Ramana Maharshi

Toutes les Ecritures ont pour unique but de ramener l'homme à la source originelle. Il n'y a rien à acquérir; il faut simplement abandonner les faux concepts et les excroissances inutiles. Mais au lieu de cela, on cherche les complications et des choses mystérieuses, car on croit que le bonheur se trouve « ailleurs ». C'est une erreur. Si l'on vit dans le Soi, on goûte la Béatitude. Mais cela paraît sans doute trop simple de pouvoir jouir de la béatitude sans rien avoir à faire de particulier. Ceci est le résultat de l'ignorance. La seule chose à faire, c'est de découvrir « à qui se posent ces questions ».

Seule existe la Conscience.
Celui qui connaît le Soi n'a plus rien d'autre à faire. A partir de ce moment, le Pouvoir infini accomplira à travers lui toutes les actions qui doivent l'être. Il n'est plus nécessaire de penser. Durant la méditation qui a le Soi pour objectif, les pensées disparaissent automatiquement. La méditation peut se faire sur divers objets, mais la plus haute forme de méditation est orientée vers le véritable Moi, vers le Sujet.
Les pensées sont nos ennemis. Sans elles, nous sommes automatiquement dans la félicité. L'espace entre deux pensées est notre état véritable, c'est le véritable Moi. Eliminez les pensées, chassez-les, demeurez dans un état où elles sont à jamais abolies ; ainsi vous devenez Existence en soi. Les pensées, les désirs et tous les attributs sont étrangers à notre véritable nature. L'Occident rend hommage aux grands mais qu' est-ce que cela veut dire ? La véritable grandeur consiste à à ne plus penser.

Âme, esprit, ego, ne sont que des mots. En fait il n'existe aucune entité correspondant à ces termes. La Conscience représente l'unique vérité.

La Réalisation est toujours là. L'état réel est celui où il n'y a plus de pensées. La Réalisation n'est pas un accomplissement. Existe-t-il quelqu'un qui n'ait pas réalisé le Soi ? Qui pourrait nier sa propre existence ? Alors comment se fait-il que nous ne connaissions pas notre propre Soi ? Ce sont les pensées qui font obstacle à notre bonheur. Comment savons- nous que nous existons ? Si vous dites« à cause du monde qui nous entoure », en ce cas comment savez-vous que vous existez pendant le sommeil?

Le Soi n'est pas quelque part au loin où on doit l'atteindre. Vous êtes toujours Cela. Vous devez simplement abandonner l'habitude de vous identifier avec le non-soi. Tout effort ne sert qu'à cela.

Q : Comment devons-nous concevoir la Conscience suprême (chaitanya-brahman) ?

M : Comme ce qui est.


Q : Doit-on la concevoir comme étant la lumière en soi ?

M : Elle transcende la lumière et l’obscurité. Un individu (jīva) voit les deux. Le Soi éclaire l’individu pour lui permettre de voir la lumière et l’obscurité.

Q : Doit-elle être réalisée sous forme de « Je ne suis pas le corps, ni l’auteur des actions, ni celui qui en jouit, etc. » ?

M : Pourquoi toutes ces pensées ? Pensons-nous à chaque instant que nous sommes des hommes, etc. ? Et en n'y pensant plus, cessons-nous de l’être ?

Q : Devrait-on alors réaliser la Conscience suprême comme il est dit dans les textes sacrés : « Il n’y a pas de différences ici (neha nānāsti kimchana) » ?

M : Pourquoi penser même à cela ?

Q : Si nous pensons « Je suis la Réalité », est-ce suffisant ?

M : Toute pensée est incompatible avec la Réalisation. L’attitude correcte consiste à exclure toute pensée de nous-mêmes et toute autre pensée. La pensée est une chose et la Réalisation en est une tout autre.

La couleur du lait est une, mais les couleurs des vaches sont diverses,
De même est la nature de la Connaissance, observent les Sages.
Les êtres avec toutes leurs différences et caractéristiques, sont comme les vaches,
mais leur Réalisation est la même;
C'est là un exemple que nous devrions connaître.

Se défaisant des attachements de lieu, de caste, de croyance ainsi que des pensées et des œuvres qui s'y attachent,
Le Sage méditera sans cesse sur sa véritable nature, qui est le Soi.

Tout ce qui est vu dans ce monde,
Tout ce qui est entendu dans ce monde,
Tout ce qui luit, conceptualisé comme intérieur et extérieur,
Tout cela est pénétré par Moi -
L'Un omniprésent.
Réalise cela!

La recherche incessante du Soi,
nous l'appelons l'amour suprême de Dieu;
Car Lui seul en tant que Soi
demeure au-dedans du Coeur de tous.

Je suis la Conscience éternelle, dissociée du mental et des sens. Je suis l'esprit de l'esprit, l'œil de l'œil, l'oreille de l'oreille et ainsi de suite. Je ne suis pas connaissable par le mental et les sens. ( verset 7 de l'hastamalaka stotra)

Dans les rêves, lorsqu'il n'y a pas de contact réel avec le monde extérieur, l'esprit seul crée l'univers entier composé de l'expérimentateur, de l'expérimentation et de l'expéri- menté. De même, dans l'état de veille, il n'y a pas de différence. Par conséquent, tout cet univers phénoménal est une projection de l'esprit. (verset 170 du Vivekachudamani)

Avec un mental pacifié et une intelligence purifiée, goûte au Soi primordial, sous la forme, « Je suis cela ». Traverse l'océan sans rivage de l'existence mondaine (samsâra) avec ses vagues de naissances et de morts. Fermement établi comme Brahman, Lequel est ta véritable essence. Sois béni! (verset 136 du Vivekachudamani)

Parmi les choses propices à la Libération, la dévotion (bhakti) tient la place suprême. La recherche de sa vraie nature est désignée comme dévotion. (verset 31 du Vivekachudamani)

Ce qui n'est pas permanent ne peut être réel. Si unebchose est réelle, elle doit toujours l'être et non pas parfois réelle et parfois irréelle. Tout ceci est comparable aux tours des magiciens. Leurs tours semblent réels alors qu'en fait ils ne le sont pas. De même, le monde ne peut être réel en lui-même, c'est-à-dire dire comme séparé de la Réalité absolue.

Voyez, dans le sommeil sans rêves, il n'y a plus ni monde, ni souffrance, ni ego, seul le Soi subsiste. Dans l'état de veille, il y a le monde, la souffrance et l'ego, le Soi est aussi présent. En abandonnant ces états éphémères, l'on découvre la félicité du Soi qui est toujours présente. Votre nature est félicité, ananda. Découvrez tout ce qui a recouvert le Soi et auxquels vous vous identifiez, vous resterez alors comme le pur Soi.

Existe-t-il un ornement d'or
À part l'or lui-même ?
Le corps peut-il exister en dehors du Soi ?
L'ignorant pense : « Je suis le corps »,
L'illuminé sait : « Je suis le Soi. »

On croit le Soi à l'intérieur du corps grossier,
Comme un spectateur qui suppose
Que l'écran sur lequel l'image est projetée
Se trouve dans l'image.

À quoi bon tout ce savoir des choses
Autre que le Soi ?
Et Celui-ci étant connu,
Qu'y a-t-il d'autre à connaître?

L'expérience du Soi n'est possible que pour l'esprit redevenu subtil et immobile à la suite d'une méditation prolongée.