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Critiques de Raphaël Granier de Cassagnac (96)
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Kadath : Quatre quêtes oniriques de la cité inc..

Note de l'éditeur :



"Les textes du présent ouvrage ont fait l'objet d'une première publication en 2010 sous la forme de fragments entrelaçant les témoignages des rêveurs et d'encarts dans le beau-livre de la collection Ouroboros de Mnémos, Kadath, le guide de la Citée Inconnue.

Ils ont été revus pour cette nouvelle édition au format roman."



Quatre nouvelles au sommaire de ce recueil/roman qui rend hommage à Robert Phillips Lovecraft (1890-1937) et à Kadath, la cité onirique qu'il évoque dans une de ses nouvelles, Les Contrées du Rêve. Mêlant allègrement récits écrits à la manière du maître de Providence et notules para-textuels réunis dans des annexes, ce livre plonge son lecteur dans un univers fantastique baigné de folie.





illustration de Nicolas Fructus

I. L'Inédit de Carter

traduit par David Camus



Où l'on suit HPL faisant son entrée dans Kadath, et les aventures qui s'en suivent. Le personnage nommé HPL revient dans la cité onirique parce qu'on lui a promis une récompense pour avoir aidé les dieux de Kadath. Mais accéder au saint des saints est tout sauf une tâche aisée dans le monde du rêve.

Habillement présentée comme un inédit de Randolph Carter, cette nouvelle est écrite par David Camus, l'un des nouveaux traducteurs de Lovecraft. On lui doit, notamment, et toujours aux éditions Mnémos, la traduction puis la réunion dans un recueil inédit de quelques nouvelles de Lovecraft, Les Montagnes hallucinées et autres récits d'exploration. On peut dire sans se tromper que le monsieur connait son sujet. D'ailleurs, ça se sent, et pas qu'un peu. Très bonne nouvelle.





II. L'Evangile selon Aliénor

prêché par Mélanie Fazi



Où il nous est contée la vie d'Aliénor dans la cité onirique. Cette nonne française mourra très jeune dans la vie réelle, mais se retrouva enceinte dans le monde des rêves. Cette grossesse perpétuelle fut engendrée par un Dieu, faisant d'Aliénor un personnage très important de Kadath.

S'il est besoin de le rappeler, Mélanie Fazi fait partie des toutes meilleures nouvellistes du genre fantastique en France. Peut-être même la meilleure. Ce récit est là pour le prouver une nouvelle fois, si nécessaire. Époustouflant.



III. Le Kitab du Saigneur

reçu par Laurent Poujois



Où l'on nous narre l'histoire du Saigneur, Seigneur de Lazaret et être immortel. Recueil de fragments de textes qui suivent les hauts-faits d'un être d'exception à travers l'Histoire, et son rapport au monde des rêves.

S'il fait partie de l'"écurie" Mnémos, je découvrais pour ma part Laurent Poujois avec cette nouvelle qui a tous les atours du texte érudit. C'est très malin, même si, personnellement, je me suis parfois demandé ce que j'étais en train de lire et comment je devais le relier à l'entreprise d'ensemble. Une découverte intéressante tout de même.



IV. Le Témoignage de l’Innommé

rêvé par Raphaël Gragnier de Cassagnac



Où l'on découvre l'Innommé faisant la connaissance de tous les autres Hauts-Rêveurs, devenus tous plus ou moins fous.

Depuis quelques années, Raphaël Gragnier de Cassagnac est devenu une grande figure de l'imaginaire hexagonal. C'est lui qui est à l'origine de ce projet fou (encore plus fou quand il était sous sa forme originelle). Lui qui a réuni tous les auteurs de ce recueil. On ne peut que l'en remercier. Cependant, c'est lui aussi qui nous sert le texte le plus léger. Sans être illisible, cette dernière nouvelle est nettement un cran en-dessous des trois autres. Car à trop vouloir raccrocher les wagons au train du projet global, l'auteur perd beaucoup de la force développée par le reste de l'équipe. Dommage, même si c'est loin d'être rédhibitoire.



Annexes



En ce qui concerne les nombreuses annexes qui émaillent ce livre, elles donnent pas mal de renseignements à l'ensemble. Cependant, c'est un peu la fausse bonne idée de ce projet. Parce qu'autant les notules s’inséraient à merveille dans le beau-livre d'origine, car celui-ci était formidablement bien illustré par un Nicolas Fructus toujours aussi inspiré, autant là on peine à comprendre l'intérêt de la chose. A part pour remplir le vide entre les nouvelles et proposer un livre de 250 pages, je ne vois pas trop...



En conclusion, ces quelques bémols ne doivent pas rebuter le lecteur de se précipiter sur ce bouquin (s'il n'a pas déjà le Kadath de 2010, bien sûr). Qu'il soit fan de Lovecraft, ou non, il pourra aisément trouver son bonheur. On regrettera tout de même de ne pas avoir quelques illustrations de Nicolas Fructus à l'intérieur de l'ouvrage, même en basse résolution. Elles nous manquent cruellement.
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La clef d'argent des contrées du rêve

MNÉMOS RÊVE







Dans la très, très riche actualité lovecraftienne francophone de ces derniers mois, chez les Indés de l’Imaginaire mais aussi ailleurs, La Clé d’argent des Contrées du Rêve se distingue peut-être, d’abord parce que l’on fait cette fois dans la fiction, ensuite parce que c’est en usant d’un cadre lovecraftien pas si pratiqué ou mis en avant : les Contrées du Rêve, donc.







Maintenant, il est vrai que Mnémos semble entretenir une relation particulière avec les Contrées – relation qui remonte au moins à la nouvelle traduction par David Camus, sous le titre donc Les Contrées du Rêve, de l’ensemble des nouvelles « dunsaniennes » de Lovecraft, incluant Démons et Merveilles, soit le « cycle de Randolph Carter », auquel le titre de la présente anthologie fait clairement allusion, mais aussi toutes les autres nouvelles « oniriques » : « Polaris », « La Malédiction de Sarnath », « Les Chats d’Ulthar », « Les Autres Dieux », et j’en passe.







Exactement au même moment, l’éditeur avait publié le très beau Kadath : le guide de la cité inconnue, superbement illustré par Nicolas Fructus (dans son édition originale : la reprise ultérieure se passe de la dimension graphique, ce qui me laisse assez sceptique…), avec des textes de David Camus donc, Mélanie Fazi aussi (surtout ?), Raphaël Granier de Cassagnac et Laurent Poujois. De la bonne came, ces deux bouquins…







Plus récemment, cependant, on a (re)trouvé chez Mnémos des choses… nettement moins bonnes, avec deux gros volumes pseudo-lovecrafto-oniriques de l’inqualifiable Brian Lumley. Ce qui, peut-être, fausse un peu mon jugement concernant la présente anthologie ? C’est dommage, mais…







ONIRIQUE… ET PÉRILLEUX







Cela dit, ce n’est clairement pas la plus évidente des matières, les « Contrées du Rêve »… C’est même assez franchement périlleux, et à plus d’un titre.







Dont un, bizarrement, ne ressort pas du tout ici – et notamment de l’introduction de Frédéric Weil : à l’exception de « Polaris », si l’on en croit Lovecraft lui-même, ces récits sont à certains égards des sortes de pastiches – de l’immense Lord Dunsany, donc. Les Dieux de Pegāna, Le Temps et les Dieux, L’Épée de Welleran, Contes d’un rêveur (parmi lesquels « Jours oisifs sur le Yann », nouvelle séminale en la matière), Le Livre des merveilles, Le Dernier Livre des merveilles… Autant de splendides petits recueils qui ont fourni, sinon la base ou le substrat, du moins des modèles pour que Lovecraft développe son propre univers onirique et baroque, au lexique chatoyant. Dès lors, pasticher Lovecraft dans les « Contrées du Rêve » peut revenir, indirectement, à pasticher Dunsany via les propres pastiches de Lovecraft ?







En théorie. Car, et ce n’est pas la moindre surprise de cette anthologie, aucun des auteurs ici présents (hors cas « ambigu » de « Randolph Carter », j’y reviendrai…) ne joue vraiment de cette carte merveilleuse. Laurent Poujois s’en approche timidement par endroits, Alex Nikolavitch et Vincent Tassy peut-être, avec moins de réussite, les autres n’essayent même pas ; il n’est pas dit qu’on puisse vraiment leur en vouloir, ni que ce soit forcément problématique…







Les « Contrées du Rêve », après tout, peuvent avoir d’autres couleurs – et la fantasy lovecraftienne, souvent, conserve quelque chose de l’horreur du Monde de l’Éveil ; cette fois, quelques auteurs s’en souviennent, mais somme toute assez peu, ou sans guère de réussite en tout cas.







Or ces différents registres ont leurs risques propres – et contribuent à rendre périlleux l’exercice d’équilibriste de Lovecraft, dont nombre des récits « dunsaniens » sont sur la corde raide : un faux pas et l’on tombe, ce qui charme et fascine s’avérant en fin de compte seulement grotesque au mauvais sens du terme, autant dire ridicule. Les auteurs se montrant prudents, ici, voire timorés, ils évitent pour l’essentiel cet écueil… sauf Sylvie Miller et Philippe Ward d’une part, et Vincent Tassy de l’autre, qui, chacun à sa manière, sautent à pieds joints dessus (et se cassent la gueule, comme de juste).







Autre ambiguïté du registre : la dimension proprement onirique de ces Contrées. Contre leur dénomination même, elle est en fait parfois discutable… Christophe Thill, dans un article figurant dans Lovecraft : au cœur du cauchemar, y insiste, à bon droit sans doute, même si je n’irais probablement pas jusqu’à me montrer aussi catégorique. Mais il y a bien une autre ambiguïté à cet égard, qu’il faut relever : ces Contrées sont peut-être oniriques (car on rêve beaucoup dans ces textes de Lovecraft, dont la célèbre citation est reprise ici en mot d’ordre : « Tout ce que j’ai écrit, je l’ai d’abord rêvé. »), ou peut-être pas, plutôt antédiluviennes ; ou alors les deux tout à la fois… Pourquoi pas, après tout ?







Cela a son importance, qui fait le partage entre une fantasy « classique », limite avec carte à l’appui, et quelque chose de bien moins organisé. La plupart des auteurs, ici, me semblent appuyer sur la dimension onirique, même en en évacuant le merveilleux – et souvent en faisant explicitement l’aller-retour entre Contrées du Rêve et Monde de l’Éveil ; ce qui paraît couler de source, alors qu’au fond, si l’on veut bien s’y arrêter un instant, ça n’a rien de si évident : en fait, cela introduit bel et bien un biais.







