oscillent entre horreur des blessures et héroïsme épique.



Pour le deuxième roman, passer du premier tome à celui-ci est assez déstabilisant. Nous sommes quelques années et les liens entre les deux sont assez ténus, or la présence de Judith. Dans le glaive de Mithra, nous sommes à Rome et ce point de vue centré sur la ville éternelle apporte de nouveaux éléments de contexte à un univers déjà riche.



Le ton se fait beaucoup plus sombre avec des aspects plus sanglants : La peste arrive et commence ses ravages, une sombre secte agit dans l'ombre des catacombes et le peuple de Rome se repaît des jeux brutaux dans le Cirque. J'ai beaucoup apprécié ces détails de la vie Romaine, une ville de tous les excès où les immensément riches contemplent les quartiers pauvres du haut des collines, où la prostitution côtoie les riches banquets... C'est une fois de plus un contexte qui bénéficie du travail de recherche. de Rachel Tanner.



La plume de cette dernière est d'ailleurs très efficace une fois de plus dans les scènes dramatiques et les scènes de combat. Elle parvient à donner une intensité accrue à ces dernières, qui sont réellement les meilleurs moments du roman.



Les personnages sont une fois de plus bien décrits, peut-être même avec plus de subtilité que dans le premier tome. Ce récit est moins manichéen dans la construction des personnages, et brossent au contraire des portraits complexes et humains, comme celui de Crispus, l'Empereur, partagé entre justice et besoins de l'Etat. Les rôles secondaires sont particulièrement réussies, et avec surprise, j'ai adoré la femme de l'Empereur.



Le bémol vient à mes yeux de la partie scénaristique. L'histoire est moins maîtrisée, dans le sens où il y a parfois des coïncidences un peu trop grosses qui relient les différents fils conducteurs. Ce qui donne parfois l'impression de faire face à des facilités. J'aurais préféré que les histoires des différents protagonistes s'enchâssent avec plus de naturel. De la même façon, la poursuite du médaillon, sans doute car étrangement introduite, apparaît comme un McGuffin trop évident qui fragilise l'ensemble de la construction du déroulé du roman.



Mais ce n'est qu'un petit défaut ! L'intégrale est en tout cas une excellente découverte de ces oeuvres bien maîtrisées. Entre contexte fascinant, personnages variés et bien construits ainsi qu'une plume immersive et dynamique, le cycle de Mithra est une uchronie marquante ! La lecture bénéficie d'un contexte riche et de recherches approfondies qui apportent une vraie cohérence à l'ensemble et aboutissent à un travail exceptionnel. Il n'y a aucun doute que les amateurs de culture celtique et de récits antiques trouveront leur compte et même plus !






Lien : https://lageekosophe.com/
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