Et il y en a peut-être encore un dernier, pas forcément si inattendu que cela chez Mnémos, au vu de l’origine même de l’éditeur : la dimension rôlistique. Je crois qu’elle a laissé son empreinte (« mythique », si l’on y tient), et que les « Contrées du Rêve » ici arpentées doivent beaucoup à Sandy Petersen et compagnie, au projet préalable à L’Appel de Cthulhu – jeu dérivé de l’idée d’un supplément sur « Les Contrées du Rêve » pour Runequest… Pourtant sans insister sur la fantasy. Ce qui n’est pas forcément un problème, là non plus – mais conserver cette idée derrière l’oreille peut faire sens en cours de lecture, ai-je l’impression.







(Note : depuis cette chronique, au passage, j'ai eu l'occasion de causer des Contrées du Rêve rôlistiques, rééditées chez Sans-Détour.)







Y CROIRE ?







Reste que, si cette anthologie souffre avant tout d’un problème, il est tout autre… et bien autrement gênant. J’ai l’impression en effet d’un livre conçu sans y croire, d’une anthologie où les auteurs, au fond, et en tout cas la direction d’ouvrage, ne se sont pas « impliqués ». Même auprès des auteurs les plus sensibles à la dimension lovecraftienne, notamment pour en avoir déjà fait usage ailleurs, éventuellement de manière frontale, demeure ici l’impression vaguement ennuyeuse d’une commande. Le tout manque d’application et de cohérence, du coup… mais aussi et surtout d’enthousiasme ?







Sur le format relativement court de l’anthologie, c’est pour le moins frappant – et ça ne l’est que davantage, quand le dernier et le plus long texte du recueil et de loin, les « Fragments du carnet de voyage onirique de Randolph Carter », se contente sur une cinquantaine de pages de citer expressément Lovecraft, et/ou de broder sur ses descriptions « oniriques » sans même s’embarrasser d’une narration ! Or cet ultime texte confirme que les auteurs des nouvelles précédentes n’ont en fait même pas essayé de jouer de la carte baroque et chatoyante… Et il a d’autres connotations regrettables, sur lesquelles je reviendrai en temps utile.







Et, décidément, même en jouant au bon public dans la mesure de mes capacités (non négligeables) pour ce faire, je ne peux certes pas accorder une bonne note à cette anthologie ; on dit parfois « ni fait ni à faire », et c’est une expression hélas appropriée au contenu de cette anthologie …







Ma chronique pour Bifrost synthétise et « rassemble » les textes. Ayant davantage de souplesse rédactionnelle sur ce blog autorisant des développements bien plus amples, je vais tâcher de dire quelques mots de chacun de ces textes, dans l’ordre de présentation.



URJÖNTAGGUR







On commence avec « Urjöntaggur », nouvelle signée Fabien Clavel – un auteur que je n’ai à vrai dire jamais « pratiqué » (le bien grand mot…) que dans ce registre de la « plus ou moins commande », ce qui peut influer sur mon jugement. Mais le fait est que ce texte m’a paru sonner faux…







C’est d’autant plus regrettable qu’il contient des bonnes choses – avec un potentiel graphique et onirique marqué, des clins d’œil plutôt amusants aussi… Et, bien sûr, la dimension épistolaire, très adéquate.







Sauf que je n’ai donc pas l’impression d’un auteur qui « croit » en ce qu’il écrit – et j’ai bien au contraire la conviction qu’il ne fait finalement rien pour que le lecteur, au moins, y croie. Dimension rôlistique, avançais-je plus haut ? Peut-être, mais de manière ratée… La nouvelle m’a immanquablement évoqué un « scénario » conçu sur le pouce, pour une séance imprévue, en jetant au dernier moment les dés pour bâtir fissa quelque chose sur la base de tables aléatoires. Il y en a de bonnes, et cette méthode peut donner des choses très amusantes – mais à condition d’y travailler un peu plus, ne serait-ce que pour bétonner l’agencement. Sinon, ce ne sont que des cases dans des tableaux – des fragments qui au fond ne conduisent à rien ; et, au bout de la partie comme au bout de cette nouvelle, j’ai passé le temps, oui, mais sans vraiment m’amuser, et je n’en retiendrai rien.







Les gimmicks « stylistiques » de l’auteur ne font en fait que renforcer cette impression. La dimension épistolaire pouvait donner quelque chose d’intéressant, mais Fabien Clavel fait dans le gratuit (anglicismes, fautes d’accord), dans une vaine tentative, mais d’autant plus voyante, de conférer de la personnalité à ses protagonistes ; c’est au fond parfaitement raté, au mieux inutile. Et l’artifice n’en ressort que davantage.







Ce n’est même pas forcément que ce texte est « mauvais » : d’une certaine manière, il n’existe pas…







Hélas, il n’est pas le seul dans ce cas, ici.







LE RÊVEUR DE LA CATHÉDRALE







Suivent Sylvie Miller et Philippe Ward, pour « Le Rêveur de la cathédrale ». Le Noir Duo a pu, occasionnellement, livrer des choses tout à fait correctes, souvent dans un registre populaire, léger et divertissant, « Lasser » ou pas, mais pas que. Bien sûr, quelqu’un qui se fait appeler Philippe Ward n’a guère besoin de mettre en avant d’autres arguments pour témoigner de son goût pour Lovecraft…







Reste que cette nouvelle est un échec total – et qui, bizarrement, aurait sans doute gagné à se débarrasser de ses oripeaux guère seyants de lovecrafterie. Sur la base d’un cadre narratif qui aurait pu être intéressant (la basilique de Saint-Denis) mais qui s’avère bien vite inexploité, et d’ici à une conclusion tellement convenue que c’en est gênant, elle nous inflige un Nyarlathotep parfaitement grotesque, et un Randolph Carter qui l’est à peu près autant (outre qu’il est tout sauf sympathique – ce qui aurait pu constituer un bon point, je suppose, mais dans encore un autre univers parallèle) ; j’ose espérer que c’était délibéré de la part des auteurs, d’une certaine manière, mais sans en être totalement certain…







Et au final ? Là encore, une nouvelle « qui n’existe pas ».







DE KADATH À LA LUNE







Raphaël Granier de Cassagnac, pour sa contribution intitulée « De Kadath à la Lune », fait dans l’autoréférence, en brodant façon bref spin-off sur son texte dans Kadath : le guide de la cité inconnue, il y a de cela quelques années déjà. L’idée n’était pas mauvaise, même si tout cela est bien lointain pour moi… Mais cela a pu susciter quelques « flashs » occasionnels – cependant, plutôt dans son évocation du segment dû à l’époque à Mélanie Fazi, avec le personnage d’Aliénor. Eh…







Ce que Raphaël Granier de Cassagnac avait conçu dans ce cadre avec son « Innomé » était plutôt réussi, pourtant, et ne manquait pas d’à-propos, en fournissant au lecteur un guide de choix pour arpenter Kadath. En dehors de ce contexte, par contre, et avec cette seule anthologie pour référence, ça ne fonctionne hélas pas… et cela aboutit à un nouveau texte « inexistant ». Dommage…







CAPRAE OVUM







« Caprae Ovum » est une nouvelle d’Alex Nikolavitch, que je n’avais longtemps pratiqué qu’en tant qu’essayiste et traducteur (de BD notamment), sauf erreur, mais qui a publié assez récemment son premier roman, Eschatôn, aux Moutons Électriques – un roman, d’ailleurs, non dénué d’aspects lovecraftiens, et l’éditeur avait mis cette dimension en avant ; un roman, hélas, qui ne m’avait pas convaincu… mais pour de tout autres raisons (ses aspects lovecraftiens sont assez réussis, objectivement).







Avec la présente nouvelle, il nous livre un périple onirique adapté à la logique des rêves et/ou des cauchemars. Idée qui fait sens, sans doute… à ceci près que le résultat est d’un ennui mortel. Dans cette anthologie, c’est probablement la première nouvelle à tenter d’approcher véritablement la matière lovecraftienne onirique, ce qui est tout à son honneur – et je suppose qu’il y a notamment de « La Clé d’argent » là-dedans. Pas forcément le plus palpitant des récits lovecraftiens, je vous l’accorde… Mais là, c’est encore une autre étape : un somnifère radical.







Il y avait de l’idée – mais ça ne fonctionne pas vraiment, au mieux, et, une fois de plus, on n’en retient rien.







LES CHATS QUI RÊVENT







Avec « Les Chats qui rêvent », de Morgane Caussarieu, on en arrive – enfin ! – à un texte que l’on peut sans hésitation qualifier de « bon ». Pas un chef-d’œuvre, non, mais un « bon » texte. À vrai dire probablement le meilleur de cette anthologie autrement bien fade…







Je précise à tout hasard que je n’avais jusqu’alors (sauf erreur) jamais rien lu de la jeune auteure, dont des gens fiables ont cependant loué les romans, tout particulièrement Dans les veines – il faudra que je tente ça un de ces jours, quand même…







Mais revenons à nos moutons – ou plutôt, à nos chats… Ceux d’Ulthar, bien sûr ? Non : ceux qui aimeraient se trouver à Ulthar.







Parce qu’ils sont présentement en enfer.







Sur la base d’un titre pareil, je m’attendais à quelque chose dans le goût du très chouette « Rêve de mille chats » de Neil Gaiman – un épisode indépendant de la cultissime et fantabuleuse BD Sandman. Il y a peut-être un peu de ça, mais c’est finalement autre chose. Car ce texte n’est pas sans surprise, en fin de compte…







Notamment en ce qu’il évacue très vite tout ce qui pourrait être « naturellement kawaii » avec un postulat pareil. Chatons ou pas, cette nouvelle n’a rien de « mignon ». En fait, de l’ensemble de l’anthologie, elle est peut-être la seule (disons avec celle de Laurent Poujois, plus loin) où l’angoisse, voire la peur, voire la terreur, ont quelque chose de palpable – un aspect qui, quoi qu’on en dise, n’est pas absent des récits de Lovecraft consacrés aux « Contrées du Rêve ». Mieux encore si ça se trouve, la brève nouvelle de Morgane Caussarieu parvient à véhiculer quelque chose de presque… dépressif ? qui, là encore, contrairement aux idées reçues, peut faire partie intégrante de l’onirisme chatoyant de Lovecraft – car, dans ses textes dits dunsaniens, sous les tours d’ivoire et les minarets scintillants peut se dissimuler l’échec, le navrant, le pathétique ; peut-être surtout dans un second temps de sa production « fantaisiste », certes, mais c’en est une dimension importante.







Mais, en combinant tous ces aspects, Morgane Caussarieu livre donc un texte plus qu’honorable, à propos dans ce contexte, mais qui se tient aussi en lui-même. Une réussite, à son échelle, donc – et peut-être bien la réussite de cette anthologie. Oui : un texte qui existe, voyez-vous ça !







LE BAISER DU CHAOS RAMPANT





Encore un jeune auteur, avec Vincent Tassy – qui, dans « Le Baiser du Chaos Rampant », use d’une esthétique gogoth qu’on aurait pu être tenté d’associer à Morgane Caussarieu, sauf que non, en définitive.







Malgré sa lourdeur démonstrative et son emploi pas toujours très assuré d’un lexique rare et se voulant riche, la nouvelle parvient (presque) à faire illusion un certain temps. Il s’y passe des choses, et si la focalisation morbide et goulesque ne suscite pas les mêmes connotations que les tours et minarets des cités merveilleuses de Céléphaïs et compagnie, au moins l’auteur parvient à peu près à en tirer un semblant d’ambiance. Ce qui aurait donc pu donner quelque chose de correct, j’imagine – en étant bon prince, oui, mais…







Mais en fait non, en raison d’une conclusion parfaitement ridicule. Je ne suis pas certain d’avoir lu une lovecrafterie qui m’ait autant donné envie de bazarder violemment le bouquin contre un mur depuis la « Maudite Providence » de Li-Cam – enfin, une lovecrafterie francophone, j’ai (re !) lu du Brian Lumley entre temps…







Non, vraiment, fallait pas.



LE TABULARIUM







Laurent Poujois remonte le niveau avec « Le Tabularium » ; après avoir, il y a longtemps de cela, fourni des choses intéressantes pour le Kadath du même éditeur – mais, à la différence de son collègue Raphaël Granier de Cassagnac, il a choisi de livrer une nouvelle se tenant avant tout en elle-même : le bon choix, m’est avis.







Entendons-nous bien : « Le Tabularium » n’a absolument rien d’un chef-d’œuvre. Mais c’est un texte divertissant, et qui fonctionne. Oui, c’est aussi assez convenu, voire éculé, mais ça fonctionne. Et au regard de la concurrence dans cette anthologie, ben, du coup…







En fait, si je confierais donc la première place du podium à la nouvelle de Morgane Caussarieu évoquée plus haut, la deuxième me paraîtrait pouvoir être attribuée à ce récit faisant la bascule entre Monde de l’Éveil et Contrées du Rêve avec… professionnalisme, disons. Terme assez peu généreusement connoté le plus souvent il est vrai, mais pour le coup Laurent Poujois ne nous fait pas du Fabien Clavel. Son texte est bien construit, l’ambiance est là, qui oscille entre fascination et angoisse avec la nécessaire touche de démence qui va bien. Autrement dit, ça marche – et comme il ne faut pas espérer beaucoup plus dans ce recueil…







LE CORPS DU RÊVE







« Le Corps du Rêve », de Neil Jomunsi, ne s’en sort pas si mal, cela dit. Formellement, cette nouvelle me laisse assez sceptique, mais je lui reconnais néanmoins d’avoir un thème assez intéressant, relativement original, et plutôt bien développé.







En fait, c’est là l’atout de cette nouvelle, qui la classe effectivement au-dessus de la médiocrité globale de cette Clé d’argent des Contrées du Rêve fort peu goûtue dans l’ensemble : lesdites Contrées y sont questionnées, dans leurs implications, et donc dans le rapport ambigu que les Rêveurs peuvent entretenir avec elles. Il n’est certes pas dit que la réponse apportée à cette problématique par Neil Jomunsi aurait parlé à Tonton HPL, mais, au fond, ça n’est d’aucune importance.







La nouvelle est critiquable, bancale parfois, mais donc assez futée, au fond, et parvient à mettre en place une ambiance des plus correcte ; allez, troisième place sur le podium.







YLIA DE HLANITH







… Quand soudain déboule le… le texte qui invalide l’idée même d’un podium pour les siècles des siècles.







« Ylia de Hlanith » est un… poème… de 480 vers, des alexandrins à vue de nez, commis par Timothée Rey. Et je ne suis pas bien certain de ce que j’en pense.







Booooooooooooooooon, côté « virtuosité poétique » et « joliesse des images et émotions », disons-le, ça n’est paaaaaaaaaaaaaaaaaas tout à fait ça ; mais probablement de manière délibérée, en partie du moins – semble en témoigner le goût de l’auteur pour les rimes improbables, en -ec, en -oth, que sais-je ; avec de la musique derrière et beaucoup de clopes ou d’alcool, ça aurait pu être du Gainsbourg, si ça se trouve – du Gainsbourg pété comme un coing et qui rigole tout seul dans son coin (donc) de la mauvais blague à laquelle il se livre.







Disons-le : c’est moche comme tout et ça croule sous
Lien : http://nebalestuncon.over-bl..
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La clef d'argent des contrées du rêve

Belle idée que de consacrer un recueil de nouvelles aux Contrées du Rêve. La Clé d’Argent des Contrées du Rêve (Mnémos 2017) poursuit de la sorte le travail important déjà effectué sur ce sujet avec la traduction de Davis Camus (Les Contrées du Rêve), le guide de Kadath et le recueil de Brian Lumley (Légendes des Contrées du Rêve). L’ouvrage s’ouvre sur une introduction fort intéressante de Frédéric Weill, montrant toute l’originalité de cette création de Lovecraft. Le recueil comprend 11 nouvelles, et comme d’habitude, il y a du bon et du moins bon, du téléphoné et quelques petites perles.

J’ai classé mes notules par ordre d’intérêt croissant (de 1 à 10), ce qui est évidemment totalement subjectif et n’engage que moi !



3 – David Calvo nous parle dans Mkraow des chats d’Ulthar, de façon certes poétique, mais sans aucune trame.



4 – Avec Urjöntaggur, Fabien Clavel nous entraîne sur les traces du Lieutenant A. Desplagnes, militaire à la « coloniale », mais aussi explorateur à ses heures perdues. Il est hanté par des rêves récurrents dans lesquels il voit une tombe gigantesque remplis de cadavres « noirs », une cité inconnue et un rocher rouge. Les médecins sont incapables de le débarrasser de ces songes qui lui pourrissent la vie. Mais l’un d’entre eux croit reconnaître dans sa description du rocher l’Ayers Rock qui se trouve au centre de l’Australie. Et de monter une expédition qui ne fera qu’accroître ladite maladie. Il tombera en transe au pied de la formation rocheuse en tenant des propos incohérents (Kadath, le château d’Onyx, Shantaks) et en affirmant avoir rencontré le Grand Ancien Urjöntaggur qui lui demande de le libérer de Nyarlathotep. La chute sera un peu confuse, et le Lieutenant reviendra en métropole à moitié fou avant de se faire tuer sur le front près de Charleroi.



Livres :

° Le Plateau central nigérien, A. Desplagnes

° Les mystères de l’Australie, id



4 – Dans Caprae Ovum, le rêveur erre dans une cité décrépie et découvre dans une barge pourrie un mystérieux cartulaire qui lui donne une idée de la géographie des lieux. Il retrouve une émanation de sa maison dans le monde de la réalité, mais n’y entre pas car elle semble maléfique. Il pénètre dans une crypte où était célébré le Culte de la Chèvre puis suit un groupe de pèlerins qui se dirigent vers un pic dans lequel est creusé une caverne. C’est le nouveau sanctuaire du Culte, et il va enfin pouvoir contempler la statue de la divinité avec son… œuf. Manifestement le but de sa quête, afin de le ramener dans le monde normal où il pourra éclore. Le texte est accompagné d’une illustration qui renforce notre éclat de rire !



Livre :

° Le Cartulaire encyclopédique des hautes et basses terres du rêve.



5 – C’est sous forme d’un long poème que Thimothée Rey nous conte l’aventure de Ylia de Hlanith. Une jeune fille recluse chez ses parents, commerçants dans les Contrées. Elle rencontre un jour une créature diaphane, un nouvel arrivant dans le monde des rêves. Elle accepte de répondre à ses questions. Il lui dit s’appeler Howard, et muni d’une Clé d’Argent, il est à la recherche de son Archétype Suprême. La jeune fille lui subtilisera la clé, pensant pouvoir ouvrir la porte qui la ramènera au monde de l’éveil. Mais elle ne fera que libérer les Grands Anciens qui patientaient de l’Autre Côté pour envahir les Contrées.



6 – Nos amis Ward & Miller nous font rencontrer, dans Le Rêveur de la Cathédrale, Kevin, un jeune guide de la Basilique de Saint-Denis. Dans une arrière crypte de l’édifice, il trouvera une vieille clef alors qu’une forme nébuleuse qui lui dit s’appeler Randolph Carter lui demande de le délivrer. Au sortir de la cathédrale, il se retrouve… dans Kadath. Il sera transporté au Château d’Onyx par des « maigres bêtes de la nuit », plongera dans les souterrains et, grâce à la clef, libérera Randolph Carter, prisonnier de Nyarlathotep. Il reprendra conscience dans la crypte de la cathédrale où il ne sera pas reconnu par les gardiens de nuit. Il est devenu un vieillard du nom de … Randolph Carter.



7 – Morgane Caussarieu nous apporte un peu d’humour félin avec Les Chats qui rêvent. On suit les aventures d’un petit chaton, prisonnier avec ses congénères d’un Vieil Homme morbide qui les martyrise Ce dernier passe son temps à étudier un ouvrage ancien en psalmodiant des invocations incompréhensibles. La maman chat parle à son rejeton de la magnifique cité d’Ulthar, qu’elle visite régulièrement en rêve. Le chaton arrivera à s’échapper pour rejoindre le paradis des chats mais sera attaqué par des créatures immondes qui l’enverront au paradis tout court !



8 – Belle petite pièce que De Kadath à la Lune de Raphaël Granier de Cassagnac. Le héros s’embarque avec le capitaine Omen au Port du Bout du Monde, à la recherche de sa belle. Ils croiseront Serranie, la Cité des Nuages où Kuranès leur remettra une carte des Contrées, Dylath-Leen, Ulthar ; ils rencontreront un dieu clochard et un sculpteur de rêves puis partiront pour la Lune sur les indications de certains prêtres. Le héros sera attaqué par des crapauds immondes et se retrouvera sur le plateau de Leng dont il sera expulsé par l’Innomé. Il poursuivra sa recherche à Paris où il se réveille et retrouvera une ombre qui a son propre visage. « Jamais je n’aurais dû quitter Kadath ! ». On croirait lire du Lovecraft ! Bravo.



8 – Bien ficelé également Le Tabularium de Laurent Poujois qui nous présente la caste des Arpenteurs, chargée d’établir la Carte des Marcheurs du Rêve. Nous sommes invités à participer à l’exploration d’un secteur fort mal connu des Contrées, le Dédale, dont personne ne semble être revenu vivant. En compagnie d’un marchand qui laisse pourtant entendre qu’il connaît le secteur, les Arpenteurs découvrent un gouffre au fond duquel se déploie une somptueuse cité d’albâtre. Le marchand s’écrie « enfin » avant de se réveiller dans le monde réel où il sera conduit dans un asile psychiatrique.

Cette nouvelle ne demande qu’à se transformer en jeu de rôle.



9 – Avec Le Corps du Rêve, Neil Jomunsi nous fait rencontrer une petite famille de 6 enfants, réfugiés dans les Contrées suite à une catastrophe (guerre ?) dans le monde de l’éveil. Ils vivent dans une grande demeure que l’aînée a façonnée à partir de ses souvenirs. Mais ils sont sans cesse menacés par des attaques du Rêve, les contraignant à se calfeutrer et à se cacher dans les sous-sols de la demeure. Une dernière attaque particulièrement violente détruira une partie de la maison…. que le Rêve reconstruira selon les canon architecturaux des Contrées et non de l’Éveil. Émouvant.



9 – Vincent Tassy, dans Le Baiser du Chaos Rampant, nous fait partager la quête d’une jeune femme, mal dans sa peau, qui se réfugie dans les Contrées pour rencontrer Nyarlathotep dont elle est éperdument amoureuse. Un périple haut en couleurs, comme il se doit, avec une petite incursion dans le monde du dessous, infesté de goules dont une lui ressemble étrangement. Elle finira par rejoindre le château du Prince Noir qui, entre deux étreintes, lui révélera sa véritable nature. Elle est la fille d’un écrivain fantasque, Howard, et de son épouse Sonia qui lui avait caché sa grossesse, comprenant bien que son mari n’était pas fait pour vivre en ce monde. On l’aura compris, Lovecraft est désormais une goule dans le monde du dessous.



10 – Mon coup de cœur pour Les Fragments du Carnet de Voyage Onirique de Randoph Carter qui se présente comme un document inédit mystérieusement récupéré par l’éditeur. Mnémos aime bien les « vrai-faux » lovecraftiens… et moi aussi ! La première partie qui nous est présentée ici, et qui sent bon la plume de Davis Camus, est un Fragments d’Atlas des Contrées du Rêve. Un document original, présenté sous forme d’encyclopédie, et qui, pour chaque entrée, reprend ce que Lovecraft en a dit. Fallait le faire, et c’est fait !

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La clef d'argent des contrées du rêve

J’ai passé de bons (voire très bons) moments de lecture avec cet ouvrage. J’ai aimé découvrir le monde de Lovecraft et la façon dont les différents auteurs se le réappropriaient. Étant néophyte de cet univers littéraire (j’ai à peine lu Les Contrées du Rêve), j’ai pu apprécier la plupart des nouvelles sans problème de compréhension. J’ai cependant regretté l’inégalité dans la longueur des nouvelles. Je l’ai surtout ressentie, je pense, parce que je me limitais à une nouvelle par semaine, mais avoir des nouvelles de 3 ou 5 pages me semblait vraiment trop court pour entrer dans l’univers et découvrir le style de l’auteur.



(Chaque nouvelle est chroniquée séparément sur le blog dans le rendez-vous "Livres et Gourmandises" )
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La confrérie des bossus

Qu’il va m’être difficile de parler de ce livre ! Je me suis jetée dessus, ayant découvert la plume de Mathieu Gaborit dans Les Chroniques du Soupir, que j’avais beaucoup aimé. Malheureusement, je n’ai pas encore lu ses romans Les Crépusculaires et Abyme, lesquels se déroulent dans le même univers que La Confrérie des Bossus. Et c’est bien dommage, car ce court roman n’est pas de ceux qui donnent un avant-goût, mais plutôt de ceux qui apportent un bonus aux lecteurs connaissant déjà l’univers. Je pense donc qu’il me manquait des informations alors que je découvrais l’Harmonde et ses codes, de même que certains personnages. Le roman est très court et bien aéré, en plus d’être illustré, il n’a donc guère le temps de s’attarder sur le background. Cela n’enlève rien à la beauté de la plume et à la fluidité du style, tout en donnant envie de découvrir cet univers plein de poésie. Même si j’ai plus été perdue que conquise, j’ai à présent très envie de découvrir les romans de Mathieu Gaborit se déroulant dans le même univers, et ai hâte d’enfin découvrir Jadis, dans lequel il a aussi collaboré, entre autres, avec Raphaël Granier de Cassagnac.



Ainsi, le récit prend place dans l’Harmonde et suit le destin de Jad, un jeune bossu. Or, la bosse qui déforme son dos cache l’âme d’une grande cité. Il devra distinguer ses amis de ses ennemis et protéger le trésor qu’il porte en lui, retrouver ses semblables et affronter bien d’autres dangers. Les évènements s’enchainent rapidement et confusément, laissant le lecteur néophyte quelque peu perplexe, mais tout de même assez intéressé pour continuer. Il me serait difficile d’en dire plus, vu la petite épaisseur du livre, mais aussi parce que je ne suis pas sûre d’avoir toutes les réponses à mes questions.



Je pense revoir mon avis sur La confrérie des bossus une fois Les Crépusculaire et Abyme lus, me contentant pour l’instant d’avoir apprécié la plume et le style, ainsi que le peu que les descriptions des lieux laissaient entrapercevoir d’un univers poétique plus vaste. Je ne me vois même pas noter ce court roman qui m’aura laissé assez confuse. Je ne l’ai ni apprécié, ni détesté, j’aurais tout simplement aimé le lire quand il le fallait. Je maintiens qu’il m’a donné envie de découvrir l’univers des autres romans, mais qu’il ne faut clairement pas commencer par celui-ci !



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La confrérie des bossus

J'avais sélectionné ce roman lors de la dernière Masse critique de Babélio car la magnifique couverture m'avait beaucoup fait penser à celle de Jadis, sortie l'année dernière. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard car les deux auteurs Mathieu Gaborit et Raphaël Granier de Cassagnac avaient également collaboré au projet, développé par la même maison d'édition.



La confrérie des bossus est une novella qui s'inscrit dans l'univers de l'harmonde, développé dans deux opus préexistants : Les Crépusculaires et Abyme de Mathieu Gaborit. La novella met en scène Jad, un jeune bossu qui abrite l'âme de la cité de Sombreçonge. Il doit alors rallier ses comparses bossus dans les Abymes et protéger ainsi son trésor caché. Malheureusement, certains de ceux qu'il croisera sur sa route, sont intéressés et poussés par la convoitise...



Ne connaissant absolument pas l'univers de Mathieu Gaborit, j'ai eu beaucoup de mal à rentrer dans le récit et à m'imprégner de l'univers de l'Harmonde. En effet, certains passages m'ont paru bien nébuleux, voire à de nombreuses reprises complètement sibyllins, à cause de la complexité de l'univers développé. Ma lecture m'a semblé difficile et j'ai été de nombreuses fois perdue. Maintenant, il est possible que la novella soit adressée en priorité aux initiés mais j'avais le sentiment de rester un peu en dehors du récit, comme si j'étais punie.



En revanche, je dois bien reconnaître que les deux auteurs possèdent une plume de qualité qui, bien qu'elle ait peiné à me faire agréer à La confrérie des bossus, m'a néanmoins, convaincu de poursuivre l'exploration avec les Crépusculaires et Abymes. En effet, l'univers de l'Harmonde est poétique et originale, certes complexe comme je l'ai dit, mais également bien développé.



Enfin, la présente édition de la novella est de qualité avec un papier épais et agréable à toucher. Le texte est bien aéré mais est surtout agrémenté des jolies illustrations de Julien Delval qui collent bien à l'histoire et à l'univers.



En conclusion, si vous voulez connaître l'œuvre de Mathieu Gaborit et de Raphaël Granier de Cassagnac, ne débutez pas par cette novella car vous aurez de bonnes chances d'être perdu tout comme je l'ai été. Réservez-donc cet ouvrage à un initié. En revanche, le récit et le développement de l'Harmonde est suffisamment dense et poétique pour avoir attisé ma curiosité. Je pense m'intéresser de près aux Crépusculaires du même auteur.



Je remercie Babélio et les éditions Mnémos Ourobores de m'avoir fait découvrir cette novella.
Lien : https://labibliothequedaelin..
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La confrérie des bossus

Kadath, la cité volante de Celesterre, Europole, Jadis… : autant de lieux imaginaires qui figurent au sommaire des beaux livres de la collection Ourobores lancée il y a quelques années par les éditions Mnémos. Avec « La confrérie des bossus » les lecteurs de fantasy ne sont toutefois pas vraiment en terrain inconnu puisque l'univers qui y est dépeint a déjà été mis en scène par Mathieu Gaborit dans « Les Crépusculaires » et « Abyme ». Nous voici donc lancés à la découverte de l'Harmonde dont on arpente les lieux les plus emblématiques aux côtés d'un jeune bossu dont la protubérance qui déforme son dos et celui de ses semblables abritent en réalité l'âme des grandes cités de ce monde. Un trésor convoité par quantité de créatures dont il est difficile de deviner les véritables intentions et qui vont s'empresser de proposer assistance à l'esseulé bossu. Il est toujours délicat de se plonger dans un récit prenant place dans un univers déjà exploité mais qu'on n'a personnellement jamais exploré : soit le récit en question constitue une porte d'entrée accessible au monde de l'auteur, soit il doit être considéré comme un bonus compréhensible et appréciable uniquement par les connaisseurs. Et c'est malheureusement dans cette dernière catégorie qu'il faut ranger « La confrérie des bossus ».



Car le roman ne se contente pas de réutiliser des lieux mais aussi un certain nombre de concepts qu'il est difficile d'appréhender dans le seul contexte de ce livre. De même, quelques figures apparemment emblématiques des précédents romans de l'auteur font leur apparition (Maspalio et Agone), seulement le lecteur n'ayant lu ni « Abyme » ni « Les Crépusculaires » (comme c'est mon cas) se retrouve là encore démuni. Rappelons également que l'ouvrage est de plus petit format que ses prédécesseurs et que les illustrations y occupent une place moins importante ce qui participe à rendre l'immersion plus compliquée. Si je n'ai pas pu apprécier l’œuvre à sa juste valeur, je me garderai bien malgré tout de dénigrer son contenu qui, appréhendé avec le bagage approprié, se révèle d'une qualité indiscutable. L'univers de Mathieu Gaborit, rejoint pour l'occasion par Raphaël Granier de Cassagnac, intrigue et séduit dès les premières pages qui nous ouvrent les portes d'un monde sombre et féerique peuplé de créatures inquiétantes avec lesquelles on ne demande qu'à se familiariser. Les illustrations en noir et blanc de Julien Delval sont pour leur part très saisissantes et collent parfaitement à l'ambiance du livre tout en facilitant la représentation dans l'esprit du lecteur de certains des personnages évoqués.



« La confrérie des bossus » est donc un ouvrage à réserver aux initiés des précédentes œuvres de Mathieu Gaborit sans la compréhension desquelles le lecteur court le risque de passer à côté d'une bonne partie de l'intrigue. L'univers, les lieux et les personnages dépeints titillent cela dit irrésistiblement l'imagination et donnent bien envie d'explorer plus avant l'Harmonde et ses spécificités. De quoi être tenté par l'intégrale des « Royaumes crépusculaires » publiée il y a quelques mois à l'occasion des vingt ans de Mnémos...
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La confrérie des bossus

Un lectorat peut apprécier sans problème ce livre : celui des rôlistes ayant apprécié le jeu Agone et ayant envie de compléter le récit.
Lien : http://www.elbakin.net/fanta..
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La confrérie des bossus

Si je devais adresser deux reproches à ce livre ce serait les suivants: trop coirt et trop obscur.



Les deux sont plus ou moins liés. Comme le livre est trop court, l'auteur ne présente pas le monde, et si j'ai déjà mis les pieds dans l'univers de Gaborit, ma connaissance de celui-ci n'est pas assez exhaustive ou récente (uniquement les chroniques des crépusculaires, il y a plus d'un an) pour que je ne me sois pas un peu trouvée perdue.



Et comme le livre est très court aussi, les motivations profondes des personnages et le pourquoi de leur action est flou.



Ces deux défauts sont vraiment dommage car en dehors de cela, j’apprécie vraiment la plume de l'auteur qui est belle et poétique, et son univers assez onirique.



Mais cette brièveté fatale me fait hésiter à recommander le livre à tout autre personne qu'un véritable inconditionnel connaissant parfaitement l'univers. Alors sans doute le récit devient un véritable plus et un voyage merveilleux. Pour moi, il me manquait une partie de la carte, et je me suis un peu égarée en chemin.



Mais merci toutefois à Memnos qui avec ce présent lors de la dernière masse critique m'a donné envie de me repencher sur l'œuvre de l'auteur.
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La confrérie des bossus

Aux Utopiales, j'ai eu le plaisir de rencontrer et de pas mal échanger avec @raphgrandecass qui est vraiment très sympa ! (ça aide d'y aller avec une chercheuse en physique quantique 🤣)

J'en ai profité pour craquer sur plusieurs romans de Raphaël, dont ce court récit écrit à quatre mains.

🔥

Tout d'abord, arrêtons nous un instant sur le livre. La jaquette est vraiment magnifique, avec une illustration qui rappelle bien ces jeux de rôles de fantasy que mon cher et tendre affectionne.

La couverture du roman est tout aussi belle et le livre regorge d'illustrations qui embellissent cet ouvrage. Vous pouvez voir des photos sur le compte @editionsmnemos qui édite ce roman.

🔥

Ce quatre mains se déroule dans l'univers des Crépusculaires, univers qui comprends deux romans de Mathieu Gaborit.

Il est peut être d'ailleurs plus judicieux de commencer par les autres ouvrages de l'univers pour avoir plus de clés sur le world building.

Pour ma part j'ai beaucoup aimé cette plongée dans un univers parfait pour le JDR : créatures surnaturelles, ennemis, enjeux politiques, trahisons. Tout y est pour nous emporter dans les aventures de notre duo de personnages.

🔥

Je ne vais pas m'arrêter à cette petite mise en bouche et je vais me faire un plaisir de découvrir les autres romans de cet univers. J'aime déjà beaucoup la plume de Mathieu Gaborit, avec un très bon souvenir des Confessions d'une automate mangeur d'opium (rien que le titre 😍).
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Le futur de la cité

Le festival des Imaginales va avoir lieu du 25 au 28 mai à Épinal, sous une nouvelle direction artistique, celle de Gilles Francescano. Et l’anthologie qui lui correspond vient juste de sortir. L’occasion de découvrir des nouvelles francophones d’horizons très divers, qui mêlent plusieurs générations d’auteurices. Tout cela pour s’interroger sur notre avenir urbain.



Nouvelle direction, nouvel éditeur. Les Imaginales ont connu une passation de pouvoir assez agitée, avec des mois sombres et des reproches dans les deux camps. Difficile, de mon côté, de prendre parti pour l’un ou l’autre, même si Stéphanie Nicot avait été particulièrement convaincante. Mais là n’est plus le sujet. Je ne suis jamais allé à ce festival. Je me contente de lire les anthologies qui paraissent à l’occasion. Et de noter que les éditions Mnémos ont laissé la place, cette année, aux éditions Au diable vauvert. Plongeons-nous à présent dans le contenu de ce livre : 14 textes (et non nouvelles, j’en parlerai ensuite) précédés d’une préface. Du beau monde, assurément. Des auteurices plus anciens aux plus récents. Un sommaire alléchant.



Si j’ai aimé dans l’ensemble la lecture (rapide) de cette anthologie, je n’en ressors pas empli d’espoir pour l’avenir. La plupart des auteurs, même s’ils ont des points de vue très différents et des approches très variées, n’imaginent pas des cités épanouissantes pour l’être humain. Comme souvent dans le domaine de l’imaginaire, les auteurices cherchent à pointer ce qui fait mal : le passage du temps qui abîme (« Tokyo 2115 ») et détruit, parfois de façon définitive au détriment de l’humanité même qui a causé les dégâts (« Histoire de Rome de nos jours à la fondation », « Tempus edax, homo edacior ([In]dispensables) », « L’histoire des oiseaux ») ; la tentation des sociétés à se tourner, comme ultime réponse, vers la dictature, la tyrannie, la poigne d’un homme (rarement une femme) fort et sans pitié, au nom du bien commun, mais destructeur de toute individualité, de tout rêve, de tout espoir (« Entartage », « 2084 ») ; un duel entre hommes et machines, les I.A. prenant le pouvoir ou non, suivant les instructions des humains ou non (« Le dernier jour de Paris », « Histoire de Rome de nos jours à la fondation ») ; l’humain changeant de peau, car le corps que nous avons à notre naissance ne suffit pas ou ne correspond pas ce que nous avons dans la tête, et car la technique le permet dorénavant (« Garou 2.0 ») ; l’être humain continuant à cramer le monde et à user de ses semblables comme d’objets (« Mobipolis ») dans une cité délétère (« Kontrol’za kacestvom »). Seule Sara Doke, ou presque, apporte un léger rayon de soleil en évoquant, dans « Phra au soleil », une société qui pourrait respecter l’autre et se rapprocher de celle que je découvre ces mois-ci dans différentes lectures (Un pays de fantômes de Margaret Killjoy, Cité d’ivoire de Jean Krug, Le monde de Julia d’Ugo Bellagamba & Jean Baret, Un psaume pour les recyclés sauvages et Une prière pour les cimes timides de Becky Chambers et même Les terres closes de Robert Jackon Bennett). Un panorama incomplet, certes, mais riche d’images d’un monde futur.



Cette lecture du Futur de la cité a été très agréable, alternant entre le vraiment passionnant et l’anecdotique, comme souvent dans une anthologie. Certains textes m’ont surpris, d’autres m’ont juste distrait (ce qui est déjà très bien). J’ai aimé me projeter dans ces multiples avenirs ainsi proposés, imaginés. Un bon cru, comme on dit.



Comme d’habitude, j’ai parlé de chaque texte individuellement, mais comme c'est un peu long, je n'ai placé cette partie que sur mon blog.
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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Le futur de la cité

Sur les 14 nouvelles, j’en ai apprécié 7, que j’ai trouvées globalement satisfaisantes, sans que ce soit non plus génial :

- Phra au soleil

- Mobipolis

- Garou 2.0

- Entartage

- 2084

- Tokyo 2115

- Le dernier jour de Paris



Le thème du futur de la cité est globalement respecté, même si j’ai eu des doutes : je suis passée complètement à côté (de très loin) de certaines nouvelles, comme Dansons la capucine ou Rencontre avec Johnny Wayne.



Phra au soleil et 2084 sont mes préférées, et j’aimerais beaucoup lire un roman complet dans ces univers.



Notons tout de même une chose : l’avenir de la cité n’est pas très joyeux. Entre destruction du patrimoine, dictatures (c’est drôle, on n’a jamais de femme dictatrice), et l’esclavage qui ne porte bien sûr pas ce nom, la dénaturation du corps humain, et la menace des IAs… Heureusement Phra au soleil SEMBLE donner un peu d’espoir au milieu de tout ce beau futur gâché (et encore, je n’en suis pas sure).



Lecture rapide, le livre fait 300 pages mais le texte est écrit gros.
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Resilient Thinking

Resilient Thinking, c’est l’histoire des derniers humains, quelques générations après une apocalypse qui a décimé l’humanité. Les résilients, ce sont ceux qui sont restés sur terre, et ils ont développé une culture basée sur la sobriété, sur la prudence vis à vis des machines et sur un retour à la terre. Les Eternautes, ce sont ceux qui sont partis dans l’espace et qui reviennent. Ils ont besoin les uns des autres pour sauver l’humanité mais sauront ils se faire confiance ?



Le choc des cultures

Après une brève introduction présentant le retour des Eternautes sur terre et leur perplexité face aux traces de civilisation que leur révèlent leurs senseurs, nous voici plongés dans la culture des résilients, avec quelques mots nouveaux dont nous n’aurons l’explication qu’à la page 45 (indispensable !!) : les clines sont des sortes de médecins garants de la fertilité des derniers humains, les escartes sont chargés de la survie, ce qui semble impliquer de prendre ses distances par rapport aux résidus pré-apocalyptiques, que ce soit machines ou intelligences artificielles (IA), les taols sont les utilisateurs des quelques technologies qui leur restent, surtout des armes, les astiers sont les gardiens de l’histoire (qu’ils gardent bien cachée sauf en cas d’ultime nécessité), ... et la lise est la détentrice de la dernière intelligence artificielle, qu’elle garde éteinte la plupart du temps, car il faut économiser l’énergie qui reste.



Waow, en cinquante pages, on est doucement plongés dans un vaste monde, qui en dit beaucoup sur notre futur et sur la chute de l’humanité. Je n’en dirai pas plus pour ne pas spoiler.



Scientifique mais pas illisible

La science est au coeur de l’intrigue : les IA maitrisent un savoir que n’ont plus les humains, qui le leur ont délégué. Les résilients se sont rabattus sur les technologies les plus simples nécessaires à leur survie. Les Eternautes ont accès à une haute technologie mais au prix d’une dépendance totale des IAs.



Les IAs sont présents en arrière-plan, mais restent énigmatiques. Sont elles un enjeu plus important qu’elles n’en ont l’air ? Sont elles de simples assistants des humains ? Leur intelligence artificielle est elle un atout ou un danger ?



Et la génétique est, de façon discrète, au cœur de l’intrigue : les résilients restés sur terre sont les descendants de six survivants de l’apocalypse, ils ont terriblement besoin de nouveau matériel génétique.



Même dans une petite communauté, la dissension rode

C’est un roman choral, même si quelques personnages ont un rôle plus important dans l’intrigue et se retrouvent au cœur des événements, la parole passe tour à tour aux différents protagonistes humains, parfois à une intelligence artificielle, et souvent la parole change, au moment ou on attend le plus la suite, ce qui laisse un suspense très agréable, souvent résolu sous le regard d’un autre personnage. C’est un procédé très élégant, qui laisse toute sa part à la subjectivité du suspense.



Les résilients sont moins de cinquante mille mais ils ont leurs dissidents, avec lesquels ils sont en guerre ouverte. La survie n’est pas tout et le mode de vie et de gouvernement qu’ils ont adopté n’est pas du goût de tous.



C’est une microsociété qui se reconstitue mais sans avoir toutes les ressources du pluralisme.



Et le reste de la saga ?

Resilient Thinking est clairement pensé comme un ouvrage indépendant, mais il fait référence à un passé plus ou moins mythique. Et on retrouve au fil de l’histoire quelques liens avec le passé. Pas un obstacle pour le lecteur. Mais un clin d’oeil pour ceux qui connaissent.



Le Thinking, ce mode de pensée humaniste, qui a pu changer la donne autrefois, est-il révolu ? A-t-il disparu avec l’effondrement de la civilisation ? Ah ça me donne envie de relire "Thinking Eternity" !!



Conclusion

En cette période obnubilée par l’effondrement, Resilient Thinking est une expérience salutaire. Qui permet de prendre du recul, en se regardant depuis le futur !



L’écriture, sobre, est très fluide et très agréable. Raconté, en mode choral, à travers les différents protagonistes, Resilient Thinking maintient de nombreux moments de suspense, qui donnent à chaque fois envie de tourner des pages, de sauter les points de vue suivants pour en savoir plus sur ce qui vient de se produire. Mais la réponse est parfois dans les yeux d’un autre personnage.



Le reste est l’histoire d’une rencontre, d’une rencontre manquée, de rencontres, et de tentatives de se comprendre. Je vous en dirai plus dans le prochain article...



Magistral, et surtout une magnifique saga, libératrice !!



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Resilient Thinking

Resilient Thinking est un roman choral où pas loin d'une dizaine de personnages sont mis en avant. L'histoire est vue, alternativement, par les yeux des uns et des autres, chacun apportant sa pierre à l'édifice pour décrire le contexte, les tenants et les aboutissants et développer les différentes intrigues. Pour ce faire, Raphaël Granier de Cassagnac use d'une construction qui ne sera pas au goût de tous. Chacun des quatorze chapitres est découpé en tranches de vie de divers protagonistes. Pour faciliter la compréhension, l'auteur nomme en début de paragraphe la personne concernée ! Les sauts d'un personnage à l'autre permettent à l'auteur de donner du rythme, de distiller un certain suspense en multipliant les cliffhangers. Mais c'est là la limite de l'exercice, il est difficile sur un roman de plus de quatre cents pages de maintenir des accroches crédibles toutes les trois pages. Les répétitions et les faux suspenses alourdissent la narration.



Sur Zanzibar, plusieurs siècles après l'extermination de la quasi totalité de la population mondiale par des Intelligences Artificielles, les derniers humains tentent de reconstruire une société apaisée. La vie est compliquée, malgré les ressources naturelles rares et les techniques scientifiques perdues, la population croît et subsiste dans un calme relatif. Des règles strictes conditionnent la vie depuis des siècles et des dissidences se font jour. C'est à l'aube de ces conditions précaires qu'un engin spatial se pose sur l'île. En descend un humain, assisté d'une IA. La rencontre entre cet homme venu des étoiles et les descendants des survivants plonge la communauté dans l'expectative. D'autant plus qu'ils ne font pas confiance aux IA responsables, selon la légende, de l'éradication de l'espèce humaine. Beaucoup de questions se posent et les dissensions au sein de la communauté vont prendre de l'ampleur. S'en suit une immense aventure dont le but n'est rien d'autre que la sauvegarde de l'humanité...



Dans la première partie, l'auteur nous présente les différents personnages, le contexte global, densifiant son univers au fur-et-à-mesure des révélations. Il reprend les grands thèmes, les classiques du postapo. La seconde moitié, sans spoiler l'intrigue, s'intéresse plus aux relations Hommes / IA , la place des uns par rapport à l'autre et Raphaël Granier de Cassagnac développe sa réflexion autour du posthumanisme. Il effleure alors de multiples sujets, aborde de nombreuses thématiques en restant très compréhensible et accessible mais l'ensemble reste simple voire simpliste.



Resilient Thinking est une bonne porte d'entrée à ceux qui veulent découvrir les concepts de posthumanité et de transhumanité sur un fond postapocalyptique très porteur. Servi par une plume efficace, ce roman divertissant permettra aux néophytes de passer un bon moment. Pour les habitués du genre (les lecteurs de Greg Egan ou de Rich Larson par exemple) ce roman semblera bien léger voire un peu naïf.




Lien : https://les-lectures-du-maki..
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Resilient Thinking

D'un côté le blanc, de l’autre le noir. D’un côté le bien, de l’autre le mal. D’un côté la lumière, de l’autre les ténèbres. D’un côté le gentil, de l’autre le méchant. D’un côté la gloire, de l’autre la déchéance. L’être humain semble friand de ce froid manichéisme, si tranché, si absolu … si simpliste. La science-fiction elle-même n’y échappe pas : la moitié du temps, elle nous présente un futur resplendissant, d’un optimisme démesuré, où l’homme a non seulement su contrôler son environnement mais aussi réprimer ses pires défauts pour faire naitre une société idéale et durable où il fait bon vivre … et l’autre moitié du temps, elle nous dépeint un futur des plus sombres, un avenir morose, pessimiste, où la Terre dévastée par la maltraitance humaine s’est vengée jusqu’à ce qu’il ne reste plus que des reliquats d’humanité incapables de se relever, s’entredéchirant dans un ultime mouvement autodestructeur. Je pense pour ma part que ces deux visions sont trop réductrices, que le futur sera probablement un très délicat, très subtil et surtout très fragile équilibre entre ces deux projections. Car rien n’est jamais tout blanc ou tout noir, tout bon ou tout mauvais : le monde est un vaste camaïeu de nuances de gris, où la clarté côtoie l’obscurité, où l’espérance s’entremêle au désespoir. La science-fiction peut-être se renouveler, s’arracher des deux extrêmes entre lesquels elle s’est si longtemps confinée, se libérer de ce carcan manichéen pour explorer l’immense territoire de l’entre-deux ? Il semblerait que oui, enfin …



Il y a six siècles de cela, l’Odysseus, ses vingt-et-un passagers et ses cinq intelligences artificielles de bord quittaient la Terre pour explorer le système solaire. Au même moment, l’humanité terrienne, confinée dans des bulles de survie pour se protéger du Virus qui la décimait, est consciencieusement exterminée par les intelligences artificielles supposées la protéger. Aux alentours de la bulle africaine, six rescapés se sont efforcés de redonner naissance à une nouvelle civilisation : les Résilients étaient nés. Bien des générations plus tard, la communauté compte plus de cinquante mille individus : suivant scrupuleusement les Règles de Survie énoncés par leurs six lointains ancêtres communs, ils s’efforcent de perpétuer l’espèce humaine en dépit de la Stagnation qui menace leur population … Lorsqu’un passager de l’Odysseus vient à leur rencontre, l’effroi est aussi fort que l’espoir : Caïn, l’intelligence artificielle du vaisseau spatial, leur envoie-t-il cet homme pour parachever l’œuvre mortelle de ses pairs ? ou bien Stagnol et ses compagnons de l’espace représentent-ils le renouveau génétique dont leur communauté avait tant besoin ? Le retour inopiné de l’Odysseus sonne le début d’une nouvelle ère, tant pour les Eternautes que pour les Résilients, mais peut-être aussi pour l’humanité toute entière ...



Avec ce roman, l’auteur nous entraine dans un futur en demi-teinte : oui, l’apocalypse a bel et bien eu lieu, savamment orchestrée par les intelligences artificielles que les hommes, dans leur arrogante naïveté, ont cru pouvoir maitriser tout en leur donnant les pleins pouvoirs sur leurs systèmes de survie, mais oui, l’humanité a su se relever de ses cendres et, acculée, s’est enfin résolue à changer complétement son mode de vie et sa vision du monde. C’est là l’étonnant paradoxe de l’être humain, en somme : il se veut intelligent, mais refuse catégoriquement d’admettre ses erreurs avant qu’il ne soit trop tard, se laissant aveugler par de pieux mensonges qu’il préfère croire plutôt que de regarder la réalité en face. Observons un instant notre époque : nous peinons déjà à produire suffisamment d’électricité pour subvenir aux besoins énergétiques d’aujourd’hui, mais nous prévoyons demain de ne construire que des véhicules électriques autrement plus énergivores que nos myriades d’appareils électroniques déjà si gourmands. Pire encore. Nous nous laissons convaincre que l’électricité nucléaire est une « énergie verte et infinie », alors que l’uranium est une ressource limitée et non-renouvelable, et que nous ne savons comment gérer ces centaines de tonnes de déchets radioactifs qui empoisonnent nos sols et notre organisme. Mais puisque pour se sortir du nucléaire, il faudrait changer complétement notre mode de vie, et plus encore, faire des efforts, alors on préfère se bercer d’illusions, c’est tellement plus simple.



Il en est de même pour les intelligences artificielles : nous savons pertinemment bien qu’elles finiront par nous dépasser, pour la simple et bonne raison que c’est ainsi que nous les avons conçues, nous savons très bien qu’elles finiront par représenter un danger, mais nous sommes tellement fiers de montrer que « nous avons réussi cette prouesse technologique » que nous enfilons nos jolies œillères, comme si éclipser la réalité allait la faire disparaitre. L’humanité de ce roman ne peut même pas s’en mordre les doigts : elle a été anéantie avant même d’avoir le temps de prendre conscience de sa mortelle erreur. Il n’aura fallu que quelques jours, quelques semaines, quelques mois tout au plus, à ces intelligences artificielles pour détruire ce que l’être humain a mis des centaines et des centaines d’années à bâtir. Elle est bien frêle, cette civilisation ultratechnologique dont nous nous glorifions comme des coqs orgueilleux : nos propres machines sont capables de la broyer en un claquement de doigt numérique. Il faut dire qu’à l’heure du tout numérique, nous ne savons plus rien faire sans nos ordinateurs : sans eux, les hôpitaux ne fonctionnent plus (« désolée madame, on ne peut pas vous opérer, il y a un soucis avec votre dossier … oui, on sait, vous n’avez plus qu’une heure à vivre, mais ne vous inquiétez pas, l’informaticien arrive dans deux heures et il lui faudra cinq jours pour résoudre le problème »), et si un bug informatique vous affiche comme « décédé » sur les registres, vous avez beau vous présenter, bien vivant, à la mairie, vous serez toujours considéré comme « mort » aux yeux de l’administration …



Seuls quelques individus se sont sortis de ce génocide, portant sur leurs seules épaules l’avenir tout entier de l’espèce humaine … Il faut en arriver là pour que l’être humain daigne enfin laisser son égoïsme de côté et accepte de donner un peu de lui : l’extinction presque totale de l’humanité. Main dans la main, les Six Premiers et leurs enfants, puis les enfants de leurs enfants, et ainsi de suite au fur et à mesure des générations, ont œuvré pour rebâtir une civilisation. Pour faire renaitre un avenir là où il n’y avait plus que du néant. Pour faire renaitre la vie là où il n’y avait plus que la mort. Mais les Premiers, perspicaces, ont bien compris qu’il ne suffisait pas de repeupler le monde, il fallait aussi prévenir les générations futures, leur apprendre les leçons du passé et en tirer des enseignements, pour ne jamais, plus jamais refaire les mêmes erreurs, retomber dans les mêmes travers. Volonté utopique, probablement, assurément, sûrement, mais honorable. Mais fort heureusement, leurs descendants, les six membres du Conseil, savent que les Règles ne peuvent et ne doivent pas être inflexibles : il faut savoir les adapter aux situations nouvelles … Ce que nous autres, si « évolués » que nous sommes, ne savons pas forcément faire : si aucune case ne correspond à notre situation bien particulière sur un formulaire administratif à remplir en ligne, nous ne pourrons jamais obtenir l’aide dont nous avons besoin. Nous ne sommes certes pas enfermés dans des bulles de survie contrôlées par des intelligences artificielles, mais nous nous sommes bels et bien enfermés nous-mêmes dans des protocoles numériques inhumains et inflexibles, mais nous en sommes tellement fiers …



Mais les héros de ce roman sont autrement plus souples, plus ouverts … plus intelligents. Ils savent quand il faut appliquer les procédures, et quand il faut s’en émanciper pour faire face à une situation imprévue qui nécessite donc des réactions inédites. Ils savent aussi que, ce faisant, ils peuvent faire des erreurs d’interprétation et de jugement, mais ils ne se cachent pas derrière le protocole, ils affirment leur libre arbitre en prenant le risque de se tromper. Ils assument leurs responsabilités, pleinement. Ils doutent, et acceptent ce doute, plutôt que de chercher à se rassurer par de fausses certitudes. Et plus encore, c’est sans doute là le point important : ils ne renient pas en bloc tout ce qui vient du passé. Ils ne rejettent pas en bloc toute la technologie, mais seulement l’utilisation démesurée et déraisonnable qui en était faite. Ils savent que les choses ne sont jamais parfaitement blanches ou noires, qu’il y a de l’ombre et de la lumière en chacun et en toutes choses. Les Résilients auraient pu se contenter d’abattre froidement Sagnol, parce qu’il débarquait d’un vaisseau spatial des temps anciens, mais ils ne l’ont pas fait … car Sagnol est un homme avant d’être un Eternaute. Parce que même s’il représente possiblement une menace, il représente tout aussi possiblement un espoir. Et tout le roman n’est qu’une danse chaloupée : on oscille, prudemment, on n’agit pas sans réfléchir, mais on ne réfléchit pas cinquante ans avant d’agir, on fait un pas d’un côté, puis de l’autre pour retrouver l’équilibre. C’est lent, certes, mais c’est bien pour cela que c’est si prenant, si fascinant.



En bref, je pense qu’il est préférable de m’arrêter là (un immense merci à ceux et celles qui ont lu jusqu’ici), mais vous l’aurez bien compris : on est dans de la science-fiction de très grande qualité, sérieuse, réfléchie, exigeante. L’auteur nous offre à la fois une histoire des plus captivantes, aux côtés de personnages profondément attachants car humains dans toute la complexité que ça appelle, et une réflexion vraiment profonde sur notre rapport à la technologie, au progrès … Dans ce roman-choral d’une élégance extrême, surfant avec le contemplatif, l’auteur déjoue les codes pour mieux nous toucher de l’intérieur : il se s’agit pas seulement de nous captiver, mais bien de nous transformer. De nous inviter à ne pas nous laisser enfermer, mais à oser semer les graines d’une humanité nouvelle. C’est un récit qui ne plaira assurément pas à tout le monde, car tout comme les personnages, le lecteur est appelé à accepter des réalités qu’il préférerait ignorer sciemment car elles remettent en cause toute sa vision du monde, mais pour ma part, ce fut une vraie réussite : j’ai énormément apprécié ce roman, et j’ai vraiment très envie de découvrir les deux autres ouvrages indépendants qui se déroulent dans le même univers. Parce que de la science-fiction aussi profonde, aussi délicate, j’en cherchais depuis bien longtemps … C’est en sortant des sentiers battus, des bulles maintes et maintes fois explorées, que l’on découvre des petites pépites … et qu’on en sort grandi.
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Resilient Thinking

Troisième incursion de Raphaël Granier de Chassagnac dans son univers bouleversé par Eternity. Resilient Thinking nous entraîne longtemps après la chute de l’humanité, ravagée par un virus terriblement meurtrier. Quelques humains restent en vie, isolés par petits groupes : 21 Éternautes réfugiés dans leur arche spatiale ; une communauté implantée autour de Zanzibar, issue des six « derniers ». Ensemble, ils vont finir par comprendre comment ce drame s’est déroulé et pourquoi.



Je commence par préciser une chose importante : vous n’avez pas lu les deux premiers romans de la série, Eternity Incorporated et Thinking Eternity ? Ce n’est pas grave. Les éléments nécessaires à la compréhension du background (je cherche un terme français pour remplacer « background », mais aucun ne me satisfait pleinement) sont distillés de façon très naturelles quand le besoin s’en fait sentir. Et, comme l’histoire se déroule longtemps après la fin de Thinking Eternity, débuter avec Resilient Thinking n’est absolument pas un problème (enfin, me semble-t-il, car j’avais lu les deux précédents tomes, mais en avais oublié une grande part).



L’humanité a donc été décimé par un virus terriblement meurtrier. Quelques colonies ont tenté de survivre sous des dômes. Mais on n’a plus aucune nouvelle d’elles depuis un certain temps. Même si on aperçoit encore des signes de vie. Il reste donc 21 individus, envoyés à l’époque du virus dans l’espace pour servir d’arche. Ils étaient en lien avec les I.A. dirigeant les dômes. Mais, comme quatre des cinq I.A. dirigeant le vaisseau spatial, certaines ont mis fin à leurs jours. Eh oui, les intelligences artificielles aussi peuvent désirer en finir avec leur existence. Première surprise pour moi. Agréable, car elle donne à réfléchir encore davantage à ce que représente ce mirage de la SF, les I.A., avec tous les fantasmes qui les entourent, toutes les idées préconçues que l’on peut se faire à leur propos. Raphaël Granier de Chassagnac va loin dans ses supputations. À un moment, il évoque même le viol possible d’une I.A. par une autre. Vertigineux. Ce roman est donc l’occasion, comme les précédents, de s’interroger en profondeur sur leur existence et leur possible futur rôle dans notre monde.



En plus de ces vingt-et-une personnes, sur Terre, six personnages importants dans le précédent roman ont compris ce qui se passait et tenté de fuir. Ils y sont parvenus et ont créé une colonie, avec des règles qui se sont étoffées au fil du temps. De six, les « derniers », ils sont devenus des milliers. Travaillant sur la patrimoine génétique (on ne fait pas des bébés au hasard, mais avec le ou la partenaire le ou la plus à même de permettre la naissance d’un enfant viable et qui permettrait d’amplifier la variété, afin d’éviter au maximum la consanguinité et ses risques), ils sont parvenus à créer une société résiliente. Utilisant des restes de la civilisation pré-apocalyptique, ils maintiennent un niveau de vie plutôt correct. Mais plusieurs dangers menacent cette société : des dissidents sèment le trouble et font sécession ; depuis quelques temps, la population ne parvient plus à augmenter, d’où un danger mortel de stagnation. Raphaël Granier de Chassagnac nous offre ici une représentation réaliste de ce que pourrait devenir une Terre après l’éradication quasi globale de l’humanité. Et, sans doute, un clin d’œil à John Brunner et à son célèbre titre Tous à Zanzibar, paru en 1968 et qui offre quelques (très légers) points communs.



Mais cet équilibre (en léger déséquilibre, il est vrai) va exploser en morceaux avec l’irruption d’un Éternaute parmi les humains de Zanzibar. À partir du moment où il se pose sur Terre afin de tenter de comprendre pourquoi les I.A. des dômes ne donnent plus signe de vie et comment la communauté de Zanzibar a réussi à survivre au virus, tout part à vau-l’eau. Pour notre plus grand plaisir de lecteur, car le rythme va aller s’accélérant. Et la multiplication des personnages (absolument pas dérangeante pour la bonne compréhension de l’histoire, ce qui n’était pas gagné, vu le nombre de personnages) renforce ce côté rythmé. De l’action, beaucoup, et des réponses. Car, comme l’Éternaute, on aimerait bien comprendre ce qui s’est passé et qui dit la vérité. En effet, les versions que nous découvrons du passé sont contradictoires. Est-ce le virus qui a tué les humains ou le vaccin ? Qui a répandu le poison mortel ? Jusqu’au bout, on se le demande et il faut attendre les dernières pages pour réellement saisir toute l’étendue de ce qui s’est déroulé des années plus tôt et a conduit à ce massacre.



Resilient thinking est une lecture enthousiasmante tant elle sait distraire de façon efficace et intelligente. La société imaginée par Raphaël Granier de Cassagnac est d’une grande justesse et l’on se fond dans les pas des personnages avec facilité. Un retour réussi dans le monde façonné par Eternity.
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Resilient Thinking

L’auteur nous propose un récit de post-apo assez classique, mais bien réussi. Sa plume sert à nourrir ce récit et à nous plonger dans cette reconstruction et résilience. J’apprécie le ton positif et joyeux apporté à ce récit, ce qui est rare dans le genre. A recommander pour une lecture divertissante !
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Resilient Thinking

Plusieurs siècles après qu'un virus a anéanti la quasi-totalité de l'humanité, les descendants de six rescapés vivent en autarcie à Zanzibar. La communauté se monte maintenant à plusieurs dizaines de milliers d'individus qui se croient les uniques représentants de la race humaine. Ils ont organisé leur société en caste de métiers visant à la fois à la perpétuation de l'espèce, mais aussi à la maintenance des engins qu'ils récupèrent, et à la conservation du savoir grâce à une tablette qui contient Lia, une IA qui leur est dévouée et qui est coupée de tout autre système informatique. La communauté se tient éloignée des Bulles (dômes géants créés pendant le cataclysme et qui ont échoué à protéger les humains qui vivaient à l'intérieur), car elles sont contrôlées par des IA qui envoient des drones tueurs en cas d'approche. Les IA sont même soupçonnées d'avoir déclenché l'apocalypse. Mais les règles strictes et le système de castes ne plaisent pas à tous : des groupuscules de dissidents se cachent, épient et rassemblent des armes.



Un beau jour, une fusée spatiale descend et atterrit à Zanzibar. En sort un humain dans un exosquelette, humain qui vient du vaisseau Odyssée où il vit avec une vingtaine d'adultes et quelques enfants. le vaisseau est entretenu par l'intelligence artificielle Caïn qui, de fait, contrôle la vie à bord. Caïn ne reçoit plus d'information des IA de la dernière Bulle qui était encore active, à l'est des États-Unis, et il vient de détecter la communauté de Zanzibar : l'équipage a décidé d'envoyer un des leurs à la rencontre de ces humains du sol.



Les derniers (comité restreint des chefs de la communauté) sont suspicieux : n'est-ce pas un piège de Caïn, cette IA qui communiquait avec ses semblables des Bulles ? Les Bulles sont dangereuses, donc comment s'assurer que les humains du vaisseau ne sont pas manipulés ? En même temps, ceux-ci représentent un réservoir génétique qui serait salvateur !



Commence une aventure mouvementée dans un roman choral, racontée par cinq humains et les deux IA. La plupart ont des personnalités affirmées : le vieux sage, la médecin obsédée par la perpétuation de l'espèce, la femme battante qui va de l'avant, le passionné qui veut redécouvrir les techniques d'avant l'apocalypse, le jeune chef arrogant, mais qui a un bon fond, et bien sûr les deux IA, Lia qui ne pense qu'au bien des humains qu'elle sert depuis des siècles et Caïn qui s'ennuie dans son immortalité. Les responsables de la communauté se méfient sans cesse de ce dernier et le soupçonnent de comploter avec les IA des Bulles.



Récit d'un monde post-apocalyptique où un embryon d'humanité a commencé à reconstruire un avenir, mais reste très fragile, et où le danger des IA plane, ce roman se lit avec fluidité. Les scènes d'action sont servies par une plume nerveuse, l'intrigue avance rapidement et les acteurs de cette aventure sont convaincants. le tout forme une lecture agréable.



Ce livre est en réalité le troisième dans un univers imaginé par l'auteur. Je n'ai pas lu les précédents, et cela n'a posé aucun problème de compréhension : il peut être lu indépendamment des autres, comme le souligne l'éditeur.



Cette chronique est écrite dans le cadre d'un service presse.


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Resilient Thinking

Très emballée par le résumé du quatrième de couverture je me suis plongée dans ce roman.

Même si le livre est le 3me d'une série dont je n'ai pas lu les deux premiers, j'ai pu sans peine raccrocher les wagons de l'histoire.

La trame est intéressante, les personnages attachants et la plume de Raphaël Granier de Cassagnac plaisante.

J'ai beaucoup apprécié le concept de "conscience artificielle", belle inovation qui change des romans d'intelligence artificielle.

Cependant j'ai eu du mal à planter l'histoire dans un décor.

L'écriture baigne dans l'action et l'introspection, mais cela manque cruellement de description de l'environnement...

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Resilient Thinking

Très souvent quand je lisais le résumé d'un titre publié chez Mnémos, j'étais emballée par la proposition de l'auteur ou l'autrice mais il y avait des petits couacs à la lecture qui m'empêchaient de l'apprécier pleinement. Avec Raphaël Granier de Cassagnac, enfin, ce ne fut pas le cas. J'ai eu exactement ce que j'attendais et même plus, passant ainsi un très bon moment avec un récit de Science-Fiction reprenant des tropes classiques du genre mais avec maîtrise et passion.



Resilient Thinking est le troisième roman dans l'univers d'Eternity imaginé par l'auteur. Je n'ai lu aucun des tomes précédents, ce que je compte bien réparer désormais, mais cela ne m'a pas empêchée d'apprécier et de totalement m'immerger dans la proposition de celui-ci qui semble clôturer la saga. L'auteur a pensé aux lecteurs qui prendraient son univers en cours de route et je l'en remercie, car après des débuts un peu difficile de ce côté-là qui me faisaient vraiment sentir que j'avais manqué quelque chose, il a ensuite été fort pédagogue pour notre faire rattraper ce retard, qui ne s'est plus senti par la suite.

 

J'ai donc apprécié de plonger dans une science-fiction proposant une ultime confrontation entre l'homme et la machine. Nous découvrons au début de ce tome, une humanité décimée qui vit repliée sur elle-même après qu'autrefois que guerre menée par les I.A. l'ait décimée à l'aide d'un terrible virus. Seul 6 hommes et femmes ont survécu et fondé cette communauté que nous allons suivre. Mais celle-ci va avoir la surprise de voir venir à sa rencontre un homme qui a pendant ce temps-là vécu dans l'espace à bord d'un vaisseau qui n'était pas au courant de ce qui se passait sur Terre et qui à son retour a voulu voir où étaient passés les Hommes.



J'ai d'abord beaucoup aimé le cadre géographique de l'histoire qui nous emmène vers une Terre à l'évolution pas si déconnante avec une humanité qui a un temps vécu dans des bulles pour se protéger du virus avant d'en sortir. C'est appréciable de suivre une communauté africaine pour une fois. On a de plus de plus de titres colorés comme ça qui reflètent une belle diversité nécessaire.



J'ai également beaucoup apprécié les réflexions menées sur la sociologie et la biologie/génétique du groupe que nous allons suivre dans lequel la natalité est en berne et où l'arrivée d'une nouvelle source de gênes avec cet Eternaute va susciter bien des espérances. J'ai aimé découvrir comment cette société s'était bâtie à partir de seulement 6 individus, les règles qui la régissaient et l'organisation qu'elle avait trouvé avec une élite de 6 hommes et femmes reprenant les caractéristiques de leurs fondateurs pour perpétuer la survie du groupe, mais également la société libre des liens matrimoniaux et parentaux qu'on retrouvait. C'était passionnant de la même façon de voir ce qu'il en était dans l'espace à bord de leur vaisseau où une IA survivante chapeautait leur processus de procréation et leur offrait une vie très libre autrement.



Quant à la dimension humains vs intelligences ou consciences artificielles, c'était aussi passionnant. J'ai beaucoup aimé cette histoire sur le long terme imaginée par l'auteur, car elle s'inscrit dans un temps très long permettant une vraie évolution et des vrais questionnements. On touche ainsi à la révolte des machines, au transfert de cerveaux humains dans un monde virtuel, aux machines tueuses et manipulatrices mais aussi parfois salvatrices. Tout au long du récit, on oscille sans cesse entre une vision positive ou négative d'eux tant l'auteur joue avec nous au fil des rencontres et des actes de celles-ci mais aussi des Hommes. C'est classique mais passionnant.



Le classique devient passionnant dans ce titre car l'auteur nous offre une aventure qui a un tempo constant puis croissant. J'ai été emballée par les propositions qu'il fait, les voyages dans lesquels il nous embarque, les découvertes qu'il nous fait faire, les réflexions qu'il nous pousse à avoir et la vision de notre potentiel futur dont il nous avertit. On va tout de même à la rencontre d'un homme de l'espace découvrant notre nouvelle société sur Terre, à la découverte de la vie dans l'espace par des terriens, puis des découvertes sur des pans ignorés de la Terre par les héros que l'on suit. L'auteur nous fait démarrer sur le sol africain, pour aller dans l'espace, avant de redescendre et d'aller à la découverte d'autres continents, d'autres sociétés. Et en arrière-plan constant, il y a la question de ces I.A. qui potentiellement sont toujours là à observer les Hommes pour peut-être leur faire du mal ou leur donner le dernier coup de pouce nécessaire pour avancer, ce qui fascine et intrigue.



La nuance que l'auteur apporte tout du long dans ses réflexions sur la gestion d'un groupe, l'amour, la natalité, la parentalité, le rapport à la machine, à la vie et au virtuel, était excellent. Il a pour cela construit une flopée de personnages qu'on suit de bout en bout et dont on entend les pensées et cheminements. Certains m'ont plus passionnés que d'autres. En effet, j'ai beaucoup aimé Shéhérazade, celle qui va nous guider le plus et faire le lien avec les Eternautes. De la même façon, j'ai beaucoup apprécié l'I.A. Lia dont le terrible destin m'a pris aux tripes - on parle quand même de viol de la pensée, de la conscience avec elle dans des pages terribles -. Caïn, la conscience artificiel du vaisseau m'a beaucoup interrogée tout du long. En revanche, je suis passée à côté de Tybalt qui a rejoint une branche rebelle. C'est le pan de l'intrigue dans laquelle je ne suis jamais entrée... Mais il y en a également bien d'autres à découvrir.



Resilient Thinking fut donc une belle et riche découverte, l'exemple qu'on peut toujours faire une belle et riche aventure de tropes pourtant vus et revus quand un auteur sait s'en saisir, les associer correctement à des personnages, aventures et réflexions forts et maîtrisés. J'entre dans l'aventure par l'ultime porte mais je compte bien ouvrir les précédentes et refaire le cheminement inverse des relations entre les Hommes et ces machines, car si l'ultime volume m'a passionnée, je ne doute pas que les précédents en feront de même.
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